La morte negli occhi del gatto

Autres titres: Les diablesses / Corringa / Seven deaths in the cat's eyes / Seven dead in the cat's eyes
Réal: Antonio Margheriti
Année: 1973
Origine: Italie
Genre: Epouvante
Durée: 95mn
Acteurs: Jane Birkin, Hiram Keller, Françoise Christophe, Anton Driffing, Venantino Venantini, Serge Gainsbourg, Dana Ghia, Konrad Georg, Luciana Pigozzi, Bianca Doria, Franco Ressel...
Résumé: La jolie et jeune Corringa se rend au manoir familial des McGrieff afin d’y retrouver sa mère et sa tante. A son arrivée, elle constate que l’ambiance est délétère. Son cousin James, le hobereau des lieux se montre hostile envers Corringa et les invités venus diner. Un mystérieux assassin va décimer les convives. Seul témoin des meurtres: un superbe chat...
En réalisant Les diablesses, Antonio Margheriti à qui on devait déjà l'excellente trilogie de l'épouvante Danse macabre, La vierge de Nuremberg et La sorcière sanglante tenta de renouer en ce début de décennie avec un certain cinéma gothique si cher aux années 60 en y mêlant subrepticement cette fois les bases du giallo, un genre qui en ce début d'années 70 était à son apogée en Italie. Ce mélange alors assez courant dans le cinéma transalpin donne ici un agréable petit thriller horrifique qui n'arrive peut être pas à la hauteur de ses ambitions mais ne parvient cependant jamais à être ennuyant ou ennuyeux. Précisons que le ridicule titre français est totalement inapproprié ici, on lui préférera son titre original, littéralement La mort dans les yeux du chat qui renvoie directement à l'intrigue elle même. C'est aussi un clin d'oeil direct aux thrillers italiens tels que La morte cammina con i tacchi alti, La morte carezza a mezzanotte, La morte scende leggera...
C'est dans un somptueux château écossais, le pays des fantômes et des légendes par excellence, que sont réunis les différents protagonistes de cette histoire qu'un mystérieux assassin va décimer tour à tour. Le seul témoin de ses meurtres est un superbe chat roux. Tous ces crimes semblent tourner autour de la jeune Korringa à qui revient l'héritage familial et de son cousin James, un garçon solitaire et renfermé que l'on dit à demi fou. Tous deux détiendraient la clé de cette sanglante énigme familiale.
Comme il l'avait déjà fait avec brio pour sa trilogie, Margheriti déploie tous les ingrédients propre au cinéma gothique avec ce savoir-faire qui le caractérise. Alors que rode l'ombre des vampires, le cinéaste nous entraine au son d'une partition musicale composée essentiellement de violons de passages secrets en sombres cryptes où gisent des cadavres aux visages rongés par les rats, de chambres inquiétantes en longs couloirs feutrés éclairés par des chandeliers dans lesquels déambulent Korringa en nuisette blanche tandis que d'inquiétantes silhouettes s'y faufilent et disparaissent.
Le film est une succession de messes basses et de regards accusateurs précédant de longs discours durant lesquels les différents protagonistes, tous plus énigmatiques les uns que les autres, se renvoient mutuellement leur haine. Lady Mary, châtelaine austère et désargentée, refuse de vendre son château à la professeur de français, une putain aux tendances saphiques. Alicia, la soeur de Mary, est intéressée par James, un garçon névrotique passionné de peintures qui malgré cette névrose semble cependant être très lucide. On y retrouve toute cette galerie de figures propre au genre, femmes apeurées, jalouses et perverses, personnages inquiétants, enquêteur nonchalant... qui tous se retrouvent confinés dans un lieu où pèse une malédiction familiale entrainant conspirations et morts mystérieuses.On sent bien évidemment planer l'ombre de Mario Bava, de Freddie Francis et même de Edgar A. Poe. Si La morte negli occhi del gatto renvoie irrémédiablement à la trilogie du cinéaste il fait également songer à des films tels que La chute de la maison Usher et Le corps et le fouet même si Les diablesses reste en dessous des oeuvres citées.
Quelques meurtres et visions sanglantes parsèment l'ensemble sous les yeux de ce magnifique chat qui devient un personnage à part entière du récit. Il est ici l'élément maléfique indispensable à ce type d'histoire dans laquelle l'enquête menée par un Serge Gainsbourg plutôt cocasse et nonchalant est très vite reléguée au second rang voire au troisième. Il est intéressant de noter aussi l'inattendue présence d'un orang-outang qui apporte une ultime note horrifique à l'intrigue lors de ses sautillantes apparitions
Plutôt lent dans son déroulement, Les diablesses s'attache surtout à créer une atmosphère de peur qui trouve ses origines dans les légendes tout en essayant tant bien que mal à instaurer un climat trouble et pesant.
L'interprétation internationale est correcte avec en tête l'austère Françoise Christophe particulièrement convaincante dans la peau de Lady Mary. Jane Birkin est une Korringa tout à fait louable, jeune fille frêle en proie à ses terribles tourments. On appréciera la présence du toujours énigmatique de Hiram Keller dans la peau de James qui s'il parvient avec une certaine dextérité à nous faire croire à sa folie a plus de mal à nous convaincre lors de ses accès de fureur. On regrettera par contre que le personnage de Venantino Venantini ne soit guère plus mis en avant.
Les diablesses n'est certes pas un film majeur dans l'oeuvre de Margheriti mais il n'en demeure pas moins une agréable surprise, une distraction honorable pour tous les amateurs d'épouvante gothique. Il reste avant tout un des derniers films transalpins du genre à avoir été tourné. S'il n'insuffle aucun sang neuf au genre, si derrière son canevas un rien alambiqué, il n'a rien de très original. Les diablesses reste néanmoins un honnête hommage aux grands classiques de ce cinéma dont l'angoissante atmosphère reste le principal atout.
Il faut savoir que la version française est amputée de quatre scènes dont une importante, particulièrement onirique, située au milieu du film, celle du cauchemar de Corringa dans lequel elle voit sa mère transformée en goulve ricanante revenir des Enfers. Outre sa beauté cette séquence apporte surtout une cohérence au récit qui s'en trouve ainsi altérée. Ces coupes rendirent Margheriti furieux lorsqu'il s'en aperçut, le malheureux cinéaste ne reconnaissant plus son oeuvre. Fort heureusement elles sont bel et bien présentes dans les éditions italiennes.