Mimsy Farmer: La plus merveilleuse des névrosées
Si l'éventail de sa carrière ne s'arrête pas uniquement au cinéma de genre transalpin, elle n'en est pas moins une de ses dignes représentantes. Elle prouva au fil du temps son immense talent qu'elle mit au service des plus grands noms du cinéma. Elle restera le symbole de la femme fragile, en proie à ses tourments, victime de ses névroses, ces personnages qu'elle incarna si bien, le plus souvent auréolés d'un érotisme parfois sulfureux. Inoubliable en victime traquée dans le film de Serge Leroy, le Petit Maniaco se devait de rendre hommage à cette grande artiste blonde et mutine: Mimsy Farmer.
Née le 28 février 1945 à Chicago d'un père américain et d'une mère française, Mimsy Farmer de son vrai nom Merle Farmer, quitte très jeune sa ville natale pour Hollywood où son père tient alors une boutique de fleurs. Si Mimsy poursuit ses études, elle devient à 14 ans la partenaire d'un clown avec qui elle donne des représentations. C'est à cette époque qu'un agent la remarque et lui fait faire ses débuts cinématographiques, de la simple figuration notamment dans Gidget goes hawaiian. Elle va par la suite apparaître dans bon nombre de séries télévisées et de films pour enfants telles que The outer limits, Perry Mason, The Donna Reed show, My three sons.
Son premier vrai rôle au cinéma est en 1963 dans The Spencer's mountains aux cotés de Maureen O'Hara et Henry Fonda.
En 1965 elle quitte l'Amérique pour le Canada où durant un an elle va travailler dans un centre de recherches et de thérapie ayant comme principale activité le LSD.
Elle en sort plutôt déçue et retourne aux USA où le cinéma lui tend les bras. Sa chance c'est Les anges de l'enfer de Daniel Haller, une production Corman, où elle interprète une biker. Succès plein pour Mimsy qui apprécie l'expérience et va se spécialiser en cette fin d'années 60 dans les personnages de marginales dans toute une série de films de hippie movies: Hot rods to hell, The wild racers ou encore Riot on sunset strip. Mimsy se plait à tourner car elle voyage. Elle put ainsi aller à Londres visiter son frère ainé, Philip, professeur de mathématiques à l'université.
En 1969 Barbet Schroeder la remarque et lui offre le rôle principal de More. Le film la propulse au sommet de la gloire mais va aussi la cantonner désormais dans des rôles de jeunes fille névrosée.
Alors qu'elle fait un séjour en Italie, elle rencontre Vincenzo Cerami qu'elle épousera et lui donnera une fille, le modèle Aisha Cerami. A cette époque, Mimsy, gauchiste convaincue, fort déçue par les engagements de son pays dans la guerre du Vietnam et perdant toute illusion quant à sa politique, décide de s'installer en Italie. La langue n'est pas un obstacle, Mimsy est trilingue et maîtrise à la perfection l'anglais, le français et l'italien.
C'est Eriprando Visconti qui lui offre son premier rôle au pays de Dante dans sa dispensable adaptation du roman de Jules Verne tournée en Bulgarie Strogoff aux cotés de Hiram Keller. Dés lors, la blonde jeune fille ne cessera plus de tourner. On la voit en 1971 dans le fabuleux La route de Salina aux cotés de Rita Hayworth et Robert walker Jr. Mimsy irradie de beauté, offrant sans pudeur sa nudité à la caméra de Georges Lautner. Elle enchaine avec ce qui sera son film le plus connu des amateurs de gialli, Quatre mouches de velours gris de Dario Argento, excellente dans le rôle une fois de plus d'une femme névrosée et meurtrière.
Elle retrouve ce type de personnage dans le giallo morbide Frissons d'horreur de Armando Crispino et le fascinant thriller fortement inspiré de Rosemary's baby Il profumo della signora in nero / Le parfum de la dame en noir de Francesco Barilli. Entre temps on la voit dans l'ennuyeux essai psychanalytique de Fabio Carpi Corpo d'amore, sauvé par la présence de l'actrice toujours assi fascinante dans ce genre de rôles névrosés, La vità in gioco et Il maestro e Margherita / Le maitre et Marguerite.
En 1973, elle a son premier rôle en français dans Deux hommes dans la ville aux cotés de Alain Delon et Jean Gabin. Elle enchaine avec d'autres grands succès du cinéma d'alors tels que Allonsanfan des frères Taviani, Les suspects de Michel Wyn avec Paul Meurisse et Michel Bouquet.
En 1975 elle est la bouleversante héroïne de La traque de Serge Leroy dont on garde en tête le tragique final. Après une apparition dans Antonio Gramsci, giorni di carcere, elle est de nouveau à l'affiche d'un film qui à sa sortie provoqua une mini vague de scandale, L'amant de poche de Bernard Queysanne. Dans cette histoire d'amours interdites Mimsy interprète une call-girl qui tombe amoureuse et fera l'éducation sexuelle d'un jeune collégien de quinze ans, timide et maladroit. En 1979, elle est au générique du sympathique film catastrophe SOS concorde de Ruggero Deodato. Mimsy boucle ainsi une décennie riche en films aussi divers que passionnants.
C'est par un divorce que Mimsy débute les années 80 puisqu'elle se sépare de son époux Vincenzo Cerami. Elle quitte ainsi l'Italie pour s'installer en France où elle va alors beaucoup tourner tant pour la télévision, les séries et téléfilms Martin Eden, La déchirure, Le quartet Basileus... que pour le cinéma. Elle est l'héroïne de La légion saute sur Kolwezi, Même les mômes ont du vague à l'âme et La mort de Mario Ricci.
Elle n'abandonne pas pour autant le cinéma italien puisqu'elle est dans Le chat noir de Lucio Fulci dans lequel elle a David Warbeck pour partenaire. David disait d'elle qu'elle était très professionnelle et ne laissait guère de place à l'improvisation. Tout devait être réglé sinon elle était perdue ce qui fut le cas sur ce film selon Warbeck toujours. On la voit également dans La fille de Trieste de Campanile, Nom de code oies sauvages de Margheriti, Don Camillo avec Terence Hill, Sensi de Gabriele Lavia, La ragazza dei Lilla...
En 1987, elle retrouve Deodato pour son slasher Bodycount. Ce sera là son dernier film pour le cinéma. En 1989 elle épouse le décorateur Francis Poirier qui lui donnera un enfant. Mimsy ne tournera plus par la suite que pour la télévision avant de mettre un terme définitif à sa carrière à l'âge de 46 ans en 1991 avec Safari de Roger Vadim. Mimsy se retire alors des feux de la rampe et s'installe dans le sud de la France près d'Avignon. Elle ne quitte pas pour autant le monde du spectacle puisque c'est dans l'ombre qu'elle travaillera désormais notamment comme costumière et décoratrice pour entre autres le célèbre festival d'Avignon, le théâtre antique d'Orange, l'opéra de Bordeaux ou le Théâtre des variétés. Elle met désormais ses talents de créatrice au service du cinéma (on lui doit notamment les décors de Charlie et la chocolaterie) et du théâtre. Mimsy va également s'adonner à une autre grande passion, la sculpture et surtout la peinture.