Le nazisploitation
Si dans le cinéma d'exploitation italien il est un genre qui fut et continuera à être l'un des plus décriés, haï ou bien mal interprété c'est bel et bien le nazisploitation. Il fait pourtant et définitivement partie du beau patrimoine du cinéma de genre italien et on ne peut en ignorer son importance. Style plutôt à part de par le délicat sujet qu'il touche, le nazisploitation a cette particularité de diviser les foules pas seulement celle des réfractaires du cinéma dit Bis mais surtout celle des bissophiles eux mêmes, bon nombre d'entre eux reniant ce genre ou ayant du mal à l'accepter. Si on peut en comprendre les raisons profondes de par le douloureux thème qu'il tente d'exploiter, on peut tout de même se demander s'il ne serait pas possible de convertir ces réfractaires ou du moins de mieux leur faire comprendre ce cinéma en tentant de leur montrer sous un jour nouveau, un angle différent. C'est ce que ce dossier va tenter de faire en remontant aux sources du genre et en l'analysant tout en parcourant les oeuvres qui en firent sa réputation. Comme tout cinéma d'exploitation, le nazisploitation qu'on qualifiera de sous filon, sous genre ou subdivision du cinéma Bis plutôt que de genre à part entière tente d'exploiter un thème bien précis, en l'occurrence, le nazisme. Jugé choquant, ce terme a souvent été réprimé au profit d'autres, plus souples mais tout aussi évocateurs, le terme exploitation ne pouvant décemment pas s'appliquer à un thème si délicat. Le problème fut donc au départ de trouver une appellation correcte définissant ces films dans ce qu'ils sont réellement dans leur ensemble. Les termes nazi-porno ou sadico-nazista furent assez vite oubliés, la pornographie n'étant pas propre au genre sinon par inserts destinés au marché étranger et le coté sadisme pas vraiment récurrent à tous les films. On opta alors pour des terminologies plus neutres telles que nazi-filon ou nazi-movie. Au vu du contenu érotique de ces pellicules, l'appellation porno-svastica ou plus généralement éros-svastica fut retenue même si l'érotisme n'est pas un facteur prépondérant pour tous les films de ce type qu'on peut scinder en deux groupes distincts: celui où l'érotisme prédomine et celui où le rouge du sang colore l'histoire faite de tortures recherchées qui dans tous les cas ravira les amateurs de gore.
HISTORIQUE DU GENRE:
Si ce filon du cinéma d'exploitation transalpin connut un succès éclair qui s'étala essentiellement entre 1976 et 1977 , le nazi-movie ou nazisploitation également appelé éros-svastica ou parfois nazi-porno, porno svastica et sadico-nazista remonte pourtant au début des années 60. On trouve en effet trace du coté des USA d'un film semi-documentaire de Ralph Potter intitulé After mein kampf, sorti en France sous le titre Sadisme SS, qui porte sur la vie d'Hitler et les horreurs commises dans les camps d'extermination. On y retrouve déjà insérés entre deux images d'époque les facteurs récurrents au genre: nudité des protagonistes, harems, visites médicales des prisonnières, relations sexuelles avec les soldats.
On peut citer aussi le film suédois Mein Kampf / Den blodiga tiden de Ervin Leiner sorti en 1960 qui traite du socialisme nazi.
Toujours en Suède le réalisateur Tore Sjoberg est à l'origine d'un documentaire dénommé Mein kampf 2 - Secrets of the nazi criminals, un titre mensonger puisque le fim n'a aucun lien avec celui de Potter réalisé trois ans auparavant. Il sortira dans la foulée de Mein Kampf mais uniquement aux USA. On peut également citer Camps of the dead, une oeuvre cette fois mineure sans grand intérêt. Plutôt ennuyeux, ces films documentaires commentés de façon soporifique valent surtout pour leurs images qui font office de témoignage choc sur les abominations nazies.
Présentés comme de véritables films de terreur, les producteurs ne se gênaient pas pour les lancer à grands renforts de publicité choc et de slogans racoleurs, des moyens peu scrupuleux alors très à la mode qu'on utilisait également pour les mondo, une autre branche tout aussi nauséabonde et fort décriée du cinéma d'exploitation. On pouvait ainsi lire sur les affiches "See! Unbelievable! The shocking nazies atrocities never shown before.. See! The Crematorium ovens of Dachau and Auschwitz..." ou bien "Hitler's sadists leave their shameless mark".
Ces films n'ont cependant aucun rapport avec les nazi-movies italiens des années 70 qui trouvent leurs racines dans des films tels que Kapo réalisé en 1960 par Gillo Ponte avec Emanuelle Riva et Susan Strasberg, l'histoire d'une prisonnière qui pour échapper à la mort accepte de devenir Kapo. Toujours aux sources du nazisploitation italien, on trouve trace en 1961 d'un Dieci Italiani per un tedesco de Filippo Walter Ratti, le futur réalisateur de La nuit des damnés/ La notte dei dannati , et Erika, une reconstruction historique du massacre de la Fosse Ardeantine qui valut la mort à 335 italiens.
En 1969, le vétéran américain Lee Frost connu également sous le nom de David Kayne tourne Love camp 7/ Camp spécial n°7, oeuvre prépondérante dans l'histoire chronologique de l'éros-svastica qui dut attendre sept longues années, condamnée par la censure, avant de pouvoir sortir en Italie. Camp spécial 7 retrace l'histoire de deux espionnes s'infiltrant dans un camp SS afin de pouvoir témoigner des horreurs commises sur les détenues. Découvertes, elles vont rejoindre les prisonnières et connaitre le même sort. Mal filmé, Camp N°7 d'une pauvreté affligeante au niveau des décosr oscille sans cesse entre comédie et pur trash même si la comédie volontaire ou non l'emporte le plus souvent tant celle ci désamorce l'horreur des tortures commises et les humiliations des cinq malheureuses héroïnes qui passent la quasi totalité du métrage nues. A ce niveau, on peut considérer le film de Frost comme étant l'ancêtre américain des futurs nazi-movies italiens. Frost réalisera en 1974 un autre nazi movie, un peu spécial cette fois puisqu'il s'inscrit dans le filon de la Blacksploitation, le fameux Black gestapo qui comme son titre l'indique a pour particularité d'avoir des SS de couleur.
En 1974 apparait Eine armee Gretchen / Gretchen sans uniforme / Fraulein without uniforms, un softcore érotico-comique de Erwin C. Dietrich, un nom qui fut souvent associé à celui de Jess Franco. L'année 1974 verra en fait le vrai point de départ du nazi-movie italien avec trois des plus importants films du genre: Portier de nuit, Salon Kitty et Salo et les 120 journées de sodome. On pourrait aussi mentionner l'arrivée de Ilsa louve SS connu également sous le titre Les SS étaient là, les gretchen aussi de l'américain Don Edmonds qui contribuera aussi beaucoup à populariser le genre. Ces chefs-d'oeuvres du grand écran seront le véritable détonateur du genre qui va alors exploser et c'est pas moins d'une douzaine de films qui seront tournés alors entre 1976 et 1977. Si on excepte Holocaust 2 i ricordi i deliri la vendetta les plus tardifs qui se situent entre 1978 et 1979 seront surtout tournés en France pour la plupart par la firme Eurociné et représentent les ultimes soubresauts d'un phénomène italien somme toute bien éphémère.
LES FILMS PRECURSEURS ET DETONATEURS:
PORTIER DE NUIT: Venue du documentaire, Liliana Cavani réalisa Il portiere di notte, son cinquième long métrage en 1972, film qui restera à ce jour son plus grand succès.
Ce film est sans nul doute une des oeuvres phares traitant des horreurs du nazisme. Il met en scène Max, ex-officier SS désormais portier de nuit dans un grand hôtel de Berlin où se retrouvent d'autres anciens officiers. De passage à Berlin, Lucia, épouse d'un maestro venu donner un concert en ville, reconnait en Max son ancien tortionnaire. Les souvenirs commencent à la hanter, autant elle que Max, totalement bouleversés par cette rencontre inattendue.
Lucia avait quinze ans lorsqu'elle fut déportée et après avoir été violée par Max, elle devint son amante, jouet de ses fantasmes sadomasochistes. Une étrange relation va de nouveau naitre entre eux et ils ne tardent pas à tomber amoureux ce qui les mènera à leur perte.
Etrangement accueilli à sa sortie, Portier de nuit divisa le public. Ses détracteurs reprochaient à la réalisatrice d'y faire l'apologie du sadomasochisme et d'étaler une dangereuse fascination du nazisme alors que ses admirateurs y virent un film fort, douloureux, plastiquement et esthétiquement superbe, digne successeur du chef d'oeuvre de Visconti Les damnés/La caduta degli dei. En fait, Portier de nuit est une oeuvre sur l'ambiguïté des rapports qui peut naître entre la victime et son bourreau, cette étrange attirance/répulsion, amour/haine noyée dans une forme de fascination inquiétante et morbide.
Les rapports ambigus contrôlent tout le film et les agissements de ces personnages souvent refoulés où l'ombre de l'homosexualité plane également entre Max et l'ancien danseur Bert. Et si fascination il y a, ce n'est pas celle du nazisme, c'est celle des rapports de force, de la souffrance et de la peur, la fascination morbide entre l'amour et la mort que Cavani tente d'exprimer en choisissant cette période. Magistralement interprété par Charlotte Rampling et Dirk Bogarde, Portier de nuit se classe directement aux cotés du film de Visconti où ces acteurs hors pairs étalaient déjà leurs talents aux cotés de Ingrid Thulin et Helmut Berger, Les Damnés, qui a sa place dans l'histoire des prémices du nazi movie all'italiana, oeuvre forte et dramatique sur la lente montée du fascisme à travers l'histoire de deux puissantes familles. Outre l'intensité du film, on retiendra surtout des Damnés, certains moments d'anthologie comme la fameuse danse d'Hitler qu'entame Charlotte Rampling reprise maintes fois par la suite et la reconstitution de La nuit des longs couteaux.
SALON KITTY: Salon Kitty fut le premier film d'une trilogie inachevée destinée à attaquer de façon extrême le pouvoir. Pour Tinto Brass, le pouvoir est la chose qui corrompt le plus l'âme et les pulsions naturelles, les transformant en quelque chose de grotesque et artificiel, amenant à la destruction. Lorsque Salon Kitty sortit en Italie, la censure se jeta dessus, jugeant le film sexuellement obscène. Elle se dépêcha de couper notamment toutes les scènes d'érection. Le film devint alors sa principale cible. Salon Kitty sortit en Italie dans le courant de l'année 1975, Brass organisera même une sortie clandestine fort risquée, visant à rire de la censure.
Salon Kitty tiré du roman Geheim Reichssache! Salon Kitty, ein report, le film propose de faire la lumière sur ce cabaret, endroit scabreux situé au coeur de Berlin et contrôlé par les SS pour découvrir les secrets militaires des officiers étrangers en visite en Allemagne. Brass a traité de façon plus poétique le parcours de ses héros afin d'approfondir sa critique corrosive sur le pouvoir et le fanatisme. L'ouverture du film particulièrement violente et scandaleusement sexuelle montre jusqu'où ce fanatisme et le pouvoir peuvent entrainer l'homme, le transformant en barbare. Le sexe devient alors le symbole hallucinant de l'aberration du pouvoir. La scène des orgies où des prostituées sont contraites de s'accoupler à toutes sortes de monstres et de dégénérés est en cela un monument d'horreur presque viscérale qui témoigne de cette folie.
Le véritable départ du film, c'est l'arrivée à Salon Kitty où Brass déploie une nostalgie étonnante à décrire ce lieu, à s'attarder sur la musique, les ballets, les couleurs et les jeux qui étaient le véritable but de ce salon au départ, nonobstant toute politique et condition sexuelle. Si Mme Kitty, la propriétaire des lieux, s'offusque de ce que son salon est devenu, un bordel SS, un lieu d'espionnage, une anti-chambre du pouvoir, Brass s'insurge avec rage et désespoir contre ce despotisme fanatique qui transforme cet endroit ludique en un sanctuaire sale et profane.
Au final, Salon Kitty est un film qui met en scène une guerre dans une guerre, où le pouvoir et le sexe, l'esprit et le sentimental, se confondent dans le sang. Le champ de bataille n'est autre que le salon de Mme Kitty. Beau, décadent, scandaleux, violent, poétique, Salon Kitty magistralement mis en scène par un Tinto Brass très inspiré, virulent, restera un des chefs d'oeuvres les plus marquants de son réalisateur, dominé par une interprétation hors pair avec en tête, l'irradiante et insolente Theresa Ann Savoy dans le rôle de Margherita, la jeune prostituée espionne qui représente la vie et l'idéalisme. La bergmannienne Ingrid Thulin est une Mme Kitty émouvante, une femme de spectacle, une transformiste, quasiment une mère douce et compréhensive pour ses filles de joie alors que le visage implacable, froid, de Helmut Berger incarne à la perfection la dualité sexe-pouvoir.
SALO OU LES 120 JOURS DE SODOME: Sorti en novembre 1975, Salo fut certainement le film le plus controversé de l'histoire du cinéma, chef d'oeuvre de Pier Paolo Pasolini qui à sa façon bouclait sa magistrale trilogie de la vie débutée en 1970 par Le Décaméron suivi des Contes de Canterbury et des 1001 nuits. Film le plus élaboré de son auteur, Salo reste et restera l'un des films les plus forts et traumatisant du cinéma italien, intemporel, dangereusement d'actualité.
Tiré du roman de Sade, Pasolini a simplement transposé l'histoire dans l'Italie de la deuxième guerre mondiale, dans la petite ville de Salo, remplaçant les bourreaux par des SS en civil et les narratrices originelles par des maquerelles de la haute bourgeoisie. Véritable anti thèse aux 1001 nuits, ode à l'amour et à la beauté, Salo n'est que mort et destruction, rétrogradation de l'homme vers l'animal jusqu'à sa destruction et son retour au néant. D'une horreur sans nom, et horreur prend ici tout son sens, Salo est un véritable coup de poing pour un spectateur non averti, un spectacle nihiliste d'une incroyable force, terrible dans ses images, son sens profond, ses vérités.
Si on peut trouver le film toujours aussi odieux trente ans après sa réalisation, il n'en est pas moins d'une intelligence rare, constat sans concession du danger du pouvoir. Pasolini détruit tout, croyance, amour, religion, esprit. Extrême dans sa représentation de la violence et de l'humiliation du corps, Salo recule les limites de l'horreur, une horreur qui ne provient pas seulement des images mais aussi des dialogues parfois plus cruels et que ces dernières. Plus rien ne pourra rebuter celui qui aura su surmonter son dégout à la vision du film dit-on.
Si Salo n'a aujourd'hui pris aucune ride, si sa force résiste au temps, la censure, elle, l'a depuis le début maltraité, le coupant et le recoupant, le sortant sous différentes longueurs. Si aujourd'hui on connait la version intégrale, du moins le pense t-on car beaucoup de mystères planent encore sur son élaboration (on sait désormais que l'ultime cercle, le cercle du sang est incomplet), le film a réussi à briser le tabou télévisé en obtenant enfin sa diffusion sur les chaines. Remarquable en tout point, Salo est aussi un remarquable travail d'acteurs réunissant professionnels et non professionnels.
Si les quatre narratrices, Hélene Surgère, Caterina Borrato, Elsa De Giorgi et Sonia Savange, sont de talentueuses actrices reconnues et émérites qui prirent le risque de mettre leur carrière en péril en acceptant ces rôles, les quatre dignitaires à l'exception de Paolo Bonaccelli, acteur exceptionnel au large registre, étaient des proches de Pasolini: le romancier Uberto Paolo Quintavalle aujourd'hui décédé auteur en 1976 de "Giornate di Sodoma", Giorgio Cataldi, un vendeur de chaussures, ou l'étrange ex-séminariste Aldo Valletti qui a traversé une multitude de films simplement en tant que figurant muet pendant plus de quinze ans dont Salon Kitty. Le parcours de chacun a été retracé ICI.
Quant aux jeunes victimes, comme souvent chez Pasolini, ce n'étaient pour la plupart que des comédiens amateurs choisis avec soin par le maître lui même, mineurs pour certains dont c'était le premier film à l'exception de Franco Merli qui interprète Franchino, élu plus beau cul, qui avait été auparavant le héros des 1001 nuits et connaitra une petite carrière au cinéma en apparaissant entre autre dans Affreux sales et méchants de Ettore Scola ou La collegiale de Gianni Martucci. Il en va de même pour Antonio Orlando (Tonino) qui a à son actif une jolie petite filmographie. Quant aux autres jeunes comédiens masculins aucun ne rencontra le succès par la suite. Ils disparurent quasiment tous dés le tournage terminé. En ce qui concerne les jeunes comédiennes recrutées pour la plupart dans le milieu du mannequinat pour leur aisance à se mettre nues parmi les plus chanceuses eurent une petite carrière dans des productions érotiques, parfois simples participantes anonymes, avant de disparaitre comme Antineska Nemour vue dans La sorella di Ursula, Bourreaux SS, La sposina et surtout l'émission télé Portobello qui l'a rendit célèbre ou Renata Moar aperçue dans Destin de femmes, La lame infernale... sans oublier la belle érythréenne Ines Pellegrini qui sera la seule avec Antinesca à connaitre un vrai parcours cinématographique, allant du giallo (Gatti rossi in un labirinto di vetro au film de science fiction La guerra dei roboti) et surtout le cinéma érotique dont elle se fit une spécialiste. Pour plus d'informations sur l'ensemble des jeunes comédiens un dossier leur a été consacré ICI.
SALO OU L'ANALYSE D'UN CHEF D'OEUVRE:
La longue carrière cinématographique de Pier Paolo Pasolini peut être décomposée en deux grandes parties. Si la première s'étend de 1960 à 1970, c'est de la seconde dont il sera question ici, commencée dés 1971 avec sa fameuse trilogie de la vie qui comprend Le Décameron, Les contes de Canterbury et Les 1001 nuits.
Dés le début de sa carrière, Pasolini allait signer toute une série d'oeuvres allant à l'encontre des valeurs morales et religieuses. Plus qu'un agitateur des bonnes consciences Pasolini est avant tout un poète, un poète maudit qui a toujours su jouer avec les futilités pour mieux se focaliser sur le mystère en exorcisant par la même occasion ses propres démons. Pour parvenir à ses fins, il a souvent eu recours à une certaine complaisance parfois facile dans laquelle le sexe, omniprésent, joue un rôle fondamental.
Pour Pasolini, le sexe est surtout une forme de libération, une joie, un jeu, une sublimation de la vie qu'il a perdu au fil du temps. Le Maitre n'a jamais souhaité autre chose que de lui redonner son sens originel en filmant de manière joyeuse lanostalgie d'une époque malheureusement révolue. Omniprésente est également la religion que Pasolini aime bafouer, à qui il donne un aspect souvent surréaliste à travers ses tableaux païens qui imagent les Enfers, le Démon, l'incarnation même de la subversion et de la pourriture du Monde. Il faut toujours avoir à l'esprit que Pasolini était peintre et c'est en peintre qu'il s'érigeait en tant que metteur en scène. On retrouve cette imagerie tout au long de sa trilogie de la vie où toute la démesure de Pasolini se concentre surtout dans Le Décameron et Les contes de Canterbury, une démesure qui retombe dans les 1001 nuits, véritable ode à l'amour, magnificence de la vie.
En annonçant en 1975 la réalisation de Salo, tiré de l'oeuvre de Sade, Pasolini allait cette fois retourner la tendance. La sublimation de l'amour, du sexe allait trouver son antithèse, bouleversant toutes les valeurs morales et sociales.
Transposant le roman du Divin Marquis dans l'Italie fasciste de la deuxième guerre, Salo est une véritable démonstration de ce que l'homme peut engendrer comme horreur.
Sans rien changer à l'oeuvre originelle si ce n'est pas le nom et l'âge des enfants, plus âgés dans le film que dans le roman pour d'évidentes raisons, Salo est une sorte de catalogue d'atrocités, une métaphore sadique du nazisme-fascisme et de ses crimes contre l'humanité.
Il est évident que les quatre dignitaires, le Duc, l'Evêque, le Président et son Excellence, sont des SS en civils et les narratrices des maquerelles perverses.
Ils sont la représentation de ce qu'on peut faire lorsqu'on détient le Pouvoir, une vision cauchemardesque de ce que la puissance peut engendrer. L'homme, le peuple n'est plus qu'un simple jouet qu'on va déshumaniser, animaliser, annihilant tout rapport humain pour amener à la destruction.
Le corps devient une marchandise grossière, le sexe une forme de possession par d'autres personnes, une aberration physique et morale de l'âme humaine. Salo est une vision de ce qu'est la laideur humaine, une démonstration brutale et paroxysmique de la violence primitive des forts contre les faibles. Jamais film n'aura montrer avec tant de force, de cruauté et de complaisance l'ignominie. celle ci est d'autant plus perverse qu'elle se fond dans une sorte de bienséance, se tapit dans une forme d'élégance, se cache dans cette apparence derrière laquelle les nazis aimaient se dissimuler. En ce sens, Salo pourrait être le meilleur film nazi sur le nazisme jamais tourné.
Loin des pires abominations que le cinéma italien imagina, Salo est un film sur le véritable gore, le plus terrible, celui qui est tapi au fond de l'être humain. En ce sens, le film fait mal. Il est un long cauchemar où chaque scène, chaque détail, chaque parole prononcée, prodigue un sentiment effroyable de malaise, une terreur viscérale parvenant à vriller le plus profond de notre âme.
Tout espoir est définitivement abandonné. Pas même la religion ou quelque autre croyance ne parvient à réconforter les victimes puisque celles ci sont proscrites. La Madone n'est plus qu'un symbole grotesque surplombant un baquet d'excréments auquel sont attachés les condamnés quasi agonisant. Ils sont nus, dépouillés de tout tant de leurs vêtements que de toute dignité. Les victimes sont seules, terriblement seules, plongées dans cette solitude effroyable qu'on ne peut ressentir qu'une fois face à la mort.
Salo c'est l'homme face au néant, un néant absolu que le réalisateur amène progressivement pour mieux pour mieux engloiutuir ses victimes, indisposer son spectateur et l'amener vers l'horreur. Salo n'est que la lente destruction de l'homme qui de cercle en cercle va passer du stade humain au stade animal jusqu'à son extermination, son retour au néant originel. Les 120 jours sont une descente aux Enfers, quatre mois associés à chaque fois à une nouvelle narratrice, plus cruelle que la précédente censée représenter la nature humaine. Elles sont une progression inéluctable vers une horreur de plus en plus grande jusqu"au quatrième cercle, celui du sang, réservé aux bourreaux.
En parlant d'enfer, le mot trouve justement toute sa force et sa justification lorsque Pasolini fait descendre ses narratrices d'un long escalier plongé dans une inquiétante obscurité. Pasolini se rapproche ici de la vision de l'Enfer de Dante. ses mégères semblent en effet sortir des entrailles de la Terre.
Le troisième cercle, le cercle de la coprophagie ou cercle de la merde, est l'illustration même du retour au néant. Il renvoie à l'image finale des Contes de Canterbury lorsque le Diable défèque des prêtres mais éaglement au repas de Mamma Roma pris auprès des cochons au son de la comptine Fiore di merda.
La coprophagie dans Salo est l'image profanatrice même de la religion. Le repas scatophage est pratiqué comme un rite. Chacun doit manger ce qui vient de ses entrailles. L'Homme nait des entrailles de sa génitrice, berceau de vie. Dans Salo cela n'est que la négation même du corps du Christ, une image blasphème de la vie. L'une des victimes portant justement le nom de la Mère originelle, Eva, mangera ses excréments pour la Madone. On ne mange plus le pain, corps du Christ, mais la merde, son nouveau corps.
Les récits scatophiles se concluent d'ailleurs sur celui de cet homme ne désirant manger que les selles d'une condamnée à mort. C'est ici la fin d'un parcours. Salo boucle la boucle. La femme ne sera plus génératrice de vie donc d'avenir, de survie, mais de mort, une mort qui prend une forme fécale. La pire des évocations, abominable et castratrice, est celle de la Maggi, la troisième maquerelle, désireuse de coudre un vagin, matrice si l'en est, après y avoir enfermé un rat, supposé dévorer l'intérieur de la Femme. Elle éradique ainsi par le pire des supplices toute idée de reproduction.
La mort devient le but ultime, on ne donne plus la vie mais on donne naissance à la mort, magnifiée par la scène de l'élection du plus beau cul, symbole sodomite contre-nature, négation de l'acte sexuel d'amour qui donne la vie, et amplifié par cette phrase de l'évêque résumant toute l'horreur de Salo: Nous pourrions te tuer autant de fois que nous le voulons jusqu'aux limites de l'Eternité si l'Eternité avait des limites.
Il faut également noter les interférences entre les oeuvres de Pasolini. Franchino par exemple interprété par Franco Merli gagnant du plus beau cul et par conséquent prédestiné à un geste sodomite n'est autre que le Nuredin des 1001 nuits qui déjà en fin de parcours s'apprêtait à recevoir la sodomie d'un maître inconnu.
Omniprésent est le sexe tout au long du film comme partout dans l'univers Pasolinien. Ici, contrairement aux 1001 nuits où sexe rimait avec amour et beauté, il rime avec viol, domination et jouissances forcées mais aussi avec déviances, l'urophilie, la scatologie, la bestialité sont des pratiques bien concrètes dans le film quand elles ne sont pas simplement évoquées dans les récits des maquerelles. L'acte sexuel est un plaisir triste et particulièrement sale. On en ressort honteux, en larmes, souillé, comme lors de la séquence de masturbation forcée dans le premier cercle. Cette scène comme celle du mariage contraint entre l'Evêque et le jeune homme et de la nuit de noces justifient la trame intrinsèque de Salo, celle de l'acte sexuel dans une société libérale répressive qui refuse toute forme marginale de plaisir.
Ceci peut justifier la présence quasi générale de l'homosexualité personnifiée de surcroît par l'Evêque, négation de l'église, lors de sa longue nuit avec son jeune Elu juste avant avant le cercle de sang. Elle est aussi représentée par les obsessions culiennes de son Excellence et les masturbations répétées des jeunes victimes et des miliciens. De l'horreur nait le plaisir, l'acte masturbatoire, geste hérétique par l'Eglise, accompagne le plus souvent le récit des narratrices. On apprend à jouir de l'abominable et une des premières leçons donnée aux victimes n'est elle pas celle sur l'art de se masturber. Lors des exécutions du cercle des punitions, le Duc n'oublie pas de vérifier si le milicien qui se tient à ses cotés est en érection en plongeant sa main dans son pantalon. En découvrant avec joie qu'il l'est, l'initiation est réussie. Une fois de plus, le sexe, le plaisir rime avec mort.
La puissance religieuse fortement ancrée dans l'oeuvre de Pasolini prend une tournure extraordinaire dans Salo. Il n'y a plus de Dieu cette fois, il n'y a que seulement des hommes ou plutôt une élite absolue et omnipotente qui profitent à leur guise du corps des victimes comme on profite d'objets. Ces hommes qui s'octroient le pouvoir de vie et de mort et par conséquent se substituent à Dieu prennent justement Dieu comme modèle. Dieu n'est alors plus qu'un mot qu'inscrit un des jeunes garçons totalement désespéré du bout du doigt dans l'épaisseur d'un tapis, ce Dieu, cette Madone à qui Giuliana demande en pleurs la raison de son abandon.
Les termes abandon et nudité pourraient être un des termes qui pourraient dés les premières images du film le mieux résumer Salo.
En entrant dans le manoir, les jeunes victimes laissent derrière elles leur vie, leur âme, les gens qu'ils aiment. Plus rien n'existe. Bourreaux comme narratrices leur font comprendre tout au long du film. Les victimes sont dépossédées de tout, en premier lieu de tout objet matériel dont leurs vêtements. Les jeunes gens sont nus durant quasiment tout le film si on excepte de rares instants comme lors des récits de La Vaccari où ils sont vêtus d'un simple slip blanc. Nudité du corps, nudité de l'âme, ce n'est que le premier pas vers la rétrogradation de l'Homme vers l'animal.
De l'examen anatomique des deux garçons lors de la scène d'ouverture forcés d'exposer leur intimité au choix des jeunes filles triées comme lors d'une foire au bétail jusqu'à la scène dite du chenil où les jeunes gens attachés en laisse doivent happer leur nourriture comme des chiens, caractérisation ultime de l'animalisation, le film tout entier est construit sur cette trame de déshumanisation.
N'ayant rien perdu de son efficacité en plus de 40 ans, Salo est un film sur la véritable horreur, celle de la Fin, de la mort mais également un film sur la véritable nature humaine qui se tapit sournoisement au plus profond des âmes. Monstrueux dans le sens premier du terme, il n'est que la représentation de la face cachée de l'Homme, du monstre tapi en chacun de nous, attendant passivement son réveil.
Doit on alors aimer ou détester Salo? Question à laquelle il est difficile de répondre. Beaucoup diront que Salo est un film à ne voir qu'une seule et unique fois, d'autres qu'il est à voir et revoir tant il est riche, dense et intelligent mais tous s'accorderont à dire qu'il engendre la peur, la peur de son propre jugement (comment puis je aimer Salo?) et le jugement d'autrui, celui qui propose Salo à un spectateur non averti. Le film nous remet en question et fait nous en poser. En le visionnant, devenons nous des monstres à l'instar des quatre bourreaux? C'est sur cette base que Pasolini a construit toute son oeuvre d'une logique monstrueusement lucide mais aussi auto-destructrice. Qu'on aime ou déteste Salo, novice ou averti, il ne peut laisser indifférent. Dans l'un comme l'autre cas, un sentiment de culpabilité émergera, personne n'en sortira indemne. On sort de la vision de Salo changé à jamais. Pasolini voulait que ce film soit un film ultime, dans tous les sens du terme, il l'est. Et ironiquement il est également l'ultime film du maitre qui sera assassiné quelques jours avant sa sortie.
Quasi intemporel malheureusement, Salo est un film unique toujours et encore dangereusement d'actualité, un film exceptionnel, d'une intelligence rare qui vision après vision, pour les plus téméraires, est un hallucinant miroir permettant de mieux voir et comprendre la nature humaine profonde, un miroir peut être trop brut qu'il faut savoir regarder avec un regard vierge.
Salo est et restera le constat le plus intelligent et surtout lucide de l'Histoire de l'Humanité, cette tragique période qui aujourd'hui encore fait frémir, à mille lieues des livres d'histoire et autres documentaires historiques.
LES FILMS:
Comme on l'a dit précédemment, on peut classer les éros-svastica en deux catégories de films, ceux où l'érotisme prédomine au détriment de l'horreur et ceux où au contraire l'horreur prend nettement le dessus. Le mélange, celui du sang et du sperme, n'est pas impossible. On obtient alors un cocktail explosif hautement jouissif. C'est dans cette optique que la revue sera faite, donnant ainsi au lecteur une vision plus pratique de ce qu'il recherche en priorité.
LES NAZISPLOITATION TENDANCE HARD:
C'est à Bruno Mattei que revient l'honneur d'ouvrir le bal des horreurs nazies puisque c'est à lui qu'on doit KZ9 CAMP D'EXTERMINATION, première oeuvre du genre tournée juste avant l'infâme mais si drôle Hôtel de plaisir pour SS / Maisons privées pour SS. KZ9 camp d'extermination fait sans nul doute partie des meilleurs films du genre, un des plus représentatif aux cotés de ceux de Sergio Garrone (Horreurs nazies, SS camp 5 enfer de femmes) et de Rino Di Dilvestro (Les déportées de la section spéciale SS) et l'un des plus misogyne également puisque rarement la femme avait été aussi humiliée, rabaissée et suppliciée dans un éros svatiska. Avec KZ9 Mattei nous offre un des plus efficaces nazisploitation, dans ce cas sadico-svatiska serait bien plus juste, qui se veut une sorte de témoignage anonyme des horreurs pratiquées dans les camps d'extermination sur les femmes et les expérimentions faites sur la mort basées sur les abominations du tristement célèbre Dr Mengele. Mattei s'est avant tout intéressé à l'authenticité des faits, à la véracité du scénario, en se basant sur des faits réels qu'il éplucha dans bon nombre de documents d'époque. C'est la raison pour laquelle il inséra également en fin de bande les photos des principaux criminels de guerre. Une erreur reconnaitra t-il plus tard puisqu'elles furent retirées par la suite du métrage final puis réintégrées quelques temps plus tard. La principale erreur du réalisateur est peut être ailleurs. C'est d'avoir tout simplement cru qu'avec si peu de moyens et en utilisant comme messager ce type de cinéma il pouvait avoir un discours porteur et surtout réaliste. KZ9 camp d'extermination n'est jamais qu'un pur film d'exploitation particulièrement nauséabond qui sous couvert d'une pseudo-vérité nous transporte sur fond d'images jaunies dans un hypothétique camp de la mort polonais. Dés l'ouverture du film Mattei annonce le ton. Il instaure dés les premières images une atmosphère de tristesse générale, maladive, désespérée, créant très vite un sentiment de profond malaise renforcé par une photographie sale et une partition musicale aux tonalités aussi mélancoliques que dramatiques signée Alessandro Alessandroni. A l'instar de Di Silvestro, Mattei tente plus ou moins bien de mettre en images la vie au quotidien de ces prisonnières au regard vide qui très vite subiront humiliations, dressages et viols bestiaux dont certains commis par de dangereux malades mentaux. Elles ne sont plus qu'une meute d'animaux, une expression reprise par Lorraine De Selle elle même lors d'une des très rares interviews qu'elle accepta de donner, des jouets de chair entre les mains d'officiers sadiques et pervers. KZ9 se transforme rapidement en une succession d'atrocités, de tortures en tout genre toutes plus raffinées les unes que les autres sous l'oeil de cruelles kapo lesbiennes. Mattei pousse le mauvais gout jusqu'à filmer l'intérieur des chambres à gaz dans lesquelles les suppliciées agonisent, prises dans un premier temps de soubresauts convulsifs avant de se couvrir de leurs excréments et vomissures. Cette séquence particulièrement dérangeante d'une étonante audace, preuve une fois de plus que le cinéma d'exploitation italien tentait de repousser toujours plus loin les limites du supportable et de l'amoralité dans une ambiance cyniquement ludique, sera reprise à sa manière par Sergio Garrone qui de son coté plongeait sa caméra à l'intérieur d'un four crématoire où brûlaient les détenues de Horreurs nazies et SS camp 5: enfer de femmes.
KZ9 camp d'extermination contient également son lot d'effets sanglants lors notamment des expérimentations auxquelles se livrent les SS sur leurs victimes. Au menu on ainsi droit à la vision d'un cadavre au vagin éclaté, un utérus béant, des seins arrachés, des membres gangrénés. A ces réjouissance gore Mattei y ajoute une once de nécrophilie. Suivant la théorie d'Hitler comme quoi la stimulation sexuelle pourrait réveiller un mort, deux prostituées (interprétées par la pornocrate Monica Nickel et la blonde Titti Benvenuto) sur l'ordre des docteurs SS sont obligées de faire l'amour à un cadavre. Si deux d'entre elles échoueront, la troisième, incarnée cette fois par une toute jeune et encore inconnue Guia Lauri Filzi, future diva du porno italien, réussira à le ramener à la vie. Mattei traite également des expériences faites sur les homosexuels (représentés une fois de plus par deux follasses) considérés comme de grands malades. Afin de les guérir et d'en faire de parfaits hétérosexuels on les accouple à deux prostituées chargées d'en faire de vrais hommes. Tout échec sera puni par la mort.
Une phrase prononcée par un des officiers SS pourrait résumer à elle seule le film: Ne faire preuve d'aucune humanité! Mattei l'a tout simplement mis en pratique et semble avoir réussi se permettant même un no happy end qui laissera un goût amer au fond de la gorge. Toutes les détenues seront fusillées ou pendues après qu'elles aient fièrement entonné en choeur un chant juif, le fameux Israël. Un final particulièrement dur et émouvant qui se clôturera par le massacre des officiers et des kapos, abattus de sang froid par le commandant Wieckler, devenu fou, tandis que résonne au loin le tonnerre des bombardements ennemis. Seule la kapo en chef réchappera à ce carnage qui aboutira sur un ultime rebondissement plutôt inattendu. Entièrement tourné dans les anciens abattoirs de Testaccio à Rome (seule l'évasion fut filmée dans le parc de Treja), KZ9 camp d'extermination est dominé par une distribution d'acteurs convaincants même si parfois ils donnent dans le surjeu. En tête d'affiche masculine, on retrouve avec un grand plaisir le patibulaire et toujours excellent Ivano Staccioli, parfait en officier SS sadique, Gabriele Carrara surnommé le Malcolm Mc Dowell italien pour ses mimiques calquées sur celle d'Alex dans Orange mécanique, Nello Riviè, l'effrayant Giovanni Attanasio, éternel second rôle du cinéma Bis, dans la peau d'un maniaque dément libidineux et déchainé. A leurs cotés toute une armada de starlettes formidablement maltraitées dont parmi les plus reconnaissables Marina D'Aunia, déjà présente dans Maisons privées, l'énigmatique Gota Gobert, la plantureuse Ria De Simone, Eva Hutzar, toutes trois dans l'uniforme de kapos intransigeantes, près desquelles la douceur féminine de Lorraine De Selle qui endosse de force la blouse de l'assistante du docteur et la tendre Sonia Viviani alors au summum de sa beauté qui garde du film un très mauvais souvenir tranche nettement.
Tentative avortée de cinéma d'exploitation réaliste, KZ9 camp d'extermination s'il rate son objectif et reste à l'instar des autres films de ce type un spectacle particulièrement morbide aussi dérangeant que racoleur n'en est pas moins un des meilleurs éros svastika, un des plus brutal, que tout amateur saura apprécier à sa juste valeur. Le film de Mattei contrairement à ses Maisons privées pour SS reste un incontournable pilier du nazisploitation, un monument de mauvais goût et de sadisme brut, par conséquent de plaisir coupable, pour incondtionnels d'érotisme glauque sur fond de camp de la mort.
Lager SSadis kastrat Kommandatur connu en France sous le titre bien racoleur de HORREURS NAZIES n'est peut être pas le meilleur des nazisploitations mais il fait résolument partie des pellicules les plus représentatives du genre aux cotés de son frère jumeau bien sûr SS camp 5, de KZ9 camp d'extermination de Mattei et à moindre effet Holocauste nazi de Luigi Batzella. Contraint par les producteurs de tourner ces deux films qu'il désavouera bien des années plus tard, Garrone délivre une fois encore une petite série érotico-horrifique prenant pour contexte un camp nazi afin de justifier ses scènes d'horreur et autres sanglantes atrocités. Si l'érotisme reste ici discret et se limite aux incontournables scènes de douches communes, d'examens médicaux intimes, à quelques ébats saphiques et autres orgies entre des officiers SS libidineux et une poignée de putains ainsi que bon nombre de plans de nudité intégrale féminine, évitant ainsi la traditionnelle carte du porno soft, Horreurs nazies ne lésine pas sur les séquences d'horreur qui semblent être l'unique raison d'existence du film. Contrairement à SS camp 5 enfer de femmes qui fut tourné simultanément avec les mêmes acteurs dans les mêmes décors les tortures les plus infâmes sont présentées lors d'une longue séquence pré-générique qui donne d'emblée le ton. Electrifications des suppliciées qui hurlent comme des damnées, le visage tordu par la douleur, alors que d'autres urinent sous l'effet de la souffrance, Garrone prenant un main plaisir à filmer en gros plan le jet de pisse, têtes gonflées à l'oxygène, corps ébouillanté puis gelés, victime suspendue nue, exsangue, à un mur de barbelés, humiliations diverses, viols, maltraitances, castration... sont ainsi au menu et devraient ravir tous les amoureux d'effets sanglants et de déviances en tout genre. Le paroxysme du mauvais goût est atteint lorsque les corps des victimes sont emportés sur des chariots jusqu'au four crématoire puis jetés au feu. Le cinéaste prend alors un plaisir pervers à montrer les corps se recroqueviller et se tordre sous l'effet des flammes, un moment crasse qui soudain donne au film un coté onirico-macabre certes fort douteux mais particulièrement saisissant si ce n'est jubilatoire aux yeux des plus vils même si le trucage est assez primitif, une simple superposition et transparence. SS camp 5: enfer de femmes reprendra ce moment de pur bonheur coupable lors d'une scène identique, celles où les quatre fugitives sont enfermées dans un four puis brûlées vives. Le clou du film reste bien entendu la greffe de testicules que l'officier SS veut pratiquer afin de retrouver ses capacités sexuelles dont il fut privé après qu'une détenue qu'il violait l'ait castré. Si Garrone ne nous épargne aucun détail chirurgical, la transplantation en elle même n'est malheureusement pas montrée, tout juste suggérée. S'il ne restera plus au spectateur que son imagination pour la visualiser il aura au moins assisté en direct à un prélèvement quasi scientifique de testicules d'une authenticité étonnante. C'est malheureusement dans l'effarement le plus total qu'on assiste à la fin du film. Le bel officier sur qui on a prélevé les testicules s'apercevra qu'il n'est plus en possession de toute sa virilité non pas à son réveil dans son lit d'opéré mais en plein acte sexuel avec celle sur qui il avait jeté son dévolu, la belle Mireille! On nage en plein délire! A croire qu'il est aussi abruti que les détenues. Fou de rage, il tuera le médecin qui l'a opéré ainsi que le commandant SS désormais en possession de ses testicules. Profitant de la confusion, les filles se rebellent, prennent les armes et massacrent les officiers du camp lors d'un final trop vite amené et surtout très court.
Sur ce scénario plutôt étonnant quasi surréaliste mais beaucoup mieux articulé que celui de SS camp 5 Lager SSadis kastrat Kommandantur délaisse l'horreur pure au détriment d'une histoire d'amour impossible entre un soldat SS et une détenue, trame principale du film, sur laquelle se greffent quelques expérimentations scientifiques pratiquées par les médeçins allemands sur ces filles perdues. On nage par instant en plein roman-photo sur fond de barbelés et de crémation, Garrone oscille entre romance à l'eau de rose assaisonnée à la croix gammée et la série gore par excellence mais c'est bel et bien la première tendance qui souvent prend le dessus. Le mariage des genres est amusant, inattendu, pas toujours ni très bien dosé ni très convaincant mais Horreurs nazies connu également sous le titre Le camp des filles perdues fonctionne malgré tout et honore le genre auquel il appartient ne serait ce que par son mauvais gout et son aspect crasse.
Le gros problème du film vient en fait de ses dialogues et surtout de l'interprétation des comédiens qui récitent des textes dépassant les limites de l'absurde dans la plus totale indifférence. Ce décalage entre l'horreur du propos, des scènes de tortures et le total détachement des acteurs n'est pas seulement étonnant mais il rend surtout le film par instant hilarant, transformant ce qui au départ était une petite série d'horreur maladive et déplacée en une fort drôle comédie. Les détenues s'extasient sur la douceur des douches et de leurs bienfaits, se croient parfois en villégiature et participent allègrement à ces expériences sexuelles. On ne parlera pas du comportement aberrant des soldats en apparence débiles choisis pour les expérimentations qui semblent tous autant qu'ils sont droit sortis d'un épisode de Papa Schultz!
Aux cotés de Paola Corazzi et Giorgio Cerioni déjà présents dans SS camp 5, on retrouvera Almina De Sanzio, Giovanna Mainardi, la protégée du réalisateur, en gardienne sadique, Agnes Kalpagos, Serafino Profumo, Attilio Dottesio et Patrizia Melega. Quant au pauvre soldat qui perd bien contre son gré ses testicules, c'est au bellâtre et très insipide Mircha Carven à qui revient ce triste rôle. Particulièrement benêt, Mircha qui doit son heure de gloire au fait qu'il avait affirmé être le fils de Clark Gable semble se croire dans un roman-photo, jamais crédible mais toujours très drôle Si avec SS camp 5: enfer de femmes, Sergio Garrone tenait un film plutôt dérangeant graphiquement violent, traitant avec un certain sérieux les expériences à soi-disant but humanitaire auxquelles s'est livrée l'armée allemande, il signe avec Horreurs nazies une oeuvre certes plus arrondie mais bancale qui semble ne jamais vraiment quelle orientation prendre dont le caractère abominable se trouve la plupart du temps désamorcé par le comique de situation.
Horreurs nazies reste un nazisploitation honorable au titre français légèrement trompeur qui remplit sa mission, assouvir les pulsions perverses du spectateur par son audace déplacée tout en le faisant rire par l'absurdité du traitement et de la mise en scène. Signalons que si la version furtivement sortie en salles en France fut intégrale, l'édition vidéo fut quant à elle tronquée de plus de 15 minutes tandis qu'en Angleterre le film fut banni.
SS CAMP 5 ENFER DE FEMMES est donc la deuxième incursion de Sergio Garrone dans l'éros svastica, ce sous genre très controversé du cinéma d'exploitation appelé également nazisploitation. S'il n'est pas le meilleur du genre artistiquement parlant mais cependant supérieur à son prédécesseur sur bien des points il est celui qui se rapproche le plus du cinéma d'horreur justifiant ainsi ses longues scènes de torture du moins dans sa version intégrale.
Plutôt lent dans sa première partie essentiellement consacrée à l'arrivée des détenues au camp agrémentées de quelques séquences érotiques très soft composées des inévitables douches communes avec gros plans sur les fessiers et l'intimité des prisonnières, une pauvre orgie entre quelques putains et des officiers SS ivres sous les bannières ornées d'une croix gammée, l'inévitable danse nazie calquée sur celle de Portier de nuit et surtout la fameuse chorégraphie suggestive de la banane exécutée par Alina, l'héroïne principale, face à un Giorgio Cerioni aux yeux écarquillés, une scène aujourd'hui culte pour son ridicule et son anachronisme (la jeune femme porte tout de même des chaussures à semelles compensées et des boucles d'oreilles hippie), la deuxième partie nous plonge quant à elle dans l'enfer des tortures nazies dès lors que quatre détenues tentent de s'enfuir du camp où elles sont prisonnières en empruntant les sous sols qui mènent aux fours crématoires.
Garrone nous offre donc une galerie de supplices tous plus raffinés les uns que les autres qui assurément ravira l'amateur d'effets gore. Crâne explosé dans un carcan de métal, abdomen défoncé, ongles arrachés à la tenaille, allumettes insérées sous les ongles afin de brûler la main de sa victime, langue arrachée qui rappelle la fameuse scène de Mark of the devil... sont ainsi au programme lors d'une longue séquence de tortures orchestrées par Serafino Profumo et Patrizia Melega que la critique jadis qualifia de dantesque. Elle se clôturera par ce qui était alors encore inédit dans ce sous genre du cinéma d'exploitation, véritable paroxysme de l'ignoble et de l'inconcevable, les cadavres ensanglantés des suppliciées entassés sur un chariot sont jetés dans un four crématoire que la caméra infiltre pour mieux nous les montrer en train de brûler. Si Garrone en quelques minutes seulement parvient à travers cette seule séquence à créer une atmosphère crasse, étouffante, particulièrement morbide, donnant l'effroyable impression d'une descente aux Enfers, le photomontage assez maladroit en désamorce malheureusement beaucoup l'intensité notamment lorsque les cadavres pris de spasmes se mettent à bouger comme des marionnettes dans les flammes. Horreurs nazies comportait déjà une séquence semblable filmée de façon bien plus convaincante. Il est assez amusant de constater que Garrone pousse également le vice et la perversion assez loin puisqu'il va jusqu'à glisser sa caméra sous la blouse des malheureuses entrain de carboniser pour nous dévoiler subrepticement leur petites culottes blanches.
Il est intéressant de souligner que SS camp 5 est le premier eros svatiska à avoir traité des expérimentations faites sur des cobayes humains dans les camps de la mort. Ce sont ici des détenues dont on brûle la peau sous leurs cris de douleur à des fins de greffes, des scènes très efficaces qui accentuent l'horreur du propos et lui donne un air d'authenticité plutôt dérangeant d'autant plus que Garrone toujours par souci de véracité mais pour également accentuer soyons en sûr l'aspect malsain de l'ensemble insère des images d'archive particulièrement morbides de charniers humains. Le thème des expérimentations humaines sera repris par la suite dans KZ9 camp d'extermination de Bruno Mattei et Les déportées de la section spéciale SS de Rino Di Silvestro.
Original le film l'est au moins sur un point: il est le seul à avoir comme protagoniste principale une actrice de couleur, à savoir la délicieuse Rita Manna, découverte dans Emanuelle bianca e nera, une jeune universitaire érythréenne fiancée alors au producteur Eugenio Alabiso.
Outre Rita Manna, on y retrouve l'inévitable Giorgio Cerioni en officier allemand, Serafino Profumo en bourreau libidineux et l'intrigante Patrizia Melega en kapo sadique. Parmi les détenues on reconnaitra Paolo Corazzi violée par Serafino Profumo en transe, hébêté, couvert de sueur après qu'il ait massacré une détenue, la frêle Leda Simonetti, Paola D'Egidio et Agnes Kalpagos. Moins bien articulé que Horreurs nazies, un peu moins noir également, SS camp 5 enfer de femmes ne cache pas sa pauvreté et le manque d'enthousiasme des acteurs ne joue guère en sa faveur. S'il n'est pas le haut de gamme du genre, il reste avec Horreurs nazies et KZ9 camp d'extermination un des meilleurs exemples de nazisploitation, un de ceux qui définit le mieux le genre. Nous sommes ici face à un petit film d'horreur à l'érotisme malsain, une pellicule gore, qui prend comme contexte un camp nazi justifiant ainsi selon son auteur ces interminables séquences de tortures en tout genre. Si on excepte l'hallucinant mais très drôle Holocauste nazi de Luigi Batzella dont les excès gore et l'absurdité du propos désamorce le coté dérangeant Sergio Garrone qui bien des années plus tard désavouera ces deux films exigés par les producteurs détient la palme d'honneur des nazisploitations les plus sanglants que cette sous branche ait alors connu. Fascinant SS Camp 5 enfer de femmes l'est à bien des niveaux comme la plupart des nazi-movies. Les inconditionnels du genre devraient donc apprécier et trouver de quoi pleinement satisfaire leurs instincts les plus vils.
Dans l'univers du nazisploitation italien BOURREAUX SS / LES ORGIES DU 3ème REICH, réalisé en 1976 par Cesare Canevari l'auteur de l'érotico- psychédélique La princesse nue et de Matalo, fait sans nul doute partie des films les plus intéressants du genre non pas pour ses séquences une fois encore particulièrement dérangeantes mais pour son propos plutôt original.
Canevari propose en effet un film sombre qui à la manière de Portier de nuit retrace les terribles souvenirs d'une ancienne détenue retournée sur les lieux où elle a vécu l'enfer des camps de la mort. S'ensuit toute une série de séquences plus abjectes les unes que les autres dont la première sera le gigantesque viol collectif sordide des prisonnières juives battues et humiliées par un groupe de soldats SS qui testent ainsi leur virilité sous les tentures ornées de croix gammées. Si Canevari est plus raffiné mais surtout moins obnubilé par les tortures que ses confrères notamment Sergio Garrone et Luigi Batzella, Bourreaux SS n'est cependant pas exempt de séquences choc qui devraient faire le bonheur des amateurs d'atrocités en tout genre: une détenue est jetée en pâture à un doberman qui la dévore à pleines dents sous l'oeil réjoui d'une kapo, une autre est plongée dans de la chaux vive, suspendue par les pieds, Lisa subira le supplice des rats sur lesquels elles finira par vomir, des prisonnières sont brulées vives dans un souterrain, le tatouage que porte un soldat sur la poitrine est decoupé au couteau... Le summum du mauvais goût revient à la longue séquence du repas dit cannibale où une jeune juive est flambée vivante au cognac dans un immense plat en argent. Avant de la déguster, certains officiers SS et invités s'accoupleront pendant que d'autres feront l'amour tout en caressant les restes calcinés de la victime. Cette séquence est au film ce que le repas coprophage est à Salo et les 120 journées de sodome non seulement pour l'abomination de l'acte en lui même mais surtout pour sa terrible signification puisque l'initiateur de cette monstruosité s'appuie sur la théorie de Goering comme quoi les juifs, moins dignes que de la viande animale, rabaissés au rang de simples excréments, sont faits pour nourrir la race aryenne. Elle fait également écho à la scène où la future élite de l'armée allemande haranguée par le commandant SS visionne tout en se masturbant des diapositives qui témoignent des atrocités subies par les déportés contraints de manger leurs excréments dans une écuelle et de s'en couvrir le corps. L'humain réduit à son plus simple déchet qu'on se plait à détruire. Outre ses monstruosités, le principal intérêt du film de Canevari est l'histoire qu'il développe entre l'héroïne et son ancien bourreau, de loin une des meilleures depuis le film de Liliana Cavani. A l'horreur et à l'innommable Canevari a préféré la réflexion et l'analyse en donnant à son film une dimension parfois auteuriale. Il offre une étude assez approfondie même si maladroite de son bourreau, le commandant Von Starker, contraint à commettre ses atrocités par faiblesse, par lacheté, mais également pour masquer ses complexes. L'ambiguité de sa relation avec Lisa n'en est que plus trouble et malsaine. Leur histoire d'amour et de haine qu'on peut associer au fameux syndrome de Stockholm devient vite le centre de l'intrigue filmée en un très long flash-back qui aboutira à cette tragique mais inéluctable conclusion dont la seule issue possible est la mort, une vengeance en forme d'exorcisme tout aussi trouble perpétrée bien des années plus tard. A noter que Canevari tourna une fin alternative reprise sur l'édition DVD française qui ne change en rien le message initial mais le renforce. Tout aussi intéressant est le parcours de la douce Lisa qui après avoir choisi de rester coûte que coûte en vie se transforme à son tour en une sorte de monstre, impassible, vide de toute émotion. Ainsi ne réagit-elle pas lorsque sa meilleure amie est conduite au four crématoire, une première transformation avant de devenir à son tour un monstre, le bourreau de son bourreau, ravagée par l'ambiguité de ses sentiments. Certes Cesare Canevari reste dans une certaine superficialité inhérente à l'exploitation mais il a suffisament de talent pour rendre crédible sa tentative. Filmé sur les terres désolées du lac de Come dont la photographie froide et sombre renforce la tristesse et dans un des anciens fours d'une usine désaffectée située à Rosate qui pour la rendre plus réaliste fut entourée de fils barbelés, Bourreaux SS connu également sous le titre Les orgies du 3ème reich vaut également pour ses dialogues très souvent équivoques, profondément antisémites, même s'ils n'évitent pas par instant un certain ridicule qu'une version française un peu lourde n'arrange guère. Si Canevari a évité l'horreur graphique il l'a sournoisement remplacé par quelques tirades et autres envolées verbales étonnament violentes notamment celles de Alma, l'effroyable kapo, qui entre autres exemples se vante d'arracher la bouche des nouveaux-nés pour éviter qu'ils ne sourissent et de faire de leur peau des sous vêtements particulièrement doux et érotiques. Bénéficiant d'une mise en scène efficace Bourreaux SS doit aussi beaucoup à son interprétation. Dans le rôle de Lisa on retrouve une toute jeune Daniela Levy alias Daniela Poggi, belle et sensuelle, dont c'était la toute première apparition au cinéma avant qu'elle ne devienne une vedette du petit écran et renie ce film qu'elle voulut faire retirer de sa filmographie et le solide Marc Loud alias Adriano Micantoni dans la peau du commandant SS. Egalement au générique la pasolinienne Antinesca Nemour déjà présente dans Salo plongée ici dans un bain de chaux. On notera que Fulvio Ricciardi, le docteur qui s'amourache de Lisa, qu'on retrouvera en 1982 dans le giallo Delitto carnale du même réalisateur, a co-écrit le scénario avec Canevari et Micantoni. La véritable révélation du film reste sans aucun doute l'incroyable Maristella Greco dans le rôle de la cruelle Alma, une des kapos parmi les plus sadique que l'eros svastika ait connu. Remarquée par Canevari lors d'un diner mondain, il l'engagea pour son physique sévère et son caractère bien trempé.
Bourreaux SS est de loin le meilleur film de la carrière de Canevari. Ambitieux il y avait mis tous ses espoirs et pas mal d'argent. L'échec du film en Italie lors de sa sortie en 1977 et le total désintérêt du public l'avait alors fortement affecté. Quoiqu'il en soit ce nazisploitation qui privilégie l'analyse à l'horreur pure s'il n'est donc pas le plus graphiquement terrible n'en reste pas moins le haut du panier d'un genre certes délicieusement repoussant mais résolument inégal.
Pour l'anecdote, l'acteur Tino Pollenghi qui interprète un soldat SS rondouillard, très souvent chargé de trouver acteurs et figurants sur bon nombre de films d'alors, confesse que Bourreaux SS fut directement tourné en version hard. Les séquences hardcore furent par la suite retirées du film et n'en subsiste aujourd'hui que son témoignage. S'il y a lui même participé (le viol de la pornocrate Maria Grazia Cisera la jeune juive à l'écuelle), photographie de plateau à l'appui, il avoue que Daniela Poggi n'y a pas pris part contrairement à Antinesca Nemour qui ne se fit pas prier. Cette révélation n'est guère surprenante puisque certains plans laissent sous entendre des coupures notamment lors de la masturbation collective des soldats dans la salle à orgie et l'amorce de masturbation pratiquée par Maristella Greco au soldat à qui elle s'apprête à retirer la peau du torse. Toujours pour la petite histoire selon Canevari, l'acteur Vittorio Joderi qui interprète le sadique commandant Weissman obligea Antinesca Nemour dont l'hygiène corporelle était assez négligée à aller se doucher avant la fameuse scène où il lui lèche les pieds, une information confirmée par la costumière de l'actrice qui eut également l'occasion de constater son laisser-aller
HOLOCAUSTE NAZI s'avère être quant à lui une agréable surprise aussi féroce soit elle malgré le coté grotesque qui la caractérise et la propulse vitesse grand V au sommet des meilleurs eros-svatiska, un monument incontournable de l'euro-trash, un must de ce riche filon communément appelé Sex'n'violence centré sur les atrocités commises dans les camps de la mort.
Tourné en 1977 par Luigi Batzella sous le pseudonyme de Ivan Katzanski, La bestia in calore est en fait un assemblage de deux films en un seul ce qui peut par moment étonner le spectateur quant à la ligne directrice du film lui même.
Batzella s'est en effet contenté de reprendre un de ses vieux films de guerre, lui même composé de nombreux stock-shots pris ça et là dans diverses oeuvres, Quando la campana suona / La dernière grenade (lui même formé de séquences provenant d'un autre film de Batzella, Tre franchi di pieta), réalisé en 1970, auquel il a rajouté de nouvelles scènes à savoir toute la partie avec le monstre et les expérimentations sadiques de cette kapo lubrique, le Dr Kratsch afin d'en faire une sorte de porno soft au goût tout spécialement nauséabond. Ceci donne à l'ensemble un coté chaotique parfois incompréhensible notamment dans la cohérence du scénario. La partie guerre à proprement parlé ainsi que celle qui concerne toutes les horreurs perpétuées par la kapo n'ont que peu de rapport entre elles. L'assemblage étant de surcroit plutôt aléatoire, Holocauste nazi risque donc de déstabiliser le néophyte.
Pourtant cet incroyable patchwork pelliculaire à l'atmosphère de dégradation absolue reste un agréable divertissement hallucinant aussi malsain que sadique qui bénéficie des décors naturels sauvages et séculaires de Montecelio empruntés à La dernière grenade qui donnent au film un semblant de véracité souvent absent de ce type d'oeuvres principalement tournées dans de vieux abattoirs et autres écuries abandonnées.
La majeure partie du film est consacrée à la chasse aux partisans cachés dans les montagnes, aux rafles effectuées dans le village où les troupes ennemies capturent les femmes pour les faire parler, tuant personnes âgées et nouveaux-nés sans aucun scrupule. A cette occasion Batzella nous offre entre autres deux séquences, celle où une jeune vierge est tuée d'une balle dans le vagin et celle d'un bébé jeté en l'air tel un ballon mitraillé alors qu'il retombe à terre sous les cris horrifiés et les pleurs de sa grand-mère.
Le plus intéressant dans cet Holocauste nazi n'est pas la partie guerre en elle même mais bien évidemment les atrocités commises par le Dr Kratsch et ses troupes SS dans sa salle de tortures installée au coeur d'un château. Afin d'illustrer les monstruosités commises par les nazis Batzella multiplie les plans horrifiques et s'amuse visiblement comme un petit fou à inventer les pires atrocités afin de satisfaire un spectateur voyeur friand d'effets gore. Au menu de cet holocauste le cinéaste nous propose notamment des rats (en fait, quelques cochons d'Inde) qui dévorent vivante une captive, une autre se fait arracher les ongles à la tenaille tandis que des électrodes sont enfoncées dans le vagin de sa compagne d'infortune. Des partisans sont castrés au couteau alors que d'autres sont tués d'une balle dans la tête. Ajoutons à ces réjouissances les viols et humiliations indispensables au genre et nous avons là un tour d'horzion assez complet de ce qui attend l'amateur. Impossible de passer sous silence cette scène magistrale aujourd'hui culte qui constitue le clou du spectacle, celle où le monstre arrache telle une bande scratch le sexe d'une femme avant de le dévorer à pleines dents devant des gardiennes particulièrement excitées, preuve une fois de plus que Holocauste nazi appartient à une époque où l'Italie aimait reculer de plus en plus loin les limites du mauvais goût et de l'infamie afin de contenter les instincts les plus vils de son public.
Il faut pourtant reconnaitre que la plupart des scènes d'horreur tombent dans l'excès et le grandiloquent ce qui malheureusement leur enlèvent une bonne part de crédibilité et les rendent le plus souvent inoffensives voire par moment hilarantes aggravé par le jeu des comédiens qui surjouent, renforçant ainsi l'aspect (in)volontairement comique de l'ensemble. La présence de la créature simiesque, la fameuse bête du titre (à moins que cette bête lubrique ne soit en fait le Dr Kratsch, femme cruelle totalement folle, lesbienne en chaleur qui s'abreuve de la souffarnce de ses cobayes humains), le monstre libidineux à qui la commandante chef jette ses putains en pâture, achève de donner un coté irrésistiblement drôle au film tant il est fort amusant de voir le simiesque et difforme Salvatore Baccaro, hystérique, déchainé, en transe, sautant entiérement nu telle une puce dans sa cage, le sexe à l'air, à grands renforts de grimaces atroces et d'atroces borborygmes. Baccaro, parfaite incarnation du "freak", trouve là son seul et unique véritable rôle au cinéma, une bien dégradante prestation pour celui que son physique ingrat a toujours cantonné dans des personnages monstrueux de troisième voire de quatrième plan lorsqu'il ne s'agissait pas de simples caméo.
Aux cotés de Salvatore Baccaro ici crédité sous le nom de Sal Boris, on reconnaitra Brad Harris dans le rôle du prêtre, l'helvète Brigitte Skay dont toutes les scènes sont empruntées à La dernière grenade et surtout l'atout majeur du film, la splendide Macha Magall qui tient le rôle de cette femme barbare qui derrière un visage angélique cache une cruauté sans bvorne. Habituée au genre puisque déjà à l'affiche du SS girls/Maison privée pour SS de Bruno Mattei, Macha qui si elle n'a pas héritée du talent et du professionnalisme de Franca Stoppi en possède le visage délicieusement cruel et l'art du sadisme. Outre l'inégalable Ilsa, elle restera définitivement une des kapo les plus inoubliables et marquantes du genre auprès notamment de Maristello Greco.
Holocauste nazi, incroyable nazisploitation (nazi puzzle devrions nous dire ici) qui doit quasiment tout au personnage de cette bête simiesque et de son interprète déjanté filmé la plupart du temps de manière effrénée à grands renforts de zooms, est un parfait exemple de ce que l'Italie pouvait alors offrir en matière d'euro-trash, une bande érotique sulfureuse, pestilentielle, une bande dessinée de bien mauvais goût pour adultes qui se voudrait comme la plupart des eros svatiska à la fois sérieuse et authentique dans la dénonciation du génocide et les atrocités d'une douloureuse partie de notre Histoire. Son coté bricolé, rafistolé, son manque évident de budget qui lui donne un aspect fauché, le peu de sérieux dont font preuve les comédiens, la pauvreté de la mise en scène et l'exagération des scènes gore font très vite basculer le film vers la comédie grand guignolesque et désamorcent cette authenticité recherchée. Holocauste nazi déclenchera donc plus de gros fous rires qu'une profonde réflexion mais est-on là pour réflechir? Cette seconde tentative de nazisploitation de Batzella reste un titre indispensable pour tout amateur d'eros svastika dont il est un élément unique tant il est incroyable, un moment inoubliable pour tout amoureux de cinéma trash transalpin qui s'élève au rang astronomique de n'imporque quoi de l'infâme, un similacre érotico-porno poussé à son paroxysme comico-horrifique. De quoi placer Holocauste nazi au panthéon du ridicule grand-guignolesque, de l'hallucination pelliculaire.
LES NAZISPLOITATION TENDANCE SOFT:
Second éros-svastica de Bruno Mattei réalisé juste après l'intéressant et fort convaincant KZ9 camp d'extermination, très certainement un des plus désespéré mais également sadique nazisploitation italien, CASA PRIVATA PER LE SS / MAISONS PRIVEES POUR SS fait malheureusement bien vite retomber l'enthousiasme pris à la vision de KZ9 puisque voilà cette fois un piètre spectacle que peu de choses parviennent à sauver du grotesque.
Des officiers SS menés par le commandant Hans Shellenberg, un homme sadique et impuissant, ont bien l'intention de découvrir les traîtres qui se cacheraient parmi leurs rangs et comploteraient pour renverser Hitler. Afin de mener à bien leur mission, ils recrutent et forment un groupe de belles prostituées dont le rôle sera d'utiliser tous les moyens possibles dont leurs charmes pour découvrir leur identité. Maisons privées pour SS également connu sous le titre Hôtel du plaisir pour SS n'est jamais qu'une pâle copie de Salon Kitty dont il reprend bon nombre de séquences. Malheureusement Bruno Mattei n'est pas Tinto Brass et le résultat prête surtout à sourire (rire?). Le film voit se succéder toute une série de saynètes plus stupides et incongrues les unes que les autres dans une atmosphère de délire à la limite de la clownerie. Tout y est absurde, des situations elles mêmes aux personnages en passant par l'interprétation médiocre et les dialogues d'une effarante niaiserie peu aidés par une version française catastrophique..
Le rare réconfort que trouvera l'amateur du genre se situera d'une part dans l'aspect sadomasochiste de certaines scènes et quelques séquences d'horreur mêlées à un érotisme malsain. On citera entre autre le dignitaire SS qui boit des gorgées de cognac agrémenté de sang de femme, le commandant Shellenberg qui parvient à avoir un orgasme seulement si quelqu'un lui joue du piano et, pour la note zoophile indispensable à tout euro-trash qui se respecte, l'accouplement contre nature d'une prostituée avec un berger allemand. On se réconfortera également avec le contenu érotique, abondant, qui bien souvent verse dans la déviance pure tout en oscillant sans cesse entre érotisme et porno soft. Hormis les nombreuses orgies réglementaires durant lesquelles officiers nazis et putains donnent libre cours à leurs fantasmes sexuels les plus débridés sous des flots de champagne, l'accouplement d'une putain avec un chien déjà cité et les nombreuses séquences lesbiennes on retiendra également l'initiation des putains qui offrent leur corps à tout un éventail de monstres humains et autres "freaks" dont un afferux nain difforme sous l'oeil à la fois sévère et réjoui des officiers SS qui testent ainsi les performances de leurs filles de joie. Accompagnée d'une abominable musique joyeusement décalée ce véritable plagiat des inoubliables et repoussants accouplements contre nature de Salon Kitty sombre rapidement dans les tréfonds du ridicule. Lors de trop rares moments Mattei nous offre quelques éclairs de génie notamment lorsque Marina Daunia plus sensuelle que jamais malgré l'horrible cicatrice qui la défigure se masturbe seule dans la pénombre au cours d'une orgie et celle où, par une nuit d'orage, Macha Magall la future et inoubliable kapo de Holocauste nazi offre au spectateur son insolente nudité lors d'une étonnante scène saphique avec Marina Daunia, deux magnifiques séquences aussi sulfureuses que sensuelles joliment mises en scène et photographiées qui nous rapellent que Mattei est loin d'être ce cancre que beaucoup voient trop souvent en lui.
Entièrement tourné dans les décors intérieurs du superbe Palazzo borghezze à Artena (les extérieurs dont le parc où s'entrainent les filles sont ceux de la Tenuta Borgo à Manziana) Maisons privées pour SS malgré ces quelques qualités et trouvailles n'est jamais rien d'autre qu'une farce érotique idiote comme Mattei lui même définissait son film qui accumule anachronismes et humour involontaire. La présence d'un soldat nazi version ninja qui manie une épée de samouraï, des coupes de cheveux qui tendent plus vers le hippie que de la coupe réglementaire, des moustaches bien fournies très peu aryennes, des petites culottes ornées de croix gammées, de jeunes et jolies recrues nazies qui pour s'entrainer à l'escrime portent des jupettes romaines ou dansent en juste au corps bleu électrique... sont autant d'éléments qui donnent dans un je m'en foutisme spectaculaire et désamorcent complètement le coté sadico-pervers de la bande tout en renforçant son aspect résolument comique. Quelques vieux stock-shots de films de guerre sont également insérés en fin de bande afin de simuler l'approche de l'armée russe avant l'ultime orgie qui se conclura par le suicide collectif des officiers SS terrorisés par l'idée d'une éventuelle défaite. Si l'horreur n'est pas forcément présente encore moins ce climat de folie qu'on était en droit d'attendre d'un tel final cataclysmique, Mattei tente comme il l'avait fait auparavant pour KZ9 camp d'extermination de donner une légère note philosophique aux dernières images tout en tentant d'humaniser les soldats nazis, un choix qui s'il ne fonctionnait pas forcément sur KZ9 marche encore moins sur Maisons privées, trop convaicant et mal amené.
Si Macha Magall et Marina Daunia offrent toute deux une interprétation tout à fait acceptable, Maisons privées pour SS doit beaucoup à son principal personnage masculin, Gabriele Carrara surnommé le Malcolm Mc Dowell italien, magnifiquement bien doublé en italien par Sergio Graziani, déjà présent et tout aussi sadique dans KZ9. Délirante, hystérique, sa magistrale prestation donne au film une aura bien particulière, lui apporte ce soupçon de folie, de démence, qui le sauve de l'insipidité et le rend en fin de compte presque fascinant. Comment oublier la scène grandiose où déguisé en pape décadent il juge les officiers rénégats entouré de deux putains habillées en vestales? On saluera également le jeu du toujours très professionnel Ivano Staccioli malgré un temps de présence à l'écran fort réduit contrairement à KZ9. A leurs cotés, on appréciera le trio infernal que forment Giovanni Attanasio, Lucic Bogogliub Benny dit Oskar il terribile et Thomas Rudy, respectivement un exhibitioniste sadique, un SS qui nourrit ses poissons de chair humaine et le soldat nazi déjanté qui manie avec dextérité le sabre et le nunchaku. Parmi toutes les starlettes qui tourbillonnnent autour d'eux on reconnaitra notamment l'énigmatique Gota Kopert en tenue de kapo, la pornocrate Monica Nickel, Tamara Triffez transfuge de Salon Kitty et Cristina Minutelli. Signalons également la présence furtive de Luciano Pigozzi, Vassili Karis égaré et de Salvatore Baccaro, inon crédité, dans la peau d'un des monstres.
Invraisemblable, anachronique, déjanté, Maisons privées pour SS est l'un des plus faible nazisploitation italien, un des moins crédible, qui pourrait aisément rejoindre les productions Eurociné du genre si ce n'était ses quelques qualités et l'interprétation démentielle de Carrara. Cette plaisanterie outrancière qui privilégie l'érotisme aux tortures et autres supplices n'en demeure pas moins sympathiquement offensante pour que l'amateur d'eros svatiska passe un moment partagé entre plaisir coupable et éclats de rire. Même dans ce qui l'a fait de moins brillant, Mattei n'est jamais inintéressant.
LiEBES LAGER connu aussi sous le titre Love camp est certainement l'un des plus obscurs nazisploitations transalpins qui ait été tourné. Pas qu'il diffère des autres films de ce sous genre du cinéma d'exploitation fort controversé mais tout simplement par le fait qu'il soit devenu au fil du temps totalement invisible, les négatifs ayant été gravement endommagés, jusqu'à sa soudaine réapparition il y a maintenant quelques petites années.
Réalisé en 1976 par le scénariste-metteur en scène Lorenzo Gicca Palli à qui on doit Le corsaire noir, le western La vengeance de Dieu et une décamérotique de bas niveau Primo tango a Roma... storie d'amore e d'alchimia, Liebes lager, sorti en salles en Italie en pleine fêtes de Noël, n'est pourtant guère différent de ses petits frères mais suite à sa disparition durant tant d'années il s'est crée tout autour du film une sorte d'aura de mystère, transformant Liebes lager en une sorte de mythe autour duquel l'imagination du spectateur s'est longtemps amusée à vagabonder.
L'intrigue est des plus classique si toutefois on peut ici parler d'intrigue. Gicca Palli se contente de planter sa caméra à l'intérieur d'un camp, une miséreuse reconstitution faite en studio qui alterne avec quelques plans extérieur d'un quelconque camp, transformé en bordel pour les officiers qui usent et abusent des nouvelles détenues à qui on apprend également la phallocratie entre deux expériences idiotes. Point de cobayes humains ni d'expérimentations abominables, pas de maltraitances non plus juste quelques ordres aberrants comme se doucher en synchronisation, épaule gauche, fesse gauche, épaule droite, fesse droite, ou donner son linge en harmonisant ses gestes. Toutes ses idioties conduiront tout de même à un délirant final, totalement inattendu, qui dénote véritablement avec le reste du métrage. Après que les soldats amenés au camp ait commencé à se retourner contre les officiers, les détenues s'emparent de leurs armes et massacrent soldats et officiers dans une sorte de folie collective. Certes il n'y a pas de quoi jubiler, on reste dans un certain registre comique (la putain habillée en centurion romain et la tenue en général des prostituées) mais cet ultime quart d'heure est suffisamment inespéré pour retenir l'attention du pauvre spectateur. C'est bien là le seul véritable intérêt du film.
Si on excepte ce final déjanté, Liebes lager peut se targuer d'être un des pires nazisploitation jamais tourné à coté duquel les quelques eros-svatiska produits par Eurociné semblent soudainement être de véritables chefs-d'oeuvres. C'est pour vous dire le désastre! Il est également un des plus ridicules même si on le considère comme une sorte de parodie sans queue ni tête du genre, une sorte d'hybride entre Sturmtruppen, un (très) mauvais épisode de Papa Schultz et une comédie militaire de niveau Z. D'une incroyable lenteur Liebes lager multiplie les scènes hallucinantes de crétinerie agrémentées de gags éculés à la limite du supportable digne de Benny Hill comme l'interminable tri du linge. D'une incroyable pauvreté visuelle, le film tout entier baigne dans un climat de mauvaise farce érotique d'une insondable bêtise. Irritant à force de vouloir être drôle sans jamais y parvenir, Liebes lager devrait être interdit au plus de cinq ans d'âge mental d'autant plus que cette bande en costume allemand est si inoffensive qu'elle ne risque en aucun cas de traumatiser nos jolies têtes blondes. Ils imagineront être devant un quelconque film de la longue série des Bidasses mille fois plus réussie et amusante que cette idiotie degré zéro affublée de dialogues d'une sidérante niaiserie soutenus par une piteuse bande originale de cirque tout aussi fantaisiste signée Alessandro Alessandroni. Quant à l'érotisme, il est cette fois quasiment absent du métrage qui reste désespérément, irrésolument soft. Certes on a droit aux inévitables scènes de douche et d'inspections intimes anales et vaginales mais rien d'explicite cette fois, on les tourne en dérision pour en faire des moments que Gicca Palli voudrait drôles. En vain! Reste la nudité des pseudo actrices toutes plus ingrates les unes que les autres que le cinéaste déshabille aussi souvent que possible. On a donc le quota indispensable de fessiers et de poitrines nues. Hormis cela, absolument rien de croustillant. Liebes lager ne peut même se hisser au rang d'une piètre sexy comédie.
A la limite de la caricature, les acteurs tous cachés derrière des pseudonymes semblent être en totale roue libre. On remarquera parmi eux un tout jeune Kieran Canter, le futur héros de Blue holocaust, en gentil officier SS peu viril dont le jeu particulièrement gauche semble être réduit à écarquiller bêtement les yeux face aux prisonnières mais on retiendra surtout la pathétique prestation de Luciano Pigozzi qui incarne un officier nazi particulièrement maladroit complètement perdu au milieu de cet inénarrable camp de joie. A leurs cotés, on retrouve d'autres vétérans du cinéma de genre tels que les malheureux Jacques Stany et Mario Novelli. Parmi les détenues incarnées pour la plupart par des inconnues on reconnaitra tout de même l'incontournable et furtive Gota Gobert. Signalons la présence d'une jeune comédienne anonyme, l'amante de Kieran Canter, qui se présente comme le sosie de la candide Brigitte Petronio mais il ne s'agit en aucun cas d'elle. Cette jeune inconnue fut la même année à l'affiche de Horreurs nazies dans lequel elle était la jeune détenue qui tente d'assassiner Serafino Profumo et qui connaitra une mort atroce, exsangue, pendue par les pieds.
Véritable cour de récréation où chacun semble s'être égaré, Liebes lager demeure un spectacle inénarrable, unique dans sa médiocrité, un gag d'une tristesse désespérante qui s'étire sur 103 longues minutes durant lesquelles il ne se passe strictement rien. Lorenzo Gicca Palli peut se vanter d'avoir signé là un des pires nazisploitation jamais tourné. La véritable torture est ici d'atteindre les ultimes minutes sans vouloir prendre ses jambes à son cou. Un comble pour un éros svastika! Peut être aurait il mieux valu que le film ne réapparaisse jamais. Le seul intérêt de Liebes lager outre la présence de Kieran Canter réside dans sa rareté qui en fait une pièce pour collectionneurs assidus.
KAPUT LAGER GLI ULTIMI GIORNI DELLE SS / ERICA TIGRESSE DU DESERT / LES TIGRES DU DESERT est certainement un des moins intéressants mais également un des plus monotones si ce n'est le plus insipide. Premier des deux eros-svatiska que tourna Luigi Batzella, inoubliable metteur en scène du tout aussi inoubliable Holocauste nazi, Kaput lager gli ultimi giorni delle SS est une sorte de patchwork composé de multiples inserts et stock-shots pris ça et là dans bon nombre de films de guerre auquel le réalisateur aura rajouté quelques scènes qu'il aura réalisé lui même.
Erica tigresse du désert, éventuel clin d'oeil à Ilsa gardienne de harem, cette première tentative de nazisploitation de Batzella est principalement composé d'extraits provenant Strategia per una missione di morte, un film de guerre signé de la main du réalisateur, des Jardins du diable de Alfredo Rizzo et de Quando suona la campana. Le résultat est particulièrement faible. Erica tigresse du désert est plus un film d'aventures de guerre qu'un véritable nazisploitation. Seul le camp 113 dans lequel se déroule la première partie du film raccroche Erica au filon de ce genre plutôt controversé. Malheureusement, bien timides seront les tortures qu'on y prodigue et très décevant sera le niveau des scènes érotico-trash. Dans cette ambiance exotique, le camp 113 est situé en plein désert africain, nouvelle référence à Ilsa gardienne de harem, on retiendra surtout quelques trop gentilles séquences qui semblent vouloir pimenter un film bien peu audacieux notamment celle où Mike Monti est contraint de boire l'urine d'un soldat dans un calice en cristal ou ces prisonnières dont on lave le derrière à l'aide d'un énorme balai serpillère.
Quant à la fameuse Erica, interprétée par l'ex-muse de Mario Bava Lea Lander, elle s'évertue vainement à imiter Dyanne Thorne dont elle n'a ni les formes ni le charisme encore moins la méphitique présence. Peu crédible, grimaçante, seule la scène où elle atteint l'orgasme en se faisant fouetter par une détenue fait quelque peu illusion même si nous l'aurions voulu plus puissante. Elle nous offre tout de même une petite scène érotique lorsqu'elle se masturbe en espionnant les ébats de cette même prisonnière avec son amant. Les effets gore quant à eux sont cette fois quasiment absents à l'exception de quelques castrations de bédouins plus suggérées que vraiment montrées. Quelques molles flagellations et humiliations s'ajoutent au menu.
Dés la deuxième partie, Erica tigresse du désert se transforme en un simple film de guerre traditionnel dont on appréciera surtout le décor très exotique. Quelques batailles dans un désert que sillonnent quelques malheureux chars et une ou deux jeeps, quelques rafales de mitraillettes et de belles explosions extirpées des films cités plus haut sont entrecoupées par des plans de Erica, faite prisonnière par les américains, afin qu'on n'oublie pas que nous sommes supposés regarder un film à proprement parlé original.
Puisqu'il faut bien se raccrocher à quelque chose ce sera ici à la distribution. Aux cotés de Lea Lander, une des moins bonnes et convaincantes tortionnaires que le genre ait connu, on se réjouira de la présence de Gordon Mitchell, excellent et sadique à souhait, qui rehausse la tristesse de l'ensemble et nous livre quelques éclats d'interprétation (la scène où il fouette un cadavre). Les vétérans Richard Harrison et Mike Monti ainsi que les sexy starlettes Agnes Kalpagos et Zaira Zocchedu complètent l'affiche.
Pour l'anecdote, Erica tigresse du désert fut distribué en France par Eurociné. Totalement dispensable, jamais vraiment drôle ni même distrayant, Erica est purement et simplement le plus inoffensif des nazisploitations italiens.
Il faut attendre LE DEPORTATE DELLA SEZIONE SPECIALE SS / LES DEPORTEES DE LA SECTION SPECIALE SS réalisé en 1977 par Rino Di Silvestro, spécialiste du film de genre à haute connotation érotico-saphique, pour que remonte le niveau des films de cette catégorie. Contrairement à ses confrères, le réalisateur, s'il conserve ses penchants naturels pour le sexe, a cette fois mis de coté l'aspect voyeur de ce type d'oeuvre pour mieux s'intéresser à la détresse et le désespoir des détenues. A l'exception des quelques meurtres et des inévitables supllices inhérents au genre, les séquences gore et autres effets sanglants sont peu nombreux. Les déportées de la section spéciale SS risque donc de décevoir tout ceux qui de cet eros svatiska attendaient toute une série d'atrocités toutes plus réjouissantes les unes que les autres. Ils devront simplement se contenter d'un crâne éclaté, d'un poignard planté dans la nuque et de la vision d'une femme au sexe explosé. On mentionnera également l'impressionnante séquence où la douce Lina Polito cache dans son vagin une lame de rasoir montée en croix afin de couper en quatre le gland de John Steiner le jour où elle acceptera de se donner sournoisement à lui lors d'un fort douloureux final.
Malgré un manque évident de moyens et la pauvreté de l'ensemble, très peu de scènes extérieures, des décors intérieurs qui se limitent à quelques salles quasiment vides, un régiment de soldats allemands réduit à quelques simples figurants, Di Silvestro signe cependant un des plus intéressants eros-svastica. D'une part pour le soin apporté à la réalisation et la qualité de la photographie, d'autre part pour le scénario en lui même. S'il n'évite pas certaines montées de violence surtout sexuelle qui trouvera son apogée lors de la scène où furieux de ne pouvoir posséder l'héroïne, le commandant SS sodomise férocement son assistant, un officier porcin au physique ingrat il se concentre beaucoup plus sur l'enfer carcéral et les sévices sexuels endurés par les prisonnières comme Di Silvestro l'avait déjà fait pour Condamnées à l'enfer. Le réalisateur privilégie largement l'érotisme à l'horreur et montre la vie dans les camps de la mort sous son aspect le plus sexuel. Il multiplie donc les scènes de sexe et de lesbianisme particulièrement pimentées dont parmi les chaudes celles où Paola d'Egidio force une prisonnière à lui lécher l'entre-jambe (reprise en version hétérosexuelle lorsque Lina Polito est contrainte de lécher les parties intimes d'un officier sous l'oeil pervers du commandant) et celle très réaliste où Sara Sperati et Ofelia Meyer font l'amour.
Hormis par cette exaltation de l'érotisme, Les déportées de la section spéciale SS se caractérise avant tout par cette atmosphère de total abandon, de désespoir et de désolation dans laquelle baigne tout le film et lui donne un coté authentique morbide, oppressant, dès les premières séquences, l'arrivée des prisonnières dans les cachots froids et humides plongés dans la pénombre suivie des inévitables examens gynécologiques particulièrement réalistes pratiqués par des kapos sadiques et lesbiennes puis des tontes non truquées, affreuses et humiliantes, de la tête et du sexe des détenues, l'ensemble appuyé par une partition musicale dramatique composée essentiellement de violons signée Stelvio Cipriani.
L'ultime atout du film et non des moindres est sa distribution avec en tête un excellent John Steiner, SS névrotique et violent particulièrement convaincant dont l'insoutenable castration risque d'en faire frissonner plus d'un, à la tête d'une armada de jeunes starlettes dont les tout aussi convaincantes Lina Polito et Sara Sparati entourées de Stefania D'Amario et Paola D'Egidio en kapo sadiques, Anna Curti, Ofelia Meyer, Solvi Stubing et Erna Schurer alors compagne de Di Silvestro en commandante SS cruelle et glaciale.Signalons aussi la présence de Maria Renata Franco rendue à jamais célèbre pour son accouplement avec un cheval dans Black Emanuelle en Amérique.
Les déportées de la section spéciale SS fut un des éros-svastica qui remporta le plus de succès lors de sa sortie en salles en Italie.
Lors d'une interview, Di Silvestro avoua que ce film fut pour lui comme une obligation, une réponse à la violence extrême d'une jeunesse désespérée qui alors envahissait l'Italie. L'Allemagne nazie reflétait l'Italie contemporaine et la subversion dans laquelle elle baignait avec notamment tous les mouvements politiques naissants dont le plus fameux fut Les Brigades rouges. Le nazisme en était une sorte de miroir et le sexe une forme d'évasion. Ainsi lorsque l'héroïne cache une lame de rasoir dans son vagin en espérant que son bourreau se tranche le gland, c'est le signal avertissant les autres détenues qu'elles peuvent fuir.
Plus film érotique que véritable film d'horreur Les déportées de la sqection spéciale SS est sans nul doute un des plus authentiques, peut être même le plus intelligent des éros svastica transalpins. De par cette véracité, Il peut facilement se ranger aux cotés de La svastica nel ventre de Mario Caiano, plagiat du pauvre de Salon Kitty, et Bourreaux SS de Cesare Canevari.
LE LUNGHE NOTTI DELLA GESTAPO connu en France sous deux titres différents, Les nuits rouges de la gestapo et Les nuits chaudes de la gestapo, réalisé en 1977 par le scénariste Fabio De Agostini dont ce fut quasiment le seul véritable film est un peu à part dans la petite série des eros-svastica transalpins tant il se distingue par ses qualités notamment artistiques.
Contrairement aux nazisploitations de Sergio Garrone, de Rino De Silvestro ou mieux encore de Luigi Batzella très orientés sexe et violence, aisément assimilables aux vieilles bandes dessinées pour adultes avertis tendances sadomasochistes retranscrites dans le cadre bien particulier des camps nazis, Le lunghe notti della gestapo tend plus vers une tentative de cinéma d'auteur tout en restant dans le cadre de l'exploitation qu'on qualifiera ici d'intelligente si toutefois les deux termes sont compatibles.
Loin des tortures sadiques et des perversions sexuelles des nazisploitations traditionnels, Le lunghe notti della gestapo brille d'une part par son aspect beaucoup plus intellectuel peut être dû au fait que le scénario est tiré de l'auto-biographie de l'écrivain Berta Uhland, d'autre part par la qualité de la mise en scène et du soin apporté à la photographie. Celle ci met en effet en valeur les très beaux décors intérieurs du château de Carimate dans lesquels évoluent pour une fois de bons comédiens. On saluera entre autres exemples la prestation de la française Isabelle Marchall qui, non doublée, récite Verlaine avec sensualité et conviction aux cotés de l'excellente Paola Maiolini.
Le coté gore s'estompe donc face à cet intellectualisme à prétention auteuriale puisque le film ne contient ni scène sanglante ni abomination horrifique. C'est peut être là un des facteurs qui fit que le film de De Agostini déplut profondément aux amateurs du genre, frustrés et déçus par cette cruelle absence de sadisme et de perversions y compris lors de l'inévitable massacre final, éléments indispensables à tout éros svastica qui se respecte.
Cette conclusion est en effet d'une sagesse quasi exemplaire si on excepte la mort de Niki Penati, le manche du fouet qui l'étranglera enfoncé préalablement dans le vagin, la scène où un officier impuissant pète sur une fille de joie hystérique et celle durant laquelle le cercueil où est enfermée une prostituée est jeté dans le vide. Au moment où il s'écrase au sol, il s'entrouvre et laisse apparaitre le visage de la jeune fille figé dans une expression d'horreur. Le coté très théâtral de l'ensemble, ses assommants dialogues souvent pompeux et prétentieux et sa stupéfiante lenteur acheva de détourner du film les inconditionnels du genre. Quant à la critique, elle détruisit le film mettant en cause sa misogynie mêlée ici à une certaine apologie du fascisme, deux thèmes pourtant inhérents à l'éros svastica mais qui transposés dans un contexte plus sérieux sont peut être beaucoup moins acceptables pour des esprits plus rigides. Comme dit le célèbre adage «chacun voit midi à sa porte». Chacun comprendra donc ce qu'il veut comprendre en interprétant le film à sa manière. Le lunghe notti della gestapo fut malheureusement lors de sa sortie en Italie un cuisant échec. Pour information, Les nuits chaudes de la gestapo fut le seul éros-svastica a avoir été distribué en salles en Angleterre après bien entendu moult coupes à l'instar de la version française.
Sorte de vision dégénérée de Salon Kitty, Le lunghe notti della gestapo ne méritait cependant pas un tel désaveu du public. Outre sa mise en scène, ses qualités visuelles et esthétiques et son interprétation, le film dégage par instant un étrange pouvoir de fascination à travers des images à la fois étranges et poétiques. La séquence où la féroce Rosita Torosh s'accouple sauvagement à trois hommes au son de l'envoûtante chanson ''La notte della ragione genera dei mostri'', la danse de Mademoiselle Hitler, magnifique, presque surréaliste avec la fameuse manipulation de la balle de ping-pong qui disparaît dans le vagin d'Inga Alexandrovna, parfait écho des bijoux retirés de l'intimité de Paola Maiolini, et l'étonnante séquence où une prostituée se transforme en vishna au son d'une sérénade jouée par un violoniste sont autant de moments qui illustrent parfaitement toute l'étrangeté et l'onirisme d'un film visiblement inspiré par Tinto Brass. De Agostini filme en effet avec brio et surtout avec poésie les fessiers charnus et splendides de ses actrices tandis que les nombreuses scènes de sexe souvent très audacieuses semblent quant à elles le plus souvent chorégraphiées.
Subtil, Les nuits chaudes de la gestapo n'évite pourtant pas certaines outrances certes fort sages telle la scène où une des prostituées tête le sein d'un officier, le lait coulant le long de son visage, et celle beaucoup plus suggérée sur laquelle plane une ombre de pédophilie lorsque De Agostini laisse sous-entendre qu'une fillette, au demeurant fort perverse, seule rescapée du carnage final, s'est volontairement laissée aller à des actes contre-nature avec un officier. Voilà qui est bien peu cette fois comparé à l'audace souvent sans limite des réalisateurs d'alors.
Hormis les splendides Isabelle Marchall, Paola Maiolini et Inga Alexandrovna, on retrouvera en tête de distribution féminine la regrettée Rosita Torosh, alors connue comme présidente de la ligue naturiste italienne, Almina Di Sanzio et Alessandra Palladino aux cotés d'une des stars du roman-photo d'alors, le jeune Ezio Miani qui incarne l'officier SS Werner Von Uhland, Giorgio Cerrioni déjà présent dans Horreurs nazies et SS Camp 5 enfer de femmes sans oublier Luca Sportelli et Luciano Rossi.
Si Le lunghe notti della gestapo n'est pas et de loin l'eros-svastica le plus sensationnel, il n'en demeure pas moins fascinant dans sa mise en scène, sa poésie et sa subtilité, véritable atout de ce film un peu trop ambitieux qui continuera à diviser les amateurs de ce sous genre.
Solide et toujours très intéressant réalisateur, le vétéran Mario Caiano en donnant à son tour dans le nazisploitation avait peu de chance de décevoir son public. Voici donc un nouvel essai plutôt réussi tant au niveau de la qualité du film que de la mise en scène et l'interprétation.
LA SVASTICA NEL VENTRE / DESTIN DE FEMME, réalisé en 1976, est sans doute l'un des ersatz les plus agréables du Salon Kitty de Tinto Brass vers lequel il lorgne furieusement en y mêlant certains des éléments de Portier de nuit de Liliana Cavani. Monté en deux parties assez distinctes, Caiano s'évertue à montrer avec beaucoup de conviction l'horreur des camps de la mort dans la première moitié du film en définissant de manière plutôt convaincante tant son sujet que son personnage principal, la douce Hannah une jeune fille d'origine juive.
Destin de femme débute par la rafle de la famille d'hannah très vite massacrée par les SS. Seule survivante Hannah est déportée dans un camp de la mort bien cyniquement appelé Camp de la Joie. Dés son arrivée, Hannah et une de ses compagnes sont violées par cinq officiers. L'infortunée partenaire de Hannah tente alors d'échapper à ses bourreaux mais elle finira électrocutée sur les barbelés qui entourent le camp. Hannah va très vite découvrir l'univers des camps que Caiano filme avec une certaine rage comme il parvient assez bien à recréer la détresse et le désespoir de ses filles traitées en esclaves en passe pour la plupart de devenir des putains pour SS.
En elève appliqué, Caiano respecte avec soin les régles de l'eros svatiska. Au cours de cette première partie on retrouve en effet les éléments inhérents au genre à savoir examens intimes explicites, douches collectives, séquences saphiques et accouplements forcés qui ont pour but de créer la future élite aryenne, le tout sous l'oeil vicieux de gardiennes sadiques, voyeuses et lesbiennes dirigées par une effroyable Kapo en chef jamais en manque de punitions cruelles. Si contrairement à bon nombre de nazisploitation, ceux de Sergio Garrone et Luigi Batzella en tête, Destin de femme n'est pas très graphique, plutôt pauvre en tortures et autres abominations nazies, le film réserve tout de même deux inoubliables scènes: celle où une pauvre détenues attachée nue sur une table, est sauvagement battue à coups de batte en bois par la kapo et celle où une autre prisonnière est violée avec un olifant!
La seconde partie du film doit beaucoup à Salon Kitty dont il n'a bien sûr pas la grandeur, Caiano n'est pas Tinto Brass et ne dispose pas non plus de ses moyens. Sauvée d'une mort certaine par le commandant Von Stein qui est tombé amoureux d'elle, Hannah a du en retour devenir sa putain attitrée et assouvir ses fantasmes sexuels les plus pervers. Il en fait la directrice d'un bordel où les officiers allemands vienent se distraire. Hannah devient Madame Lola. Von Stein gardera ses origines juives secrètes tant qu'elle lui obéira docilement. C'est sans compter le retour inattendu du fiancé de Hannah devenu officier réfractaire qui la reconnaitra. Il est malheureusement trop tard. Le destin de Lola/Hannah est scellé. Elle est une femme désormais sans passé sans avenir. Hannah n'est plus que Lola, une prostituée de luxe vivante mais déjà morte. Elle repoussera son fiancé qui repartira au front. Désespérée, réalisant l'horreur de sa vie, Lola, face à une assistance médusée, prendra alors une terrible décision et se condamnera elle même lors d'un final aussi magistral que dramatique.
Caiano n'apporte rien de bien nouveau au genre et se contente simplement ici de plagier le film de Tinto Brass dont il reprend moult idées et séquences y compris le final rythmé par une chanson juive. Tout y est beaucoup moins grandiose que dans Salon Kitty, budget oblige, mais il faut reconnaitre à Caiano un certain talent ainsi qu'un effort de mise en scène qui hisse le niveau du film un brin plus haut que la moyenne. Le cinéaste a su trouver un juste milieu entre le film de guerre érotique à la Brass et le pur nazisploitation sans pour autant lui enlever un certain sens de la réflexion ni trahir la vérité historique qu'il respecte du mieux qu'il peut. Voilà qui est louable et fait du film un eros svatiska quelque peu différent du reste de la production même si La svastica nel ventre n'est pas exempt de quelques scènes exploitatives et déviantes. Pour preuve la séquence de bestialité lors de laquelle Hannah est contrainte par Von Stein qui pour l'occasion a revêtu des sous vêtements féminins de se donner à son berger allemand.
Plus psychologique que réellement horrifique, le film de Caiano qu'accompagne une dramatqiue partition musicale signée Francesco de Masi bénéficie également d'une interprétation convaincante notamment de sa comédienne principale, l'Hamiltonnienne Sirpa Lane immortalisée pour son rôle dans La bête de Borowczyk, Sirpa n'est ni Ingrid Thulin ni Teresa Ann Savoy encore moins Charlotte Rampling mais sa prestation est des plus honorable, très certainement son dernier véritable bon film avant sa vertigineuse descente aux enfers, si toutefois Sirpa eut un jour à son actif un bon film. Elle est ici une Hannah à la fois forte et fragile, plus convaincante en Madame Lola qu'en victime juive. A ses cotés on reconnaitra Giancarlo Sisti dans l'uniforme du pervers commandant Von Stein, Roberto Posse et toute une kyrielle de jeunes sexy starlettes dont la pasolinienne Renata Moar, une des jeunes victimes de Salo, Christina Borghi (la victime massacrée à coups de matraque), Sarah Crespi (la détenue électrocutée), Gloria Piedimonte (la putain aryenne qui s'accouple sur un air de musique) et Maria Renata Franco à jamais associée à son accouplement avec un cheval dans Black Emanuelle en Amérique. Pour information Caiano détestait ce film qu'il accepta de réaliser uniquement car il avait grand besoin d'argent. Destin de femme lui importait si peu qu'il avait quasiment effacé de sa mémoire la plupart des scènes choc dont le massacre de la prisonnière à coups de matraque. Signalons enfin que la version française disponible jadis en vidéo fut amputée d'une dizaine minutes tandis que la version intégrale comporte des inserts porno franchement inutiles notamment lors des scènes de viol et d'examens gynécologiques. Destin de femme est un des rares sinon le seul nazisploitation a être régulièrement diffusé sur les chaines nocturnes italiennes.
Réalisé par Angelo Pannaccio, HOLOCAUST 2 I RICORDI I DELIRI LA VENDETTA a deux particularités. La première est de ne pas chercher un N°1 car il n'y en a pas, le 2 fait uniquement allusion à un deuxième holocauste, celui d'anciens SS massacrés cette fois par les juifs. La seconde spécificité est qu'il fut l'ultime eros-svatisca a être tourné et ce tardivement en 1979 après que le genre se soit très vite éteint, clôturant ainsi ce sous genre du cinéma d'exploitation.
Avec Holocaust 2 Elo Pannacio prend le genre à l'envers un peu à la manière de Cesare Canevari sur Bourreaux SS / Les orgies du 3ème reich. C'est là un postulat intelligent pour un film inquiétant, plutôt lent dans son rythme mais déconcertant qui rappelle par certains points le film de Canevari ne serait ce que par ce va-et-vient constant dans le temps lorsque les images du passé resurgissent dans le présent. Si dans Bourreaux SS c'est une jeune ex-victime des nazis, Lisa, qui se venge de ses tortionnaires bien des années plus tard, c'est ici un groupe d'activistes juifs qui sévit. Ils vengent leurs familles des atrocités commises dans les camps en tuant les anciens officiers et leur descendance.
L'essentiel du métrage se déroule donc de nos jours traversé par les caractères fantomatiques de Pannaccio qui parviennent de temps à autre à insuffler à certains passages quelque chose de dramatiquement fort. Pannaccio livre un film moderne traversé par des personnages traumatisés à vie, hantés par ce qu'ils ont vu et vécu dans les camps de la mort. Motivés par la haine, ils tuent avec la même rage ces ex-officiers et leur famille qui jadis torturèrent les leurs.
Intelligent, unique dans ce filon très controversé, Holocaust 2 traite essentiellement du traumatisme d'un peuple engendré par la folie de l'Homme et la soif de vengeance que la haine et la douleur entrainent, devenue la seule raison de vivre de ces gens.
Au sadisme et autres violences sexuelles des eros-svatiska transalpins traditionnels, Pannaccio préfère instaurer un climat glauque et dérangeant par le biais de quelques scènes en flashes-back qui montrent de manière assez rapide et surtout suggérée les horreurs subies par ces familles. Ce n'est donc pas les effets sanglants qui cette fois créent le malaise mais la façon dont Pannaccio a choisi de nous montrer ces sévices et la façon dont il a décidé de le faire. L'image est sale, jaunie, comme témoin d'un passé suffocant. Aux cris et hurlements des victimes Pannaccio a préféré le silence, pesant, étouffant. Il ne reste que le visuel, miroir des atrocités subies que par instant le réalisateur accompagne d'une chorale d'enfants contrainte de regarder les tortures alors que leurs chants angéliques couvrent les cris des suppliciés durant les scènes non muettes. Dorothy, une des protagonistes principales, faisait partie de cette chorale. Elle n'a jamais oublié ces instants. Hantée par ce dont elle fut le témoin, son personnage en devient presque bouleversant. Si son présent se noie dans le passé, son image se fond dans son miroir tandis que les larmes roulent sur son visage noirci par le maquillage qui dégouline.
L'horreur graphique se fait discrète tout comme l'érotisme quasi absent de la pellicule à l'exception d'une douce relation saphique qui apporte au film une note de tendresse.
L'amateur d'effets violents se contentera d'une jeune femme écartelée entièrement nue entre trois arbres et étranglée à l'aide d'une corde, la mort des deux amants la tête vrillée par une perceuse électrique, celle d'un jeune homme poignardé dans sa voiture alors qu'il faisait l'amour à son exécutrice ou la crise cardiaque d'un ex-officier ligoté à une table provoquée par le fameux supplice de la chèvre. L"animal lui lèche les pieds jusqu'à ce qu'il meurt. Mais c'est surtout la douloureuse agonie de Tina Aumont dont on se souviendra, froidement abattue d'une balle dans l'abdomen après s'être avilie à pratiquer une fellation à son bourreau face à la chorale d'enfants, vaine tentative pour avoir la vie sauve.
Porté par une partition musicale souvent inquiétante signée Giuliano Sorgini et les chants des enfants, Holocaust 2 malgré la lenteur de sa narration, la pauvreté des moyens et la quasi-absence d'effets choc et d'érotisme, reste un nazisploitation assez dérangeant dans son propos. Elo Pannaccio, délirant petit cinéaste spécialisé dans l'érotisme facile, n'est pas Canevari. Son film est loin d'égaler la force et l'intelligence de Bourreaux SS mais Holocaust 2 fonctionne cependant plutôt bien. Dans la filmographie guère reluisante du cinéaste, ce film fait un peu figure d'exception. Louable dans le message qu'il tente de livrer, cet éros svastica certes tout aussi racoleur que ses prédécesseurs boucle ainsi de manière honnête un sous genre éphémère qui fit, fait et fera encore couler beaucoup d'encre. Il n'a certainement pas à rougir devant d'autres petits nazisploitations bien plus médiocres et absurdes (Erica tigresse du désert, Liebes lager...).
Outre la présence éclair de Tina Aumont on retrouvera les deux égéries du réalisateur Susanna Levi et Elisabeth Tulin, la femme au regard de glace Kay Fisher, grande actrice d'origine tchèque impressionnante dans le rôle de Dorothy, ainsi que Marzia Damon sans oublier quelques vétérans du cinéma de genre tel Nino Musco et les apparitions fugaces de Gordon Mitchell et William Berger.
LES NAZI PORNOS:
Pour être le plus complet possible dans ce tour d'horizon des nazisploitations italiens on citera aussi pour information quelques porno-nazi tournés plus ou moins contre son gré par Joe D'Amato dans les années 90, sa carrière de producteur indépendant s'étant arrêtée suite à la banqueroute de sa société Filmirage. C'est surtout son scénariste, Giacinto Bonacquisti, qui avait travaillé autrefois sur les éros-svastica de Bruno Mattei qui le poussera à faire revivre ce filon si cher du cinéma populaire, le cinéma érotique mais sous sa forme hard. Il tourne donc Saloon Kiss et Le bambole del Fürher, le premier se passant dans un camp d'extermination, le second dans un bordel SS. Si Saloon kiss présente de fortes analogies avec KZ9, le second lorgne vers Hôtel de plaisirs pour SS. Inutile de dire qu'ici les horreurs se résument à quelques pressions psychologiques sur les détenues qui se laissent vite aller à leurs désirs voraces. La véritable horreur est surtout de voir le niveau zéro de ces films et le degré de médiocrité dans lequel est tombée la carrière de Joe D'Amato!
LES PRODUCTIONS EUROCINE:
Les productions franco-italiennes de dernière heure produites par la firme française Eurociné entre 1976 et 1979 sont quant à elles plutôt fadasses et frisent souvent le degré zéro si on excepte certains titres. Au nombre de quatre, toutes seront tournées sur le même modèle, souvent dans les mêmes décors, avec les mêmes acteurs, un véritable casse-tête pour le novice qui aimerait s'y retrouver.
Le premier nazisploitation de ce type à avoir été tourné est DERNIER TRAIN POUR HITLER également connu sous le titre Dernier train pour SS ou encore Train spécial pour Hitler. Malgré ce titre plutôt prometteur le seul véritable intérêt du film est justement d'avoir été le tout premier nazisploitation à avoir été tourné afin d'embrayer sur la voie ouverte la même année par l'Italie. Force est de constater que d'une part la France n'a jamais été l'Italie, d'autre part que Eurociné rimera pour l'éternité selon le cas avec pauvreté ou nullité. En ce qui concerne Dernier train pour Hitler ce serait plus avec pauvreté.
Si Jess Franco devait à l'origine réaliser le film, c'est finalement Alain Payet qui fut amené à tenir la caméra après que Franco ait quitté le projet trois jours avant le début du tournage pour de sombres raisons financières. Si on sait que les acteurs durent improviser les dialogues après la perte de ces derniers on devine assez facilement les raisons du naufrage d'autant plus l'interprétation est une fois de plus, comme d'accoutumée chez Eurociné, plus qu'approximative. L'histoire est simple et se résume au titre. Peu importe le contexte historique et les références notoires à l'invasion éminente du nazisme dans toute l'Europe, seul compte ce train qui traverse le continent, soit quatre malheureux wagons qui se trainent poussivement à travers la campagne française, avec son bord toute une ribambelle de prostituées allemandes, parmi les plus belles que comptent la race aryenne précise t-on, censées remonter le moral des troupes hitlériennes avant la grande attaque de l'Allemagne sur la Russie. Et l'important ici est ce qui se passe à l'intérieur du train surtout après qu'un groupe de prisonnières ait rejoint les catins de luxe. Le problème est qu'il ne se passe pas grand chose. Les orgies promises et tant attendues se limitent à quelques ébats mollassons bien timides sur fond de chants allemands, quelques beuveries décadentes dans un wagon décoré par des portraits du Fürher, quelques poitrines dénudées et des nus féminins frontaux assez sages, voilà de quoi désenchanter puisqu'il n'y a pas de quoi fouetter une... prisonnière. Ne surnagent ça et là que quelques scènes un brin osées dont celle où une putain se fait joyeusement laver le vagin au champagne et la mémorable fessée, longue et magistrale, de Claudine Beccarie.
Pour le reste, Dernier train pour Hitler est à l'image des habituelles productions Eurociné. Faute à un budget microscopique, les décors sont réduits à leur strict minimum, des stock-shots empruntés à différents films de guerre sont plus ou moins bien insérés afin de donner un brin de crédibilité à l'ensemble, les situations sont pour la plupart risibles appuyées par un jeu d'acteur à la limite de l'amateurisme. Maladroit mélange entre le film de guerre et le WIP, à l'instar des quatre autres nazisploitations produits par la firme, Dernier train pour Hitler ne parvient à aucun moment à se hisser à la hauteur des productions italiennes, malsaines et souvent dérangeantes du moins pour les plus sensibles, dont il reprend les principaux éléments: une kapo intransigeante, des prostituées faciles, des prisonnières maltraitées, la révolte et une histoire d'amour impossible entre un officier et une détenue. Mal maitrisé, trop improvisé, ringard bien avant l'heure le film de Payet n'est guère sauvé par sa distribution féminine. Monica Swinn, une des égéries de Jess Franco, qu'on reverra dans Convoi de filles / A l'est de Berlin est une Ingrid bien peu charismatique et une kapo des plus oubliables malgré ses quelques scènes de nu. A ses cotés on retrouvera quelques unes des pseudo actrices érotiques récurrentes aux films produits par Eurociné dont Pamela Stanford. On retiendra juste la présence de l'attendrissante Sandra Mozarowsky dont ce sera l'ultime apparition au grand écran puisqu'il se jettera d'une fenêtre quelques temps plus tard à l'aube de ses 19 printemps. Parmi les comédiens on retrouve les incontournables Olivier Mathot, Rudy Lenoir et autres Frank Brana tous plus mauvais les uns que les autres qui d'un film à l'autre passent de l'uniforme SS à celui de partisan.
Elsa Fraulein SS sera tourné quasiment simultanément dans les mêmes décors puisque sa réalisation débuta alors que Dernier train pour Hitler entamait sa troisième semaine.
Si elle reste une petite curiosité, cette première tentative d'éros-svastica à la française demeure bien décevante et surtout frustrante pour l'amateur puisque le film de Payet est la preuve évidente de l'incapacité de la France à égaler l'Italie dans l'euro-trash e plus précisément le nazisploitation. Là où les italiens donnaient sans honte dans la démesure, la torture nazie grand-guignolesque et le plus total mauvais goût tout en se jouant avec désinvolture mais bonheur d'une douloureuse période de notre histoire nos tentatives sont quant à elles plus proches de la comédie érotique paillarde en costumes SS.
Si Eurociné on le sait rime le plus souvent avec absurdité voire nullité, FRAULEIN KITTY également connu sous le titre Elsa Fraulein SS tourné quasiment simultanément avec Train spécial pour Hitler dont il reprend le décor, le fameux train et une bonne partie de la distribution confirme une fois de plus la règle. On est ici loin, très loin, des productions transalpines et de leur évident mauvais goût. Cette coproduction franco-italienne fort ennuyeuse tournée quelque part dans l'Est de la France, on soupçonne l'Alsace au vu des maisons, et les alentours de Paris, revisite à sa façon Ilsa louve SS et Salon Kitty dont elle n'est qu'une très pauvre version campagnarde.
Le scénario tient ici sur un confetti et reprend les grandes lignes des deux films qu'il plagie sans imagination ni originalité: des jeunes filles servent de filles de joie dans le train qui mène les officiers SS en Allemagne. Ces derniers sont sous le commandement de la terrible Elsa Ackermann (Elsa Kitty dans d'autres versions) qui utilise ce train comme centre de contre-espionnage afin de découvrir qui complote contre le Fürher.
Il faut admettre que sur cette microscopique trame qui fleure bon le déjà-vu, Rhomm est tout de même parvenu a étaler son film sur quelques 90 minutes dans sa version intégrale qui ne diffère guère des autres versions si ce n'est par l'ajout d'inserts hard lors de certaines séquences.
L'érotisme est ici aussi triste que vulgaire. C'est à peine si l'amateur pourra admirer Patrizia Gori et Malisa Longo en tenue d'Eve. La pudeur semble être de rigueur et c'est à peine si on ne garde pas son uniforme lors des séquences de sexe.
Pour le reste, le film demeure désespérément soft et involontairement drôle. Pas une seule minute, à l'image des comédiens d'ailleurs fort mauvais, on parvient à croire non seulement à l'histoire mais surtout qu'on est en pleine seconde guerre mondiale. Rhomm insère à tout va de longs stock-shots de batailles et d'images d'archives où Hitler harangue la foule qui dénotent fortement avec le produit original. On l'aura compris, Fraulein Kitty, produit par l'infatigable Marius Lesoeur, fera beaucoup rire l'amateur qui regrette déjà le mauvais goût des oeuvres italiennes.
On est face ici à un film érotique typiquement "franchouillard" dans le plus mauvais sens du terme. Et ce n'est pas Malisa Longo, la boucle blonde parfaite, cravache en main et béret sur la tête, qui nous sortira de la torpeur dans laquelle le spectateur a plongé tant elle est transparente et peu féroce dans la peau d'une sous Ilsa du pauvre. Fraulein Kitty ressemble à tout ce que Rhomm a pu tourner auparavant, ce type de petits films érotiques souvent vulgaires tels que Touchez pas au zizi, La jouisseuse infernale, Les petites jouisseuses, L'archisexe...
Ce petit train campagnard nous rappelle irrémédiablement cet autre petit train qui lorsque nous étions enfant servait d'interlude à la télévision avant qu'on aille se coucher... et se coucher est peut être ce que le spectateur a de mieux à faire plutôt que de visionner Fraulein Kitty en rêvant à ce que fut l'éros-svastica italien.
Les films français produits par Eurociné, tous réalisés par le pornographe Alain Payet sous le pseudonyme de James Gartner ou Alain Garnier, ne relèvent guère le niveau si on excepte le tragique NATHALIE DANS L'ENFER NAZI.
Payet allait enchainer trois films, le pitoyable Train spécial pour Hitler que nous avons déjà traité, l'étonnant et intéressant Nathalie dans l'enfer nazi et un inattendu HELGA LOUVE DE STILLBERG. Inattendu car si son titre fait quelque peu songer à Ilsa louve SS, Helga la louve de Stillberg n'est pas à proprement parler un nazisploitation puisque son scénario nous plonge au coeur d'une dictature sud-américaine fictive où des prisonnières sont exploitées et torturées dans une forteresse médiévale dénommée Stillberg. A la tête de cette garnison une femme cruelle et redoutée aux tendances saphiques, Helga, étrangement appelée Elsa dans la version française comme le personnage que jouait l'actrice Malisa Longo dans justement Elsa Fraulein SS.
Si on peut facilement se mélanger les prénoms, on pourra tout aussi facilement se perdre dans ces distributions interchangeables et ces même décors qui reviennent encore et encore d'un film à l'autre.
Fidèle à elle même, la firme Eurociné nous livre un film brouillon qui s'approche du WIP, totalement anachronique et surjoué à l'excès. Tourné dans le Val d'Oise, apparemment au château de Dampont qui resservira pour Nathalie dans l'enfer nazi, Helga n'a de sud-américain que certains noms de ses principaux protagonistes qui récitent sans conviction aucune des dialogues souvent niais avec de surcroit un accent campagnard particulièrement marqué. Inutile de dire que Helga respire plus le terroir que l'air moite et nauséabond des dictatures qu'il est censé imager.
Souvent incohérent et joyeusement anarchique, bien peu crédible, le film de Payet ne s'embarrasse guère de détails et le budget microscopique dont il a bénéficié ne lui permet pas vraiment de folies. On devra se contenter tout comme pour Train spécial pour Hitler de quelques malheureuses jeeps, quelques fusils, une dizaine de figurants empotés et quatre décors qui reviennent inlassablement: la chambre de Elsa qui ressemble étrangement à une chambre d'hôtel de seconde zone, les prisons du château, le dortoir des détenues et une ferme très locale. On regrettera que ce magnifique château et les superbes décors qu'il proposait soient si mal exploités. Payet ne s'y intéresse nullement et délaisse ce cadre qui pourtant servait si bien l'histoire même si il est loin de représenter le pays où le film est censé se dérouler.
L'affiche nous propose quant à elle un bel éventail d'acteurs français venus du porno dont trois des super stars d'alors Jacques Marboeuf, Dominique Aveline et Alban Ceray qui officient ici aux cotés de comédiennes elles aussi venues du hardcore France Lomay et Claude Janna. La partie italienne est quant à elle réservée d'une part à Malisa Longo qui incarnait déjà Elsa dans Elsa Fraulein SS. Malisa est une Helga qui manie la cravache avec délectation et torture ses prisonnières avec un certain savoir-faire. Plus convaincante que dans Elsa fraulein, Malisa dont le jeu d'actrice a toujours été contestable avoue s'être particulièrement amusée à jouer les méchantes. Cela se voit mais malheureusement elle est loin d'égaler ses consoeurs dans le sadisme. Serrer les mâchoires tout en fusillant du regard ses victimes en claquant la lanière de son fouet ne suffit pas à lui donner de l'envergure. Elle laisse loin devant elle Maristella Greco, Macha Magall, Erna Schurer ou Paola D'Egidio.
La frêle Patrizia Gori est l'autre comédienne italienne. Moins investie que dans Nathalie dans l'enfer nazi, elle n'en domine pas moins cette petite bande franchouillarde. La présence de Patrizia n'est peut être pas fortuite puisque le film devait au départ être produit par la Patrizia films, la maison de production de son compagnon d'alors, Franco Lo Cascio. Cela ne se fit pas et la Patrizia films ferma ses portes quelques temps plus tard. Eurociné s'empara alors du projet.%%%
Malgré la présence de tous ces comédiens spécialisés, l'érotisme ne dépasse jamais les limites du softcore et demeure tristement timide. On devra se contenter outre la nudité de Malisa Longo de quelques plans de chair flasque, quelques viols gentiment filmés, une discrète scène de douche et tout aussi discrets, les examens gynécologiques de rigueur dans ce type de films.
Produit typique des oeuvres Eurociné, Helga la louve de Stillberg est loin d'être un indispensable du genre. Plus qu'un nazisploitation ou un WIP on est là face à une sorte de comédie de guerre à l'humour troupier, une série Z où tout doit être pris au second degré. Souvent ridicule, Helga risque donc de fortement décevoir ceux qui en attendaient un film dans la grande lignée des débordements érotico-gore des eros-svatiska transalpins.
Après Dernier train pour Hitler et Helga louve de Stillberg, Alain Payet signait donc un troisième film, NATHALIE DANS L'ENFER NAZI, de loin le meilleur opus de cette trilogie. Tourné conjointement à Helga, si Nathalie... reprend les décors des deux précédents films ce nouvel essai est bien plus un drame de guerre, une tragédie de la résistance teinté d'érotisme qu'un véritable nazisploitation.
On suit les aventures de la jeune et belle Nathalie, un médecin de campagne qui exerce quelque part en Ukraine. Elle va se retrouver déportée à la forteresse de Stillberg après avoir été accusée à tort de la mort d'un commandant SS. Si Nathalie est innocente elle est cependant une espionne, un agent secret soviétique. Lorsque la redoutable Helga, commandante en chef de la forteresse, le découvre, tout se complique pour la jeune fille dont les amours avec un officier allemand à qui elle a sauvé la vie sont mis en danger.
Laissant loin derrière lui le coté grotesque des deux précédents films qui trop souvent prenaient l'apparence de farces pseudo-érotiques ridicules, Alain Payet privilégie cette fois l'aspect dramatique du scénario et l'histoire d'amour tragique entre la jolie doctoresse et un officier de la Wermacht. Plutôt soigné dans sa mise en scène, bénéficiant d'une solide interprétation de la part de ses deux protagonistes principaux, Nathalie dans l'enfer nazi s'éloigne avec bonheur des productions Eurociné habituelles. Si on reste tout de même dans le cadre de l'exploitation pure et simple qui use et abuse de toute l'imagerie nazi, le film s'intéresse cette fois plus au destin tragique de cette jeune fille pure et innocente perdue dans l'enfer de la guerre. Là réside bel et bien tout l'intérêt et la force de ce film manichéen.
Manichéen car il repose essentiellement sur la confrontation archi stéréotypée du Bien et du Mal. Nathalie, vertueuse doctoresse, toute de blanc vêtue, romantique et dévouée, est l'incarnation même d'une jeune héroïne de roman-photo à l'eau de rose qui aime à coeur perdu son bel amoureux. Perdue dans la tourmente de la guerre, refusant de vendre son corps après s'être retrouvée prisonnière d'un bordel nazi, Nathalie va devoir affronter Helga, la commandante en chef sadique et lesbienne de la forteresse de Stilberg. Helga est le mal personnifié qui aurait pris l'apparence d'une diablesse au rire hystérique toute de cuir noir vêtue se pavanant dans toute une gamme de tenues sadomasochistes absolument incroyables. Haïe des officiers, redoutée des détenues, Helga est certainement un des personnages les plus haut en couleur de cette trilogie, loin, très loin derrière ceux qu'incarnaient sans conviction Malisa Longo dans Helga la louve de Stillberg et Monica Swim dans Train spécial pour SS. L'affrontement de ces deux femmes sera sans pitié et conduira vers un drame inéluctable qui affectera à jamais la vie de la malheureuse Nathalie.
Souffrant d'un budget ridicule, Nathalie dans l'enfer nazi s'éloigne des productions transalpines. Typiquement français dans son esthétisme et sa mise en scène maladroite qui le rapproche des vieilles séries Z de jadis, le film de Payet ne possède pas le coté racoleur des traditionnels eros-svastica. L'érotisme, joliment filmé, fait encore plus rare pour une production Eurociné, se fait ici discret. Déçus seront donc ceux qui attendaient du film cette débauche sexuelle propre au genre qui bien souvent a mis l'accent sur toutes les déviances imaginables. Payet se limite à quelques scènes de sadomasochisme de bon aloi et quelques ébats saphiques. Emerge cependant de cette sagesse une scène qui devrait satisfaire certains inconditionnels, celle où une catin se fait laver le corps et le sexe au champagne par une dizaine de mains fébriles. Nathalie dans l'enfer nazi contrairement à Helga louve de Stillberg met fort bien en valeur les décors qu'offre le très beau château de Dampont. Sombres et humides, ses caves, ses tunnels et ses cachots, arpentés par la glaciale Helga, fouet en main, sont propices aux manoeuvres les plus sinistres et à l'exacerbation des désirs sexuels tout en donnant un cachet presque gothique fort agréable à l'ensemble.
Malgré ses défauts, Nathalie dans l'enfer nazi, bercé par les pleurs des violons qui insistent sur l'aspect tragique, est un film plaisant, presque prenant, qui parvient à maintenir une certaine cohérence dans son scénario. Payet malgré son manque de moyens a réussi à donner vie à une oeuvre réaliste quelque peu à part dans l'éros-svastica qui mérite toute l'attention non seulement des afficionados du genre mais également des autres.
Déjà à l'affiche des précédents nazisploitations de Payet, Patrizia Gori dans le rôle titre prouve une fois de plus qu'elle était une bonne comédienne, fort convaincante et même émouvante dans la peau de cette jeune fille candide, pleine de tendresse, fragile et forte à la fois. dans le rôle de Nathalie. Le film lui doit beaucoup comme il doit beaucoup au vétéran Rudy Taylor. Helga, quant à elle, est magistralement interprétée par la française Jacqueline Laurent dont ce fut l'ultime prestation au cinéma qui surjoue son rôle de garce jusqu'à la caricature la plus savoureuse. Claudine Beccarie complète une distribution qui bien heureusement nous évite enfin la présence d'acteurs porno franchouillards particulièrement mauvais et de starlettes cellulitées venues du softcore ou du hardcore, véritable gangrène des productions Eurociné.
Réalisé en 1978 voici l'ultime nazisploitation produit par Eurociné. Avec CONVOI DE FILLES également connu sous le titre A l'est de Berlin, on touche cette fois le fond de l'abîme. Sous un scénario signé par l'infatigable Marius Lesoeur, un des piliers de la firme, réalisé par le français Pierre Chevalier sous un des nombreux pseudonymes utilisés par Eurociné, A.M Frank, Convoi de filles se contente de reprendre moultes séquences des quatre films précédents mais également des Jardins du diable, de les assembler tant bien que mal tout en y intégrant bon nombre d'images d'archives en N/B mais également de fausses images d'archives dans un N/B cette fois impeccable (l'exécution d'un soldat par une kapo), l'ensemble relié par de nouvelles séquences qui tentent de former une belle histoire d'amour entre un officier allemand et une jeune juive.
Inutile de dire que cette idyllique romance en pleine invasion allemande est grotesque, bien peu crédible et totalement décousue. Rien ne parvient à sauver ce puzzle de l'absurdité dans lequel il s'enfonce de minutes en minutes encore moins l'interprétation qui atteint des sommets d'amateurisme. Lorsqu'ils ne surjouent pas les comédiens récitent de façon niaise des dialogues qui semblent avoir été écrits par une bande de potaches pour une fête de fin d'année, la palme revenant à la figuration recrutée parmi les habitants du petit village où fut tournée cette mauvaise plaisanterie. Benêts, patauds, engoncés dans des uniformes trop grands quand ils ne perdent pas tout simplement leurs accessoires en cours de scène, le comique bien involontaire prend alors très vite le dessus quand le film ne se transforme pas en émission culinaire. En manque d'inspiration peut être, Chevalier fait déblatérer à ses putains, tout en nattes blondes, d'interminables recettes de cuisine gastronomique puisque nos catins n'ont rien d'autre de mieux à faire semble t-il dans leur wagon en toc.
On ne se rattrapera pas sur les décors misérables recyclés des autres films dont ce faux wagon que des techniciens secouent encore moins sur l'érotisme, un des composants essentiels du genre réduit ici à quelques topless et ébats de chairs flasques entre des soldats figurants d'âge bien mûr et ventripotents et quelques donzelles aussi détendues que vulgaires
Restent les images du petit village enneigé digne d'une carte postale d'antan. voilà qui est bien peu de chose!
Cette farce se terminera sur une séquence idyllique digne d'une image d'Epinal, l'officier allemand et sa belle s'enfonçant dans les bois recouverts de neige, tirés par un traineau, serrés l'un contre l'autre lorsque des partisans tireront par mégarde sur l'officier. Sa belle en larmes se blottira contre lui tandis que le traineau continuera mystérieusement sa route à travers la forêt. Si on savait que le traineau du Père Noël pouvait se guider seul, on sait désormais que celui de Chevalier a également cette étrange faculté. L'inconvénient est que son film est loin d'être un cadeau pour l'amateur de nazisploitation dont Convoi de filles représente le degré zéro.
Au générique on reconnaitra quelques acteurs habitués aux productions Eurociné dont les starlettes de l'érotisme de bas étage Monica Swinn en kapo permanentée, Pamela Stanford et Fanny Magier tandis qu'on retrouvera Jean Marie Lemaire dans Fascination de Jean Rollin, La guerre du pétrole et quelques polars noirs bien français comme Le bar du téléphone et Les filles de Grenoble. Grâce aux images repiquées au Train spécial pour Hitler on reconnaitra également Claudine Beccarie.
LES INGREDIENTS DU GENRE:
Le nazi-movie comme tout film génèrique suit un schéma traditionnel qu'on retrouve à chaque nouvelle oeuvre, ingrédients propres et indispensables au genre. On remarquera deux styles: les films se déroulant dans un bordel SS et ceux se passant dans un camp d'extermination. Dans les deux cas, la femme est la victime par excellence tant sexuelle que suppliciée.
La visite médicale est de règle avec le plus souvent une douche forcée avant des examens gynécologiques plus ou moins détaillés.
Un des facteurs récurrent est l'homosexualité surtout féminine. Les kapos, le plus souvent des femmes sadiques et perverses au visage hallucinant, forcent les détenues à des accouplements contre-nature mais les victimes trouvent aussi un certain réconfort en prenant du plaisir entre elles. L'homosexualité masculine se fait quant à elle à l'abri des regards entre officiers et subalternes (Les déportées de la section spéciale SS) mais également sous forme d'orgies (Erica tigresse du désert).
Tomber amoureuse du commandant SS est quasiment une règle. Cet amour conduira obligatoirement l'officier à la mort, tué dans la majorité des cas par son amante durant le massacre final ou comme dans Bourreaux SS après la guerre lors de retrouvailles inopinées. Il pourra également comme on le voit dans KZ9 être abattu par l'une de ses kapos qui ainsi se venge de la trahison dont elle fut victime. Parmi tous ces soldats et officiers sadiques, il y en a très souvent un au coeur pur et tendre. Il s'agit le plus souvent d'un médecin (SS camp 5, Les déportées..., KZ9). Il peut s'agir aussi d'un soldat qui se prend de sentiment pour une détenue comme dans Bourreaux SS et Horreurs nazies.
On retrouve également cet élément dans les productions françaises où l'héroïne est inévitablement amoureuse d'un officier au coeur tendre, le plus bel exemple étant le cas de Nathalie dans Nathalie rescapée de l'enfer. L'officier amant peut parfois aussi se retourner contre son amante comme dans Train spécial pour SS où Ingrid sera tuée par son ex-amant, désespéré de la voir passer à l'ennemi.
Les expériences sont monnaie courante dans le nazi-movie qui aime mettre en exergue l'horreur des hopitaux SS où des pseudo-scientifiques se livrent à toutes sortes d'expérimentations sur les prisonnières bien vivantes. SS camp 5 en est une des meilleures preuves avec ses femmes qu'on brûle vivantes. On crée des monstres comme dans Holocauste nazi, on transplante des testicules pour améliorer les performances sexuelles des officiers dans Horreurs nazies, on tente de créer une race pure en faisant copuler des femmes choisies avec soin avec des officiers dans Destin de femme, on essaie même dans KZ9 de ramener les morts à la vie en forçant deux détenues à faire l'amour avec un cadavre illustrant ainsi une des théories d'Hitler comme quoi la stimulation sexuelle peur ranimer une personne décédée..
Enfin, point de nazi-movie sans tortures qui trouvent leur apothéose lors du final de Salo. C'est sans doute Sergio Garrone dans son SS camp 5 et Horreurs nazies qui détient la palme d'honneur des horreurs les plus hallucinantes perpétrées sur les pauvres victimes avec au menu ongles arrachés à la tenaille ou explosés à l'aide de pétards judicieusement placés, estomac défoncé, rat dévorant vivante une victime, supplice à l'electricité, corps ébouillanté et gelé. Il pourrait aussi détenir la palme de l'audace pour avoir osé montrer l'intérieur des fours crématoires où brûlent les victimes. Bruno Mattei le suit de près avec son KZ9 en se faisant succéder vagin défoncé, flagellations, humiliations, viols, nécrophilie forcée. Mattei préfera pour sa part les chambres à gaz aux fours en filmant la lente agonie de victimes suffocantes dans leurs excréments.
Batzella dans Holocauste nazi a lui aussi recours à l'électricité avec ses électrodes plantées dans un vagin et apprécie l'arrachage des ongles à la tenaille et les castrations. Si bien souvent la nudité intégrale revient aux femmes Batzella offre une légère variante puisqu'elle est aussi bien masculine que féminine dans Holocauste nazi.
Dernier facteur commun du genre, le massacre final par lequel se termine la quasi totalité des films, que ce soit suite à la rébellion générale et l'évasion des prisonnières du camp ou la mort de l'héroïne qui se suicide comme dans Destin de femme. Le massacre peut avoir lieu bien des années plus tard comme dans Bourreaux SS, l'héroïne se venge de son bourreau et des atrocités autrefois commises, Holocaust 2, les familles des victimes juives retrouvent bien des années plus tard les anciens nazis qui ont massacré leurs familles et proches, et KZ9, la kapo en chef tuera son commandant en lui offrant un bouquet de fleurs piégé, une façon de prolonger l'horreur par delà le temps.
ILSA OU LA NAISSANCE D'UN MYTHE:
On ne peut consacrer un dossier sur le nazi-movie sans mentionner le trilogie des Ilsa, trilogie si on considère que le quatrième opus des aventures de Dyanne Thorne tourné par Jess Franco n'en fait pas partie. Dans ce quatrième volet intitulé Ilsa ultimes perversions ou Greta la tortionnaire, l'actrice reprend en effet du service mais sous un autre nom, Greta, et officie dans un hopital psychiatrique où les détenues sont soumises à de bien curieux et violents traitements.
Mais comment est donc née Ilsa? La génèse de ce personnage légendaire remonte au succès tardif du film de Lee Frost, Camp spécial 7. Le producteur Dave Friedman est alors à la recherche d'un blockbuster qui le dépasserait en efficacité et bouleverserait le public.
Il contacte la plantureuse et opulente Dyanne Thorne, starlette ayant officié jusqu'alors dans quelques productions érotiques mineures comme Les aventures sexuelles de Pinocchio en qui il voit une parfaite et idéale Ilsa. Dyanne Thorne n'est plus toute jeune mais accepte le rôle. Ainsi naquit le premier film, Ilsa louve SS, tourné en une dizaine de jours par Don Edmonds en 1973 et distribué en salles en 1974. Ilsa tout au long du film au cours d'expérimentations et de tortures toutes plus abominables les unes que les autres tente de prouver que la femme est plus apte à supporter la douleur que l'homme et a donc sa place au front.
Deux autres films suivirent, Ilsa gardienne de harem en 1976 toujours tourné par Edmonds où cette fois la redoutable femme sévit dans un harem où un sheik aime faire des femmes ses esclaves sexuelles, et Ilsa tigresse de Sibérie en 1977, réalisé cette fois par le canadien Jean Lafleur où notre tortionnaire travaille pour un goulag dans la sibérie de 1953 avant d'être projetée de nos jours dans un bordel où elle retrouve un de ses prisonniers.
Même si moins présent dans ces deux suites, le sadisme est un des principaux composants de Ilsa louve SS, un sadisme alors encore inégalé au cinéma même si le gore se rapproche beaucoup ici de celui du cinéma d'exploitation U.S des 70s. Véritable montée dans l'érotisme et la violence, Ilsa a un coté baroque et décadent, fils illégitime et sordide des Damnés de Visconti.
Cocktail d'expériences atroces sur des prisonnières dans un camp nazi que dirige une terrible commandante SS, Ilsa aprés être sorti dans 17 pays devint le film scandale et la cible favorite par excellence de la censure.
Le deuxième volet, Ilsa gardienne de harem, voit notre héroïne sévir dans un harem en plein désert avec toujours autant de perversions et de cruauté mais l'aspect malsain du premier film a disparu. On se rapproche ici beaucoup plus de la BD pour adulte et il s'en dégage cette fois un coté sadico-humoristique des plus enthousiasmant.
Ilsa tigresse de Sibérie, troisième chapitre de la série, se déroule cette fois dans un goulag où Ilsa règne désormais avec toujours autant de force, brisant les prisonniers qui refusent de se soumettre au communisme. Ce troisième opus est scindé en deux parties puisqu'après la Sibérie des années 50, on retrouve Ilsa dans le Canada d'aujourd'hui où elle régit un bordel dans lequel elle va reconnaitre un de ses anciens détenus.
Fascinante, vicieuse, Ilsa reste aujourd'hui encore l'image même d'un certain cinéma de genre sulfureux, un cinéma érotique aux limites du sadomasochisme de mauvais goût, mais aussi de la beauté imaginaire de la femme, plantureuse, la matronne fantasmatique exposant avec extase ses formes généreuses et arrogantes aux pieds du mâle soumis.
ET AUJOURD'HUI?
Si aujourd'hui le nazi-movie est bel et bien mort, on peut trouver dans le cinéma italien actuel son digne successeur Le crani rasati film, né essentiellement du cinéma américain par le biais d''oeuvre tels que American history X ou Romper Stomper mais qui trouve aussi ses racines dans ces films de bandes qui connurent un beau succès dans les années 80 tels que Les guerriers de la nuit, Les seigneurs ou même Class 84. C'est ainsi que sont nés Teste rasate de Claudio Fragasso, Naziskin Wuperthal de Amos Gitai ou La sfida degli skinheads de Larry Ludman.
L'EROS SVASTICA AU CINEMA OU LA TENTATIVE D'ANALYSE D'UN SOUS GENRE:
Fortement décrié chez nous par rapport à une Italie plus laxiste, l'eros-svastica même si la plupart connurent une sortie cinéma tardive en France dans les années 80, a le plus souvent trouvé un mur d'incompréhension, multiplié les détracteurs.
Si on peut en comprendre les raisons puisque le genre touche à une délicate partie de notre Histoire, il faut tenter néanmoins de dédramatiser la chose en la reconsidérant et tenter de l'aborder sous un angle différent. Si le terme nazisploitation n'est guère apprécié des afficionados de ce filon, une telle période ne pouvant être exploitée à des fins cinématographiques, le terme générique usité eros-svastica donne une meilleure approche du genre. Car ces films, peu nombreux finalement, sont surtout et avant tout des comédies érotiques trash de mauvais goût qui s'inscrivent dans la lignée de l'euro-trash. Ils ne sont en fait qu'une version pellicule de ces vieilles bandes dessinées sadomasochistes pour adultes souvent américaines retransposées dans un contexte trés particulier, celui de la seconde guerre mondiale et des camps de la mort. On y retouve en effet les mêmes ingrédients dans un univers très particulier et surtout sulfureux. C'est un peu le schéma du WIP, le film de prison de femmes, dont on peut rapprocher du nazi movie. Aux antipodes de nos comédies franchouillardes qui bien souvent tournaient en dérision cette période, le but ultime du nazi movie outre de titiller la libido et les instincts pervers du spectateur via cet érotisme souvent pointu est pourtant de tenter de le faire sourire, au mieux rire même jaune. On y retrouve en effet certains des éléments de la comédie sexy poussés ici à l'extrême. On y retrouve même cette ombre machiste qui visait à faire de la femme un objet sexuel, base élémentaire de la sexy comédie italienne. En cette période de libération de la femme, l'homme se voit menacé dans sa virilité. Il redevient presque un adolescent, un enfant, maladroit, perdu, face à une femme désormais forte qui menace de le dominer y compris sexuellement. Avec le nazisploitation et certains autres courant cinématographique de l'exploitation italienne l'homme reprend le dessus sur la femme, la domine de nouveau, la possède dans tout ce que le verbe peut signifier de plus abominable. On est bel et bien dans l'air du temps. Le nazi movie all'italiana, subdivision du cinéma d'exploitation, comme la sexy comédie est avant tout porté sur l'exagération, l'excès, une surenchère sexico-gore souvent si énorme qu'elle vient désamorcer l'horreur du propos pour mieux le tourner une fois encore en dérision.
Et la dérision ne serait elle pas un moyen d'affronter d'une façon détournée et plus évidente cette tranche d' Histoire?
En y regardant de plus prés, la plupart de ces films véhicule un humour noir et grinçant. De dialogues souvent hilarants au jeu des acteurs plutôt médiocre et peu convaincant en passant par la pauvreté de la mise en scène souvent trop théâtrale, l'eros svastica n'est qu'une parodie piquante et acerbe de cette tragique période. Le nazisploitation n'est en fait qu'un dérivé du théâtre populaire de rue, le théâtre de Guignol, saignant et acide où le public venait rire de la cruauté des aventures mises en scène. A t'on condamné Guignol? Les personnages des eros svatica ne sont finalement que les nouveaux Gniaffron et Guignol en uniformes et casquettes poussant le mauvais goût à son paroxysme. Outre la répulsion, le spectateur se retrouve pris entre le rire et la réflexion, un des but plus ou moins inavoué du genre même s'il est souvent amené de manière fort inapropriée et très maladroite.
Ces excès critiquables car souvent gratuits peuvent aussi comme pour KZ9 de Mattei s'intégrer dans un contexte de vérité historique, de témoignage choc sur l'horreur des camps et des atrocités commises sur les femmes à titre expérimental. En y intégrant des données historiques et des images d'époque, Mattei a voulu en faire un vrai film de guerre sur la guerre. L'erreur est peut être là. Peut on avec si peu de moyen et dans le cadre de cinéma bis faire un vrai film réaliste sur ce difficile thème sans vraiment heurter et blesser? Si KZ9 est une exception dans l'aspect vérité, le reste de la production oscille essentiellement entre le film érotique et le film d'horreur.
Des titres tels que SS camp 5 enfer de femmes ne sont en réalité que des films d'horreur, suite de scènes de tortures et de sadisme, de perversion pratiqués simplement par des personnages habillés en SS. Outre l'accoutrement, rien en fait ne vient réellement rappeler le contexte de l'histoire. Ces suites de scènes pourraient fort bien être projetées dans n'importe quel autre environnement. L'exemple de SS camp 5 est l'exemple type du porn-svastica d'horreur, la longue séquence de la chambre de torture, hallucinante et dantesque, tente à le démontrer. Ce genre de scènes n'a donc rien à envier aux tortures faites sous l'inquisition dont on s'est souvent servi à des fins cinématographiques comme pour entre autre Mark of the devil.
On est aussi proche de certaines pellicules asiatiques poussant elles le vice parfois beaucoup plus loin, reculant un peu plus les limites de l'extrême à chaque fois. Plutôt inoffensive, l'eros-svastica pourrait à l'exeption de certains titres être considéré comme une forme de pastiche érotico-grotesque arrosé de gore, une sorte d'échappatoire grinçante à ce que notre Histoire connut de pire.
A voir avec un certain recul et un certain degré, ces films ne sont que la continution d'un théâtre populaire grand guignolesque fait pour s'amuser des pires ignominies. Et n'est il point permis de rire même du pire?
Doit on mettre une limite à l'humour aussi noir et de mauvais goût soit il, ne peut on se jouer de tout tant que l'irrespect ne l'emporte pas? Dans le porn-svastica, le rire, salvateur et exorciseur, est d'autant plus de mise grâce souvent à l'absurdité de la réalisation, le grotesque des situations et le jeu surjoué des acteurs parodiant eux mêmes leur rôle.
C'est donc avec ce regard neuf et frais que le novice ou le refractaire devrait faire l'approche du genre. L'amateur de constat et de vérité brute se tournera vers des oeuvres plus académiques et grand public comme La liste de Schlinder d'un hollywoodien Spielberg à qui on préférera et de loin Portier de nuit ou mieux encore, l'apothéose philosophique, religieuse, politique et sociale qu'est Salo.