Dirce Funari: une si belle et timide étoile filante
Le regard bovin mais des yeux magnifiques, un visage angélique et la mine boudeuse, un corps de rêve, qui ne se souvient pas de la brune Dirce Funari, cette jeune et audacieuse actrice qui ensoleilla le cinéma érotique tendance osé dés la fin des années 70 notamment celui de Joe D'Amato dont elle fut une des actrices fétiche. Mais qui se cachait donc derrière cet étrange prénom à la fois si charmant et exotique? Levons le mystère sur l'une des plus discrètes comédiennes du cinéma érotique des années 70.
Dirce Funari de son vrai prénom Dirce Patrizia Funari est née à Rome le 24 juillet 1957. Son enfance est marquée par un drame, celui du décès de son père emporté par un cancer qui laisse sa mère et son frère dans la précarité. Elle doit quitter le lycée. A cette époque elle accompagne une amie à un casting, celui de Remo e Romolo. Son amie n'est pas retenue mais Dirce décroche un rôle de figurante auprès de Bombolo. Nous sommes en 1976. Elle comprend vite que le cinéma peut rapporter beaucoup d'argent. Ainsi sa mère ne serait plus obligée de travailler pour faire vivre sa famille. La jeune fille va apparaitre dans quelques films, toujours en tant que simple figurante. On l'entraperçoit dans I padroni della citta de Di Leo ainsi qu'aux cotés de Maurizio Merli. On la voit brièvement dans Carrière dans d'une femme de chambre où elle est aussi la doublure de Agostina Belli. Parallèlement à ses furtives apparitions cinématographiques Dirce est aussi modèle et pose pour de célèbres magazines dont Vogue. Passionnée de danse elle ne passe pas inaperçue au Jackie O, une célèbre discothèque de Rome. Elle va jusqu'à s'inscrire dans une école pour prendre des cours de danse.
C'est à l'automne 1976 qu'elle décroche son tout premier vrai rôle au cinéma. Alfredo Rizzo lui propose d'interpréter un des principaux personnages de son prochain film I peccati di una giovane moglie di campagna, une comédie érotique campagnarde dont une version X destinée au marché étranger sera mise en circulation. Visiblement très à l'aise Dirce, les cheveux très courts, y a déjà quelques insolents nus tant dorsaux que frontaux, parfaite dans la peau d'une jeune citadine émancipée, libre d'esprit.
Après une brève apparition en 1978 dans Un'ombra nell'ombra de Pier Carpi, elle joue une des sorcières qu'on aperçoit au début du film, c'est Joe D'Amato qui va la lancer sur la rampe du succès et en faire une de ses actrices fétiche. Il lui offre d'abord un petit rôle dans Il ginecolo della mutua aux cotés de Paola Senatore et Lorraine De Selle.
Elle apparait plus que furtivement, véritable cameo, au début de Emanuelle e gli ultimi cannibali / Emanuelle et les cannibales, même si mystérieusement elle n'est pas créditée au générique. Elle fait également une petite apparition dans Eva Nera / Voluptueuse Laura.
Un rôle plus consistant lui est proposé dans Suor Emanuelle / Emanuelle et les collégiennes réalisé par Giuseppe Vari dans lequel elle a une belle et torride scène saphique agrémentée d'une banane. Aux cotés de Laura Gemser, Dirce interprète dans cette amusante aventure de notre éternelle Black Emanuelle la belle-mère de la splendide Monica Zanchi. Le film boucle ainsi une année 1977 bien chargée pour la jeune actrice qui s'apprête à vivre une année 1978 tout aussi remplie.
C'est avec Alberto Cavallone qu'elle débute cette nouvelle année. Elle tourne sous sa direction Blue movie, une rencontre et un rôle traumatisant pour la jeune fille qui faillit être dégoutée du cinéma selon ses propres aveux. Dirce est en effet dans ce film le jouet sexuel d'un photographe dément qui l'humilie et la tient enfermer nue dans une cage au milieu de ses excréments afin de l'anéantir tant moralement que physiquement.
Suite à ce très curieux film Dirce va se spécialiser bien plus par le hasard des choses que par la volonté de son agent d'alors dans l'euro-trash, le sex and violence movie. On la retrouve ainsi dans l'implacable Violez les otages / Le evase, storie di sesso e violenza de Giovanni Brusatori, un film froid au casting brillant puisqu'il regroupe une pléiade de starlettes alors montantes du cinéma de genre dont Lilli Carati, Ines Pellegrini, Marina D'Aunia et Zora Kerowa. Dirce interprète Claudine, la jeune fille vierge que Marina D'Aunia initiera de force au lesbianisme.
Suivront le rape and revenge Midnight Blue de Raimondo Del Balzo où elle est l'accompagnatrice de l'équipe féminine d'athlétisme, un des rares films voire le seul où elle n'a aucune scène de nu, et Hard sensation de Joe D'Amato qui traite une fois de plus des sévices sexuels que vont subir cinq jeunes filles lorsque trois voyous échappés de prison les retiennent en otages. Une copie hard circulera à l'étranger pour laquelle Dirce ne participa pas bien entendu.
Au milieu de ce tourbillon de violence sexuelle elle trouve tout de même le temps d'avoir un petit rôle bien plus "normal" dans la série française Joséphine ou la comédie de l'ambition avec Danièle Lebrun et Daniel Mesguich où elle joue Elisa Bonaparte. En 1979 elle fait la page centrale du magazine de charme Playmen.
A partir de 1979 la belle brunette va apparaitre dans la quasi totalité des films de D'Amato, pour la plupart des films érotiques parfois aux limites du hard où Dirce s'exhibe toujours nue dans des situations extrêmes comme l'ennuyeux Porno holocaust où elle subit une fellation forcée par un être difforme au pénis démesurément gigantesque. Long et parfaitement insipide, le film est surtout prétexte à montrer de sublimes paysages côtiers exotiques, lieux enchanteurs qui servent de décors à de longues séquences hardcore répétitives entrecoupées de dialogues interminables jusqu'à l'apparition grotesque du monstre muni d'un faux sexe en latex.
Si dans la plupart de ses films lors des scènes hardcore Dirce a toujours simulé lorsqu'elle n'était pas doublée, criant haut et fort qu'elle refusait de franchir le cap de la pornographie, ses affirmations furent souvent sujet à controverse. En effet dans Blue movie elle joue elle même les scènes hardcore qui ne figurent pas dans la version courante du film mais sont visibles dans la version super 8 soit une fellation et une très longue masturbation qui conduira son partenaire à l'éjaculation. Ces contradictions, cette fausse vertu provoqua souvent la colère de D'Amato qui ne comprenait pas l'attitude de Patrizia.
Elle enchaine avec Le notti erotiche dei morti viventi / La nuit fantastique des morts-vivants, toujours de D'Amato, aux cotés de Laura Gemser, le pornophile Mark Shanon et Luigi Montefiori. Dirce a deux des scènes les plus audacieuses de sa carrière, celle où elle se masturbe de face devant Montefiori et celle où elle fait une fellation à Mark Shanon en sortant de la douche. Mark se souvient lui aussi très bien de Patrizia. Une fille charmante, gentille, discrète au corps parfait. Ce fut pour lui particulièrement frustrant de n'avoir jamais pu jouer avec de scène hardcore réelle avec elle. "Ca restera un fantasme" avoue t-il de façon coquine.
Luigi Montefiori a toujours été impressionné par la jeune actrice. Aujourd'hui encore il s'en souvient très bien. Il se demande encore comment une fille si discrète et timide a pu faire de tels films et surtout pu tourner de telles scènes. Pour lui, Dirce n'avait pas sa place dans ce monde. Elle était trop innocente, trop gentille et ingénue. Il le lui a souvent dit à cette époque et n'a jamais compris pourquoi elle continuait à s'investir dans de telles productions, un avis partagé par Laura Gemser qui se souvient d'elle comme d'une fille si gentille et discrète. Toujours selon Luigi, Patrizia dont jouer la comédie n'était pas le métier s'ennuyait fermement sur les plateaux de tournage.
On la verra une dernière fois en 1979 dans Porno esotic love du même D'Amato avant qu'elle ne décide de tout arrêter pour se marier. Son union ne durera qu'un an. Dirce se trouve trop jeune pour le mariage. Elle n'est pas prête à vivre une vie de femme rangée à seulement 24 ans. Après son divorce Dirce reprend le chemin des studios. Elle fait une apparition non créditée dans Horrible où elle est la femme qu'on aperçoit dans l'émission que les protagonistes sont censés regarder puis se retrouve au générique d'oeuvres mineures et sans grand intérêt comme la comédie érotique de science-fiction Quello strano desiderio / Désirs inassouvis de Enzo Millioni aux cotés de la star du porno Marina Frajese. C'est pour Dirce le commencement de la fin. La jeune actrice commence par se sentir dégoutée et fatiguée du cinéma et de cette ambiance qui l'entoure sur les plateaux. Sa carrière n'avance pas, elle semble même reculer.
En 1982, elle apparait dans l'inénarrable érotico-giallo Delitto carnale de Cesare Canevari en femme battue, un mauvais thriller sans réel scénario essentiellement prétexte à une multitude de scènes hard avec une Moana Pozzi encore inconnue. On la voit encore très rapidement au générique de Déchainement pervers de Manuela / Emanuelle's perverse outburst de Joe D'Amato avec encore Laura Gemser, Gabriele Tinti et Annj Goren dont elle fut une amie proche. Ce film n'est en fait qu'un montage de plusieurs films du réalisateur n'en faisant ainsi plus qu'un Voilà qui explique la présence de l'actrice au générique.
Sa dernière apparition au grand écran, elle la fera dans Il cavaliere, la morte, il diavolo de Beppe Cino où elle y a un minuscule rôle.
En 1985 Dirce déclare être fatiguée de devoir continuer à jouer toujours nue, lasse de ce métier dans lequel elle stagne. Elle décide de tout arrêter. Dans la foulée elle se marie et divorce très vite. Elle va alors s'affairer à d'autres activités mais toujours en rapport avec le monde du 7ème art. A sa grande surprise le public italien voit à la fin des années 80 son nom crédité aux génériques de diverses émissions télévisées en tant que maquilleuse. Elle travaillera également un temps dans les coulisses de la RAI et au théâtre.
Discrète, Patrizia a depuis refait sa vie. Elle a repris le chemin des études, est sortie diplômée des Beaux-Arts. Elle a toujours beaucoup aimé la peinture, le dessin. Elle est heureuse de sa nouvelle vie mais aussi de sa nouvelle orientation. Patrizia s'est également remariée et s'est appelée un temps Patrizia Stochetto mais elle a de nouveau divorcé, déclarant avec humour que le mariage n'était pas fait pour elle. Au fil des décennies la jeune fille timide est devenue une véritable femme, heureuse et accomplie qui à longtemps résidé dans un paisible quartier de Rome, anonyme, avant de définitivement s'installer à La Gomera, une des nombreuses iles des Canaries.
A la grande surprise des téléspectateurs italiens Patrizia était
réapparue sur la chaine Mediaset le 24 avril 2002 dans la très populaire
émission Forum, les cheveux désormais longs et détachés, vêtue d'un
tailleur sombre, dans le rôle d'une cliente d'une laverie automatique
venue se plaindre à la propriétaire. Aujourd'hui depuis maintenant de longues années Patrizia est professeur de yoga. Très à la page elle donne des cours par Internet, un travail à plein temps qu'elle adore. Patrizia ne renie en rien son passé d'actrice dont elle parle avec plaisir même si elle n'a pas que des bons souvenirs des films et des réalisateurs avec qui elle a travaillé.
Le Maniaco vous offre en exclusivité une des rares photos récentes de Dirce prise en 2007.