Thor il conquistatore
Autres titres: Thor le guerrier / Thor the conqueror / Beastmaster 2
Réal: Tonino Ricci
Année: 1983
Origine: Italie
Genre: Heroic Fantasy
Durée: 90mn
Acteurs: Bruno Minniti, Maria Romano, Malisa Longo, Christopher Holm, Raf Baldassarre, Angelo Ragusa, Rosala Ciofalo, Elena Wiedermann, Giovanni Cianfriglia, Artemio Antonini, Osiride Pevarello, Rinaldo Zamperla...
Résumé: Ses parents ayant été tués par l'ignoble Gnut alors qu'il n'était qu'un bébé, Thor fut élevé par un sorcier. Devenu un robuste adulte, Thor va partir à la recherche de Gnut afin de venger le massacre de sa famille. Lors de sa quête, chaperonné par son mentor de magicien et une chouette, incarnation d'une sorcière arracheuse d'yeux, il va également devoir trouver non seulement une épée magique mais également des graines d'or qui permettront de refaire pousser le blé sur les terres stériles de son pays et ainsi nourrir le peuple opprimé...
S'il est un pays qui aima imiter les blockbusters internationaux c'est bel et bien l'Italie qui passa alors maitre dans l'art de les plagier et les exploiter jusqu'à plus soif. Le gigantesque succès de Conan le barbare de John Millius en 1981 allait très vite donner naissance à un nouveau sous genre du cinéma d'exploitation transalpin: l'heroic fantasy all'italiana.
C'est donc à une véritable déferlante de héros musclés portant perruques à laquelle nous allions alors assister. Parmi les plus fameux on citera Gunan il guerriero de Franco Prosperi, Sangraal de Michele Massimo Tarantini ou encore la série des quatre Ator de Joe D'Amato.
Tonino Ricci, petit artisan de la série B et véritable touche à tout, surtout réputé pour l'indigence de ses oeuvres et son évident manque de talent, ne resta pas en marge de ses confrères. Après avoir donné dans le film de requins avec sa trilogie Bermude: triangle de l'enfer, Encounters in the deep et La notte degli squali, le post nuke avec la série des Rush, tâté le film de guerre avec Rush 3 et le film d'horreur gore avec Panic, s'être essayé au western avec sa version du roman de Jack London Buck le loup sans oublier le giallo et le film érotique avec respectivement Omicidio perfetto a termine di legge et Delirio d'amore, il va en 1982 s'illustrer dans ce tout nouveau filon en mettant en scène le tristement célèbre Thor le guerrier. Si Thor est dans les mythologies nordiques le dieu du tonnerre, le héros de Ricci n'a pourtant aucun rapport avec cette puissante divinité si ce n'est le nom et au vu de ses piètres pouvoirs, il n'en aurait été qu'un très lointain descendant.
Accompagné de Tito Carpi au scénario, Ricci nous délivre ici une histoire des plus simples voire simplistes. Ses parents ayant été tués par l'ignoble Gnut alors qu'il n'était qu'un bébé, Thor fut élevé par un sorcier. Devenu un robuste adulte, il va partir à la recherche de Gnut afin de venger le massacre de sa famille. Lors de sa quête, chaperonné par son mentor de magicien et une chouette, incarnation d'une sorcière arracheuse d'yeux, il va également devoir trouver non seulement une épée magique mais également des graines d'or qui permettront de refaire pousser le blé sur les terres stériles de son pays et ainsi nourrir le peuple opprimé.
Tourné dans les sempiternelles plaines verdoyantes romaines, inutile de dire que la quête de Thor ressemble à une ballade espagnole. Entre deux péripéties d'une mollesse à toute épreuve et trois combats livrés à une poignée de figurants gauches, Thor va découvrir le sexe dit faible appelé ici femelle et les joies de l'amour par la même occasion sous les mises en garde du magicien qui ne cessera de lui répéter que ces êtres sont veules, dangereuses, hypocrites et tellement inutiles. Ricci affiche clairement sa misogynie et ne cesse de maltraiter ses quelques actrices qu'il réduit en esclavage ou tue avec une certaine délectation. Voilà qui sera une des nombreuses sources de plaisir du spectateur à la vision de certaines séquences fort drôles. Les avertissements du sorcier n'empêcheront pourtant pas Thor de procréer sous l'oeil vicieux de la chouette omniprésente. Il ne faut pas s'attendre à de torrides scènes d'amour ici, celles ci se bornent à quelques frileux et rapides câlins dans une grotte, allongés sur une peau de bête à la lumière d'un feu de bois, sous le regard dépité du magicien qui préférera disparaître.
On se souviendra longtemps également de cette armée d'Amazones que notre vaillant guerrier va devoir combattre, autrement dit trois malheureuses actrices anorexiques en haillons dissimulées sous un casque en osier ressemblant à un panier à légumes.
Si on excepte de piètres combats entre quelques figurants munis d'épées peu impressionnantes, quelques pirouettes de Thor et les nombreuses incohérences d'un récit qui se disperse, Thor le guerrier s'essaie tout de même à quelques fabuleux effets spéciaux digne du cinéma de Méliès. C'est ainsi que les tours de passe-passe de notre sorcier ne sont rien d'autre que de gentillettes explosions, les personnages disparaissant inlassablement dans une magnifique gerbe de fumée blanche, un peu comme dans un festival de magie régional patronné par Gérard Majax.
A cela Ricci y ajoute quelques plans gore savoureux. Ainsi notre valeureux conquérant après avoir vaincu trois guerriers cannibales qui savourent le bras d'un esclave fraichement tué va devoir affronter près d'un ruisseau cristallin sous le joliment nommé Pont des Mains Coupées un abominable guerrier zombi au visage rongé par le temps. Il devra par la suite faire face sous l'emprise de la fièvre à deux spectres virevoltant dans la grotte où il se reposait. Inutile de dire que nos deux fantômes gentiment incrustés dans les murs de la caverne s'agitent par transparence et sont plus proche du masque d'Halloween bon marché et du poulet géant pour ventriloque que du revenant infernal.
Se prenant alors pour Ray Harryhausen, tentant peut être un clin d'oeil (in)volontaire à Jason et les argonautes, Ricci nous offre l'inoubliable vision d'un squelette qui danse derrière Thor, visiblement apeuré par la stupidité de la séquence, une ridicule marionnette en plastique qu'agite sans conviction un technicien fatigué. Nous atteignons là le comble de la bêtise qui n'a d'égal que l'hilarité qu'elle engendre.
Les quelques effets horrifiques sont tout aussi aberrants. Capturé par une tribu primitive qui vénère un épouvantail sur lequel repose un crâne de bouc, soit quelques figurants admirablement peinturlurés au brushing impeccable cachés dans un amas de fougères, Thor va être torturé. Tentant peut être de plagier Michel Strogoff dans un élan des plus candides, Ricci va lui brûler les yeux à l'aide d'une torche. La scène sera bien évidemment éludée mais le résultat sera des plus réjouissants. Un étonnant cataplasme vert épinard en guise de maquillage précairement posé sur les yeux, donnant l'impression qu'une vache s'est soulagée sur son visage, Thor déambulera quelques minutes à tâtons dans l'orée d'une forêt avant de recouvrer la vue grâce au venin d'un serpent. Monté sur un magnifique cheval blanc, créature inconnue considérée comme infernale, il finira par affronter Gnut au moment où sa belle esclave donnera naissance à son fils.
Rythmé par une partition musicale des plus guillerettes signée Francesco De Masi, Thor le guerrier doit également son amusante réputation à son interprète principal Conrad Nichols alias Bruno Minniti, bellâtre tout en muscles qui débuta dans le roman-photo avant de toucher à la sexy comédie. Très célèbre en Italie, Bruno qui avec Thor trouvait son tout premier rôle en tant que principal protagoniste deviendra dés lors l'acteur fétiche de Ricci pour qui il tournera énormément dont la série des Rush. Thor reste un très agréable souvenir pour l'ex-comédien qui trouva au sein du film une véritable famille tant au niveau des acteurs que des techniciens et autres cascadeurs avec qui il garda de solides relations tout au long de sa carrière. Pour l'anecdote Bruno fut doublé pour la plupart des scènes à cheval par un professionnel, Angelo Ragusa, qui joue également le rôle du monstre avec lequel il se bat au bord du fleuve et celui de son père. Si les producteurs, qui au passage lui trouvèrent son pseudonyme anglo saxon, auraient souhaité qu'il monte lui même à cheval, Bruno confesse qu'il n'aurait jamais pris ce risque.
Aujourd'hui chanteur populaire, présentateur télé, directeur d'une salle de sport, Minniti, le muscle huilé, le sourire carnassier et la perruque mal vissée, s'avère ici un assez piètre acteur sans charisme aucun dont le talent se résume à quelques grimaces et à bander ses muscles.
A ses cotés on reconnaitra Christopher Holm en magicien misogyne et Raf Baldassarre dans la peau de Gnut, seul à véritablement croire à son personnage et lui donner un certain relief. Tentative plutôt vaine ici vu la médiocrité de l'ensemble.
La gente féminine est représentée par deux ex-sexy starlettes du cinéma d'exploitation, la brune Maria Romano vue dans Pénitentier de femmes et Révolte au pénitentier des filles, les deux WIP de Bruno Mattei, et la blonde Malisa Longo, alors sur le pente descendante, dont Ricci se débarrassera trop rapidement.
Assez loin derrière de gentilles productions comme Sangraal l'épée de feu et surtout l'agréable Ator, Thor le guerrier est fort certainement un des moins bons sous Conan italiens mais aussi un des plus drôles. Voilà peut être la raison pour laquelle il est devenu aujourd'hui un de ces produits culte qu'affectionnent particulièrement les bissophiles, une série Z divertissante de par son coté non seulement absurde mais joyeusement ludique. En ce sens Thor le guerrier est un pur petit joyau de bonne humeur.