Mal d'Africa
Autres titres: The final prey
Real: Stanis Nievo
Année: 1967
Origine: Italie
Genre: Mondo
Durée: 99mn
Acteurs: Nino Dal Fabbro (Narrateur)...
Résumé: Le réalisateur nous propose de revenir en images sur les grands bouleversements qu'a connu l'Afrique post coloniale. La révolution, les émeutes et les guerilla en Angola, en Rhodésie, au Congo... sont passés en revue dans toute leur tragédie. Il nous invite également à découvrir l'Afrique des safaris touristiques et celle des braconniers et autres chasseurs, la cruauté animale et ert certaines coutumes du peuple noir dans toute leur étrangeté...
Crédité auprès de Gualtiero Jacopetti et Franco Prosperi sur Africa addio l'année précédente, Stanis Nievo, écrivain, journaliste, co-fondateur de la WWF et organisateur de la Rizzoli Films, réalise à son tour son propre mondo africain en 1967, Mal d'Africa.
Avant toute chose, expliquons l'expression qui donne au film son titre. Elle désigne en fait cette profonde nostalgie qu'une personne peut ressentir en quittant l'Afrique, ce qu'elle laisse derrière elle. Ceci s'applique également au film de Nievo qui tente de mettre en avant tous les changements que connaissait alors le continent noir alors que l'homme blanc, la civilisation lentement l'envahissait. Une ère se terminait, une nouvelle naissait et avec toute une partie de la culture africaine profonde disparaissait. Ainsi Nievo à travers Mal d'Africa tentait d'analyser à sa manière toutes les révolutions que le continent traversait alors, ses échecs, ses guerres, ses changements, sa cruauté mais aussi son folklore.
Inutile de dire que Nievo fut à bonne école en produisant Africa addio et c'est en bon élève qu'il suit les traces du fameux tandem avec ce mondo qui pourtant est loin de lui arriver à la cheville tout comme il est loin d'égaler les futures productions des frères Castiglioni. Narré avec toujours autant de condescendance cette fois par Nino Dal Fabbro, Mal d'Africa se distingue des autres mondo de ce style par son humour constant puisqu'il ne cesse d'alterner les séquences choc et d'autres plus légères, beaucoup plus légères, à la limite du comique voire du ridicule. En ce sens il n'est pas loin des mondo que Bitto Albertini tournera dans les années 80.
Il est donc assez difficile de le prendre au sérieux. Toute la première partie du film se veut une sorte de documentaire journalistique historico-politique sur les grands bouleversements qu'a connu l'Afrique post coloniale, les évènements tragiques de Rhodésie, la guerrila en Angola contre les portugais, les mercenaires blancs au Congo... mais également la guerre d'Algérie et la condition pied noir. Nievo nous fait donc parcourir une bonne partie du continent avec une prédilection pour le Kenya. Ceci nous vaut les scènes les plus crues du film, les visions les plus barbares. Ainsi le film s'ouvre sur des exécutions publiques, des hommes fusillés contre un mur. La caméra de Nievo s'attarde sur des charniers, des cadavres y compris d'enfants...
La deuxième partie du film est plus légère et se rattache davantage au pur cinéma d'exploitation en insistant plus particulièrement sur l'aspect raciste. L'Homme noir, s'il est heureux nous dit-on et prolifère, est toutefois présenté comme un être inférieur et stupide que l'Homme blanc doit éduquer. Comment ne pas être pris de fous rires lorsque le narrateur nous apprend que les femmes noires peuvent être aussi sexy que les femmes blanches. Faut il toutefois leur apprendre à se tenir. Ainsi donc, une rombière outrageusement maquillée va leur donner des cours de maintien franchement ridicules et dépassés tout en leur apprenant à faire un élégant strip-tease. Prête à l'emploi, la femme africaine peut ainsi devenir modèle! L'africain a également des coutumes étranges nous dit on. S'il n'est pas sexy, il est très débrouillard. Si nous autres, hommes dits civilisés, avons fait de la voiture un moyen de locomotion, l'Homme noir, regroupé en gigantesques ghetto faits de vieilles épaves d'automobiles, en a fait non seulement son habitation mais aussi une bétaillère et se sert du coffre comme lavabo!
Cette seconde partie est également celle où l'on compte le plus de massacres d'animaux, un véritable festival de tueries de toutes sortes qui risquent de mettre en rage tous les détracteurs du genre. Eléphants, rhinocéros, girafes, buffles, zèbres, autruches... ne trouvent aucune grâce auprès de Nievo. Chasses, braconnages, marées noires et charniers d'oiseaux englués... sont ainsi à l'honneur et se veulent être le reflet exacte de l'Afrique noire, celle des safaris et des guides touristiques à sensations commente solennellement le narrateur. On restera bouche-bée devant ces pygmées qui émergent joyeusement de l'abdomen d'un éléphant dont on extirpe les tripes avant de le découper en morceaux. Voilà très certainement une des scènes les plus répugnantes qu'ait connu le genre aux cotés de la douche d'excréments de Mondo magic. Afin de renforcer l'impact de ces scènes, Nievo se complait à faire des gros plans sur les larmes qui coulent des yeux des animaux à l'agonie avant que la dernière partie du film ne reprenne le ton plus journalistique du début.
Rythmé par une partition musicale très décalée signée Riz Ortolani qui fait la part belle à l'accordéon (!), rien de tel en effet qu'un petit air de musette pour accompagner la cruauté humaine et l'agonie animale, Mal d'Africa reste dans la grande tradition des mondo de Jacoppetti. Il est bien difficile de le prendre au sérieux et son coté trop humoristique voire par moments stupide brise la cruauté du propos. Mal d'Africa sous ses faux airs de documentaire historique est du pur cinéma d'exploitation, complaisant, voyeur, étalant son lot de barbaries teinté de ce nuage de racisme propre au genre afin de satisfaire les bas instincts du spectateur. On lui préférera largement Africa addio, Kwaheri ou encore les futures productions des frères Castiglioni.