Milano trema: la polizia vuole giustizia
Autres titres: Polices parallèles en action / Rue de la violence / The violent professionals
Réal: Sergio Martino
Année: 1973
Origine: Italie
Genre: Polizesco
Durée: 98mn
Acteurs: Luc Merenda, Richard Conte, Silvano Tranquilli, Carlo Alighiero, Martine Brochard, Luciano Bartoli, Lia Tanzi, Bruno Corazzari, Chris Avram, Steffen Zacharias, Cyrille Spiga, Rosario Borelli, Antonio Casale, Bruno Boschetti, Sergio Serafini, Luciano Rossi, Carla Mancini, Valeria Sabel, Anna Eugeni, Ezio Sancrotti, Enrico Marciani, Claudio Ruffini, Sergio Smacchi, Susanna Melandri, Nestore Cavaricci, Domenico Cianfriglia, Ennio Colaianni, Franz Colangeli, Tom Felleghy, Mario Ingrassia, Riccardo Petrazzi, Milena Zampana...
Résumé: Après avoir abattu froidement deux évadés de prison l'inspecteur Caneparo est suspendu un temps de ses fonctions. Seul son supérieur direct et ami Del Buono le soutient. Peu de temps après Del Buono est assassiné en pleine rue par un gang. Caneparo décide de faire cavalier seul et de retrouver ceux qui ont tué son supérieur. Il s'infiltre dans le gang qu'il pense être responsable de sa mort afin de remonter jusqu'à celui qui est à leur tête...
Après des débuts dans le mondo comme beaucoup de ses confrères et une incursion réussie dans le western spaghetti Sergio Martino va entrer dans la légende et gagner ses lettres de noblesse en mettant en scène ce qu'on appelle aujourd'hui la trilogie du vice à savoir trois gialli, L'étrange vice de Mme Wardh, Toutes les couleurs du vice et Ton vice est une chambre secrète dont moi seul ai la clé auxquels s'en ajoutent deux autres tout aussi réputés La queue du scorpion et Torso. Après cette entrée fracassante dans l'univers du thriller à l'italienne Martino va se tourner vers le polizesco avec Les rues de la violence,
une oeuvre dure qui avec les réalisations de Umberto Lenzi et Enzo Castellari est au fil du temps devenu un des films phare du genre.
Milan - Lors de leur transfert deux dangereux malfrats parviennent à s'échapper. Ils prennent en otages un père et sa fillette et fuient à bord de leur voiture. Poursuivis par la police et l'inspecteur Giorgio Caneparo ils finissent par abandonner la voiture après avoir abattu l'homme et la fillette. L'inspecteur réussit à les rattraper et les abat froidement ce qui déplait fortement à ses chefs las de ses méthodes expéditives. Seul son supérieur immédiat, Del Buono, continue à la défendre. Peu de temps après il est assassiné en pleine rue. C'est
pour Caneparo la goutte qui fait déborder le vase. Il fustige le représentant de la République venu présenter ses hommages à la police milanaise tout en étant très clair sur un point: ils doivent exercer leur devoir de justice non de vengeance. Démis un temps de ses fonctions Caneparo avec l'appui de son ami le commissaire Viviani décide alors de faire cavalier seul et d'infiltrer le gang responsable de la mort de Del Buono. Il va jouer à un dangereux double jeu pour remonter la filière jusqu'au commanditaire du crime, l'apparemment intouchable "Padulo".
Les rues de la violence également connu sous le titre Polices parallèles en action se veut l'exact reflet de ce qu'on appelle les années de plomb. En ce milieu d'années 70 l'Italie est gangrénée par des bandes de voyous qui sèment la terreur. L'époque est aux attentats, au terrorisme, aux hold-up, aux rapts... orchestrés par des mouvements essentiellement gauchistes, communistes et néo fascistes. La police est non seulement impuissante mais elle est corrompue tout comme le système judiciaire et politique. La mafia gagne du terrain. C'est dans ce contexte très sombre que la plupart des polizeschi tournés à cette époque se situe. Les rues de la violence ne fait pas exception à la différence près qu'il se veut plus
réaliste que ses pairs d'où un coté plus humain, moins caricatural de ses personnages contrairement à ceux de Lenzi et Castellari. L'inspecteur Caneparo agit seul, use et abuse de moyens peu orthodoxes pour débarrasser Milan de ceux qui la pourrissent, s'érige en policier vengeur comme le feront Tomas Milian et Maurizio Merli mais de manière plus modérée sans pour autant rien perdre ni de sa force ni de sa dureté. Il n'est plus un surhomme ici, simplement un homme sur le fil du rasoir déchiré entre sa position de flic et le double jeu auquel il est contraint de se soumettre, ce qui lui donne une certaine fragilité.
Pour le reste la recette reste inchangée. Caneparo a recours à des méthodes peu
conventionnelles qui déplaisent à ses supérieurs et le font démettre de ses fonctions actuelles. Les voyous sont odieux et n'ont aucune pitié pas même pour les femmes et les enfants envers lesquels ils usent d'une violence aussi brutale que choquante. En témoignent deux scènes clé, celle qui ouvre le film où une petite fille est froidement abattue parce qu'elle pleure, puis celle où une femme enceinte est tuée sans aucune hésitation, deux séquences aujourd'hui impensables qui reflètent parfaitement non seulement ces années noires mais également le cinéma italien de cette époque, ultra permissif... et permissif rime souvent avec jouissif pour le spectateur qui ainsi peut pleinement assouvir
ses instincts pervers. Quant à la police elle est coincée, a les mains liées et ne peut agir. Ne reste que l'audace de quelques policiers qui osent franchir les limites pour faire justice. Comme bien d'autres polizeschi Milano trema est une critique féroce du système judiciaire, de l'ordre et de la politique, la critique d'une société qui voit dans la violence et l'intimidation le moyen le plus radical pour régler ses problèmes.
Martino signe un polizesco dont les maitres mots sont violence et action. Les morts tombent comme des mouches comme ceux ou celles qui ont le malheur d'approcher l'ambigu Padulo, les courses poursuites effrénées s'enchainent ainsi que les impressionnantes
cascades réglées par Rémi Julienne. Efficacement mis en scène ces Rues de la violence ne laisse place à aucun temps mort. Martino vise le spectaculaire et y parvient donnant à son film un ton aussi incisif qu'exaltant. De quoi tenir le spectateur en haleine et retenir aussi son attention jusqu'aux ultimes minutes qui nous offrent un petit retournement de situation pas forcément surprenant (le spécialiste l'aura senti venir) mais cependant intéressant. Le message passe, contestable ou non comme l'idéologie véhiculée. Dans cette société où règne la peur, où l'ordre nait du désordre, chacun est une petite pièce de puzzle qui dépend d'une autre, d'un engrenage bien plus complexe qu'on peut imaginer. La pieuvre!
Si Martino se montre à la hauteur de ses ambitions l'interprétation, autre important atout du film, est tout aussi bonne parfaitement menée par un Luc Merenda qui ici sans jamais trop en faire excelle et accentue le coté réaliste du film. Il nous offre en plus un nu intégral qui caressera l'oeil. A ses cotés tout aussi bons sont Silvano Tranquili, Richard Conte trouble à souhait et Chris Avram entourés de quelques noms indissociables au genre tels que Bruno Corrazzari, Luciano Bartoli, Luciano Rossi et Antonio Casale (les deux évadés de prison) sans oublier la gente féminine représentée ici par Martine Brochard en junkie au grand
coeur et la rousse Lia Tanzi en gentille petite prostituée compatissante.
Rythmé par une jolie et très efficace partition musicale signée des frères Maurizio et Guido De Angelis Les rues de la violence est non seulement un des premiers films du genre mais c'est avant tout un très bel exemple de polizesco, un exemple réussi qui aujourd'hui malgré ses quelques défauts n'a rien perdu de son panache. En un mot voilà un must du genre. Venant de Sergio Martino cela n'est guère surprenant.