Le 10 meraviglie dell'amore
Autres titres: Tout le monde est sexy tout le monde est cochon / Les dix merveilles de l'amour / Le dieci meraviglie dell'amore / Le meraviglie dell'amore / Libido / Libido, das große lexikon der lust
Réal: Sergio Bergonzelli
Année: 1969
Origine: Italie / Allemagne
Genre: Sex mondo
Durée: 82mn
Acteurs: Bernard De Vries, Angelo Infanti, Brigitte Skay, Isa Sala, Hansi Linder, Marisa Solinas, Sarah Ross, Antonietta Fiorito, Viviana Vanni, Gianni Pulone, Tom Felleghy, Attilio Martella, Eva Astor, Giovanni Attanasio, Aurora Bautista, Renato Chiantoni, Al Cliver, Willi Colombini, Michael Conti, Horst Edel, Dithe Faul, Fiorella Ferrero, Nino Korda, Peter Kranz, Saverio Laganà, Carlo Landa, Michaela Martin, Biagio Pelligra, Dick Randall, Barbara Scott, Vittoria Solinas, Luca Sportelli, Gianfranco Tondury, Gaspare Zola, Lino Banfi...
Résumé: Six étudiants préparent leur thèse sur la sexualité dans notre société actuelle. Pour la mener à bien ils vont interviewer des anonymes dans la rue mais aussi d'éminents professeurs en sexologie avant de mettre en pratique leurs travaux...
Après une série de films d'aventures et quelques westerns Sergio Bergonzelli s'offre un petit détour par la case sex mondo, ces faux documentaires à connotations fortement érotiques qui sont censés parler de sexualité, d'éducation sexuelle de manière scolastique mais sont en fait un moyen détourné d'étaler à l'écran un maximum de nudité afin de satisfaire les bas instincts d'un public voyeur en contournant sagement la censure. De la Scandinavie à l'Allemagne en passant par l'Amérique et l'Angleterre nous avions déjà eu droit de quelques croustillants sex documentary et cela ne fera que croitre tout au long des
années 70. Le bon Bergonzelli s'offre donc cette juteuse détente coréalisée durant l'hiver 1968 avec l'allemand Theo Maria Werner (producteur et scénariste qui travailla beaucoup en Italie) qui surfe sur le récent succès du teuton Helga / Helga - dalla sfera intimissima di una giovane donna signé Erich F. Bender.
Trois couples d'étudiants décident de vivre ensemble dans l'appartement du père de l'un d'eux afin de mieux préparer leur thèse sur la sexualité en cette fin d'années 60. Ils vont pouvoir ainsi non seulement travailler ensemble mais également partager leurs idées et expériences. On suit donc durant quasiment 90 minutes Zeno, Pericle, Aicha, Claudia, Pete
et Anita une jeune psychologue dans leurs démarches quotidiennes dont de nombreuses interviews d'anonymes dans la rue mais aussi d'éminents professeurs en sexologie qui vont tout nous expliquer sur la sexualité et ses anomalies. Un vrai cours qui commence donc par le résumé de l'évolution des moeurs quant à la perception de la nudité à travers les âges, des statues grecques et romaines aux peintures érotiques en passant par la nudité enfantine (les parents donnent le bain à leurs progénitures nues sans aucune gêne, les enfants nus sur la plage), les saunas en Scandinavie et les camps naturistes jusqu'aux premiers frémissements de la libération sexuelle où courir en tenue d'Adam et Eve dans la
nature ne fait plus peur à la jeunesse de cette fin d'années 60. Si la bonne ménagère interrogée dans la rue est encore un peu coincée à parler orgasme et pratiques sexuelles la nouvelle génération l'est beaucoup moins et elle le prouve. Bergonzelli nous montre ainsi pèle-mêle un groupe de jeunes qui s'apprête à partouzer avant d'aborder le premier grand thème: la frigidité! Nos professeurs en blouse blanche nous expliquent donc schémas à l'appui l'origine du problème qui est ensuite illustré par de petites historiettes totalement stupides mais bien drôles.
Afin d'éviter les ardeurs de son petit ami qui adore faire l'amour la lumière allumée une femme fait exprès de briser la lampe de chevet au moment crucial. Afin de tenter de guérir sa femme de sa réticence au sexe un homme très énervé de ne pouvoir lui faire l'amour la couvre de bijoux pensant qu'ils la rendront heureuse et reconnaissante. Si les femmes peuvent être des glaçons au lit les hommes eux peuvent être impuissants. Voilà la deuxième anomalie traitée avec toujours à l'appui de jolis schémas anatomiques et quelques explications à trois sous. Comme pour la frigidité l'alcool, le café, le tabac, la drogue et
même la circoncision (!), l'occasion de montrer de la nudité enfantine, peuvent en être la cause! On a bien pris note! Ne reste plus qu'à regarder les petits scénarii qui mettent en images ce pas très sympathique petit souci comme celui de ce bellâtre à qui on explique que regarder une femme qui se déshabille le mettra forcément en érection (en théorie oui mais en pratique c'est tout mou qu'il va se coucher) ou ce couple dont la femme (à lunettes car femme à lunettes femme à quéquette, c'est connu) tente d'exciter en vain son époux (sous l'oeil d'un perroquet plutôt bavard). Plus drôle est le raccourci que Bergonzelli prend soudainement. De l'impuissance naitrait d'autres anomalies sexuelles dont l'éjaculation précoce, l'homosexualité et la transsexualité, les trois thèmes suivants.
Une fois de plus l'homosexualité masculine est traitée sous son aspect le plus clownesque
pour ne pas dire débile. Que l'on demande à un un couple gay s'il pense qu'être homos est scandaleux est déjà d'une stupidité sans nom (mais nous en sommes en 1969!) mais qu'on représente une fois encore l'homosexuel comme une véritable folasse maniérée et déjantée est désespérant comme associer l'homosexualité à une forme d'impuissance même si le sketch qui illustre le thème est plutôt drôle. Une artiste peintre pensant exciter son modèle (très timide) en le mettant nu après s'être à son tour déshabillée s'aperçoit que sa virilité ne s'agrandit pas jusqu'au moment où débarque le petit ami du modèle avec qui il part bras dessus bras dessous après avoir remis son slip bien sûr! Le lesbianisme n'est
guère mieux mis en valeur puisqu'il est considéré comme une déviance faite pour exciter l'hétéro vicelard et voyeur après un restaurant bien arrosé!
Arrive l'épisode consacré à l'hermaphrodisme (une hermaphrodite se prend une gifle retentissante lorsque l'homme aperçoit son intimité) et à la transsexualité avec ce qui deviendra très vite la séquence incontournable de tout bon sex mondo qui se respecte: l'opération consistant à changer de sexe avec tous ses détails cliniques. On y donc droit ici, une plage assez brève cette fois mais suffisamment chirurgicale ou comment transformer un clitoris en pénis! Voilà qui en ravira beaucoup mais combien seront dépités, consternés
par le résultat final? En effet Bergonzelli n'a pas trouvé mieux que de nous présenter un simple travesti façon Bois de Boulogne, un croisé entre Didier Bourdon et Maïté affublé d'une horrible perruque.
Après toutes ces émotions et toutes ces excitations nos six étudiants avaient bien droit à une pause. Les voilà donc entrain de fumer des joints et de se vautrer les uns sur les autres en tenue très légère au son d'une musique psychédélique. Vont-ils partouzer et pouvoir mettre en pratique tout ce qu'ils ont appris? Peut-être. Chacun imaginera ce qu'il veut. Ce qui est certain c'est qu'ils vont être réveillés par le père et la mère de Pericle, des parents
transgressifs qui mettent nos jeunes mal à l'aise, qui sont de retour! On se rhabille très vite et nos étudiants vont leur présenter leur travail. Vont ensuite suivre d'autres thèmes comme le fétichisme (une des étudiantes se fait voler toutes ses petites culottes) ou plus glauque, l'admiration pour des mannequins en plastique. Au bout du compte nos étudiants passeront leur thèse avec succès.
Refusé deux fois par le comité de censure qui finit par lui donner son visa de sortie après quelques tailles Le 10 meraviglie dell'amore est un sex mondo discret qui comme la plupart se veut sincère en traitant de sujets alors jugés scabreux ou tabous. Ni meilleur ni
pire que tout ce qui fut fait et se fera le film de Bergonzelli est surtout très drôle dans ses illustrations (même si on connaitra encore plus hilarant) et tellement vieillot, démodé dans sa façon de penser. Tout cela paraitra si incroyable, surtout bien inoffensif aujourd'hui mais tout ce fouillis sexuel avec psychologie de basse-cour aura au moins l'avantage de faire découvrir aux plus novices, ignares et puceaux d'entre vous (il y en a?) comment fonctionnent un zizi et une zézette et pourquoi parfois il y a des ratés! Les autres, eux, se repaitront des scènes de nu... c'est bien là le but premier!
Ces 10 merveilles du monde ont aussi un gros atout: sa distribution. Parmi tous les
anonymes on reconnaitra une affiche alléchante composée de futures figures incontournables du cinéma Bis et d'exploitation et autres starlettes en devenir. Parmi elles on citera les étudiants joués par Angela Infanti (Pericle), un tout jeune encore presque ado Al Cliver dont c'était le tout premier film, l'hollandais Bernard De Vries, repéré l'année précédente dans le giallo maritime Le sexe des anges, doublé ici en italien avec un accent vénitien grotesque, la teutonne Brigitte Skay, les soeurs Marisa et Vittoria Solinas et l'autrichienne Hansi Linder. Tom Felleghy interprète avec force comique le père de Pericle. Futur roi de la comédie populaire italienne Lino Banfi est un des professeurs sexologues.
On apercevra aussi le girond Luca Sportelli et l'ineffable Dick Randall.
Sorti en France en catimini quatre ans après sa réalisation sous le titre paillard Tout le monde est sexy tout le monde est cochon Le 10 meraviglie dell'amore a comme la plupart des oeuvres de Bergonzelli été difficilement visible durant des décennies. La version originale n'est disponible à ce jour que sous forme d'une très médiocre vidéo italienne éditée jadis. C'est l'Allemagne qui redonna récemment une seconde vie au film grâce à une petite édition DVD uniquement disponible en allemand intitulée Libido. De quoi faire pleurer à chaudes larmes tous les non germanophones.