Grazie signore p...
Autres titres: Orgie mesdames les putes / Merci mesdames les putes
Real: Renato Savino
Année: 1972
Origine: Italie
Genre: Drame érotique
Durée: 85mn
Acteurs: Hiram Keller, Ida Galli, Antonia Santilli, Umberto Di Grazia, Paolo Borselli, Giancarlo Del Brocco, Virginia Rodin...
Résumé: Marco, un étudiant, souffre d'un blocage sexuel depuis le suicide de son père quelques années auparavant. Il vit avec sa mère qui de temps à autres se laisse aller à quelques aventures amoureuses afin de se sentir vivre. Marco la méprise encore plus pour ses écarts. Vont alors débarquer deux jeunes photographes, sensuelles et désinhibées, qui vont faire perdre la tête à Marco. Il ne peut malheureusement assouvir ses envies et son obsession pour les deux femmes va le détruire encore plus. Elles vont alors lui faire subir une thérapie sexuelle bien particulière afin de tenter de le sortir de ses tourments et le débloquer...
Discrètement et fort tardivement distribué en France en octobre 1976 sous le titre racoleur Orgie mesdames les putes dans une version agrémentée d'inserts hardcore apparemment interprétés par une des actrices récurrentes de Polselli, on lui préférera son titre original, Grazie signore p... beaucoup plus intelligent puisqu'il renvoie aux ultimes minutes de ce film, Grazie signore p... fut réalisé cinq ans auparavant par le peu prolifique Renato Savino sous le pseudonyme de Mauro Stefani.
Fin d'un parcours tourmenté pour le héros, Grazie signore p... est un drame psychologique érotique dont l'action se situe dans un magnifique village côtier sicilien balayé par le vent, une sorte de thérapie sexuelle poussée que subit Marco, un étudiant souffrant d'un profond blocage sexuel depuis le suicide de son père. Il vit avec sa mère qui se laisse aller à quelques aventures amoureuses afin de continuer à se sentir vivre. Marco la méprise encore plus pour ces écarts d'autant qu'il la tient responsable de la mort de son père. Il se complait alors à la faire souffrir tout en se faisant souffrir lui même, pris dans un tourbillon auto-destructeur.
L'arrivée de deux jeunes et splendides photographes libérées venues conquérir les hommes du coin va aggraver l'état du jeune homme qui en tombe vite amoureux. Ainsi nait une étrange relation triolique à travers laquelle Marco ne peut trouver de plaisir. Obsédé par ces deux créatures désinhibées, il passe son temps à rêver d'elles, à les espionner tout en se masturbant. Refusant de voir son fils encore plus souffrir, sa mère va tenter de briser cette relation attisant la haine qu'il nourrit pour cette vieille femme sur laquelle il rejette désormais son infirmité.
Grazie signore p... baigne dans un climat érotique incessant. Tout est mis en oeuvre pour exacerber les sens tant de Marco que du spectateur, de sublimer le corps de la femme à travers les photographies que la photographe prend de sa compagne dans des décors propices aux rêves et à l'évasion. Les corps fébriles explosent de sensualité moite, insolents et impudiques, évoluent au milieu de pièces emplies de sculptures phalliques ou le long de plages ensoleillées. Si le sexe est l'élément fondamental de ce drame, il est aussi l'élément de base de la thérapie que les deux femmes vont imaginer afin de guérir Marco de ce blocage qui détruit sa vie ou... le mal par le mal!
Elles lui font absorber un aphrodisiaque puis l'entrainent dans une grotte dans laquelle elles vont attiser sa flamme puis se donner à lui suivant un rituel mystique avant de s'enfuir, le laissant en plein délire. Dans un état second, Marco va tenter de la rattraper, courant à perdre haleine, perdu dans les dédales de cette grotte où telles des fées mutines les deux femmes apparaissent et disparaissent, perdu dans les méandres de son esprit, cherchant désespérément à en sortir comme il cherche la sortie de cette grotte.
Sous l'effet de la drogue tous les sens de Marco semblent se réveiller plongeant le jeune homme au creux d'un tourbillon vertigineux au milieu duquel il se débat pour mieux s'en échapper et retrouver enfin son équilibre. Dans sa course poursuite effrénée, il heurtera sa mère venue retrouver son amant. Mère et fils vont se percuter violemment et tomber l'un sur l'autre. Ce deuxième choc aussi bien dans le sens propre que figuré va permettre à Marco de non seulement retrouver ses esprits mais aussi de pardonner à sa mère, ultime étape de sa propre libération. Marco est enfin guéri et c'est d'un Merci mesdames les putes qu'il remerciera les deux jeunes femmes en regardant leur avion décoller donnant ainsi au titre du film tout son sens.
Grazie signore p... n'est en rien une étude psychologique. Il s'agit plus d'un drame mystique, oedipien, un voyage introspectif bizarre à consonances mélancoliques. Le but de Savino à qui on doit également I ragazzi della Roma violenta n'est pas ici de donner des explications rationnelles au comportement et tourments de son héros. On pourra donc sourire et trouver ridicule cette thérapie sexuelle basique. Savino ne fait qu'exploiter le sujet pour n'en garder que l'aspect sexuel et délivrer une oeuvre érotique douce-amère qui ne dépasse jamais les limites du softcore. Ceux qui s'attendaient donc à une oeuvre sulfureuse seront fort déçus.
On retiendra essentiellement du film les magnifiques paysages, ruines et théâtres antiques de Pantelleria en Sicile, quelques scènes très belles dont celle de la grotte qui fut photographiée par Joe D'Amato, onirique et étrange, certains dialogues notamment le passage qui explique la différence entre une putain et une prostituée et la présence au générique du charme ravageur de Hiram Keller, dandy plus androgyne et sexuel que jamais, aux cotés de Ida Galli et l'impudente Antonia Santilli, héroïne de Il boss de Fernando Di Leo.
Particulièrement mutilé en Italie lors de sa sortie, Grazie signore p... est au fil du temps devenu une oeuvre rare lui conférant une certaine aura de film culte dans l'univers du cinéma érotique transalpin des années 70. Il reste surtout le témoignage d'une époque et d'un certain cinéma de genre qui se voulait osé. Sera t-on étonné si Savino s'est par la suite tourné vers l'ésotérisme.