Ida Galli: ambassadrice du western et reine du giallo
Avant de devenir une des figures récurrentes du giallo, son nom fut associé durant les années 60 au peplum et surtout au western spaghetti dont elle fut là encore une des reines. En presque vingt ans, sa blondeur et son élégance illuminèrent les écrans de cinéma et son nom reste aujourd'hui encore indissociable au cinéma de genre. Plus connue sous son pseudonyme anglais, elle a ici toute raison d'être et c'est avec un plaisir non dissimulé que le Maniaco vous invite à découvrir le parcours de la distinguée Evelyn Stewart de son vrai nom Ida Galli.
Ida est née en 1942 à Sestola. C'est un peu par hasard si Ida va se retrouver devant l'objectif d'une caméra en 1959 à tout juste 17 ans. A cette époque Ida vivait à Ostia. Sa soeur était une amie de l'acteur français Gérard Landry alors installé à Rome. Photographe amateur, Gérard prit un jour des photos d'Ida sur une plage. Il donna les clichés à son agent qui fut frappé par sa beauté. Ce fut ainsi que l'aventure commença. Tout alla très vite alors. L'agent parla de Ida à Piero Tellini, un des scénaristes de Federico Felllini, qui lui proposa de suite un rôle dans son premier film Blu dipinto di blu. La carrière de la jeune fille qui avait toujours souhaité être enseignante, l'idée d'être comédienne n'avait jusqu'alors jamais effleuré son esprit, est lancée. Après un petit rôle dans Une fille pour l'été de Edouard Molinaro Fellini lui offre un rôle dans La dolce vita. Un début fracassant pour la jeune fille qui dés lors ne cessera plus de tourner.
Elle va devenir très rapidement une des reines du peplum. Elle en tourne trois quasiment à la suite et non des moindres puisqu'elle est une des protagonistes principales de Messalina venere imperatrice de Vittorio Cottafavi, Hercules contres les vampires de Mario Bava et Rome contre Rome de Giuseppe Vari. Sa beauté émerveille l'Italie qui en fait sa nouvelle coqueluche.
Mais le peplum est alors moribond. Ida va donc orienter vers d'autres genres. Après avoir été à l'affiche de films aussi prestigieux que Le guépard de Lucchino Visconti, Madame sans gêne et le très beau Le corps et le fouet de Mario Bava, elle s'essaie au film de guerre. On la voit dans La loi de la guerre, Sur ordre du Fürher de Enzo Castellari et 7 hommes pour Tobrouk de Mino Loy.
Dés 1965 c'est pourtant à un genre bien spécifique que son nom va être désormais associé, le western spaghetti, dont elle devient une des ambassadrices sous le pseudonyme international de Evelyn Stewart crée pour la distribution à l'étranger. Entre 1965 et 1973 elle n'en tourne pas moins de onze. Elle est ainsi au générique de Le dollar troué de Giorgio Ferroni, Adios Gringo de Giorgio Stegani, Django tire le premier de Alberto De Martino, Perche uccide ancora et Perche si uccide ancora de Eduardo Mulargia et José Antonio De La Loma, Il suo nome grindava vendetta de Mario Caiano, 3 croce per non morire de Sergio Garrone, Gli eroi di Fort Worth de Albert De Martino, Quel caldo maledetto giorno di fuoco de Paolo Bianchini, 7 magnifice pistole de Romolo Guerrieri, I quattri pistoleri di Santa Trinita de Giorgio Cristallini et enfin Lo chiamavano Tresette... giocava sempre col morto de Giuliano Carnimeo.
Entre temps, elle se distraie dans Coplan ouvre le feu à Mexico de Riccardo Freda, Assassination de Emilio Miraglia et L'affaire Lady Chaplin du tandem De Martino / Grieco.
En 1968 elle tourne son premier giallo, Il dolce corpo di Deborah / Le doux corps de Deborah de Romolo Guerrieri. C'est ici le début d'une nouvelle ère pour Ida, celle du giallo auquel son nom sera désormais associé. Il dolce corpo di Deborah est le premier d'une série de sept qu'elle tournera entre 1968 et 1973. Elle est ainsi à l'affiche des très britanniques Concerto per pistola sola de Michele Lupo et Il coltello di ghiaccio de Umberto Lenzi où sa beauté tranche avec celle de l'immuable Caroll Baker, Una farfalla con le ali insanguinate / Cran d'arrêt de Duccio Tessari, La queue du scorpion de Sergio Martino, l'ibérique La mansion de la niebla / Quando Marta urlo dalla tomba de Francisco Lara Polop et enfin Exorcisme tragique / Les monstres se mettent à table de Romolo Scavolini.
Toujours aussi éclectique, Ida touche entre deux gialli à d'autres genres. Aux cotés de Stefania Santilli et Hiram Keller, elle illumine le très érotique Grazie signore p..., un film qu'elle n'aime pas et qui pour elle marque le déclin de sa carrière. Renato Savino, le réalisateur, se souvient d'elle comme d'une jeune femme très timide que les scènes érotiques apeuraient. Elle venaient sur le plateau constamment accompagnée de son époux et de leurs deux enfants. Elle est une envoûtante sorcière qui, entourée de Silvia Monti et Haydée Pitoff, fait perdre la tête à Ray Lovelock dans le très beau Les sorcières du lac / Le regine de Tonino Cervi. Elle est une nonne jalouse et manipulatrice dans le nunsploitation méconnu de Armando Crispino La badessa di Castro.
Toujours dans le domaine du fantastique, elle est une des protagonistes de l'étrange et inquiétant Le orme de Luigi Bazzoni, de Emilie l'enfant des ténèbres de Massimo Dallamano aux cotés de la jeune Nicoletta Elmi et l'ésotérique Povero cristo de Pier Carpi où elle est la Madonne. Toujours aussi élégante, elle est aussi à l'affiche de L'emmurée vivante de Lucio Fulci aux cotés de Jennifer O'Neil et Marc Porel.
C'est alors que Ida tente une incursion dans le polizesco avec Bracelets de sang de Umberto Lenzi et Napoli spara de Mario Caiano respectivement en 1975 et 1977. Elle se retrouve ensuite perdue dans la prestigieuse distribution de La grande bataille de Umberto Lenzi. Malheureusement pour Ida ce sera là son dernier vrai bon film.
Les temps sont plus durs et Ida contrairement à certaines de ses consoeurs refuse de tourner n'importe quoi. Les scénarri se font plus rares, ses apparitions à l'écran également. Mais Ida précise que sa décision de ne plus tourner ne provient pas du manque de travail mais d'une réflexion personnelle. Elle ne ressentait plus de plaisir à faire des films, peu satisfaite des derniers rôles qu'elle avait joué. Elle ne pouvait pas continuer de travailler si elle n'en avait plus le coeur. Tout arrêter était pour elle la bonne décision même si elle resurgit en 1982 avec Una di troppo de Pino Tosini le temps d'un court rôle avant de
disparaître à nouveau sept longues années même si elle tourne quelques spots publicitaires pour la télévision italienne. Elle mettra son absence loin des écrans à profit pour s'occuper de ses enfants, les futurs acteurs Alessandro Cocco, l'ainé né en 1964, et Deborah Cocco née en 1967.
Ida fait un petit retour en 1989 avec la comédie de Neri Parenti Fratelli d'Italia et surtout un sexy giallo sans intérêt plutôt mauvais mais particulièrement osé Arabella l'angelo nero de Stelvio Massi. Ce retour aux origines sera son chant du cygne si on excepte une apparition en 1990 dans Con i piedi per aria de Vincenzo Verdecchi.
L'ennui a tué Ida qui durant
presque quinze ans fut une des têtes de proue du cinéma de genre. Celle qui incarna la beauté et l'élégance a préféré mettre un terme à sa carrière à 48 ans et se retirer afin de profiter d'une retraite bien méritée plutôt que de tourner pour tourner comme le firent de trop nombreuses actrices. Elle s'orienta alors vers d'autres horizons dont l'écriture et surtout la mise en scène de spectacles qui la fit voyager aux quatre coins du monde avec son compagnon.
Aujourd'hui à 77 ans Ida ne regrette rien et porte sur sa carrière un regard positif, heureuse de son parcours et des gens formidables qu'elle a pu rencontrer et avec qui elle a pu également travailler.