Janet Agren: Une beauté venue du froid
Visage incontournable du cinéma italien, on se souvient de la blonde Janet Agren surtout pour les films d'horreur qu'elle a tourné sous la houlette de Lucio Fulci ou Umberto Lenzi en oubliant un peu trop souvent l'impressionnante filmographie de celle qui fut baptisée la Anita Strindberg des années 70 mais qui malheureusement pour elle ne trouva jamais vraiment sa place dans l'univers du septième art.
Cette sensuelle et sculpturale jeune femme aux pommettes saillantes, au doux visage en forme d'amande est née en 1951 à Landskrona en Suède, le pays sa consoeur Anita. Très tôt, alors quelle n'est encore qu'une adolescente, elle a alors 17 ans, Janet rentre dans le monde de la mode et devient modèle notamment pour des maillots de bain pour Stern et Dior entre autres. Elle ne pense que très peu au cinéma à cette époque. Publiées dans les plus grandes revues, le photos font le tour du monde. C'est alors qu'un producteur la remarque. Il entre de suite en contact avec elle et lui propose de venir en Italie afin de tourner un film à gros budget. Arrivée à Rome, Janet découvre l'escroquerie. Il n'y a jamais eu de film ni de budget juste un producteur factice qui voulait coucher avec elle. Janet qui n'a pas encore 18 ans ne désespère pas d'autant plus que Rome la fascine. Elle s'inscrit alors au cours du prodigieux Alessandro Fersen et décroche vite un petit rôle dans Colpo di stato de Luciano Salce. Sa très courte apparition ne passe pas inaperçue. Le producteur Franco Cristaldi tombe sous le charme de la belle scandinave et lui fait signer un contrat de sept ans avec sa maison. La carrière de Janet peut commencer.
En 1968, elle apparait dans la comédie musicale de Ruggero Deodato Donne... botte e bersaglieri puis dans Il giovane normale de Dino Risi aux cotés de Lino Capolicchio. Les films s'enchainent même si ce ne sont que de petits rôles. On citera Io non spezzo... rompo de Bruno Corbucci, Due occhi pieni di sole de Michel Boisrond. Alfredo Sordi la choisit pour être la femme de chambre mi-ange mi-démon de La piu bella serata della mia vita en 1972.
Le succès du Décameron de Pasolini fait naître tout un courant de nouveaux films érotiques, les décamérotiques, dont Janet fera les beaux jours. Elle apparait ainsi dans Fiorina la vacca de Vittorio De Sisti puis Racconti proibiti ... di niente vestiti de Brunello Rondi qui en fait un temps son actrice fétiche. Elle est donc tout naturellement à l'affiche de la dramatique existentielle Tecnica di un amore avec Silvano Tranquilli dans laquelle elle interprète une jeune hippie naturiste,
tentatrice aussi étrange que machiavélique. Janet y a de superbes séquences de nu intégral, impudique et désinhibée. Puis elle est au générique du tout aussi dramatique Ingrid sulla strada dans lequel elle interprète le personnage principal, Ingrid, une jeune prostituée aux prises avec un gang de néo-nazis. Avec ce film Rondi offrait très certainement à Janet le rôle le plus fort de sa carrière. Toujours dans le registre dramatique, elle est en 1974 à l'affiche de l'anticlérical Il saprofita de Sergio Nasca aux cotés de Al Cliver dans lequel elle interprète une jeune fille pieuse qui se laissera aller à de morbides ébats sur le lit de mort de sa grand-mère. Dans le domaine de l'érotisme elle apparait dans L'erotomane de Marco Vicario.
Jouer nue ne dérange pas la belle suédoise mais le cinéma érotique confessera t-elle en 1986 ne l'a jamais vraiment attiré.
A cette époque, Janet entretient une relation clandestine avec Carlo Maietto qui fut son photographe personnel. Cette relation aboutira à un mariage. Les films quant à eux s'enchainent et ne laissent guère de répit à la nouvelle mariée. On la voit trop vite assassinée dans le giallo gothique L'assassino ha riservato nove poltrone de Giuseppe Bennati aux cotés de Paola Senatore et Lucretia Love. Elle se met aux polars, un genre alors très en vogue, et tourne entre autre l'insipide La polizia interviene: ordine di uccidere en 1976 de Giuseppe Rosati qu'elle retrouve en 1979, les cheveux bruns, aux cotés de Joseph Cotten et Gloria Guida pour l'intéressant Indagine su un delitto perfetto / Le crime du siècle. On peut également citer Il commissario di ferro de Stelvio Massi ou encore l'ennuyeux Commissario Verrazzano de Franco Prosperi.
Janet s'octroie alors un peu de repos et s'offre une croisière aux Bermudes pour l'ennuyeux Bermude: la fossa maledetta / Bermudes triangle de l'enfer de Tonino Ricci.
Quelques films plus discrets suivront ensuite. Puis vers la fin des années 70, Janet fait une pause pour s'adonner à une autre passion: le cabaret.
Elle revient ensuite sur le devant de la scène avec quelques comédies telles que Aragosta a collazione / Une langouste au petit déjeuner de Giorgio Capitani, Prestami tua moglie de Giuliano Carmineo ou encore Onorevole con l'amante sotto il letto / Le prof d'éducation sexuelle de Mariano Laurenti.
Le début des années 80 verra un nouveau tournant dans la carrière de Janet. Le cinéma d'horreur fait appel à ses services. Elle tourne donc Mangiati vivi / La secte des cannibales de Umberto Lenzi avec Paola Senatore, Me Me Lai et Ivan Rassimov, le mauvais Bakterion / Panic de Tonino Ricci aux cotés de David Warbeck ou encore La paura / Frayeurs pour Lucio Fulci avec Catriona McColl.
Elle fait un détour par la case post-nuke avec le sympathique Atomic Cyborg / Vendetta dal futuro de Sergio Martino avec Georges Eastman et l'athlétique David Greene.
Elle tourne encore quelques comédies comme Superfantaggio avec Bud Spencer, une version d'Alladin vue et corrigée par Bruno Corbucci. Lors du tournage du film, Janet est enceinte. On la retrouve quelque temps plus tard à l'affiche d'un agréable thriller signé des frères Vanzina Mystère avec une irréelle Carole Bouquet.
A la fin des années 80 la filmographie de Janet s'éffiloche de plus en plus. Après le soporifique La notte degli squali / La nuit des requins de Tonino Ricci dans lequel elle tient un court rôle, très vite dévorée vivante par un squale, on la voit encore plus furtivement dans l'inénarrable copie italienne du Karate kid Il ragazzo dal kimono d'oro puis le mauvais film d'horreur Quella villa in fondo al parco / Ratman de Giuliano Carmineo. Janet commence à être fatiguée du cinéma. Elle n'est jamais vraiment arrivée à vraiment y trouver sa place ni à donner un sens réel à sa carrière.
Toute sa période italienne, Janet ne la renie absolument pas. Elle n'aime pas forcément les films dans lesquels elle a tourné. Lucide, elle reconnait qu'ils sont loin d'être excellents, ils étaient essentiellement commerciaux et lui ont simplement permis de vivre.
En 1989, elle décide de tout arrêter et se tourne alors vers une carrière de chanteuse. Elle sortira quelques 45T qui seront de gros échecs. Parmi ses quelques sigles on mentionnera le titre Teddy bear. Elle se tourne alors vers la télévision pour se redonner une nouvelle virginité et tourne La baronessa di carini qui sera un beau succès. Janet fera également quelques shows tels que Parigi se avesse il mare aux cotés de Lino Banfi.
Janet s'est ainsi redonnée une nouvelle jeunesse et les années 90 lui sourirent donc. Elle divorcera et depuis 1995 la belle actrice vit tranquillement avec sa fille Charlotte à Miami où elle est designer d'intérieur. Elle a sa propre entreprise qu'elle dirige de main de fer. Elle retourne tout de même chaque été et chaque Noël à Landskrona où elle aime retrouver sa famille et ses origines.