Lady Emmanuelle
Autres titres:
Réal: Pasquale Fanetti
Année: 1989
Origine: Italie
Genre: Erotique
Durée: 78mn
Acteurs: Malù, Micaela, Gianni Macchia, Antonio Zequila, David D'Ingeo...
Résumé: Jeune bourgeoise Emmanuelle ne supporte plus son mari, les hommes de manière générale qui pour elle ne sont que des machines à sexe qui utilisent les femmes comme des objets pour assouvir leurs pulsions. Sa rencontre avec Lyonn, une belle écrivaine qui partage ses idées, va changer sa vie. Elle finit par quitter son mari pour vivre une relation passionnée avec la jeune femme. Elle découvre un jour que Lyonn l'a trahie...
Tout le monde connait Emmanuelle, héroïne internationale à jamais personnifiée par la regrettée Silvia Kristel, un succès interplanétaire au box-office qui n'allait pas tarder à donner naissance à de nouvelles Emmanuelle, pas les séquelles du film de Just Jaeckin mais de nouvelles héroïnes nées de l'imagination des scénaristes tant espagnols, français, germaniques qu'italiens. Et du coté de l'Italie c'est bel et bien notre Black Emmanuelle incarnée par la divine Laura Gemser qui est devenue la plus célèbre, personnage incontournable du cinéma érotique italien, bien plus que ses consoeurs Yellow Emanuelle,
Blue Emanuelle ou Soeur Emanuelle. Ses aventures se déclinèrent en une dizaine d'épisodes jusqu'en 1982 puis elles cessèrent. Emmanuelle avait vécu et bien vécu. Avec la mort du cinéma de genre et d'exploitation, du cinéma érotique (et pornographique) par la même occasion, les réalisateurs afin de survivre durent s'adapter. Téléfilms, productions vidéos et séries B destinées le plus souvent aux marchés étrangers devinrent le quotidien des bissophiles des années 90. C'est dans ce contexte qu'Emmanuelle revint un temps à la vie en 1989 sous l'égide de Pasquale Fanetti, un des spécialistes de l'érotisme version années 90 qui jusqu'en 2006 allait réaliser une petite vingtaine de coquineries. Lady Emmanuelle est une de ses toutes premières sauteries celluloïd.
Emmanuelle est une riche bourgeoise fascinée par les écrits de sa grand-mère qu'elle a découvert dans un grenier. Femme libre et libérée bien avant l'heure elle y parle ouvertement de sexe et de sa façon de le concevoir. Cette fascination la pousse à vouloir écrire un livre. Non seulement elle passe son temps à lire les manuscrits de sa mère-grand mais elle a fait appel à une écrivaine spécialisée, Lyonn, qu'elle ne quitte plus d'autant plus qu'elle partage la même vision du sexe. Comme mamie autrefois les deux femmes ne supportent plus les hommes. A leurs yeux ce sont des machines qui pratiquent le sexe en suivant leurs
pulsions sauvages, les femmes ne sont pour eux que des objets dont ils se servent à leur guise et envies. Les deux femmes sont pour le romantisme, la sentimentalité, l'amour pur, le sexe libéré de tout désir et la liberté. Michael, le mari d'Emmanuelle, ne supporte plus que sa femme se refuse à lui, qu'ils n'arrivent plus à avoir de relations sexuelles. Il rejette bien sûr la faute sur Lyonn jusqu'au jour où, las, il quitte le domicile conjugal. Emmanuelle et Lyonn enfin seules vont vivre une relation amoureuse passionnée jusqu'au jour où Emmanuelle qui de temps à autre s'offre un homme découvre que Lyonn en a payé un pour pouvoir les observer. Furieuse Emmanuelle l'oblige à se faire posséder par un mâle puis
met un terme à leur relation. Elle se réfugie dans les bras du beau Pierre qui devient son amant. Désespérée à l'idée d'avoir perdu Emmanuelle Lyonn fait kidnapper Pierre...
Emmanuelle n'a plus rien à offrir, on s'en doutait. Le film de Fanetti n'a strictement rien d'innovateur et ne fait que reprendre un thème vu et revu des milliers de fois, la femme libérée qui aux démons du sexe masculins préfère s'épanouir dans les bras d'une femme le temps d'une intense relation saphique. Et l'intrigue doit ainsi tenir 90 minutes. Qu'Emmanuelle soit une descendante de Lady Chatterley (plusieurs fois citée dans le film, Fanetti en tournera d'ailleurs sa propre version en 1991) n'apporte rien tout comme le fait
que notre bourgeoise se nomme Emmanuelle dont elle n'a que la liberté d'esprit. Le film de Fanetti est tout bêtement une sorte de roman-photo rose auquel on a ajouté quelques scènes érotiques un peu piquantes, une pellicule très dans l'air de son temps c'est à dire totalement aseptisée. Lady Emmanuelle ressemble à ces productions érotiques destinées aux chaines du câble, ces coquineries qui passent tard le soir et qu'à une certaine époque M6 n'aurait pas renié. Voilà un film patiné à l'érotisme papier glacé, jamais trop hard, jamais trop soft mais qui reste toujours décent. Défilé de lingerie et scènes saphiques sur fond de décors ultra chic superbement mis en valeur par une photographie ultra léchée, le tout au
rythme d'une bande son tout en saxophone. On a un résumé de ce que Lady Emmanuelle nous réserve. Ajoutons les inévitables balades romantiques sur la plage main dans la main, les diners aux chandelles scintillantes et surtout, années 90 obligent, les séquences en discothèque où on se déhanche (on fume aussi le narghilé ici) et on a un bel aperçu de cette petite bande érotique qui ressemble à des centaines d'autres de cette époque. Et l'érotisme alors?
Pas de quoi vraiment fouetter un chat ou exciter la libido de spectateur. Le temps où on s'ébattait nu semble bien loin. Aujourd'hui les hommes gardent leur pantalon (et n'ouvrent
même plus leur braguette), Emmanuelle garde le plus souvent sa culotte mais ils font tout de même l'amour, c'est prodigieux. L'amateur de lingerie sera plus heureux et remarquera les guêpières d'Emmanuelle, ses nuisettes et dentelles. C'est beau, c'est chic, un peu comme le brillant glaçage d'un superbe gâteau pas si savoureux que ça une fois dans l'assiette. Frustré on s'ennuie un peu. Reste les caresses saphiques des deux amantes pour un peu nous tiédir, de doux et sensuels baisers, quelques discrètes masturbations et une ou deux trouvailles érotiques amusantes (les baguettes chinoises). C'est peu mais ça fera au moins frétiller devant les écrans.
Lady Emmanuelle marque aussi les débuts des nouvelles stars de l'érotisme italien. Adieu Laura, Annie et toutes celles qui nous avaient fait vibrer. Voilà entre autre l'italo-hongroise Malu qui s'apprêtait à régner sur le genre durant une petite décennie. Malu, actrice fétiche de Fanetti, est donc aujourd'hui Emmanuelle avant d'être Lady Chatterley. Malu est pulpeuse, Malu a les arguments qu'il faut pour charmer la gente masculine mais son manque de personnalité ne la différencie guère de la multitude d'actrice érotiques de ces années là. C'est encore plus le cas de sa partenaire, la peu gracieuse starlette éphémère Micaela, dont le jeu est des plus quelconque. Après une absence de dix ans on assiste ici au piteux
retour de l'ex play-boy Gianni Macchia dans le rôle du mari. Gianni reprend son rôle d'époux machiste, odieux comme jadis dans Quando l'amore è sensualità mais hormis justement être odieux ça ne fonctionne plus. Fort heureusement il disparait assez vite. Gianni avait-il quelques soucis financiers pour accepter de se compromettre dans de telles pellicules puisqu'il récidivera avec Sensazioni d'amore (avec une Marisa Mell sur la pente descendante) et Provocazione fatale avant de se retirer et de s'adonner à sa passion, la restauration? L'indispensable et toujours aussi poupin David D'ingeo (crédité José D'ingeo) complète l'affiche dans le rôle de Pierre, le jeune et bel amant.
A des années lumière de nos Emmanuelle d'hier cette Lady Emmanuelle est un produit d'une banalité exemplaire, une petite bande érotique très esthétique mais d'une regrettable tiédeur à servir en guise d'apéritif avant de ressortir justement les aventures de Silvia Kristel et autre Laura Gemser. Le film de Fanetti est un parfait reflet non seulement de sa filmographie mais du cinéma érotique des années 90 de manière générale. Pas désagréable mais parfaitement insipide.