Madeleine anatomia di un incubo
Autres titres: Madeline study of a nightmare
Real: Roberto Mauri
Année: 1974
Origine: Italie
Genre: Thriller
Durée: 100mn
Acteurs: Camille Keaton, Riccardo Salvino, Paola Senatore, Silvano Tranquilli, Pier Maria Rossi, Gualtiero Rispoli, Maria Teresa Piaggio, Mario Donatone, Raimondo Toscano, Alfonso Barlo, Lorenzo Piani...
Résumé: La jeune Madeleine est hantée par un cauchemar récurrent. Enceinte, elle est poursuivie par quatre sorcières qui ont son visage. Elle les voit porter un cercueil dans lequel git une poupée qu'elles brûlent tandis que les images d'un terrible accident de voiture dans lequel son frère trouva la mort se superposent. Madeleine est mariée à Franz, un homme beaucoup plus âgé, un psychanalyste spécialisé dans la parapsychologie qui s'adonne à de mystérieuses expériences. Un jour elle prend un jeune autostoppeur étudiant en philosophie, Thomas, et l'emmène chez elle. Elle le séduit, lui fait l'amour après lui avoir présenté son époux comme étant son père. Témoin de leurs ébats, il tente de chasser Thomas mais celui ci est devenu le confident de Madeleine. Une fois parti, elle jette son dévolu sur Luis, le fils de Franz, en se présentant comme la secrétaire de son père. Elle invite alors Luis, Thomas et sa fiancée à une fête. Tous s'y retrouvent mais lentement, l'ambiance se dégrade. Les cartes s'abattent. C'est le début d'une véritable tragédie tant pour Madeleine que pour Thomas et Luis durant laquelle toute la folie de la jeune fille va faire surface jusqu'à l'incroyable dénouement...
Vétéran du péplum et du spaghetti western, Roberto Mauri fit une seule et unique incursion dans l'univers du thriller avec Madeleine anatomia di un incubo qui sera également son dernier véritable film si on excepte son inénarrable polar érotique Le porno killers.
Typique d'un certain cinéma italien estampillé années 70, Madeleine anatomia di un incubo est un très étrange drame psychologique aux limites du thriller fantastique dont il est bien difficile de parler encore plus d'analyser tant le scénario semble partir tout azimut. Ce qui ne signifie pas que le film de Mauri soit inintéressant encore moins raté, loin de là. En premier lieu il s'ancre dans tout un filon de films où contestation juvénile, philosophie utopiste, nymphomanie et liberté sexuelle, bourgeoisie décadente se mêlaient dans un savoureux cocktail de sexe, d'alcool et de drogues. On retrouve tous ces éléments dans Madeleine qui à la base se veut une analyse psychanalytique d'un cauchemar (d'où le titre) que fait de façon
récurrente la jeune héroïne, Madeleine. La jeune fille, mariée à un homme beaucoup plus âgé qu'elle, un éminent professeur en psychanalyse adepte de sciences occultes, rêve régulièrement que quatre sorcières aux cheveux multicolores qui ont son visage la poursuivent dans la forêt alors qu'elle est enceinte. Horrifiée, elle les voient ensuite porter un cercueil dans lequel git une poupée. Alors qu'elles le brûlent, les images d'une voiture en feu d'où sort un homme se superposent à la terrible scène.
Si la signification du cauchemar en lui même est assez simple, le reste du film l'est beaucoup moins. Mauri accumule tant et tant d'éléments qu'il est non seulement parfois difficile de savoir où il veut en venir mais il semble lui même se perdre dans les méandres de son scénario dont certains aspects demeureront énigmatiques.
Ainsi ne saura t-on jamais quelles sont les expériences sur lesquelles travaillent le professeur ni même comment il peut se dédoubler lors d'une séquence inexpliquée et inexplicable. Les relations et les liens qui lient Madeleine et son époux restent assez vagues. Mauri donnent l'impression de vouloir compliquer les choses afin de les rendre encore mystérieuses mais ici, trop maladroit, ce sont les questions qui s'accumulent au rythme des changements de pièces du puzzle géant du professeur représentant des fragments dirait-on du visage de ses futures victimes à moins que ce ne soient celles de Madeleine. Plus énigmatiques encore sont les agissements des personnages notamment lors de la fête donnée par Madeleine durant laquelle d'étranges complots semblent se tisser sans qu'ils influent réellement sur les stupéfiantes révélations finales.
Cette maladresse, le coté confus de l'histoire, contribuent cependant à renforcer outre l'atmosphère mystérieuse du film son intérêt puisque le spectateur passe ici son temps à se demander le pourquoi du comment sans que Mauri ne dévoile d'une once le sidérant final. Mais le charme, la fascination du film proviennent également de son ambiance psychédélique, de cette insouciance baignée de philosophie pacifiste qui caractérisait ces années. Toujours à son crédit, cette aura fantastique aux limites de l'onirisme dont est imprégnée certaines séquences notamment la longue scène d'ouverture, le cauchemar de Madeleine, qui s'étale sur pas moins d'une bonne dizaine de minutes.
Etrange, envoûtante, presque angoissante, elle est à l'image de la jeune fille admirablement bien interprétée par une toute jeune Camille Keaton à la fois sensible, fragile, désespérée. Elle incarne à merveille toute la folie de son personnage qui n'hésite pas à se dénuder de nombreuses fois tout au long de l'histoire et esquisser une scène saphique avec Paola Senatore. L'érotisme fait partie intégrante de ce thriller, intelligemment dosé, mais également parfois osé comme en témoigne la danse frénétique qu'entame Paola Senatore qui sous l'effet des drogues effectue un fabuleux strip-tease au bord de la piscine. On mentionnera également la très belle partition musicale signée Maurizio Vandelli, mélodique et envoûtante, et la beauté des décors maritimes qui rappellent les sexy gialli iodées et ensoleillés alors fort à la mode tels que Top sensation ou Interrabang.
Madeleine anatomia di un incubo est avant tout un voyage dans les méandres de l'esprit torturée d'une jeune femme, nymphomane et obsédée par la mort de son époux et le désir d'avoir un enfant après un avortement traumatisant. Truffé de métaphores, de symboles parfois un peu grossiers, Madeleine oscille sans cesse entre rêve et réalité, passé et présent pour se terminer sur le coup de théâtre final totalement inattendu et surtout original, sorte de transposition, d'exorcisme lors duquel tous les personnages retrouveront la place mais qui surtout devrait marquer la fin d'un long voyage pour Madeleine. L'ultime image plongera le spectateur dans le doute et laissera libre cours à son imagination.
Sans être une réussite car maladroit et brouillon, Madeleine anatomia di un incubo est une ambitieuse tentative de thriller psychanalytique ni forcément logique encore moins vraisemblable mais l'essai est fort louable et le film de Mauri étonnera et fascinera. Trop méconnu et injustement oublié, il mérite toute l'attention de l'amateur qui outre ce charme très années 70 se délectera de la présence de Camille Keaton et Paola Senatore tout en se pourléchant les babines en admirant le corps du jeune et christique Pier Maria Rossi, uniquement vêtu la plupart du temps d'un slip de bain. Venu des décamérotiques, cet éphémère éphèbe du cinéma de genre connaitra son heure de gloire l'année suivante en incarnant, est ce surprenant, le Christ dans la fabuleuse fresque de Rosselini, Il messia, avant de disparaitre. A ses cotés, Silvano Tranquilli est quant à lui un peu rassurant psychanalyste.