Un omicidio perfetto a termini di legge
Autres titres: Un crime parfait aux termes de la loi / Cross current / A perfect murder in terms of law
Real: Tonino Ricci
Année: 1971
Origine: Italie / Espagne
Genre: Giallo
Durée: 89mn
Acteurs: Elga Andersen, Philippe Leroy, Ivan Rassimov, Rosanna Yanni, Franco Ressel, Rina Franchetti, Julio Peña, Franco Fantasia, Giorgio Cerioni, Liana Del Balzo, Mario Morales, Carla Mancini, Franco Balducci, Ferdinando Poggi, Franco Marletta, Mario Della Vigna, Vincenzo Balestrieri, Filippo Perego...
Résumé: L'ingénieur Marco Breda est victime d'un accident de hors bord lors d'une course. Après une délicate opération à la tête, il est devenu amnésique. Il part avec son épouse Monica se reposer dans sa villa maritime où les rejoint un groupe d'amis. Le soir même Breda reçoit un appel téléphonique de son ancien jardinier qui souhaite le voir d'urgence afin de lui révéler d'importantes informations sur son accident. L'homme est tué quelques heures plus tard. Sa relation avec Monica se dégradant, Marco a une aventure avec Terry. Lorsque Monica découvre son infidélité elle se bat avec la jeune femme qui la tue involontairement. Terry propose à Marco de jeter son cadavre à la mer. C'est alors qu'un des amis de Marco est assassiné par un mystérieux assassin. Dans la foulée Monica réapparait. Terrorisé par cette réapparition, Marco s'enfuit dans sa voiture dont il perd le contrôle. Le véhicule plonge d'une falaise. Le corps de Marco reste introuvable. Monica révèle alors son véritable visage. Aidée de Terry et de son amant elle est à l'origine de l'accident de bateau et du complot visant à rendre fou son mari. Monica est loin de se douter qu'elle va être victime de ses manigances d'autant plus que l'énigmatique assassin rôde toujours...
Modeste réalisateur italien Tonino Ricci s'est souvent fait remarquer pour la faiblesse de ses oeuvres quelque soit le genre auquel il s'essaya. On se souvient essentiellement de lui pour les amusantes petites séries B qu'il signa dés la fin des années 70 de Thor le guerrier à la trilogie des Rush en passant par son autre trilogie, celle des films de requins, et quelques films d'horreur (l'indigent Panic) ou familiaux (Buck le loup). On oublie mais est ce un mal que Ricci fut à la fin des années 60 à l'origine de quelques petites bandes plus sérieuses mais qui par un manque de talent certain sombraient vite dans la ringardise ou la banalité.
C'est le cas de son polar noir L'onorata famiglia - Uccidere è cosa nostra et son film de guerre Deux salopards en enfer. On dit souvent qu'à toute règle existe son exception. Cela marcherait il pour Ricci? Il semblerait que oui au vu de Un omicidio perfetto a termini di legge, sa seule et unique incursion dans l'univers du giallo, un genre alors très en vogue en ce tout début d'années 70.
L'ingénieur Marco Breda est éjecté de son bateau lors d'une course à laquelle il concourait. Gravement blessé à la tête, il doit subir une intervention chirurgicale risquée qui a de forte chance de le rendre amnésique. Sa jeune et belle épouse Monica accepte qu'il soit opéré en
sachant pertinemment qu'il risque d'être sujet à de fortes pulsions violentes s'il est confronté à un choc émotionnel ou psychologique. A sa sortie de l'hôpital, Marco part se reposer en compagnie de Monica et de quelques amis dans sa somptueuse villa maritime. Le soir de son arrivée son jardinier lui téléphone pour lui donner rendez-vous le lendemain matin afin de lui révéler d'importantes informations sur son supposé accident. L'homme est assassiné quelques heures plus tard par une mystérieuse silhouette vêtue de noir. Assailli par des flash-backs de son accident mais également de son passé, Marco voit sa relation avec sa femme se dégrader tant et si bien qu'il a une aventure avec Terry, une amie de la famille.
Folle de rage, Monica se rue sur Terry qui la tue bien involontairement. Terry décide de se débarrasser du corps en le jetant à la mer. Monica ayant déclaré qu'elle voulait partir et quitter définitivement son mari, sa disparition n'inquiétera personne. L'entourage de Marco va alors être décimé par l'énigmatique tueur qui rôde autour de la villa. C'est alors que Monica, bel et bien vivante, réapparait. Terrorisé par cette soudaine réapparition , Marco s'enfuit en voiture. Dans sa course folle il perd le contrôle de sa voiture qui plonge d'une falaise. Le corps de l'ingénieur reste introuvable. Son époux présumé mort, Monica peut désormais jouer à visage découvert. Elle a en effet fomenté avec Burt, son amant et meilleur
ami de Marco, ce plan démoniaque dont Terry faisait également partie. Si Monica avait tout prévu elle n'avait cependant pas envisagé que Burt puisse la tromper avec Terry. Folle de rage, elle les tue et rentre chez elle où s'est tapi le toujours aussi énigmatique meurtrier...
Ce qui surprend le plus à la vision de Un omicidio perfetto a termini di legge ce sont les différentes inspirations du cinéaste qui s'amuse ici à mélanger les genres avec une aisance inhabituelle. Ce n'est ni du coté de Mario Bava ni de Dario Argento que Ricci s'inspire mais plutôt de Umberto Lenzi et Romolo Guerrieri. Le film lorgne en effet du coté du giallo maritime, un sous genre qui fit ses preuves, et surtout du thriller familial dont le coeur de
l'intrigue repose sur une machination diabolique où se mêlent folie et secrets de famille teinté ici d'une ombre des Diaboliques de Clouzot pour le trio infernal et la résurrection d'une prétendue victime. Plus originaux et surtout intrigants sont les divers éléments que Ricci y incorpore. On y trouve en effet pêle-mêle des réminiscences du film d'épouvante gothique (les nuits d'orage incessantes, la présence inquiétante de l'arbre décharné, le long escalier que descend Monica, version moderne de l'indispensable escalier des manoirs d'antan, le son de l'orgue que certains rapprocheront des mélodies funestes de L'abominable Dr Phibes) et d'horreur (le redoutable oeil espion présent à chaque assassinat, les meurtres
certes peu nombreux mais suffisamment sanglants dont celui de Rosanna Yanni filmé au ralenti qui rappelle le futur meurtre de Veronica Lario dans Ténèbres et l'éventrement de Franco Ressel durant lequel Ricci se permet un bref plan gore sur les tripes qui sortent de l'entaille). Ajoutons à cela l'originalité de l'accident en hors-bord en guise de prologue, déclencheur des hostilités, et on se trouve face à un film inattendu qui se laisse voir avec un certain plaisir.
Outre ce mélange des genres et le charme propre aux thrillers maritimes, Un omicidio perfetto a termini di legge parvient à instaurer une certaine atmosphère à la fois inquiétante
et mystérieuse tout en maintenant un suspens qui ne retombera qu'aux ultimes minutes aidé par une interprétation d'acteurs tous plus investis les uns que les autres, Philippe Leroy en tête, égal à lui même, jouant parfaitement bien la carte de la folie, feinte ou non, convalescent victime ou coupable. Ricci insiste beaucoup sur les jeux de regards, sait brouiller les pistes en usant et abusant des ficelles du genre tout en ayant recours à quelques rebondissements qui remettent en cause le jugement du spectateur. Certes l'amateur invétéré ne s'y laissera pas prendre et aura assez vite compris les tenants et aboutissants d'un scénario somme toute classique dans ce type spécifique de thriller
machiavélique. Mais Ricci est suffisamment malin pour entretenir la tension et distiller un agréable et vénéneux parfum de mystère tout autour de ses personnages tous aussi coupables en apparence les uns que les autres, aidé par une mise en scène tout à fait honorable.
Toujours au crédit du film une partition musicale efficace signée Giorgio Gaslini qui tente d'imiter Ennio Morricone agrémentée d'un soupçon de jerk endiablé lors d'une séquence en boite de nuit ras les mini jupes sur le Yellow river de Christie, des décors fortement estampillés années 70 entre design et pop art qui qui flatteront le regard de l'amateur de cette folle décennie et un zeste d'érotisme grâce aux nus de Elga Endersen dans sa salle de
bain futuriste et surtout sa longue scène d'amour avec Ivan Rassimov.
Si le meurtre est parfait ce thriller méconnu ne l'est pas forcément malgré ses nombreuses qualités. On regrettera quelques invraisemblances, certes légères, certaines zones d'ombre que Ricci n'a pas souhaité bon d'éclaircir, quelques facilités ou ellipses qui pourront gêner les plus tatillons et un final peut être un peu trop abrupt mais tellement cynique. S'il joue sur le traditionnel qui est pris croyait prendre il a surtout le gros avantage de laisser planer une ombre de mystère autour du tueur dont on ne connaitra jamais l'identité. Cette conclusion aigre-douce parfaitement menée sur le plan du suspens, de l'angoisse, peut facilement
faire oublier les quelques points noirs que ne manqueront pas de relever les puristes et autres rabats-joies.
Autour de Philippe Leroy on se fera un plaisir de retrouver Ivan Rassimov, égal à lui même, Giorgio Cerioni, futur abonné aux nazisploitations, l'argentine Rosanna Yanni, figure incontournable du cinéma d'horreur ibérique, et l'allemande Elga Endersen dont le regard bleu intense en hypnotisera plus d'un, excellente dans sa composition d'épouse machiavélique. Ce sera pour Elga un de ses derniers rôles au cinéma puisque après la série Aux frontières du possible réalisée l'année suivante, elle mettra un terme à sa carrière.
Coproduit avec l'Espagne avec laquelle Tonino Ricci collabora régulièrement, Un omicidio perfetto a termini di legge est un très sympathique petit giallo, conventionnel mais parfaitement fonctionnel, étonnant sur bien des plans, un thriller qui mérite toute l'attention de l'amateur qui saura l'apprécier à sa juste valeur. Il reste et de loin le meilleur film qu'ait signé son auteur durant sa carrière, une fort jolie exception made in 70s qu'on aura grand plaisir à découvrir.