Marc Porel: L'autodestruction d'un ange!
Fils de l'acteur Gérard Landry et de l'actrice Jacqueline Porel, l'épouse de François Perrier le célèbre photographe des stars, demi-frère de Jean-Marie Perrier et de Anne-Marie Perrier, directrice du magazine "Elle", Marc, de son vrai nom Marc Porel de Legatinier, est né le 3 août 1949 à Lausanne. Bercé dés son plus jeune âge par le milieu artistique de par sa célèbre famille, Marc ne pouvait qu'y faire son entrée aidé par son un physique de jeune premier qui allait l'aider à le catapulter au firmament d'une carrière prometteuse.
C'est sa soeur qui très tôt va l'introduire dans les coulisses du show-biz. Le jeune garçon va ainsi rencontrer des stars telles que France Gall, Françoise Hardy ou encore Sylvie Vartan. De petits boulots en petits boulots, Marc va alors tracer doucement sa route sous les feux de la rampe.
C'est en 1967, à 19 ans, que Costa-Gavras lui donne sa première chance au cinéma avec Un homme de trop. Dés lors, la carrière de Marc va prendre son envol et il est sollicité par les plus grands réalisateurs. Il va côtoyer les grands noms du cinéma français et en l'espace de quelques années Marc va voir son nom associé à ceux de Jean Gabin, son idole, Alain Delon, Roger Hanin, Bruno Cremer, Charles Vanel entre autres.
C'est en 1969 que la chance de sa vie se présente lorsqu'il obtient un un rôle dans Le clan des siciliens de Henri Verneuil aux cotés de Alain Delon. La machine est lancée rien ne l'arrêtera plus.
Marc qui crie bien haut qu'il aimerait être le nouveau Gabin est happé par le tourbillon du succès, déchainent les passions. Sa belle gueule d'ange, ses allures de jeune homme fragile en font un sex-symbol auprès des jeunes filles des années 70 mais son coeur bat alors pour Nathalie Delon toute fraîche divorcée, une romance qui durera presque quatre ans. Si Marc avait déjà une fille issue d'un premier mariage, sa passion pour Nathalie qui le surnomme P'tit Marco est idyllique. Elle s'effilochera lentement après que Nathalie ait perdu leur bébé et que les paradis artificiels ne les séparent.
Au cinéma, Marc ne cesse d'être sollicité. Pierre Granier-Deferre le veut pour La Horse où il partage la vedette avec Gabin en 1970, Edouard Molinaro pour Les Aveux les plus Doux en 1971 ou Georges Lautner pour La Route de Salina, un film envoûtant où il partage le temps de quelques instants de superbes scènes avec la toujours aussi magnifique Mimsy Farmer dont il joue l'incestueux frère. Si le film sort en 1971, il aurait été tourné dit-on quelques années plus tôt en 1969. Marc n'y apparaît malheureusement que dans les rares séquences de flash-back qui donnent à cette tragique histoire toutes ses explications. Lautner profite de ses quelques minutes de présence à l'écran pour mettre en valeur le bellâtre sur cette plage déserte, balayée par le vent et les vagues, face à une Mimsy Farmer désespérée qui le tuera à coups de pierre.
En 1972 s'il est le partenaire de Claudine Auger dans Un peu de Soleil dans l'Eau Froide de Jacques Deray il est surtout à l'affiche de la gigantesque et somptueuse fresque historique Ludwig - Le Crépuscule des Dieux de Luchino Visconti aux cotés de Helmut Berger et Romy Schneider entre autres noms prestigieux. Marc interprète le jeune page du roi Ludwig de Bavière, l'acteur confirmant ici son statut de jeune sex symbol.
C'est alors que l'Italie va s'intéresser à lui et une fois de plus, il tourne à nouveau aux cotés de Alain Delon pour Tony Arzenta / Big guns, polar mafieux de Duccio Tessari avant que Lucio Fulci ne fasse appel à lui pour jouer le jeune prêtre assassin et pédophile de La Longue Nuit de l'Exorcisme / Don't torture a duckling avec Tomas Milian, Barbara Bouchet et Irene Papas avec laquelle il aurait entretenu une relation amoureuse durant le tournage. Film sordide et dérangeant, Marc a le rôle d'un jeune ecclésiastique qui tue de jeunes enfants pour sauvegarder une certaine morale, un rôle qui malgré le port de la soutane ne lui enlève aucun charme. Un charme dont il use et abuse, collectionnant alors les flirts et amourettes.
Suivront deux comédies aigres-douces pleine de charme et de sensibilité Virilità / Virilité / Un parfum d'amour avec la belle Agostina Belli sous la direction de Paolo Cavara et Nipoti miei diletti de Franco Rossetti avec Adriana Asti. Par la suite Marc va se partager essentiellement entre la France et l'Italie et se spécialiser plus particulièrement dans le polar italien. En 1975 il est ainsi au générique du réputé Live like a man die like a cop de Ruggero Deodato dans lequel il a le rôle détestable d'Antonio, un jeune flic corrompu et sans scrupule, formant un duo de choc et
surtout de charme plutôt ambigu avec l'autre beau gosse du cinéma transalpin Ray Lovelock.
S'il tourne avec les plus belles stars du cinéma italien comme Ursula Andress dans Colpo in canna / Ursula l'anti gang en 1976 ce jeune homme plein de charme et si drôle dans la vie cache en fait un être fragile, torturé et surtout auto-destructeur. Le suicide de son frère va lui asséner le coup fatal. Marc ne se remettra jamais de cette tragédie. Il va lentement plonger dans l'univers de l'héroïne, accentuant ainsi son coté auto-destructeur.
Les tournages, eux, continuent de s'enchainer mais on devine sur le visage de l'acteur le malheur. La détresse se lit dans ses yeux désormais. Même s'il demeure un excellent comédien, ses interprétations s'en ressentent quelque peu. On le sent parfois peu impliqué, fade diraient les mauvaises langues, manquant visiblement de conviction dans son jeu comme si son esprit était ailleurs.
En 1976, Lucchino Visconti fait de nouveau appel à ses services et lui offre le rôle du jeune Filipo dans son éblouissant film sur la jalousie et l'univers sordide de la grande bourgeoisie L'Innocent. Si Marc a pour partenaire la sublime Laura Antonelli dont il joue l'éphémère et fougueux jeune amant, il y partage surtout la vedette avec la non moins belle Jennifer O'Neill, l'inoubliable héroïne de Un été 42. Le film va donner naissance à une relation amoureuse passionnelle puisque Marc tombe éperdument amoureux de la jeune actrice. Cette torride relation va continuer sur le plateau de Sette note in nero / L'emmurée vivante que Lucio Fulci réalise en 1977, un film un peu à part dans la filmographie du maitre de l'horreur à l'italienne qui traite ici à sa façon des phénomènes paranormaux. C'est un amour impossible et ravageur que va vivre l'acteur puisque Jennifer O'Neill refusera toute aventure avec lui au vu de ses graves problèmes d'addiction. Elle refuse de s'engager avec quelqu'un d'aussi instable et dépendant. Marc vivra très mal cet échec, ses problèmes ne feront que s'aggraver par la suite.
En 1977 il tourne sous la direction de Umberto Silva l'ambitieux film de guerre Difficile Morire aux cotés de la magnifique Barbara Magnolfi dont il tombe amoureux tant et si bien qu'ils se marient assez vite. Ils tourneront ensemble deux autres films, le polar de Gianni Martucci La Fleur qui Tue / Milano..Difendersi o Morire et en 1978, le sulfureux sexy giallo La sorella di Ursula où un maniaque tue des jeunes filles à l'aide d'un phallus géant! Plutôt soigné dans son esthétique et ses décors, comportant assez bizarrement de longues scènes aux limites du hardcore, Marc interprète ironiquement un enquêteur héroïnomane. Malheureusement, Marc est en pleine détresse.
La même année Mario Bava pense à lui pour être Matthew, un jeune expert en objets anciens, pour son ultime réalisation, le téléfilm La Vénus d'Ille/ La venere d'Ille où il a pour partenaire Daria Nicolodi.
Il continue pourtant de tourner. Il est au générique notamment du drame à l'atmosphère morbide Caresses Bourgeoises / Una spirale di nebbia en 78 sous la direction de Eriprando Visconti, le neveu de Lucchino, où pour la première fois de sa carrière Marc, désinhibé, apparait entièrement nu tant de dos que de face lors de longs plans. Il est à l'affiche de deux polars, le musclé Porci con la P38 signé Gianfranco Pagani et, plus anodin et surtout mollasson, le napolitain La pagella, deux films dans lequel Marc endosse de nouveau la peau d'un flic. On le voit également en France en 1980 dans Je Vais Craquer, une comédie fade avec Christian Clavier où il joue un jeune producteur de films véreux. Un regain de gloire arrive quand Aldo Lado le choisit pour être aux cotés de l'ex-lolita Theresa Ann-Savoy dans son drame de guerre La Désobeissance même si Marc n'y tient qu'un petit rôle de second plan.
Malheureusement en octobre 1981 c'est une tragédie qui s'abat sur le couple que forment Marc et Barbara. Marc est arrêté par la police italienne pour possession et usage de stupéfiants. Il est condamné à deux ans de prison ferme mais il n'y restera que neuf mois.
En pleine dérive, Marc tournera en 1982 le décevant giallo érotique Delitto carnale de Cesare Canevari avec la future diva du X italien Moana Pozzi, un film ennuyeux et mal monté au scénario inexistant, un n'importe quoi tourné en un week-end, prétexte à de longues scènes d'un érotisme mou. Une version hardcore agrémentée de plans d'anciens films hard du réalisateur, La pantera bionda, sortira suite à la notoriété de Moana.
Barbara confessa que Marc n'aurait jamais joué dans un tel film s'il avait eu tous ses esprits. Mais Il était semble t-il arrivé à un point de non retour. Triste chant du cygne pour le comédien qui s'éteindra à Casablanca le 5 août 1983, emporté par une méningite.
Ainsi donc est parti l'ex sex-symbol angélique des années 70, anéanti par un un long et lent processus d'auto-destruction, laissant derrière lui ses deux petites filles, Bérangère et Camille. Bérangère était née d'un premier mariage en 1968. Elle tourna un film, Trocadéro bleu citron, avant de s'éteindre en 1991 à tout juste 23 ans.
Sensible et trop fragile, à l'image même qu'il donnait de lui, Marc est parti trop tôt à l'âge de 34 ans. Pour nous, il restera l'éternel beau gosse du cinéma français d'alors, celui qui put rivaliser avec l'étoile Delon sans dépareiller et ensoleiller le cinéma italien aux cotés des plus belles actrices qu'offrait alors l'Italie. Cette beauté fragile, on la conservera à jamais sur les pellicules que tu as illuminé.