Danza macabra
Autres titres: Danse macabre / Castle of blood
Real: Antonio Margheriti
Année: 1964
Origine: Italie
Genre: Epouvante
Durée: 86mn
Acteurs: Barbara Steele, Georges Rivière, Margarete Robsahm, Arturo Dominici, Silvano Tranquilli, Sylvia Sorrente, Giovanni Cianfriglia, John Peters, Merry Powers, Umberto Raho, Salvo Randone, Benito Stefanelli, Johnny Walters...
Résumé: Le journaliste Alan Foster en visite à Londres à Londres fait la rencontre de Edgar Allan Poe alors qu'il conte dans une taverne une de ses célèbres histoires d’épouvante. Celle ci concerne le château de Lord Blackwood, également présent, réputé hanté. Blackwood propose alors au journaliste qui ne croit pas en l’existence des fantômes, de relever un pari: passer toute une nuit dans son château et en ressortir vivant à l’aube. La légende voudrait que personne n’ait jamais réussi à s'en échapper. Dubitatif et fort amusé, Alan accepte et se rend au manoir le 1er novembre, le jour même de la fête des morts. La nuit va être longue et très étonnante...
Aux cotés de Riccardo Freda et Mario Bava, Antonio Margheriti fut dans les années 60 un des principaux investigateurs du cinéma gothique à l'italienne avec notamment sa célèbre trilogie ouverte en 1964 avec Danse macabre puis La vierge de Nuremberg et enfin La sorcière sanglante. Beaucoup plus intéressé par les éléments traditionnels du gothique que par la mise en place d'une étude socio-psychologique des divers protagonistes, il n'est guère étonnant que le cinéaste ait accepté de réaliser ce film écrit par Bruno Corbucci et Giovanni Grimaldi dont la mise en scène devait au départ revenir à Corbucci. Danse macabre prend pour personnage principal un jeune journaliste, Alan Foster, qui lors d'un séjour à Londres rencontre dans une taverne le célèbre écrivain Edgar Allan Poe. Il fait également connaissance de Lord Blackwood qui le défie de passer une nuit complète dans son château réputé maudit et d'en ressortir vivant à l'aube, la légende voulant que toute personne y pénétrant meurt au petit jour. Sceptique, Foster relève le défi et s'apprête donc à passer, seul, la nuit de Toussaint au château des Blackwood.
Très influencé par le cinéma d'épouvante anglais notamment celui de la fameuse firme Hammer, renforcé ici par la présence en début et fin de film de la présence du personnage très britannique de l'écrivain Edgar Allan Poe, Danse macabre rassemble quasiment tous les ingrédients du genre à savoir l'imposant château isolé noyé dans une nappe de brume épaisse, longs corridors éclairés à la bougie, l'inévitable et lugubre cimetière, portes et fenêtres qui claquent, étranges apparitions spectrales, personnages énigmatiques, secrets de famille, l'ensemble baignant dans un incessant climat de mystère. On y ajoute ici certains des éléments typiques au cinéma de genre italien à savoir cette pointe d'audace que sont le vampirisme, la nécrophilie sublimée quelques années plus tard par Freda avec L'horrible secret du professeur Hichcock, le lesbianisme et l'érotisme même si ce dernier reste fort sage, époque oblige. On retiendra surtout le sein nu de Silvia Sorrente et l'évidente relation saphique entre Elisabeth et Julia. Ces scènes et certains dialogues entre Poe et Foster furent jadis censurés notamment par les distributeurs américains et ne furent réintégrés que lors de la sortie vidéo italienne du film.
Par certains aspects le film de Margheriti offre quelques similitudes avec La nuit de tous les mystères de William Castle avec Vincent Price. Sept personnes y étaient en effet invitées à passer toute une nuit enfermées dans une maison supposée hantée contre une grosse somme d'argent. Danse macabre le surpasse aisément de par son incroyable esthétisme, sa mise en scène et l'atmosphère très étrange que Margheriti parvient à instaurer tout au long du métrage. Sublimé par un noir et blanc magnifique, le film dégage une ambiance assez particulière dans lequel âmes défuntes et êtres vivants se croisent, se rencontrent et
s'aiment. Car avant tout Danse macabre est une très belle histoire d'amour nécrophile entre un fantôme, la belle Elisabeth Blackwood, et le journaliste, une romance impossible durant laquelle Elisabeth fera son possible et se sacrifiera même pour sauver celui qu'elle aime dans un monde qui ne lui appartient plus. C'est peut être là une des grandes forces du film, son aspect le plus émouvant. C'est également une forme de résolution pour Foster qui ne voit guère de différence entre Londres, ville plongée dans le brouillard où règne l'ennui et la solitude, et ce château qui est à l'image même de la ville. Etre dans la capitale ou dans ce manoir isolé revient au même à la petite différence près qu'en ces lieux lugubres et hantés il est en compagnie de celle qu'il aime.Il n'a donc plus rien à perdre.
Mis en scène de manière très théâtral, Danse macabre est un film sur la mort, présente dés l'ouverture du film, mais si elle est le sujet principal de l'histoire, elle est représentée comme une délivrance, comme par instant un bonheur. Les différents protagonistes, vivants comme défunts, vivent dans un monde de rêves et d'illusions qui deviennent réalité pour lesquels mourir en vaut la peine. Les personnages de Margheriti sont donc tous voués à une inévitable autodestruction. C'est peut être sur ce point précis que Danse macabre diffère des films d'épouvante gothiques habituels ce qui le rend d'autant plus intéressant.
Si Danse macabre rythmé par la partition musicale de Riz Ortolani plutôt inspiré souffre par instant d'un léger manque de rythme notamment lors de sa première partie, si le film est
aujourd'hui assez daté, on se laisse cependant assez rapidement séduire puis emporter par la beauté des images et des décors somptueux, l'étrangeté des personnages, la jolie reconstitution d'un Londres nocturne d'époque noyé dans le brouillard, la valse de ces fantômes qui en cette longue nuit de Toussaint reviennent de l'au delà avec leurs secrets qu'on tentera de percer, l'ambiguïté des dialogues et surtout par la présence de la sublime et vénéneuse Barbara Steele qui n'a jamais été aussi envoutante, atout majeur d'une très belle distribution. George Rivière incarne le journaliste, beaucoup plus convaincant et surtout moins fade que sa composition dans La vierge de Nuremberg. Silvano Tranquilli endosse la peau de Poe, Umberto Raho celle de Lord Blackwood tandis que Margarete Robsahm, la soeur de Fred Robsahm, interprète Lucia.
Oeuvre envoutante et particulièrement mélancolique, Danse macabre est une romance macabre qui aujourd'hui n'a rien perdu de sa tragique beauté ni de son impact émotionnelle même si certains ne seront guère sensibles aux procédés horrifiques aujourd'hui bien datés.
Contraint et forcé, Margheriti en tournera en 1971 pour des raisons essentiellement commerciales une nouvelle version en couleur cette fois intitulée Les fantômes de Hurlevent totalement inutile et surtout sans intérêt que le réalisateur détestait.