Halina Zalewska: le diamant polonais
Si son nom peut parfois nous échapper ses yeux émeraude, son regard si intense, un des plus beaux qu'ait connu le cinéma de genre transalpin, resteront quant à eux à jamais gravé dans nos mémoires bissophiles. Cette ex-Miss Italie native de Pologne à qui Visconti mit le pied à l'étrier fut au générique de quelques grands classiques du cinéma Bis des années 60 mais eut cependant quelques difficultés à se faire réellement une place au soleil, raison pour laquelle elle eut du mal à survivre aux années 70 qui très vite l'engloutir jusqu'à sa mort prématurée en 1976. Revenons aujourd'hui sur le parcours de cette superbe polonaise aux yeux revolver nommée Halina Zalewska.
Halina Zalewska est née en 1940 en Pologne d'une mère issue de la noblesse polonaise et d'un père romain, le banquier Ingo Galleani. Le nom de Galleani ne vous est peut-être pas inconnu puisque Halina n'est autre que la demi soeur de l'actrice Ely Galleani, née du second mariage de son père avec une jeune noble ukrainienne qui en pleine révolution dut fuir la Russie afin d'éviter d'être jugée pour tsarisme. Halina quitta très jeune la Pologne pour grandir à Alassio, en Italie - Ligurie, le village natal de son père. Elle va y grandir et y faire ses études. A tout juste 18 ans Halina remporte le joli concours de Miss Muretto, un
concours de beauté crée et organisé par la ville d'Alassio, puis la même année elle est élue Miss Italie. Cette élection lui apporte une certaine renommée et sa beauté ne laisse personne indifférent surtout pas les producteurs et réalisateurs. C'est ainsi que Lucchino Visconti la remarque et lui propose en 1963 un petit rôle dans Le guépard. Il est intéressant de noter que c'est aussi Visconti qui aura donné à sa soeur Ely sa première chance à l'écran en lui offrant un rôle dans Mort à Venise puis Les damnés.
Avec Le guépard la carrière d'Halina est lancée. Les propositions vont s'enchainer. On peut ainsi la voir dans deux péplums, Hercule, Samson et Ulysse du spécialiste Pietro Francisi
et Le triomphe des dix mercenaires de Nick Nostro cosigné avec Sergio Sollima. Elle s'essaie à l'horreur gothique en apparaissant dans deux classiques du genre Un ange pour Satan de Camillo Mastrocinque et surtout La sorcière sanglante de Mario Caiano. Toujours dans l'optique de la diversification elle est au générique d'un spy movie, Agente 777: invito ad uccidere de Enrico Bomba puis à ceux de deux films de science-fiction signés Antonio Margheriti, les fameux La mort vient de la planète Aytin et Il pianeta errante. Il aurait été étonnant que Halina ne se retrouve pas propulsée au Far West à une époque où le western spaghetti envahissait les salles obscures. Elle en a quatre à son actif, à savoir Gringo joue
sur le rouge aux cotés de Tony Kendall, Joe l'implacable avec Anthony Steffen, L'odio è il mio dio et surtout le fort réputé Les tueurs de l'ouest dans lequel elle joue l'amie de Tomas Milian. Après sa prestation chez Visconti Halina renoue à nouveau avec un cinéma d'un niveau un peu plus élevé en travaillant cette fois pour Ettore Scola, la comédie Cent millions ont disparu, puis elle revient au cinéma de genre avec quelques polars et thrillers dont Omicidio per appuntamento de Mino Guerrini et le mafia movie Gente d'onore de Folco Lulli en 1969 dans lequel elle joue une jeune veuve sicilienne.
C'est avec ce film qu'elle clôt les années 60. Les années 70 seront pour Halina bien plus
dures. Les propositions vont se faire beaucoup plus rares. Sa carrière amorce un lent et inexorable déclin. L'actrice aux yeux de diamant ne tourne quasiment plus. Elle survit grâce à la télévision. Entre 1970 et 1973 on ne la voit en effet que dans le téléfilm Viaggio di ritorno puis trois séries télévisées Le père Goriot, Nero Wolfe et Nucleo centrale investigativo, son ultime prestation en 1973. Si en 1975 on la voit encore au générique du polar La polizia brancola nel buio de Helia Colombo il faut savoir que ce film fut en fait tourné en 1972 et ne sortit en salles que trois ans plus tard. Ce qu'on retiendra le plus de ce film posthume bancal, c'est son visage éteint, ce regard étrangement triste, sombre reflet malheureusement de ce qu'elle vivait alors. Halina vécut en effet assez mal cette période de
vache maigre. Elle se réfugia dans l'alcool dont elle devint doucement dépendante. Certains de ceux qui l'ont connu soupçonnaient également une addiction aux drogues.
Après la sorti du film de Colombo on n'entendra plus parler d'Halina durant quasiment un an jusqu'à cette nuit tragique du 16 août 1976. Alors qu'elle se met au lit Halina allume une cigarette et malheureusement s'endort. Le mégot se consume déclenchant un incendie dans son appartement à Rome. Son corps à demi carbonisé sera retrouvé le lendemain matin. A l'annonce de sa mort quelques jours plus tard tout le petit village d'Alassio est
bouleversé. Tout ceux qui l'ont connu se rappellent de la petite fille qui jouait dans le parc publique, de l'adolescente de 17 ans dont tous les jeunes hommes étaient amoureux. Au Caffé Roma dont elle était une habituée on se souvient surtout de sa tristesse, son mal être durant tous les mois qui ont précédé sa mort. Halina supportait mal cette traversée du désert et disait regretter son passé d'actrice. Si elle avait pu revenir en arrière disait-elle jamais elle n'aurait choisi cette voie.
A nos yeux, loin d'être des diamants, Halina n'a en aucune façon raté sa voie. Si elle survivra à travers quelques grands classiques incontournables du cinéma de genre elle restera également un des plus beaux, un des plus inoubliables regards du cinéma italien de ces lointaines années.