Franca Gonella: quand la passion du cinéma se fait virtuelle
Elle fut une des égéries de la comédie polissonne à l'italienne des années 70, une de ces charmantes lolita qui illuminèrent les écrans de cinéma à travers toute une pléthore d'oeuvres coquines qui forme la majeure partie de sa filmographie qui s'étala sur quasiment vingt ans. Après une tentative de reconversion dans le cinéma d'auteur, la blonde mutine mit un terme à sa carrière pour mieux rebondir dans une toute autre voie, l'univers étrange de la réalité virtuelle. Beaucoup plus terre à terre est l'histoire que le Maniaco se propose de vous narrer sans plus attendre, celle de cette charmante comédienne au caractère bien trempée, la délicieuse Franca Gonella.
Franca est née à Turin le 29 février 1952. Après des études studieuses, elle s'inscrit à l'université de lettres modernes et tente de s'orienter dans un premier temps vers des études d'archéologie. Trop rebelle, elle change de direction pour finalement s'inscrire en histoire du cinéma et du théâtre. A travers les séminaires auxquels elle assiste, sa passion pour l'histoire du cinéma ne fait que croitre. Tout en poursuivant ses études de manière fort sérieuse, Franca, dés l'âge de 14 ans, va enchainer les petits boulots. Elle est ainsi modèle pour de nombreux salons à Turin ou encore hôtesse au salon de l'automobile.
Elle sort finalement diplômée en histoire du cinéma et dés 17 ans Franca commence à monter sur les planches. C'est avant tout le théâtre qui l'intéresse. Elle aime le cinéma mais uniquement en tant que spectatrice. Elle écume ainsi les scènes de Turin et part régulièrement en voyage. Jeune, enthousiaste, libre, Franca adore cette vie de saltimbanque.
C'est un pur hasard qui un jour lui fit pénétrer le monde du 7ème art. Elle jouait Oreste en Sicile aux cotés entre autre du comédien Pino Ferrara dont le rêve était alors de faire du cinéma. Il lui présenta Mariano Laurenti qui cherchait alors des acteurs pour son prochain film Cerca a capirmi. Pino ne fut pas pris mais Franca fut choisie par Laurenti malgré ses réticences. C'est ainsi que la jeune fille fit ses débuts à l'écran dans un petit rôle. Tout alla alors très vite. Franca se spécialise dans la comédie à l'italienne et c'est dans la décamérotique, un genre alors fort en vogue, qu'elle fait ses véritables premiers pas. On la voit ainsi successivement dans trois d'entre eux E si salvò solo l'Aretino Pietro con una mano avanti e l'altra dietro, L'Aretino nei suoi ragionamenti sulle cortigiane, le maritate e... i cornuti contenti, Quando i califfi avevano le corna. Alors très jeune, Franca était le plus souvent considérée comme la mascotte de l'équipe sur ce type de films confesse t-elle aujourd'hui. Si ce ne sont jamais de grands rôles, cela suffit cependant à Franca à se faire une place au soleil. Sans être forcément ravie des personnages qu'on lui propose, l'actrice avoue qu'elle s'amuse bien sur les plateaux, elle est heureuse, la vie est belle et elle gagne plutôt bien sa vie grâce à toutes ces comédies légères.
Elle est au générique de Rosina Fumo viene in città... per farsi il corredo aux cotés de Ewa Aulin et Hiram Keller, elle fait une brève apparition dans Rivelazioni di uno psichiatra sul mondo perverso del sesso de Renato Polselli avant d'être à l'affiche de Zelda de Alberto Cavallone dont elle garde un très bon souvenir. Elle atteint en 1975 son statut de sexy star avec La bolognese / Caresses à l'italienne de Alfredo Rizzo, un film qu'elle n'aurait pas du tourner. L'actrice devant jouer le rôle principale ayant quitté le plateau, son agent lui proposa de reprendre le rôle. Franca avoue avoir hésité car selon elle, elle n'était pas faite pour interpréter ce personnage d'adolescente en fleur. Mais son agent insista. Elle dut donc accepter, peu convaincue, et cela se ressent durant tout le film. Franca, trop mature pour ce personnage, échoue là où certaines de ses consoeurs explosaient littéralement.
Franca va continuer dans le registre de la comédie coquine durant pratiquement dix ans. On la voit entre autres dans Una vergina in famiglia avec Gianni Dei et Campagnola bella tous deux de Mario Siciliano qui croyait beaucoup en elle, Cugine mie de Marcello Avallone, Verginita / Amore e morte tourné en Bulgarie, Orazi e Curiazi 3-2 de Giorgio Mariuzzo auprès de Gloria Guida, l'audacieux film à sketches La bella e la bestia de Luigi Russo, Amore all'arrabbiata avec Ninetto Davoli ou encore La bravata avec Ajita Wilson et Franco Garofalo. Elle tourne également en Turquie La grande châtaigne et Mettetemi in galeria, deux comédies avec la star turque Cüneyt Arkin. Franca garde un excellent souvenir de ses séjours en Turquie, un pays fabuleux où il était si facile de tourner dit elle. Quant à Cüneyt Arkin, c'était comme si aujourd'hui une actrice devait tourner face à Brad Pitt dit-elle malicieusement. Elle y tournera également un western parodique, Sparo col calcio mi chiamo Garringo / Che carambola raggazzi. Franca sera également à l'affiche d'un film d'épouvante satanique raté signé Salvatore Bugnatelli Diabolicamente Letizia et d'un des joyaux de l'euro-trash, l'excellent I violenti di Roma bene / La nuit des excitées de Sergio Grieco. Elle retrouve Magda Konopka pour l'intrigant film de science-fiction La casa de l'espagnol Angelino Fons. Elle finira la décennie en étant au générique du premier film de Arduino Sacco, le très étrange et fascinant road movie aujourd'hui bien oublié Rand rover__.
C'est au début des années 80 que Franca va donner un nouveau tournant à sa carrière en changeant totalement de registre. En 1982, elle se tourne vers le cinéma auteurisant après avoir fait la connaissance de Pierre Kast qui deviendra un ami. Elle est ainsi à l'affiche de La guérilla, un film avec Jean Pierre Cassel et Victoria Abril qui représente beaucoup pour l'actrice. Elle retrouvera Pierre en 1985 aux cotés de Jean Sorel et Jean Pierre Léaud cette fois pour L'herbe rouge tiré du roman éponyme de Boris Vian, un autre moment fort dans la vie professionnelle de Franca. Elle avoue que si Pierre n'était pas mort prématurément elle aurait poursuivi sa carrière d'actrice. Pour la télévision italienne elle tourne ensuite au bord
du lac de Garde la mini-série en costumesLa citta di Miriam.
On l'aperçoit encore dans quelques comédies tardives telle que Missione eroica - I pompieri 2 aux cotés de Lino Banfi. Elle est à l'affiche de trois films de Amasi Damiani, L'ultimo giorno, Una storia importante et Odore di spigo qui sera son chant en cygne. Nous sommes en 1990 et Franca décide alors de mettre fin à sa carrière d'actrice après avoir joué dans quelques 80 films tant pour le cinéma que pour la fiction. Une nouvelle vie commence alors pour l'ex-sexy star de la comédie italienne. C'est en effet vers la production qu'elle va
s'orienter tout en mettant à profit ses connaissances en histoire du cinéma. En 1993 elle rencontre l'immense Michelangelo Antonioni et lui propose d'être la productrice exécutive de son prochain court métrage intitulé Noto Mandorli Vulcano Stromboli Carnevale. Il accepta et Franca accompagna le cinéaste en Sicile durant un mois pour le tournage réalisé en hélicoptère. Le documentaire reçut le ruban d'argent. Franca tournera également de nombreux autres courts et spots dans lesquels elle essaye toujours d'apporter un coté fiction. Elle est à l'origine entre autres exemples d'un spot pour l'Enel sur les économies d'énergie, d'un documentaire sur l'illumination artistique des grands monuments, de documentaires d'information sur Venise ou sur le Dôme de Lecce dans les Pouilles. Franca fait aujourd'hui partie de ce qu'on appelle la New economy. A Rome, elle est à la tête de sa propre entreprise informatique spécialisée dans tout ce qui a trait à la réalité virtuelle, un domaine qu'elle a il y a quelques années fait découvrir en Italie. Elle a notamment entrepris de mettre le patrimoine historique italien sous forme virtuelle. Elle propose ses services à divers organismes alliant toujours son amour pour le cinéma à ses projets publicitaires et documentaires.
Franca est une femme heureuse, pleinement épanouie par ses activités qu'elle mène aujourd'hui. Elle garde un merveilleux souvenir de son passage dans l'univers du cinéma, une époque d'insouciance et de liberté durant laquelle elle s'est beaucoup divertie.
Signalons tout de même que Franca n'est pas décédée dans les années 90 comme l'annonçait fut un temps l'Imbd, une nouvelle qui aurait très certainement fait frémir la jolie actrice si elle était venait à la découvrir!