Tutti i colori del buio
Autres titres: L'alliance invisible / Toutes les couleurs du vice / All the colors of the dark / Todos los colores de la oscuridao
Real: Sergio Martino
Année: 1972
Origine: Italie
Genre: Giallo
Durée: 91mn
Acteurs: Edwige Fenech, George Hilton, Susan Scott, Ivan Rassimov, George Rigaud, Marina Malfatti, Dominique Boschero, Luciano Pigozzi, Lisa Leonardi, Renato Chiantoni, Vera Drudi...
Résumé: Traumatisée par le meurtre de sa mère dont elle a été témoin lorsqu'elle était enfant puis par une fausse couche, Jane Harisson sombre peu à peu dans une sorte de folie. Suivie par son psychiatre, épaulée par sa voisine un brin libertine, elle cherche à se libérer de ses peurs. Si elle semble y parvenir progressivement, d'étranges faits vont transformer de nouveau sa vie en un long cauchemar. Persécutée et menacée par un mystérieux homme au regard de glace, plus rien pour la pauvre Jane ne semble être réel...
Réalisé juste avant Il tuo vizio è una stanza chiusa e solo io ne ho la chiave, profitant du succès inattendu remporté par L'étrange vice de Mme Wardh, Tutti i colori del buio plus connu chez nous sous les titres L'alliance invisible ou Toutes les couleurs du vice met cette fois l'accent beaucoup plus sur l'aspect fantastique. Des quatre gialli que réalisa Martino, L'alliance invisible est sans nul doute le film le moins convaincant.
Mélangeant Roman Polanski et Dario Argento, Tutti i colori del buio est un thriller mêlant plus ou moins habilement giallo et satanisme. C'est justement ce mélange qui nuit à l'ensemble du film et notamment à sa qualité après une ouverture foudroyante qui laissait présager une oeuvre particulièrement forte et réussie. Martino tente de perdre le spectateur au même titre que sa vulnérable héroïne entre rêve et réalité, tourmentée par ses propres démons, un peu comme dans Le Venin de la peur de Lucio Fulci mais sans réelle conviction ni imagination. Ici, on abandonne plus souvent la trame du giallo au profit d'un aspect plus surréaliste qui donne l'impression que tout le film n'est qu'un long cauchemar que fait la jeune femme. Martino ne cesse de jongler entre les scènes de rêve et le réel jusqu'à se faire se les faire chevaucher pour mieux égarer son public dans les méandres de l'éventuelle folie de Jane en oubliant tout repère spatio-temporel.
A la vision de ce film, on pense obligatoirement au film de Polanski Rosemary's baby auxquelles les hallucinations constantes de l'héroïne font référence au même titre que cet étrange complot, ces manigances qui semblent se tramer autour de la l'impuissante et malheureuse héroïne. C'est dans un univers étouffant, suffocant qu'elle évolue alors, prisonnière d'une cage invisible dans laquelle on cherche à l'enfermer et dans laquelle se terminera son terrible destin.
Tutti i colori del buio est une sorte de fable moderne construite comme un véritable thriller transalpin, alternant l'onirisme, le surréalisme et les peurs véritables mais Martino malgré une mise en scène comme d'accoutumée irréprochable et un professionnalisme certain semble pourtant un peu se perdre en ne sachant guère quelle direction prendre, celle du pur thriller ou celle du film d'horreur satanique. Cette hybridation entre deux genres bien spécifiques ne fonctionne pas toujours très bien ici. Passé l'agréable surprise, l'édifice se fissure quelque peu et laisse entrevoir nombre de lacunes qui finissent par pénaliser le résultat.
Accumulant les effets déformants et psychédéliques, les contre-plongées vertigineuses, Tutti i colori del buio n'en oublie pas pour autant un érotisme souvent généreux encore moins les effets sanglants à travers de nombreuses scènes de meurtres souvent graphiques qui devraient plaire aux amateurs et de nudité. La toujours sensuelle Edwige Fenech s'y déshabille allégrement exposant avec bonheur son corps sous l'objectif de Martino. A ses cotés on retrouvera son habituel partenaire, l'argentin George Hilton et Ivan Rassimov affublé pour l'occasion de lentilles bleu azur qui lui donne un regard à vous glacer les sangs, toujours aussi impressionnant dans l'éternel rôle du persécuteur. On notera également la présence de Susan Scott dans un rôle de second plan malheureusement.
Bercé par une envoutante partition musicale signée une fois de plus Bruno Nicolai, Tutti i colori del buio s'il n'est pas le meilleur giallo de son auteur ne laisse pas pour autant indifférent. Il se laisse regarder avec un certain plaisir ne serait ce que pour certaines séquences plutôt saisissantes comme celle des poupées en plastique sanguinolentes et son ambiance très spéciale, troublante et étrange, oscillant sans cesse entre le pur fantastique et le thriller à l'italienne pur et dur.