L'assassino ha riservato nove poltrone
Autres titres: The killer reserved nine seats / El asesino ha reservado nueve butucas
Real: Giuseppe Bennati
Année: 1974
Origine: Italie
Genre: Giallo / Fantastique
Durée: 99mn (Uncut)
Acteurs: Rosanna Schiaffino, Chris Avram, Eva Czemerys, Lucretia Love, Paola Senatore, Gaetano Russo, Andrea Scotti, Eduardo Filipone, Howard Ross, Janet Agren...
Résumé: Le jour de son anniversaire, un vieil aristocrate, Patrick Davenant, invite sept membres de sa famille ainsi que leur médecin dans un magnifique manoir abandonné pourvue d’une salle de théâtre. Selon la légende, un siècle auparavant une pièce y fut donnée durant laquelle les neuf comédiens furent assassinés. Ils sont accueillis par le maitre des lieux qui très vite disparait. A peine installés, un tueur masqué particulièrement cruel fait son apparition, décimant tour à tour les amis de l'aristocrate en suivant la trame de la légende. Prisonniers du manoir dont ils ne peuvent plus désormais sortir, ils se mettent à se soupçonner les uns les autres. Chacun d'eux aurait en effet d'excellentes raisons d'être l'assassin. Outre le mystérieux tueur il semblerait qu'un fantôme hante également les lieux. Peu à peu la peur et la folie gagnent les rescapés...
Auteur d'un Labbre rosse / Les fausses ingénues qui au début des années 60 fut à l'origine d'un petit scandale pour son thème, un avocat tombe amoureux d'une adolescente dont il découvre les perversions, le peu prolifique réalisateur-scénariste Giuseppe Bennati réalisa en 1974 cet intéressant giallo qui tentait de sortir des sentiers battus en y mêlant une bonne dose de surnaturel qui par bien des moments oriente le film vers l'épouvante gothique
traditionnel. Voilà bien l'originalité de ce thriller qui reprend la trame des fameux Dix petits nègres d'Agatha Christie qu'il transpose dans un somptueux théâtre où vont se retrouver enfermées toute une nuit durant neuf personnes qui entretiennent entre elles de coupables relations. Afin de célébrer son anniversaire, un vieil aristocrate du nom de Patrick Davenant invite son ex-femme Vivian, sa fiancée Kim, sa fille Lynn et son petit ami Duncan, sa belle-sœur Rebecca et son amante Doris ainsi que le médecin de famille dans un magnifique manoir abandonné pourvue d’une salle de théâtre dans laquelle selon la
légende, un siècle auparavant, une pièce y fut donnée. Durant la représentation, les neuf comédiens furent assassinés. Ils sont accueillis par le maitre des lieux qui très vite disparait. Un tueur masqué particulièrement sadique fait alors son apparition, décimant un à un les amis de l'aristocrate en suivant semble t-il la trame de la légende. Prisonniers du manoir dont ils ne peuvent plus sortir, ils se mettent à se soupçonner les uns les autres, chacun ayant de très bonnes raison d'être le tueur. Mais il semblerait qu'un fantôme hante également les lieux. La folie gagne lentement les rescapés. La nuit va être longue, très longue pour eux.
Enfermer un groupe de personnes dans un lieu clos où se cache un mystérieux assassin n'est pas nouveau, voilà le schéma type de bien des thrillers que suit ici scrupuleusement Giuseppe Bennati. L'assassino ha riservato nove poltrone pourrait donc vite s'enliser dans une certaine routine si ce n'était la facilité avec laquelle il joue sans cesse avec l'élément fantastique. Si on pense à Bloody bird de Michele Soavi ce sont surtout à d'autres classiques que le spectateur songera avec un plaisir non dissimulé tant les références sont ici agréables. Outre Les Dix petits nègres de la célèbre écrivain britannique, Bennati s'inspire
également de L'ange exterminateur de Luis Bunuel, du Fantôme de l'opéra dont le tueur fait irrésistiblement penser mais aussi à un petit chef d'oeuvre méconnu du cinéma d'horreur américain, L'ange du mal / The redeemer de Constantine S. Gochis à qui le metteur en scène semble avoir volé non seulement une partie de l'intrigue et un des masques de son meurtrier vengeur mais aussi sa cruauté lors de meurtres particulièrement violents qui punissent dirait-on les péchés de chacun. Autant dire que tous ces clins d'oeil donnent une saveur toute particulière au film et en font un de ses principaux atouts d'autant plus qu'ils
s'insèrent parfaitement bien à cette histoire étrange où le surnaturel prend sans cesse le pas sur le naturel d'où ce agréable sentiment de ne jamais réellement savoir sur quel pied danser jusqu'au dénouement qui lui encore jouera sur les tableaux. S'il y a bien une explication des plus rationnelle à cette nuit de massacre, les ultimes scènes dans la crypte du manoir effaceront toute trace de logique au profit d'un dénouement purement fantastique, effroyable, qui renvoie ici aux meilleurs films d'épouvante gothiques jusqu'à l'ultime et superbe scène où le manoir réouvrira comme par enchantement ses portes aux lueurs de
l'aube, offrant ainsi la liberté à l'ultime survivant ou le triomphe de l'innocence.
Un des autres atouts de cet inhabituel giallo gothique totalement inédit sont ses somptueux décors dignes là encore des plus grands films gothiques magnifiquement bien photographiés. Filmé dans un véritable théâtre, celui de Fabriano non loin de Rome, L'assassino ha riservato nove poltrone doit beaucoup à ces lieux à la fois magnifiques et inquiétants dont les éclairages qui privilégient les tons rouges, jaunes et orangés rappellent par bien des points Mario Bava. Bennati a très bien su jouer avec son décor, le mettre en
valeur et l'utiliser du mieux possible. Aidé par une jolie partition musicale signée Carlo Savina, il parvient à instaurer une véritable atmosphère à la fois terrifiante et mystérieuse parfois même aux limites de l'onirisme comme en témoigne la magnifique scène de la pièce fantôme. Alors que sur l'immense scène du théâtre, vide, jouent face aux neuf protagonistes des comédiens invisibles, une légère brise fait doucement voler rideaux et tentures, des formes ectoplasmiques semblant onduler au creux des plis au son des voix d'outre tombe qui récitent leur texte. L'érudit notera d'ailleurs ça et là quelques citations shakespeariennes issues du Roi Lear et de Roméo et juliette. Les amateurs d'effets
sanglants applaudiront du fond de leur siège les quelques meurtres tous plus sauvages les uns que les autres, plus particulièrement ceux des deux amantes, Rebecca et Doris. Si Doris se fera écraser le torse par une porte coulissante, la caméra filmant sa lente agonie, la mort de Rebecca restera quant à elle dans les annales du cinéma de genre. Déshabillée puis violemment plaquée contre une table, elle succombera aux multiples coups de poignard que l'assassin lui assénera à l'intérieur du vagin, un meurtre phallique d'une sauvagerie inouïe, avant de finir une main clouée sur une poutre.
Il est dommage qu'à de tels moments de pure violence succèdent malheureusement de
longs passages parfois ennuyeux qui viennent casser un rythme au départ déjà trop inégal tandis que le coté claustrophobe de l'histoire n'est quant à lui pas assez appuyé. On regrettera également certaines incohérences qui font perdre au récit de sa force et surtout de sa crédibilité. On a parfois un peu de mal à comprendre l'attitude de certains personnages qui malgré la mort de leurs compagnons d'infortune ne semblent ni inquiets ni même terrorisés et continuent d'agir comme si ce de rien n'était. Voilà qui est d'autant plus incroyable qu'ils ne pensent qu'à copuler au beau milieu de cette demeure maléfique où se cache un dangereux maniaque. Voilà qui donne l'impression que Bennati se soumet aux
exigences d'un certain cinéma d'exploitation où le sexe se doit d'être omniprésent... pour le plus grand plaisir d'un certain public... même si cette fois il semble arriver comme un cheveu sur la soupe. Cela est surtout et avant tout valable pour Lynn incarnée par Paola Senatore, un personnage clé de l'intrigue pourtant mais interprété sans grande conviction par l'actrice qui semble anesthésiée. Bennati la déshabille le plus souvent qu'il le peut et nous offre même un grand moment de cinéma lorsque, sous stupéfiants, elle se met à danser frénétiquement nue devant un miroir, une scène qui n'est pas sans rappeler celle qu'elle exécutait dans l'excellent et tortueux Madeleine anatomia di un incubo.
Si le lesbianisme est ici ouvertement montré et se vit au grand jour, beaucoup noteront cependant la remarque de Kim qui, courtisée par Doris, lui fait remarquer vertement que l'homosexualité est une déviance tout en soulignons qu'en aimant les hommes, elle est quant à elle normale, une habitude récurrente du cinéma transalpin des années 70 fermement marquée cette fois.
L'assassino ha riservato nove poltrone réserve au spectateur et fan de cinéma Bis une affiche des plus alléchantes qui rassemble sous le même toit hormis Paola Senatore Janet Agren trop vite assassinée, l'androgyne Eva Czemerys aujourd'hui disparue, la filiforme Lucretia Love et la brune Rossana Schiaffino, star des années 60. Le grec Chris Avram, figure incontournable du cinéma d'exploitation italien des années 70, Howard Ross, et Gaetano Russo (Roma a mano armata, Thrauma) complètent cette distribution lumineuse.
Si l'assassin a réservé neuf sièges dans ce théâtre de l'horreur, le spectateur lui en retiendra un dixième afin d'assister à ce plaisant et fort divertissement spectacle de massacre qui malgré ses quelques défauts et son manque de rythme demeure un très honnête giallo gothique resté à ce jour inédit en DVD à l'exception d'un certain nombre de galettes non officielles plus ou moins longues de qualité parfois tout à fait acceptable..