Sabrina Siani: Une guerrière de charme
Si dans le cinéma de genre transalpin beaucoup d'acteurs et actrices se sont essayés à de nombreux genres, certains ont bâti leur réputation sur un seul en devenant son digne représentant. Il en va ainsi de la blonde Sabrina Siani dont on se souvient surtout pour ses prestations de solide guerrière dans la plupart des films d'Heroic-fantasy all'italiana maniant avec dextérité l'épée et la massue. Stéréotype même de la combattante acharnée qui allie force et charme, elle fut un temps la réplique féminine d'une Sandhal Bergman avant d'être la copie conforme d'une Brooke Shields pour quelques bluette marines. Pourtant Sabrina en quelques dix ans de carrière est apparue dans de nombreux autres films, du polar à la sexy comédie en passant par le film d'aventures, avant de définitivement décrocher en 1988 et de se retirer des feux de la rampe. Il est grand temps de retracer le parcours cinématographique de cette jeune comédienne à la mine boudeuse qui fut particulièrement célèbre en Allemagne.
Si vous prononcez le nom de la Belle en Italie, on vous répondra sûrement cet argument coquin: Sabrina! Si! bionda, piccolissime tette ma quel grande culo! Reconnaissons le, Sabrina apparaissait le plus souvent en tenues plus que réduites, dévoilant sa parfaite anatomie dont la poitrine devait se classer en mensuration juste après celle de Jane Birkin!
Née en 1963 à Ostia, à Rome, Sabrina Siani, de son véritable nom Sabrina Seggiani, débuta à l'âge de 15 ans comme mannequin et modèle pour divers magazines et autres concours, poussée par sa mère qui a toujours caressé le doux rêve de faire de sa fille une star. La chance va très vite sourire à l'adolescente. Alors qu'elle est en vacances avec sa mère elle croise un producteur qui la remarque et lui fait signer de suite un contrat. A tout juste 16 ans, Sabrina fait donc une apparition musclée dans le polar de Alfonso Brescia, Napoli... la camorra sfida la città risponde avec Antonio Sabato et Mario Merola puisque la malheureuse sera brutalement violée dans une voiture sous les yeux de son petit ami. La carrière de Sabrina est lancée. Suivra une gentille sexy comédie, tonique et vivifiante de Marino Girolami, Dove vai se il vizietto ce l'hai? / Le trou aux folles avec Paola Senatore et Lory Del Santo. Il y interprète la fille de Mario Carotenuto.
Elle retourne ensuite au polar. Elle retrouve Alfonso Brescia pour Les contrebandiers de Santa Lucia dans lequel elle joue Lucy aux cotés de Antonio Sabato, Gianni Garko et Lorraine De Selle. Si son personnage ne fait une fois encore qu'une brève apparition on ne risque cependant guère de le rater puisque Sabrina est la jeune épouse de l'interminable et très dansante séquence de mariage. Sabrina termine cette année 1979 chargée dans l'unique film de cannibales qu'elle tournera, un des pires du genre Mondo cannibale de Jesus Franco. Plus monolithique et inexpressive que jamais, Sabrina semble réellement se demander ce qu'elle est venue faire dans ce désastre que rien ne sauve de la catastrophe. Ne blâmons pas la belle enfant car même le plus talentueux des acteurs n'aurait rien pu faire face à un tel vide pelliculaire. Quant à Franco il affirmait que Sabrina était une des pires actrices avec qui il avait du travailler.
Dés 1980, Sabrina Siani également connue sous les pseudonymes de Sabrina Sellers,
Sabrina Syan ou Diana Roy, va enchainer quelques comédies sexy, un genre qui lui sied à merveille au vu de sa beauté et de son charme. C'est ainsi qu'on peut la voir et l'admirer entre 1980 et 1981 dans La liceale al mare con l'amica di papà de Marino Girolami aux cotés de Marisa Mell, La dottoressa preferisce i marinai / La zézette plait aux marins de Michele Massimo Tarantini auprès de Paola Senatore et Bruno Minniti avec qui elle vivra une brève historiette d'amour à cette époque, L'esercito più pazzo del mondo toujours de Girolami ou encore Pierino medico della S.A.U.B de Giuliano Carnimeo.
En 1982 après un fade remake du Lagon Bleu intitulé Due Gocce d'acqua salata/Blue island réalisé par Luigi Russo où Sabrina reprend le rôle de Brooke Shield, l'actrice tourne pour Umberto Lenzi, Incontro nell'ultimo paradisio, un petit film d'aventures exotiques où elle
retrouve une fois de plus le rôle qu'elle avait dans Mondo cannibale, celui d'une jeune fille vénérée par une tribu indigène qui la prend pour une déesse. Deux étudiants amateurs de sensations fortes perdus dans cette jungle vont alors tenter de la libérer. Sous un scénario de Giovanni Lombardo Radice, Lenzi signe un petit film d'aventures mélangeant la comédie salace et le film d\aventures exotiques qui tourne court tant l'ensemble est fade.
C'est alors que la carrière de Sabrina va prendre un nouveau tournant. En effet, pendant presque deux ans, de 1982 à 1984, la belle romaine va incarner avec succès l'Amazone de rêve, la guerrière aussi charmante que redoutable, dans une multitude de films d'Heroic fantasy que l'Italie ne se priva pas de réaliser suite au succès phénoménal de Conan le barbare. Ce type de personnage n'est qu'une extension de ce qu'elle est dans la vraie vie. Sabrina est en effet une sportive émérite qui pratique l'équitation, le tir à l'arc, le judo et le karaté, des disciplines qui lui donnent ce corps de réve et cette grâce de combattante. Tourner dans de tels films ne lui fait donc pas peur.
C'est Joe D'Amato qui va ouvrir le bal avec Ator the fighting eagle/ Ator l'invincible certainement le plus réussi et le plus agréable des ersatz du film de John Millius. Sabrina y est Roon, vaillante amazone qui se battra aux cotés de Miles O'Keefe pour vaincre le mal. Elle enchaine avec Gunan il guerriero de Franco Prosperi. Sabrina y a pour partenaire Pietro Torrisi dans rôle titre. Aux cotés de Sabrina, on y retrouve la plantureuse Malisa Longo et Rita Silva. Elle retrouvera d'ailleurs Franco Prosperi en 1983 pour Il trono di fuoco / The throne of fire toujours avec Pietro Torrisi. Cette fois elle est la princesse Valkiri qui doit combattre les forces de Satan et d'une sorcière fort peu loquace. Elle enchaine avec le mésestimé
Conquest de Lucio Fulci. Elle incarne Ocron, la déesse d'or. Voilà un rôle plutôt ingrat puisqu'elle y apparait masquée durant tout le film mais ses petits seins la trahissent! Le sympathique et plutôt réussi Sangraal, la spada di fuoco / L'épée de feu de Michele Massimo Tarantini toujours avec Pietro Torrisi bouclera la boucle et Sabrina va y incarner pour la dernière fois une belle princesse. De sabrina, Tarantini garde un assez bon souvenir, celui d'une jeune fille sympathique un peu acerbe mais professionnelle. Il garde par contre un souvenir plus mitigé de sa mère qui l'accompagnait sur tous les tournages, la suivait comme son ombre. C'était une femme étrange qui était également son agent et manager. Elle menait d'une main de fer la carrière de sa fille, exigeait sans cesse qu'elle soit mise en avant et veillait à ce qu'elle soit le plus souvent dévêtue dans ses films. Là où beaucoup de parents veillaient à l'intégrité de leur progéniture, sa mère la poussait à se déshabiller, fière de son enfant chérie.
Après avoir donné ses lettres de noblesse féminines à l'héroic fantasy à l'italienne, Sabrina s'essaie à un autre style cinématographique très en vogue également en ce milieu d'années 80, le post nuke. Elle est la principale protagoniste féminine dans l'original 2020 texas gladiators / Anno 2020 i gladiatori del futuro de Joe D'Amato, un western post atomique assez réjouissant qui réunit Al Cliver, Al Yamanouchi et l'infatigable Donald O'Brien. Amaigrie, le visage émaciée, elle apparait ensuite dans l'intéressante coproduction coréenne Missione finale, un film d'aventures explosif signé Pierluigi Ciriaci. Elle y joue la brutale et jalouse petite amie du non moins brutal Mark Gregory. C'est avec surprise qu'on la verra par la suite dans la mauvaise comédie de Dino Risi, Le bon roi Dagobert avec Coluche, sa seule et unique tentative malheureusement ratée de travailler avec un cinéaste de renom. Parallèlement à sa carrière d'actrice, Sabrina fera tout au long des années 80 la une de nombreux magazines et posera pour bon nombre de revues en Italie notamment pour Blitz et Skorpio dans laquelle on la verra régulièrement, plus affriolante et sexy que jamais.
Par la suite, Sabrina va se faire plus rare sur les écrans. Tout en fourrure, elle tient le rôle d'une jeune et riche bourgeoise dans la comédie musicale démente de Ciro Ippolito Uccelli d'Italia. Le temps d'une longue séquence coquine, elle offre à son fiancé un joli strip-tease pour lequel elle sera récompensée par un énorme saucisson! On ne la reverra qu'en 1987 lors d'une brève apparition dans Palla al centro une comédie anodine de Federico Moccia. Stelvio Massi lui offre ensuite un petit rôle muet dans le polar Black cobra avec le vétéran Fred Williamson. Elle interprète la fille kidnappée de Maurice Poli.
C'est ainsi que se termineront quasiment dix années d'aventures cinématographiques pour la jolie blonde, lasse de ce métier mais aussi victime comme beaucoup de la lente agonie du cinéma de genre transalpin. Sabrina après une ultime et brève apparition dans les mini-séries télévisées Desperatamente Giulia de Enrico Maria Salerno et Classe di ferro met un terme à sa carrière de comédienne à seulement 25 ans afin de se consacrer désormais à l'homme qu'elle aime. Sabrina se marie puis disparait du devant de la scène durant plus d'une décennie. L'ex-guerrière de charme réapparaitra cependant dans les années 2000 en bonne jet-setteuse qu'elle est dans les endroits branchés de la capitale et à poser pour des photos explosives toujours très classieuses. A 53 ans, Sabrina toujours aussi peroxydée a gardé sa silhouette de jeune fille qu'elle entretient férocement et ce visage si facilement reconnaissable même si on regrettera malheureusement le recours intempestif au botox.
Sabrina restera pour nous l'incarnation de la guerrière, la femme forte et redoutable, la seule et unique version féminine italienne de nos héros musclés qu'elle sut si bien interpréter le temps de quelques films, un mythe féminin, et comme tout mythe il est éternel.