Racconti proibiti... di niente vestiti
Autres titres: Master of love
Real: Brunello Rondi
Année: 1973
Origine: Italie
Genre: Décamérotique
Durée: 103mn
Acteurs: Rossano Brazzi, Tina Aumont, Janet Agren, Barbara Bouchet, Magali Noël, Silvia Monti, Enzo Cerusico, Leopoldo Trieste, Venantino Venantini, Karin Schubert, Monica Strebel, Mario Carotenuto, Norberto Botti, Paola Corazzi, Carla Mancini, Michael Forrest, Ben Ekland...
Résumé: Le peintre et poète Lorenzo Del Cambio, licencié en libertinage, vit comme un roi dans un couvent entouré de soeurs qui le choient et s'offrent à ses désirs les plus coquins. Un jour il se voit charger d'enseigner au jeune Uccio les délices charnels. Ils partent donc ensemble pour le château de Dame Lucrezia réputée pour son obsession des plaisirs sadomasochistes religieux. En cours de route, Lorenzo va conter à Uccio quatre histoires afin de commencer son éducation, celle d'une duchesse qui va apprendre à un futur jeune marié les plaisirs sexuels, celle d'une magicienne qui par vengeance contre celui qui l'a abandonné va lui jeter un sort qui frappera sa virilité, celle d'un frère qui pour rendre fertile une femme va opérer un prétendu miracle et enfin celle d'un jeune homme qui pour récupérer son argent va devoir faire face à un sodomite.
Arrivés au château de Lucrezia, Uccio va pouvoir mettre en pratique les leçons données tandis que Lorenzo va découvrir les pratiques blasphématrices de la châtelaine perverse...
Réalisé par l'éclectique Brunello Rondi qui quelques mois auparavant venait de terminer Valeria Dentro e fuori, Racconti proibiti... di niente vestiti s'il est certainement un des décamérotiques qui s'approche le plus de l'oeuvre originale de Pasolini il est aussi et de loin le plus parodique et surtout blasphématoire. Au fil des trois segments qui le composent, Rondi y inclut bon nombre d'éléments bibliques tels que la Passion du Christ, la flagellation, la couronne d'épines, le chemin de croix, le lavage des pieds tout en saupoudrant l'ensemble lors du final d'un soupçon de fantastique avec l'apparition de la Mort.
Produit par le scénariste-producteur-metteur en scène Oscar Brazzi, le frère de Rossano Brazzi, le principal protagoniste du film, Racconti proibiti... di niente vestiti se présente comme un décamérotique traditionnel. Il respecte le schéma récurrent au genre. Le fil conducteur de l'histoire est le peintre et poète diplômé en libertinage Lorenzo del Cambio. Il vit comme un roi au sein d'un couvent, choyé par les soeurs et la Mère supérieure, une femme de couleur(!) avec lesquelles il assouvit ses désirs les plus lubriques. C'est alors que Sieur Uguccione lui demande d'initier son jeune fils, Uccio, à l'amour charnel. Lorenzo va alors conter à son disciple quelques histoires qui devraient libérer ses sens et donner envie au jeune garçon de goûter au fruit interdit. Il se rend pour cela au château de la Dame Lucrezia décrite comme une adepte des plaisirs sadomasochistes religieux. S'ensuit donc une série de quatre petits contes salaces.
Le premier met en scène la duchesse de Falcocchioni. Sur ordre du duc, elle doit faire l'éducation sexuelle d'un jeune berger qui doit prochainement épouser la belle Magdalena. Si le jeune homme refuse il sera puni par le Duc. Mortifiée par cette nouvelle, Magdalena ne supportera pas de voir son futur époux se faire dépuceler par la duchesse.
Le deuxième sketch, le plus anodin et le moins intéressant, raconte l'histoire de frère Bernardone qui après avoir opéré un supposé miracle va rendre fertile une jeune mariée sous les yeux éberlués de la foule.
Le troisième met en scène Roméo qui pour avoir abandonné sa fiancée, une séduisante magicienne nommée Dirce, va être victime de sa terrible vengeance. Elle va jeter un sort sur le jeune homme pour qu'il perde sa virilité alors qu'il se prépare à se jeter dans les bras d'une généreuse conquête.
Le dernier segment quant à lui met en avant les péripéties d'un jeune homme, Sarnacchione, qui pour avoir sauvé la vie de Bastianozzo, un adepte de la sodomie, a du lui verser 300 florins. Si le garçon lui a promis de les lui rendre, les mois passent et Sarnacchione n'a aucune nouvelle de Bastianozzo. Il se rend chez lui afin de lui réclamer son argent mais à chaque faux pas il sera puni par une sodomie. Au fil du temps il semblerait qu'il y prenne gout.
Tout cela mène au final particulièrement hérétique qui autrefois fit scandale et donna des hauts-le coeur au comité de censure italien. Lorenzo del Cambio arrive au château de Dame Lucrezia, découvre avec extase les plaisirs blasphématoires de la châtelaine. Uccio suite à un décret papal va retourner au couvent afin de mettre en pratique les enseignements de son maître qui de son coté rencontre alors la Mort. Il s'éloigne avec elle tout en dansant.
Bénéficiant d'une très jolie photographie, de superbes décors tant intérieurs qu'extérieurs dont le splendide cadre de San Gimignano, rythmé par une très plaisante partition musicale signée Stelvio Cipriani, frais et enthousiaste, saupoudré de quelques passages plein d'humour notamment lors du dernier segment et de ses protagonistes sodomites, Racconti proibiti... di niente vestiti s'élève facilement au dessus des productions traditionnelles de ce genre. Le final est des plus original flirtant avec le pur fantastique. Alors qu'Uccio se livre désormais avec délectation aux plaisirs de la chair dans un immense tonneau de vin où s'ébattent la Mère Supérieure et ses soeurs, Lorenzo va à l'encontre de la Mort qui lui apparait, irréelle, vêtue de voiles diaphanes, une faux à la main. S'ils ne traverseront pas le Styx, ils partiront ensemble main dans la main, encourant à travers champ...
Si les scènes de nu ne sont pas légion, Rondi reste cette fois plutôt pudique, l'amateur appréciera plus particulièrement le coté blasphématoire du film qui n'hésite pas à jouer avec toutes les images sacrées de la religion, à mettre l'accent sur les délices interdits sadomasochistes en les utilisant ici dans un contexte religieux, il appréciera aussi une éclatante distribution féminine, une des affiches les plus alléchantes que le genre nous ait donné. On y retrouve en effet Janet Agren pleine de grâce et d'inventivité, Tina Aumont, extraordinaire en sorcière, Karin Schubert, Silvia Monti, Magali Noel, Paola Corazzi et Monica Strebel dans le sombre rôle de la Mort.
Quant à Barbara Bouchet, véritablement en transe, elle est simplement excellente dans la peau de Lucrezia obsédée par les délires sadico-mystiques. On se délectera du bonheur quasi extatique avec lequel par exemple elle fouette son jeune serviteur avant de faire elle même flageller en portant la couronne d'épines du Christ.
Difficilement visionnable aujourd'hui puisque la version italienne est devenue pratiquement invisible, il n'existe aujourd'hui qu'une copie vidéo anglaise du film assez proche de la copie d'origine sur laquelle ceux qui aiment blasphémer devant la croix tout en forniquant de façon ludique se précipiteront. Parmi ce prolifique genre que fut le décamérotique et autres canterbérotique, le film de Rondi est en effet une petite gemme à découvrir.