Un chico chez la flic: Thomas Rudy
Même s'il eut une carrière plutôt confidentielle il n'en devint pas moins une figure légendaire du cinéma de genre transalpin, plus particulièrement du western-spaghetti dans un premier temps puis de la comédie populaire dans un second temps. Son visage particulièrement typé, les yeux et les cheveux noirs lui valurent de souvent jouer des rôles de méchants ou de mexicains voire d'asiatiques, des personnages toujours de second plan voire de troisième mais qui surent à chaque fois marquer les esprits dans une petite vingtaine de films étalés sur une dizaine d'années. Retraçons aujourd'hui le parcours cinématographique de Vittorio Gagliardi connu de l'amateur sous son nom d'emprunt, Thomas Rudy.
Né à Turi en 1941 Thomas Rudy, de son véritable nom Vittorio Gagliardi, quitte très jeune son village natal pour suivre ses parents obligés de partir après que son père, un petit artisan spécialisé dans la fabrication de bassins de décantation du vin, ait reçu une importante offre de travail à Velletri. Le futur Thomas va y grandir mais dés sa majorité il quitte Velletri pour Rome, peu désireux de poursuivre les traces de son père. Vittorio découvre Cinecittà qui le fascine. Le monde du cinéma lui plait beaucoup et c'est sans mal qu'il trouve très vite du travail. Il débute tout d'abord comme cascadeur puis fait dés 1969 ses
premières apparitions en tant qu'acteur dans de petits rôles le plus souvent dans des westerns-spaghettis dont il va vite devenir une des figures récurrentes. Son visage fortement typé, ses cheveux noirs mi-longs vont souvent lui valoir des rôles de méchants, de bandits ou de mexicanos voire de chinois. Comme beaucoup de comédiens italiens d'alors, Vittorio va user d'un pseudonyme à consonance anglo saxonne. Il devient Thomas Rudy. Il tourne son premier film pour Sergio Garrone, La horde des salopards, aux cotés de Anthony Steffen puis enchaine avec Adios Sabata de Gianfranco Parolini. Après une figuration dans l'étrange Necropolis de Franco Brocani il tourne pour Enzo Barboni, On l'appelle Trinita. S'il
n'y a qu'un tout petit rôle à la limite de la figuration, celui d'Emiliano un fermier mexicain, ce film va pourtant lancer sa carrière grâce à une scène mythique, celle où il tient tête à Terence Hill et Bud Spencer et finit un canon de pistolet dans la narine. Il enchaine alors les rôles. On le voit dans Chaco de Gino Mangini, Blindman le justicier aveugle de Fernando Baldi, On l'appelle Spirito Santo de Giuliano Carnimeo et The last rebel de l'américain Larry Spangler qui sera l'ultime western qu'il tournera.
Dés 1973 il change de registre. C'est désormais vers la comédie qu'il va s'orienter, un choix ponctué par quelques apparitions dans des films d'exploitation mais également le
polizesco. La première comédie dans laquelle il joue est une comédie signée Mariano Laurenti, Furto di sera bel colpo si spera, avec pour partenaires Giancarlo Prete et Pippo Franco suivi de Scusi si potrebbe evitare il servizio militare? No! de Luigi Petrini mais c'est essentiellement pour son grand ami Massimo Michele Tarantini qu'il va le plus tourner. Très proche du metteur en scène Thomas accepte d'être au générique de plusieurs de ses films, toujours pour de courts rôles lorsqu'il ne s'agit pas simplement de figuration. C'est ainsi qu'entre 1977 et 1981 l'acteur originaire de Turi est au générique de La toubib se recycle (il est l'émir) et La flic à la police des moeurs dans lesquels il a pour partenaire Edwige
Fenech, L'infirmière a le bistouri facile avec Nadia Cassini (le patient prêt à être opéré), Una moglie due amici quattro amanti, La moglie in bianco... l'amante al pepe et enfin il est le premier patient de Paola Senatore dans La zézette plait aux marins son chant du cygne. Pour Tarantini il tournera aussi un polar, MKS...118 / La violence appelle la violence, il est l'homme qui mange du chocolat. Il reviendra au genre sous l'égide de Mario Caiano avec Antigang / La malavita attaca la polizia risponde. Thomas apparaitra aussi dans deux films d'exploitation, Hôtel privé pour SS / SS girls de Bruno Mattei en 1977 dans lequel il est l'infâme officier Wang, et l'énigmatique western érotique Porno erotico western, un film de récupération fait de bric et de broc signé Angelo Pannaccio.
Thomas met un terme à sa carrière d'acteur en 1981, à seulement quarante ans, après quelques douze années passées devant la caméra et vingt-deux films à son actif. Il épouse une jeune femme, Enrica, originaire du petit village de Fontana Liri dans le Latium où le couple achètera une maison. Thomas, redevenu Vittorio (Vito pour les intimes), grâce à son passé d'acteur, deviendra une figure locale, aimée de tous, un homme toujours aimable, toujours disponible se souviennent les habitants de Fontana Liri. Quelques années avant sa disparition Vittorio projetait de quitter Rome pour s'installer définitivement avec sa famille
dans leur maison de Fontana. En 2021 la petite ville préparait la célébration du cinquantième anniversaire du film de et avec Nino Manfredi Miracle à l'italienne. Le film y avait été en effet en partie tourné. Fier de le compter parmi ses administrés le maire avait demandé à Vittorio de présider la cérémonie à laquelle l'épouse et le fils de Manfredi devaient assister. Vittorio avait gentiment accepté. Malheureusement il tombe malade quelques mois avant les réjouissances. La maladie l'emporte très vite. Il meurt à 80 ans le 15 septembre 2021 à Fontana Liri où il fut inhumé quelques jours plus tard.