Quando Marta urlo dalla tomba
Autres titres: La mansion de la niebla / The murder mansion / Manic mansion
Real: Francisco Lara Polop
Année: 1972
Origine: Espagne / Italie
Genre: Thriller / Epouvante
Durée: 87mn
Acteurs: Ida Galli, Analia Gadè, Lisa Leonardi, Alberto Dalbes, Eduardo Fajardo, Yelena Samarina, Franco Fantasia, George Rigaud, Andres Resino, Ingrid Garbo, José Luis Velasco, Saturno Cera, Emilia Rubio...
Résumé: Perdues dans un épais brouillard qui s'est abattu sur la campagne, un groupe de personnes qui étaient plus ou moins entrées en contact quelques heures auparavant se voient contraintes de passer la nuit dans un sinistre manoir qui se dresse près d'un cimetière abandonné. La jeune propriétaire, Marta, leur offre l'hospitalité après leur avoir conté la malédiction qui pèse sur les lieux. Sa tante a trouvé la mort 30 ans plus tôt lors d'un accident de la route qui couta également la vie à son chauffeur. Leur spectre hanterait désormais la demeure. Ils ne vont tarder à apparaitre à chacun des invités qui seront tour à tour mystérieusement assassinés...
Première réalisation de l'ex-directeur de production espagnol Francisco Lara Polop, Quando Marta urlo dalla tomba appartient à la catégorie de films qui tentèrent avec plus ou moins de bonheur de s'engouffrer dans le riche filon du giallo qui était alors à son apogée. Le plus souvent coproduits avec l'Italie, ces thrillers ibériques reprenaient minutieusement tous les codes du genre sans grande imagination, se contentant d'imiter sans jamais égaler le modèle original. Quando Marta urlo dalla tomba ne déroge pas à la règle. C'est cette fois vers les deux gialli de Emilio Miraglia, La dama rossa uccide sette volte et surtout La notte che Evelyn usci dalla tomba, que le film de Polop se rapproche le plus. On est ici face à un thriller gothique où le surnaturel semble le plus souvent l'emporter sur le rationnel jusqu'au rebondissement final où chacun des terribles évènements que les différents protagonistes auront vécu dans ce manoir perdu au milieu de nulle part trouvera une explication bien naturelle comme en réclame tout bon giallo.
Suite à divers incidents dus à un épais brouillard, un groupe de personnes venues de différents horizons se sont égarées en pleine nuit dans la campagne. Elles se retrouvent toutes dans un inquiétant manoir situé près d'un cimetière. Toutes ont un point commun: celui de s'être déjà rencontrées auparavant pour diverses raisons mais également d'avoir des vies dissolues. Sont ainsi regroupés Elsa, une belle névrotique hantée par le souvenir de son père, la petite amie de Fred, un jeune motard rebelle qui se dispute une jolie auto-stoppeuse avec un vieux bourgeois coureur de jupons, un avocat et son épouse... La propriétaire des lieux, Marta, les accueille. Sa vieille tante est décédée trente ans auparavant dans un accident de voiture qui causa aussi la mort de son amant et du chauffeur. Son fantôme hanterait désormais les lieux. Le village le plus proche est aujourd'hui abandonné suite à une série de mystérieux meurtres qui ont suivi la tragédie. Les villageois sont en effet persuadés que ces crimes sont l'oeuvre du spectre de la vieille femme dont Marta est le parfait sosie. Durant cette longue nuit, le fantôme de la tante et du chauffeur apparaitront aux invités qui seront tour à tour assassinés.
Ce qu'on retiendra avant tout de Quando Marta urlo dalla tomba ce n'est certes pas son scénario somme toute classique mais bel et bien l'atmosphère que Polop tente de créer à travers un décor des plus lugubres où on retrouve quasiment tous les éléments du cinéma d'épouvante gothique: un manoir perdu au milieu d'une campagne envahie par un épais brouillard, un vieux cimetière abandonné, les apparitions fantomatiques de la vieille femme et de son chauffeur, les ombres dans le brouillard qui ici devient presque un personnage à part entière du film, le portrait austère de la tante et les horribles tableaux diaboliques qui ornent les murs et semblent menacer les invités, les cryptes humides, des décors lugubres tout spécialement soignés admirablement bien photographiés. Polop se permet même de
reprendre une certaine imagerie propre aux légendes populaires au détour de quelques séquences notamment celle où deux des protagonistes croisent sur la route une silhouette noire encapuchonnée portant une faux, funeste symbole de la mort qui les attend, qui se révèlera n'être qu'un simple paysan avançant dans cette incroyable purée de pois. En alternant les tons bleus (les extérieurs et les vêtements que portent Marta et Elsa) et orangés (l'intérieur du manoir), le cinéaste crée un contraste visuel saisissant qui d'une certaine manière délimitent le réel du surnaturel tout comme il aime faire glisser de façon habile le présent vers le passé lors de jolis flashes-back. On est parfois proche d'un certain onirisme, un fantastique que Polop veut subtil. Les procédés sont simples, particulièrement esthétiques mais sont ils efficaces?
Efficacité ne rime pas forcément avec beauté et cela se confirme malheureusement ici. Malgré des efforts louables, Polop use et abuse des grosses ficelles du genre sans jamais arriver à rendre effrayante cette histoire, à créer une atmosphère réellement angoissante, prenante ou même fascinante. La musique de Marcello Giombini faite d'orgues et de violons auxquels se mélangent des cris, des rires et d'étranges bruits rappelle bien entendu les meilleurs moments des films d'horreur d'antan mais elle ne parvient pas non plus vraiment à rendre inquiétant les lieux. A quoi peut être du cet échec? A un rythme quasi inexistant, une narration trop en déséquilibre qui fait la part belle à l'action et aux effets sanglants uniquement lors des vingt dernières minutes, une mise en scène beaucoup trop plate mais surtout à la grossièreté des moyens employés. A aucun moment le scénario ne parvient à être vraiment crédible tant la supercherie semble énorme. Les apparitions de la tante et du chauffeur zombifié dés la seconde partie du film prêtent plus à sourire qu'elles n'effraient tant elles sont artificielles, peu aidées par des maquillages peu convaincants. L'effet surnaturel ainsi balayé ne reste plus au spectateur qu'à découvrir, l'oeil rieur, l'identité du ou des coupables et leurs motivations. Mais là encore, la déception est au rendez-vous. C'est un peu surpris qu'on assistera aux jetés de masques et autres révélations lors d'un final un brin précipité assez invraisemblable.
L'interprétation trop transparente d'une distribution d'où aucun comédien n'émerge réellement n'aide guère à rehausser l'ensemble. Peu attachants les protagonistes font simplement ce qu'ils ont à faire, peu convaincants et convaincus, multipliant les actes incohérents dans leur démarche héroïque. Voilà peut être où se cache le véritable coté surnaturel du film de Polop! Seule Analia Gadé dans le rôle de la fragile Elsa parvient à donner à son personnage une certaine épaisseur, une certaine émotion qu'on aurait aimé retrouver chez ses partenaires. On sera tout de même heureux de retrouver parmi les invités Eduardo Fajardo, les yeux revolver du regretté Andres Resino qu'on retrouvera aux cotés de Gloria Guida dans La lycéenne découvre l'amour puis chez l'indigeste Jess Franco pour
son risible Quartier de femmes. Ida Galli alors en pleine période giallo endosse quant à elle la peau de la troublante Marta.
Malgré ses défauts et l'invraisemblance du scénario, Quando Marta urlo dalla tomba n'est cependant pas un mauvais film. On se laissera séduire par son esthétisme, sa beauté visuelle, certains parmi les plus émotifs seront sensibles à certains effets qui leur procureront quelques doux frissons. Ce premier essai de Polop en tant que metteur en scène est un petit thriller gothique dans le plus pur style espagnol d'alors, un simple divertissement d'épouvante qui à défaut d'être crédible fera passer un agréable moment aux amateurs pour le peu qu'ils ne soient pas trop difficiles. Reconnaissons tout de même qu'on a vu bien pire du coté de nos amis transalpins. Il serait donc dommage de bouder notre plaisir et de rater ce rendez-vous que nous donne Marta en son sinistre manoir.