Lo strano vizio della signora Wardh
Autres titres: L'étrange vice de Madame Wardh / Les étranges vices de Madame Wardh / Strange vice of Mrs Wardh
Real: Sergio Martino
Année: 1971
Origine: Italie
Genre: Giallo
Durée: 97mn
Acteurs: Edwige Fenech, George Hilton, Ivan Rassimov, Alberto De Mendoza, Manuel Gil, Conchita Airoldi, Carlo Alighiero, Bruno Corazzari, Pouchi, Miguel Del Castillo, Marella Corbi, Luis de la Tejeda, Mira Vidotto, Brizio Montinaro...
Résumé: De retour à Vienne, Julie Wardh, une jeune et jolie bourgeoise, a bien du mal à se débarrasser de son ex-époux, Neil, un homme violent avec qui elle partage un étrange et trouble passé. Julie ne peut s'empêcher de revivre les certains moments qu'elle a connu avec. Adepte du masochisme, Neil lui apportait cette violence sexuelle dont elle a besoin. Alors que l'homme la rejoint à Vienne afin de lui rappeler qu'elle lui appartient pour toujours, son entourage proche tombe sous la main d'un mystérieux meurtrier particulièrement sadique. Julie de plus en plus vulnérable sombre peu à peu dans la folie. Afin d'échapper à Neil qu'elle pense coupable des meurtres, elle quitte son mari et s'enfuit en Espagne avec son amant, un bellâtre. Si Neil est retrouvé mort, les assassinats continuent cependant. Détruite psychologiquement, Julie est désormais à la merci du tueur...
Premier giallo signé Sergio Martino, Lo strano vizio della signora Wardh apparait comme une sorte de pont entre le giallo à la Lenzi très en vogue à la fin des années 60 et le giallo à la Argento suite au récent succès de Quatre mouches de velours gris sorti l'année précédente qui allait engendrer toute une nouvelle vague de thrillers. De Lenzi, Martino aidé au scénario par un des spécialistes du genre, Ernesto Gastaldi, récupère la trame du complot, la fragilité psychologique de l'héroïne ainsi que l'aspect érotique tandis que de Argento il ne garde que l'assassin tout de noir vêtu, la violence et le sadisme des meurtres. Sergio Martino a en sa possession tous les éléments nécessaires ainsi qu'un scénario certes guère original mais parfaitement efficace, il maîtrise cependant mal son histoire à l'intrigue volontairement alambiquée qui bien souvent apparait un peu trop brouillon.
Si l'amateur y verra une sorte de prélude à son giallo suivant, Tutti i colori del buio / L'alliance invisible / Toutes les couleurs du vice, la rhétorique est cependant nettement moins bonne. Ainsi a t-on du mal à réellement cerner le personnage de Julie Wardh et par conséquent à ressentir sa détresse. Mal amené et desservi par une intrigue qui comporte de nombreux trous, il est tout aussi difficile d'analyser sa lente dégradation mentale que d'accepter et comprendre ses choix notamment amoureux. Au final, son personnage laisse le spectateur indifférent.
On ne retiendra donc que ses penchants pour le masochisme, l'étrange vice auquel fait référence le titre, thème majeur du film que Martino met en images de manière inoubliable lors notamment de deux superbes séquences à l'onirisme morbide. La première est celle du viol sous la pluie battante qui ouvre le film, la seconde celle où son ex-amant lui taillade un sein à l'aide d'un tesson tandis qu'une pluie cette fois de verre recouvre majestueusement son corps à demi dénudé qu'un filet de sang macule.
Martino compense le déséquilibre de son scénario par un érotisme exacerbé et un sadisme tout à fait jouissif au détour de quelques meurtres le plus souvent prodigués à l'aide d'un rasoir. Tourné entre Vienne et l'Espagne, soutenu par un très beau thème musical signé Nina Orlandi, Lo strano vizio della signora Wardh doit également beaucoup à son interprète principale, Edwige Fenech, dont Martino filme le corps nu aussi souvent qu'il le peut. A quelques années des sexy comédies qui feront sa renommée, Edwige, belle et fragile même si elle n'a pas le coté candide de Carroll Baker, porte ce thriller sur ses robustes épaules aux cotés de l'argentin George Hilton avec qui elle formera à l'écran le temps de quatre autres films le couple idéal.
On notera également au générique la présence de talentueux noms tels que Alberto De Mendoza, Carlo Alighiero ainsi que Ivan Rassimov dont le charisme et le regard de glace n'auront jamais aussi bien été utilisés au cinéma. Quant à la blonde et enjouée Conchita Airoldi, épouse du producteur, c'était là son premier rôle au cinéma.
Certes moins carré que Tutti i colori del buio bien que lui étant supérieur au niveau ambiant, Lo strano vizio della signora Wardh et son final à tiroirs un peu grossier que l'amateur aura assez facilement décelé n'en reste pas moins un bon et honnête giallo, attachant et fort bien rythmé.
Chose amusante, l'amateur au vu du petit mot que l'ex-amant de julie lui laisse "Ton vice est une pièce fermée dont moi seul ait la clé" pensera immédiatement au troisième giallo du réalisateur qui porte justement ce titre. Si elle fait référence à Freud, l'expression fut pourtant inventée par Martino à des fins commerciales afin de lancer au mieux le film, une pratique alors courante dans le monde du cinéma de genre italien. Elle devait être au départ attribuée au Venin de la peur de Lucio Fulci.