El hombre perseguido por un OVNI
Autres titres: Le survivant des OVNI / The man of Ganimedes
Réal: Juan Carlos Olaria
Année: 1976
Origine: Espagne
Genre: Science-fiction
Durée: 81mn
Acteurs: Richard Kolin, Juan Olaria, Lynn Endersson,
Résumé: Alberto Oliver, un écrivain peu inspiré, est soudainement traqué par des extra-terrestres qui veulent le kidnapper. Il leur échappe mais la soucoupe volante le poursuit partout il va. Personne ne veut le croire pas même la police. Il finit par se réfugier chez une amie mais les aliens le retrouvent. Ils fuient...
Mais qui est donc Juan Carlos Olaria parfois surnommé le Ed Wood espagnol? Il s'agit tout simplement d'un réalisateur qui a passé sa vie à mettre en scène, entre la fin des années 50 et le milieu des années 90, de tout petits films bien souvent de science-fiction devenus pour la plupart invisibles au fil du temps lorsqu'ils n'ont pas tout bonnement disparu. Difficile donc de se faire une idée de son travail à la limite de l'amateurisme mais on peut en avoir un aperçu grâce à son tout premier long métrage réalisé en 1972 mais tardivement sorti en 1977 après moult retouches, El hombre perseguido por un OVNI, considéré aujourd'hui en
Espagne comme un monument de la série Z de science-fiction, une sorte de fierté coupable, honteuse mais qu'on aime cultiver et qui pourrait faire passer la pentalogie de Brescia (La guerre des robots, La bataille de l'espace, Star odyssey, Anno zero: guerra nello spazio, La bestia nello spazio) pour des réussites hollywoodiennes.
L'histoire est dés le départ totalement délirante et franchement idiote. Un écrivain de romans policiers en mal d'inspiration, Alberto Oliver, est soudainement traqué par des extra-terrestres mutants qui viennent de débarquer sur terre au moment où il sortait de chez Carol sa charnelle maitresse. Il leur échappe mais une soucoupe volante le suit désormais
partout où il va. A son bord, un alien qui veut le kidnapper pour apparemment l'emmener sur sa planète, un univers fait d'anti matière. Les aliens sont eux mêmes composés d'anti matière. Lorsque les aliens tentent de s'emparer de sa voiture, une Simca 1000, Alberto voit rouge et se rend au commissariat pour informer la police de ce qui lui arrive. Le commissaire a bien du mal à le croire mais il enquête tout de même. Toujours poursuivi par les mutants qui ont la faculté de se régénérer si on les mutile ou ampute d'un membre il se réfugie chez Carmen, une amie, mais les aliens le retrouvent. Ils doivent fuir. Alberto est finalement capturé et emmené dans la soucoupe où il découvre leur chef agonisant.
Difficile de résumer l'intrigue tant elle part tout azimut. Est-ce réellement important? Pas vraiment puisqu'elle n'a vraiment aucun sens. Elle est aussi obscure que bête. Les questions s'accumulent et ne trouvent jamais aucune réponse. A la décharge du metteur en scène on évoquera les difficultés qu'il rencontra lors du tournage débuté en mai 1972, étalé sur trois courtes semaines. Olaria présente cette même année au festival de Sitges un premier montage de son film mais dénué de toute piste sonore il est simplement massacré par la critique. Olaria abandonne son projet pour le reprendre en 1973 lorsque le producteur-réalisateur Juan Xio Marchal sentant un certain potentiel dans l'histoire
l'encourage à le reprendre. Marchal remanie l'intrigue, y ajoute quelques scènes érotiques d'où la présence inattendue d'une des reines-mères de l'érotisme ibérique, la plantureuse Lynn Endersson. Olaria de son coté truffe le métrage de photos empruntées à la NASA pour lui donner un coté "vérité". Le film sort en Espagne en 1975 mais ne remporte aucun succès. Il ressort deux ans plus tard alors que le cinéma surfe sur la vague Star wars et autre Rencontres du 3ème type. Cela n'empêchera pas que le film sombre dans l'oubli avant de devenir au fil du temps une perle du Z espagnol assumée.
Aussi nul et illogique soit-il El hombre perseguido por un OVNI n'est cependant pas
dépourvu ni de charme ni d'intérêt. On pourrait même dire sans trop exagérer que ce Z est par moment tout bonnement fascinant comme en témoigne sa longue scène d'ouverture. Ce sont cinq petites minutes durant lesquelles Olaria nous montre des photos venues des archives de la NASA censées représenter des apparitions réelles de soucoupes volantes à travers le monde, toutes commentées de manière fort sérieuse par une voix off sur une angoissante musique. Cette ouverture façon documentaire est entrecoupée de plans plasmiques du plus bel effet où on voit l'écrivain courir, poursuivi par les aliens. Etrange, suffisamment curieux pour d'emblée capturer l'attention du spectateur comme les trucages
rudimentaires influencés par les vieux films de SF des années 50 et 60. Les apparitions de la soucoupe volante sont drôles mais finalement fonctionnent malgré le coté ultra cheap des effets spéciaux. Son intérieur très coloré, soit une console garnie de loupiotes, un écran et un sas a ce charme typique de ces lointaines années. Quant aux scènes où la Simca 1000 (objet culte pour nos amis de l'espace apparemment) flotte dans l'espace au milieu de la voie lactée aux cotés de la soucoupe elles ont un coté à la fois si surréalistes, si poétiques qu'elles fascinent. Une véritable trouvaille tellement kitsch mais envoutante. Brescia n'aurait guère fait mieux.
L'autre attraction du film est bien entendu ses extra-terrestres mutants à mi-chemin entre l'humanoïde, le zombi et Freddy Krueger. Ils sont habillés comme des humains (un joli polo, un pantalon et des chaussures de ville), marchent comme des zombis et ont une tête croisée entre celle des morts-vivants de Romero et notre futur Freddy. Très spécial! Ils ont du sang jaune citron (de la jolie gouache), se dématérialisent quand on les tue (du moins parfois, leur anatomie reste un mystère), peuvent revenir à la vie grâce à un rayon qui sort du poignet (fulgoropoing?), leurs organes se régénérer si on les coupe (d'où cet étonnant alien que l'écrivain a décapité puis mis dans une malle en osier mal fermée qui réapparait avec
deux têtes, la deuxième poussant semble t-il sur son bras!!!). Quant à leur commandant on en verra au début que deux bras chétifs squelettiques terminés par deux mains argentées, de quoi faire rêver. Puis on découvre une partie de sa tête recouverte d'une sorte de casque de moto à l'ancienne et une paire de lunettes noires qui dissimulent ses yeux avant de le voir enfin entièrement. Une déception. Il s'agit d'un simple humain au crâne dégarni tirant sur la cinquantaine, les yeux cachés cette fois derrière des lunettes de piscine puis des lunettes psychédéliques de bazar. Il se meurt dans sa soucoupe car il ne supporte pas
notre atmosphère. Encore un illogisme. Pourquoi viennent-ils chez nous puisqu'ils ne supportent pas notre air? Peu importe. L'important est qu'on soit charmé, surpris, et qu'on sente aussi les influences d'Olaria, un autre petit plus qui là encore fait plaisir et flatte les bissohiles que nous sommes.
Olaria a été nourri dés sa petite enfance à la science-fiction des années 50 et ses grands classiques. Cela se ressent à la vision de son film, son esthétique, ses idées. Reconnaissons au metteur en scène d'être un des seuls à s'être intéressé à la SF en Espagne, un genre boudé comme il le fut aussi en Italie, comme il fut un des tout premiers avant Spielberg à traiter des enlèvements extra-terrestres. Outre les zombis de Romero on
pense aussi à ceux de Armando De Ossorio, flagrant lors de la scène où l'écrivain est attaqué dans des ruines par un groupe d'aliens à la démarche hésitante, se déplaçant presque au ralenti. Impossible également de ne pas rapprocher le film à la série Les envahisseurs. Non seulement la soucoupe ressemble à celles que David Vincent voit mais l'intrigue est semblable à celle de la célèbre série, un homme seul contre tous qui ne parvient pas à convaincre le monde (ici sa maitresse, sa meilleure amie Carmen et la police) que des extra-terrestres sont parmi nous et veulent l'enlever. Quant aux aliens comme dans la série ils se dématérialisent dans un bel halo rougeâtre lorsqu'ils meurent.
El hombre perseguido por un OVNI, sorti à la va-vite en France uniquement en Province sous le titre Le survivant des OVNI, a donc suffisamment d'atouts pour convaincre quiconque aime la science-fiction d'hier de visionner cette curiosité fauchée ultra rare, kitschissime mais si attachante, si étrange, si hilarante par moment. Elle n'a ni queue ni tête, aucune réponse à apporter mais charme cependant d'emblée. Et si Marchal a cru bon d'y ajouter une touche d'érotisme totalement gratuit et inutile signalons tout de même que Lynn Endersson version blonde platine, n'a guère plus de 5 minutes de temps d'écran, le temps de déambuler en petite tenue et de dégrafer son soutien-gorge avant de se faire
dématérialiser en plein ébat. Elle laisse sa place à la dilettante Gemma Lewis le temps d'une scène de douche.
Pour terminer un mot sur Richard Kolin qui interprète l'écrivain. Les amoureux de Bis ibérique auront pu apercevoir ce générique dans quelques gialli dont Chats rouges dans un labyrinthe de verre, El pez de los ojos d'oro, Los mil ojos del asesino et quelques sériez Z comme Le baiser du diable et L'homme à la tête coupée. Que des références là aussi!
Juan Carlos Olaria s'est quant à lui réservé le rôle du commissaire de police.