Zombi 2
Autres titres: L'enfer des zombies / Zombie flesh eaters / Zombie 2: The dead are among us / Zombies
Réal: Lucio Fulci
Année: 1979
Origine: Italie
Genre: Horreur
Durée: 88mn
Acteurs: Ian McCullogh, Tisa Farrow, Al Cliver, Richard Johnson, Dakkar, Olga Karlatos, Auretta Gay, Stefania D'amario...
Résumé: Un bateau abandonné entre à la dérive dans le port de New York. Les policiers qui le fouillent sont attaqués et dévorés par une créature grotesque et obèse qui disparait au fond de l'eau. Une jeune journaliste Ann Bowles décide d'enquêter. Elle décide de se rendre avec quelques compagnons sur l'île de Matoul réputée maudite afin de découvrir ce qui s'est passé. Ils sont accueillis par le docteur Menard qui bien vite se révèle étrange. De curieuses légendes circulent sur l'île, terrifiantes, à propos de zombis sortant de leur tombe. En fait, le docteur se livrent à d'abominables expériences sur les indigènes. Très vite, les morts vont sortir de terre et attaqués les rares survivants de l'île...
Depuis la sortie de La nuit des morts-vivants en 1968, le mythe du zombi au cinéma avait été par la suite plus ou moins abandonné durant les années 70 jusqu'en 1978 lorsque vit le jour la suite du dudit film, Dawn of the dead. Le mythe allait plus que jamais être remis au goût du jour et c'est toute une kyrielle de films qui allait débouler sur nos écrans. Et l'Italie ne fut pas la dernière à reprendre le succès du film. L'enfer des zombis allait certainement devenir le plus célèbre
Lorsqu'il réalise L'enfer de zombis en 1979, projet qui au départ devait revenir à Enzo G. Castellari qui le refusa, Lucio Fulci avait déjà à son actif toute une pléiade de films, allant du polar au western en passant par le fantastique ou l'aventure. Certaines de ses oeuvres avaient déjà laissé d'excellents souvenirs dans les esprits cinéphiles notamment l'excellent et historique Liens d'amour et de sang, le western sombre Les quatre de l'apocalypse ou encore le giallo Le venin de la peur. C'est bel et bien avec Zombi 2 qu'il va à jamais rentrer dans l'histoire du cinéma d'horreur et ainsi gagner ses galons de réalisateur culte au fil du temps.
Avec ce film le but de Lucio Fulci était non seulement de repousser les limites de l'horreur graphique mais également de provoquer chez le spectateur un sentiment de peur, une peur viscérale, tétanisante, une peur encore jamais égalée à l'écran. Force est de reconnaitre qu'il a réussi son difficile pari puisque dés l'ouverture du film, il insuffle au film une atmosphère lourde, inquiétante, presque éprouvante avec l'arrivée de ce voilier apparemment abandonné que visitent les policiers. Sur le bateau règne un silence mortuaire uniquement brisé par le bruit du roulis de l'eau et du bois qui craque. Et l'horreur va surgir, tout d'abord par la découverte des aliments avariés grouillant de vers au beau milieu d'un apocalyptique désordre. L'inimaginable, l'innommable prendra la forme d'un zombi obèse et grotesque surgit de nulle part, déchirant les chairs du policier qui venait de découvrir les restes putrides d'un cadavre. Il disparaitra comme s'il n'avait jamais existé en sautant dans l'océan, engloutissant cette vision abominable.
Cette seule scène et la vision de cette éléphantesque créature putride suffisent à installer le malaise et convaincre le spectateur qu'il va alors assister à un spectacle unique dans les annales du cinéma. Toute la beauté macabre du film de Fulci trouvera son apothéose lors de l'arrivée des protagonistes sur l'île maudite plongée dans une atmosphère moite et lourde, quasi étouffante qui transpire par delà l'écran, appuyée par la fabuleuse musique de Fabio Frizzi. Dés leur débarquement, un insupportable sentiment de malaise s'empare du spectateur tandis que la tension va crescendo atteignant son point culminant lors des apparitions macabres des morts-vivants qui progressivement envahissent l'île. Et cette tension ne se relâchera plus jusqu'au no happy end final, une apocalyptique vision de New-York envahie par les zombis.
Lucio Fulci est aussi et avant tout un poète de l'image et du macabre. Il donne à son film une dimension réellement onirique. Chaque scène pourrait être vue comme un fascinant tableau funeste. Le zombi déambulant dans l'unique ruelle du village, le crabe traversant le village désert balayé par le vent, sont autant de scènes effroyablement poètiques et belles, macabres et hypnotisantes.
Le clou du film demeurera la résurrection des cadavres. C'est sous la lancinante partition musicale de Fabio Frizzi que le sol de la forêt se craquèle de toutes parts, des doigts décharnés surgissent du sol tels des pièges mortels, les corps putrides rongés par le temps et les vers se soulèvent du sol pour commencer leur lente errance. Cette longue résurrection et la multiplication des zombis donnent l'impression oppressante que toute fuite est désormais impossible. Rarement le cinéma de zombi avait atteint un tel climax.
L'enfer des zombis bénéficie de surcroît d'excellents maquillages et d'effets spéciaux de grande qualité notamment quant aux morts-vivants eux mêmes, incarnation putrescente de nos pires peurs primales. Fulci a toujours été fasciné par la putréfaction et le prouve avec cet Enfer des zombis, dépassant et de loin les morts-vivants encore trop humains de Romero. On s'éloigne en effet de façon radicale de la vision des morts-vivants de Romero et de ses considérations socio-politiques. Fulci a voulu mettre le spectateur face à ses pires peurs, ces peurs ancestrales que l'Homme garde enfouies au plus profond de lui, celle de la Mort et de toute son horreur. Défi pleinement réussi.
Le gore et la représentation graphique des atrocités perpétrées par les cadavres ressuscités sont d'un réalisme hallucinant et bénéficie là encore d'un soin et d'un éclairage parfait. Les amateurs de gore y trouveront sans aucun doute satisfaction. Personne n'a oublié l'énucléation douloureuse d'Olga Karlatos par une écharde ou encore le repas cannibale des zombis se précipitant sur la chair pour la dévorer, véritable apothéose scénaristique lors d'un inoubliable final!
Un happy end aurait fait perdre au film beaucoup perdu de sa force. Cette fois il n'y a pas plus d'issue dans le monde extérieur qu'il n'y en avait sur Matoul. Les deux survivants apprennent par radio que New-York est envahie, le film se concluant sur l'époustouflante vision des zombis déferlant sur le pont de Brooklyn.
L'interprétation est à la hauteur du film, une palme d'honneur à Tisa Farrow, soeur de Mia Farrow dont les grands yeux reflètent toute la peur et la résolution du monde. A ses cotés, la regrettée Auretta Gay donne à cette pellicule sa touche ultra sexy notamment lors de la séquence de plongée sous marine. L'écossais Ian Mc Cullogh et le toujours vaillant Al Cliver complètent un casting irréprochable.
Poètique et macabre, terrifiante et apocalyptique, cette hallucinante descente dans l'horreur brute est indubitablement l'oeuvre la plus marquante depuis La nuit des morts-vivants de Georges Romero en 1968 mais aussi et sans mal le meilleur film de zombis des années 80.
L'enfer des zombis est une pellicule d'horreur unique et inégalée, trop souvent plagiée pour le meilleur mais aussi le pire. Lucio Fulci, poète de la mort, a signé là son chef d'oeuvre, premier volet de son triptyque sur les morts-vivants auxquels succéderont Frayeurs et L'au delà.