Napoli spara
Autres titres: Assaut sur la ville / Weapons of death
Real: Mario Caiano
Année: 1977
Origine: Italie
Genre: Polizesco
Durée: 87mn
Acteurs: Leonard Mann, Henry Silva, Jeff Blynn, Ida Galli, Adolfo Lastretti, Massimo Deda, Kirsten Gille, Enrico Maisto, Tommaso Palladino, Tino Bianchi, Maurizio Mattioli, Enrico Chiappafreddo, Benito Pacifico, Nazzareno Cardinali, Massimo Vanni, Mario Deda, Ottaviano Dell'Acqua, Mario Erpichini, Luciano Foti, Mario Granato, Maurizio Gueli, Dino Mattielli, Francesco Anniballi, Omero Capanna, Franco Marino, Umberto Santolamazza, Claudio Zucchet...
Résumé: A Naples le commissaire Belli et ses agents spéciaux sont aux prises avec un dangereux mafioso, Santoro, qui se cache derrière un entrepreneur en apparence sans histoire. Hold up, prises d'otages, tueries... plongent la ville dans la terreur. Belli va tout mettre en oeuvre pour arrêter Santoro qui ne cesse de lui glisser entre les mains...
En 1975 Marino Girolami créait le personnage du commissaire Betti, un flic imperturbable aux méthodes aussi efficaces que peu orthodoxes dont l'objectif principal était de faire justice et ramener le calme dans les villes gangrenées par la délinquance durant la sombre période des années de plomb. Trois films allaient ainsi voir le jour entre 1975 et 1976 dont un mis en scène par Umberto Lenzi, le second et meilleur chapitre de la trilogie Napoli violenta / SOS jaguar: opération casseur, les deux autres volets Rome violente et Italia a mano armata / Opération jaguar étant réalisés par Girolami lui même qui tua son héros lors du dernier
opus. Napoli spara s'il ne peut pas réellement être inclus dans la trilogie n'en est pas moins un évident clin d'oeil dans lequel Mario Caiano ne manque pas d'y faire quelques références. Non seulement le titre original rappelle le film de Lenzi mais le nom du commissaire Betti est également cité lors d'une scène entre Belli et le petit Gennarino ou le retour de l'orphelin boiteux que Betti avait pris sous son aile dans ce même film. Quant au nouveau commissaire il ne se nomme plus Betti mais Belli, la consonance des deux noms étant tout sauf fortuite, et tout deux poursuivent le même but à la différence près que Maurizio Merli qui fut un inoubliable Betti cède son imperméable à l'américano-italien Leonardo Mann qui ne
parvient à aucun moment à faire oublier l'irremplaçable homme à la moustache.
Le scénario de Napoli spara devenu en France Assaut sur la ville diffère bien peu de celui de la trilogie, guère plus travaillé. Comme SOS jaguar: opération casseur l'action se situe à Naples. Le commissaire Belli et ses hommes doivent faire face aux exactions d'un dangereux mafieux, Santoro, qui se cache sous l'apparence d'un respectable entrepreneur que protège le vieux Don Alfredo. Les hommes de Santoro multiplient hold-up et assassinats au nez et à la barbe de Belli qui s'est juré de l'arrêter et de le tuer de quelques manières que ce soit. Voilà qui est simple et n'est au final qu'un joli prétexte pour enchainer toute une série
de scènes d'action plus violentes les unes que les autres. Vieux routard de la série B et du cinéma de genre transalpin, le toujours très professionnel Mario Caiano signe une pellicule particulièrement faible quant à son intrigue réduite à sa plus minime expression mais diablement efficace. Peu importe l'improbabilité de l'histoire Caiano ne semble pas être là pour tenter une certaine logique mais tout simplement pour divertir son public et lui offrir un maximum de violence dans un déluge d'action où flics et voyous finissent par se confondre dans leur façon d'agir.
Pour se faire Caiano ne recule devant rien et explose les limites que Girolami et Lenzi s'étaient fixés sans pour autant être dans la retenue. Assaut sur la ville est
en cela un superbe exemple de ce que l'Italie pouvait faire de mieux à ce niveau afin d'exciter non seulement les papilles de son spectateur mais aussi et surtout ses instincts les plus vils. Il n'hésite donc pas à rouer de coups de pied dans le ventre une femme enceinte lorsqu'il ne se laisse pas aller à de surprenants effets gore auxquels le genre ne nous avait jusqu'alors pas habitué. Le sang d'un conducteur gicle sur le parebrise de sa voiture précipitée dans un ravin, un policier est décapité net sur sa moto mais c'est surtout la stupéfiante castration d'un pédophile qu'on retiendra, une scène d'un réalisme saisissant qu'on ne reverra plus avant la mode des films cannibales à l'aube des années 80 qui vient
sublimer ce déchainement de violence. A ces nombreuses réjouissances sanglantes on ajoutera les incessants braquages, hold up, fusillades accompagnés de leur lot de corps mitraillés ou brulés vifs, les courses-poursuites à travers les rues de Naples, prise d'assaut d'un train, les prises d'otages y compris d'enfants que Caiano n'épargne pas puisqu'il ne s'interdit pas de les tuer pour le plus grand plaisir d'un spectateur jubilant face à un tel déferlement de brutalités. C'est pour dire que la banalité de la trame est noyée dans un déluge d'action et de sang qui transforme Assaut sur la ville en un véritable film d'exploitation pour passionnés de genre.
Contrairement à d'autres polizeschi celui ci n'est peut être pas à prendre très au sérieux. Caiano, cynique au possible, semble en effet se jouer du genre, se moquer gentiment d'une Naples mise à feu et à sang, la tourner en dérision en exagérant au maximum sa vision des choses tout en l'agrémentant de touches comiques qui font par instant sombrer le film dans le ridicule le plus complet voire peut être pour certains l'insupportable. Ainsi le retour de Gennarino risque d'en énerver plus d'un. L'enfant boiteux encore plus crispant que dans l'opus de Lenzi, accompagné cette fois d'un ami obèse, devient une sorte d'intermède humoristique derrière sa caractérisation folklorique de l'enfant des rues napolitain, figure
indispensable à tout film de ce type. Si sa présence dédramatise les faits il personnalise surtout cette volonté de survie, ce désir de s'en sortir en inventant mille petits boulots tous plus sympathiques les uns que les autres mais déjà si mafieux car mafioso on le devient très jeune. Il est fort dommage que ses bêtises, propre à l'enfance, soient aussi idiotes faisant basculer dans la plus grande invraisemblance une intrigue déjà peu crédible à la base. En ce sens la scène où il vole une Lancia Stratos, un vrai petit bolide de course pour les ignares, et la conduit à travers les rues de la ville et celle où il vient chercher le commissaire à bord cette fois d'une Alfa 2000 sont d'une absurdité sans nom. Comment
imaginer un enfant de dix ans, handicapé, se transformer soudainement en Nikki Lauda pour reprendre l'expression de Belli?
Derrière l'outrance et l'absurde se cache tout de même un certain discours. Outre l'habituelle apologie des méthodes expéditives qui font se confondre flics et voyous, l'explosion de toute règle et morale, Caiano semble tenter une forme d'héroïsation des flics ou plus exactement des agents spéciaux présentés ici comme de vrais combattants qui luttent non pour prétendre à un quelconque titre de gloire mais pour simplement assurer aux citoyens un avenir meilleur si cela est toutefois encore possible. A chaque instant de leur vie ils jouent
avec l'illégalité, le danger, pour finalement se faire tuer et finir dans l'anonymat le plus complet puisqu'ils mourront oubliés quelque fut leur action. Pour le metteur en scène l'agent spécial est un monument de force et de justice, d'honnêteté et surtout d'altruisme, autant de qualités qui ne paient pas et s'avèrent vaines. C'est sur l'image de Belli portant dans ses bras le cadavre de Gennarino que se conclura le film, un final glacial qu'on ne se permettrait plus aujourd'hui mais qui en soi annonce un avenir bien pessimiste en brisant l'espoir que sont ces modèles de justice. C'est par contre une certitude pour le spectateur de ne plus revoir ce Gavroche napolitain. Le voilà tranquille!
Si on pourra regretter le choix du fade Leonardo Mann dans le rôle de Belli, toujours aussi peu charismatique, trop lisse, malgré son cigare et l'énergie qu'il déploie à courir et se battre, on savourera une distribution trois étoiles avec en tête d'affiche Henry Silva, excellent comme d'habitude, qui de surcroit trouve ici une des morts les plus gore de sa carrière, copieusement écrasé par un train, entouré de toute une pléthore de gueules du cinéma Bis dont Massimo Vanni, Adolfo Lastretti, Maurizio Mattioli et quelques noms venus en simple figuration tels que l'ineffable bellâtre du roman-photo Jeff Blynn et Ida Galli, version coupe grand-mère, une des plus vilaines qu'elle ait arboré de toute sa carrière. C'est toujours le
petit Massimo Deda, fils de l'acteur générique éphémère Mario Deda également présent au générique, qui interprète Gennarino, plus potelé et en possession cette fois de toutes ses dents. Après avoir été à l'affiche de Onore e guapparia Massimo apparaitra une dernière fois à l'écran aux cotés de Marc Porel dans le rarissime La pagella, un polar sombre signé Tiziano Longo avant de disparaitre définitivement à l'instar de son père.
Assaut sur la ville en dépit de ses faiblesses et limites scénaristiques et ses invraisemblances est une pure distraction, explosive, nerveuse, efficace, drôle et méchante, sans limite, un mets de choix pour amateur de gratuités et de violence exacerbée qui y trouveront tout ce qu'ils attendent d'un bon petit polar d'exploitation à l'italienne. Ni plus ni moins.