Olga Karlatos: le diamant olympien
Son nom est définitivement associé à son incroyable regard, de grands yeux verts striés de bleu que beaucoup ont souvent comparé à deux magnifiques diamants, deux joyaux qui longtemps brillèrent dans le noir des salles. D'origine grecque, elle symbolisa dés ses premières apparitions à l'écran la sophistication et l'élégance, une beauté presque ensorcelante qui dans un certain sens fut peut être un handicap à sa carrière.
Plongeons nous sans plus tarder dans l'azur des yeux si limpides de Olga Karlatos.
De son véritable nom Olga Vlassopoulos, Olga Karlatos est née le 20 avril 1947 à Athènes. Décidée dés sa plus tendre enfance à devenir artiste, Olga fréquente très tôt les écoles artistiques de Grèce avant de quitter sa terre natale pour Paris où elle s'installe définitivement à l'aube de ses vingt ans. C'est en tant que chanteuse et guitariste que la jeune Olga débute sa carrière artistique en multipliant les représentations sur les scènes de la capitale où elle fait découvrir le folklore de son pays. Elle ne tarde pas à se faire remarquer du metteur en scène hellénique Nikos Papatakis qui lui offre son premier rôle au cinéma en 1966, une coproduction franco-grecque Les pâtres du désordre. Entre la jeune comédienne et le
cinéaste, c'est le coup de foudre immédiat. Ils se marieront l'année suivante, une union qui se terminera en 1982. Si le film de Papatakis lui offre la chance de se faire un nom c'est surtout sa fabuleuse prestation en 1971 dans la gigantesque fresque télévisée de Francesco Rossi, Eneide, tirée des poèmes de Virgile, qui lui apporte la renommée et la reconnaissance du public. A la fois chanteuse et actrice, Olga, intense, y interprète avec brio le rôle tragique de Dido, un des principaux personnages. La même année elle tourne dans Paulina 1880 de Jean Louis Bertucelli avant de s'envoler pour les USA pour y entamer un très long tour de chant lors duquel elle interprète des chansons traditionnelles grecques. A
son retour en 1974, elle part pour cette fois Allemagne pour y tourner un téléfilm de William Petersen, Aufs kreuz gelegt, juste avant de retourner en Grèce où son époux doit la diriger pour ce qui reste un de ses films les plus impressionnants, le dramatique Gloria Mundi / Tortura dans lequel, totalement investie, elle incarne une femme qui s'inflige les pires sévices corporels afin de trouver le cri exact de la souffrance la plus extrême. Tirée d'une histoire vraie, ce film fort et torturé provoqua à sa sortie un véritable scandale, certains pays l'ayant même interdit.
Après cette incursion dans l'effroyable, Olga va dés 1975 débuter sa longue période italienne.
Installée à Rome, elle tourne tout d'abord pour Monicelli qui lui offre le rôle principal de Amici miei / Mes chers amis puis devient l'épouse de Nino Manfredi pour Il cavaluccio svedese de Luigi Magni. Enzo Castellari fait ensuite appel à son talent et à sa beauté pour le splendide western Keoma, un nouveau personnage à la destinée tragique errant dans cet univers apocalyptique où résonnera encore son inoubliable cri. Après une parenthèse mexicaine sous la coupelle de René Cardona Jr pour lequel elle apparait dans Cyclone, on retrouve Olga dans Per questa notte de Carlo di Carlo puis Nero veneziano de Ugo Liberatore, un film d'horreur dans lequel, vieillie pour l'occasion, elle joue la tante de Renato Cestié, un
adolescent doué de pouvoirs maléfiques et enfin La maitresse légitime / Mogliamante de Marco Vicario. Olga s'essaie ensuite au polar à l'italienne avec Diamants de sang de Fernando di Leo où elle n'y fait qu'une courte apparition et Un poliziotto scomodo / Un flic explosif / Situation dangereuse de Stelvio Massi avec Maurizio Merli avec qui le célèbre acteur moustachu tentera une approche sentimentale hors tournage tant il se prit d'affection pour l'actrice au regard de diamant. En 1978 elle est au générique de Dedicato al mare Egeo de Masuo Ikeda, une production érotique ambitieuse étrangement restée inédite totalement en Italie mais qui devint un film culte au Japon. Olga y interprète une superbe femme d'âge
mûr qui loue son appartement à un jeune étudiant en arts, le petit prince du roman-photo Claudio Aliotti, qui va la séduire et la tourmenter puisque l'adolescent partage également sa vie amoureuse avec d'une part Stefania Casini, d'autre part avec une Ilona Staler solaire, un trio sulfureux à l'origine de nombreuses scènes de nu très audacieuses. Dans la même veine Olga est à l'affiche en 1979 du maritime Senza buccia, une ode au naturisme signée Maurizio Aliprandi, avec une fois de plus Ilona Staler aux cotés de Lili Carati. Olga fait ici perdre la tête au meilleur ami de son fils, un amour qui conduira les protagonistes vers le drame final. Cette même année Olga entre à jamais dans l'histoire du film d'horreur grâce à
Lucio Fulci qui lui offre une mort comme il en avait le secret, l'inoubliable scène de l'énucléation de L'enfer des zombis lors de laquelle un mort vivant putride et hargneux transpercera violemment les yeux d'Olga avec une énorme écharde de bois. L'actrice retrouvera le fameux metteur en scène en 1984 pour Murderock, un giallo tardif dans lequel elle incarne une professeur de danse dont l'école est menacée par un mystérieux assassin. Par la suite, Olga apparaitra dans quelques comédies de fin de parcours dont Mani di Velluto de Franco Castellano avec Adriana Celentano, Belli e brutti ridono tutti de Domenico Paollela et Una moglie due amici quatro amanti de Michele Massimo Tarantini.
Les années 80 verront non seulement son divorce d'avec Papatoukis et son remariage avec le producteur-metteur en scène Arthur Rankin Jr qui lui donnera deux enfants mais également le lent déclin de la carrière de la belle Olga. C'est essentiellement pour la télévision qu'elle tournera alors en multipliant les rôles dans des séries, téléfilms et autres grosses productions internationales dont Quo Vadis?. Elle fera encore quelques apparitions au grand écran comme notamment pour Purple rain dans lequel elle joue la mère de Prince, La dame aux camélias de Mauro Bolognini et Il était une fois en Amérique de Sergio Leone, une courte apparition à laquelle Leone tenait particulièrement mais qui au montage final fut
honteusement réduit. C'est en 1987 qu'elle fera ses adieux définitifs au cinéma avec le thriller de Silverio Blasi L'ingranaggio.
Olga s'est alors retirée de la vie publique et entama une nouvelle vie, celle de mère de famille. Elle a également repris ses études et a passé en 2007 un diplôme en droit à l'université de Kent en Angleterre où désormais elle peut plaider. Installée dans le plus complet anonymat entre Paris, l'Angleterre et son pays natal, la belle comédienne aux yeux de diamant a tiré un trait définitif sur son passé d'artiste.