Metti lo diavolo tuo ne lo mio inferno
Autres titres: Ton diable dans mon enfer
Real: Bitto Albertini
Année: 1972
Origine: Italie
Genre: Décamérotique
Durée: 81mn
Acteurs: Antonio Cantafora, Melinda Pillon, Margaret Rose Keil, Piera Viotti, Alessandra Moravia, Renate Schmidt, Mario Frera, Mimmo Baldi, Luca Sportelli, Gennaro Masini, Giorgio Bixio, Mario De Vico, Bruno Boschetti...
Résumé: Un jeune peintre prénommé Ricciardetto profite de son art pour séduire toutes les femmes qui croisent sa route et les mettre dans son lit sans oublier d'en faire profiter ses deux nigauds de valets. En cette année sainte, la bourgade où ils se sont arrêtés est le point de ralliement de bien des pèlerins. Le nombre de femmes avec qui Ricciardino peut coucher s'en trouve donc multiplié. Après bien des aventures le peintre est surpris au lit avec la femme du bourgmestre. Celui ci le condamne à être castré...
Lorsqu'on évoque le nom de Bitto Albertini, l'expression bon film n'est peut être pas celle qui nous vient de suite à l'esprit. Spécialiste de la petite série B d'aventures souvent fauchée (Zambo), auteur d'un giallo bien peu glorieux (Plus venimeux que le cobra), de quelques mondos plutôt grotesques, d'un inoubliable monument d'absurdité (Starcrash 2) et de deux des moins bons volets de la série des Emmanuelle (Emanuelle nera 2 et L'éveil des sens d'Emy Wong), ne reste au crédit du cinéaste que Emanuelle nera, premier film d'une longue liste qui allait ouvrir le riche filon des Black Emanuelle. C'est donc avec une certaine anxiété
qu'on se prépare à découvrir cette décamérotique, première d'un diptyque plutôt étonnant puisque ce premier volet s'avère une bien agréable surprise.
Ricciardetto est un jeune peintre fougueux fort charmant qui plait énormément aux femmes. Fraichement débarqué avec son valet Masuccio et un troisième larron dans la petite bourgade de Montelupone, Ricciardetto se met de suite à trousser jupons. Il multiplie d'autant plus facilement les conquêtes que c'est l'année sainte, les pèlerins arrivent donc en masse. C'est ainsi qu'il parvient à mettre au lit après avoir dupé leur mari respectif Amasunta, une noble masochiste qui aime se faire fouetter en public, Monna Elisa, la femme du
bourgmestre, Monna Violante et la belle Bice. Ricciardetto et ses deux acolytes vont connaitre moult déboires et mésaventures notamment lorsqu'ils tombent sur un détachement de soldats pédérastes. Malheureusement pour le charmant peintre et son valet, ils se font surprendre par le bourgmestre qui les condamne à être castrés pour avoir couché avec son épouse. Grâce à Amasunta ils parviendront à s'échapper juste à temps.
Inspiré par une des nouvelles du Décameron de Boccace, (Novelle 10 - Giornata 3) qui donne au film son titre, Metti lo diavolo tuo ne lo mio inferno est contre toute attente une des meilleures décamérotiques que le courant ait compté. Si cette première incursion de
Albertini ne suit pas le schéma traditionnel du genre, à savoir une suite de sketches reliés entre eux par un fil conducteur, l'histoire construite sur un seul et unique bloc sans être très originale n'en est pas moins fort divertissante. Ton diable dans mon enfer, une manière joliment déguisée pour signifier faire l'amour, est une décamérotique au ton enlevé, à la mise en scène alerte, qui enchaine aventures sur mésaventures à un rythme d'enfer dont le dénominateur commun est l'humour. La vulgarité et la paillardise indispensables à toute bonne décamérotique sont bien entendu au rendez-vous même si Albertini préfère une certaine légèreté à une lourdeur trop souvent de mise. Les scènes de sexe abondent dans
une ambiance aussi délirante que triviale où amants, maris cocufiés et femmes infidèles se mêlent et s'entremêlent au cours de situations cocasses parfois extrêmes qui ne sont pas sans rappeler certains débordements dignes de Alberto Cavallone. Loin d'être simplement suggérée, scatophilie et zoophilie sont donc au programme lors de deux séquences aussi inoubliables qu'hilarantes.
Obligé d'interrompre ses ébats adultérins faute à l'arrivée impromptue du mari, le valet de Ricciardetto n'a d'autre solution que de se cacher à l'intérieur de la banquette qui sert de toilettes. Pris d'une envie de déféquer, l'époux se pose sur le trône tout en courtisant sa
femme déconfite puis soulage son intestin. Les excréments recouvrent rapidement le visage de l'infortuné de manière incroyablement réaliste. Voir la merde tomber sur la face du malheureux ne peut que rappeler la scène mythique de Spell-Dolce mattataio de Cavallone lorsque Paola Montenero défèque dans la bouche de son amant. Albertini a réalisé la scène scatophile la plus incroyablement authentique jamais tournée du moins dans un cinéma dit classique hors circuits pornographique. De quoi faire bondir de bonheur coupable l'amateur d'obscénités intestinales!
Tout aussi drôle et salace est la scène où désirant faire l'amour au peintre dans la grange, la
belle Bice demande à son mari de fermer les yeux et de s'appuyer contre le mur en bois dans lequel un trou est percé. Bice est ainsi censée lui offrir son derrière que l'homme possédera à travers le trou mais c'est en fait une chèvre qu'il prendra, visiblement très heureuse de ce traitement affectif puisqu'elle ne voudra plus le quitter. Il va sans dire que pendant ce temps, juste à coté du pauvre époux, Bice prend bien du plaisir avec le peintre.
Toujours au rayon divertissement égrillard citons la séquence où les moines d'un monastère où doit dormir l'Evêque sont remplacés par des putains déguisées en nonnes, de quoi mettre les lieux sens dessus dessous ainsi que celle où quelques fieffés coquins sont bien
malgré eux sodomisés par des soldats sodomites, un désagrément qui les fera fuir, les fesses fort douloureuses.
Autant dire qu'on ne s'ennuie pas une seule seconde d'autant plus que les acteurs semblent eux aussi bien s'amuser. Bénéficiant de très jolis costumes aux couleurs chatoyantes, d'une élégante photographie qui met parfaitement en valeur les magnifiques décors tant extérieurs qu'intérieurs du célèbre château de Balsorano ainsi que d'une musique allègre signée Stelvio Cipriani agrémentée des entrainantes ritournelles chantées par Gianni Musy, Ton diable dans mon enfer est une bouffée de bonne humeur paillarde dans l'univers de la décamérotique.
On y retrouvera avec grand plaisir le séduisantAntonio Cantafora futur Michael Coby alors à ses débuts dans les collants ocre du peintre entouré de la blonde Margaret Rose Keil (une habituée du genre), Patrizia Viotti (Isabella duchesse du diable) et d'une kyrielle de starlettes pour la plupart inconnues, la plus stupéfiante étant celle qui interprète Bice sur laquelle on ne sait absolument rien pas même son nom, un de ces visages d'un jour qui disparurent aussitôt dans le néant d'où ils avaient surgi. A leurs cotés on reconnaitra l'inévitable Luca Sportelli et Mimmo Baldi dont les mimiques rappellent Alvaro Vitali. On
signalera aussi la présence de deux figures récurrentes du cinéma d'action et du western italien, Fortunato Arena (Trottolino) et Roberto Dannesi (un soldat pédéraste).
Honteusement tronqué lors de sa sortie en France, Le diable dans ton enfer connut un joli succès en Italie ce qui obligea Albertini à lui donner une suite l'année suivante, Continuavano a mettere lo diavolo ne lo mio inferno.
Certes très classique, Metti il diavolo tuo ne lo mio inferno n'en est pas moins une décamérotique de haut niveau, pleine d'entrain, visuellement très belle, que tout amateur devrait apprécier ne serait ce que pour son coté parfois extrême dans son humour.