Apocalypse domani
Autres titres: Pulsions cannibales / Demain l'apocalypse / Apocalisse domani / Cannibal apocalypse / Savage apocalypse / Invasion of the flesh hunters / The slaughterers / Cannibals in the streets
Real: Antonio Margheriti
Année: 1979
Origine: Italie
Genre: Horreur
Durée: 95mn
Acteurs: John Saxon, Giovanni Lombardo-Radice, Cinzia De Carolis, Elisabeth Turner, Tony King, Wallace Wilkinson, Ramiros Oliveros, John Geroson, May Heatherly, Vic Perkins, Jere Beery... ...
Résumé: Lors de la guerre du Vietnam une unité de soldats américains mené par le capitaine Hopper est chargée d'une mission de sauvetage. Au cours d'un raid, Hopper découvre deux prisonniers entrain de dévorer le cadavre d'une jeune vietcong.En voulant les libérer Hopper est mordu par l'un d'eux. Les deux soldats pendant leur captivité ont contracté une étrange maladie. Toute personne mordue après une période d'incubation plus ou moins longue est prise de pulsions cannibales. Isolés dans un hôpital depuis leur retour, l'un des soldats réussit à s'évader. Après avoir agressé une femme dans un cinéma, il se retranche dans un supermarché. Si Hopper parvient à le maîtriser l'épidémie a commencé.Hopper jadis mordu se sait lui aussi condamné. Alors que les victimes se multiplient en ville, il décide de rejoindre ces anciens compagnons d'armes et de les aider...
Alors que l'Italie suite au succès du film de Romero, Dawn of the dead, se met doucement aux films de zombis avec notamment L'enfer des zombis de Lucio Fulci mais également aux films dits de cannibales avec Cannibal holocaust de Ruggero Deodato, certains réalisateurs vont mêler les deux genres et offrir quelques classiques du cinéma gore transalpin tels que Zombi holocaust ou Virus cannibale.
Antonio Margheriti qui tout au long de sa carrière a touché avec bonheur à quasiment tous les genres ne s'était jusqu'alors jamais attaché au cinéma d'horreur encore moins à cette vague vomitive alors naissante puisqu'il le reconnaissait il lui même, l'horreur ne l'avait jamais réellement intéressé. Il s'y essaie tout de même en 1979 lorsqu'on lui propose de réaliser une coproduction italo-espagnole écrite par Dardano Sacchetti, Apocalypse domani devenu chez nous Pulsions cannibales.
Afin d'éviter de reproduire un schéma qui ne lui plait guère, Margheriti va tenter de quelque peu dévier des scénarii habituels en proposant cette fois une histoire plus originale qui puise sa source dans un effroyable traumatisme qui remonte à la guerre du Vietnam et ronge certains survivants. L'ouverture explosive du film digne des futurs films de guerre du réalisateur tels que Héros d'apocalypse nous plonge au coeur de la jungle vietnamienne qui donnera à beaucoup l'impression de visionner un véritable film de guerre. Parti à la rescousse de quelques soldats américains, le capitaine Hopper découvre deux soldats prisonniers entrain de dévorer à pleines dents le cadavre d'une jeune vietcong.
Si cette très efficace ouverture sert à présenter le sujet, c'est également le cauchemar que fait régulièrement Hopper depuis son retour en Amérique. C'est alors que les deux soldats qui jusqu'alors étaient soignés en hôpital spécialisé sont malencontreusement libérés. L'un d'entre eux le contacte afin de lui donner rendez-vous, mû par cette envie irrésistible de chair fraîche, les fameuses pulsions cannibales du titre français. Une fois mordu tout individu après une période d'incubation assez rapide se trouve à son tour contaminé. Tout le scénario tourne autour de ce soldat traqué par la police que Hopper va tenter de sauver en sachant que lui même fut jadis mordu.
Si on passe outre les incohérences d'une histoire peu crédible et quelques faiblesses narratives, Pulsions cannibales prouve une fois de plus que Margheriti quelque soit le genre auquel il touchait était un talentueux réalisateur. Loin du coté macabre des oeuvres de Fulci et de la surenchère sanguinolente de Deodato, Pulsions cannibales nous plonge dans un univers tout aussi cauchemardesque, celui d'un quotidien où, contaminés par une mystérieuse maladie, des ex-soldats du Vietnam, traumatisés par cette guerre durant laquelle ils ont été réduits à manger de la chair humaine, doivent désormais faire face à cette lente maladie qui les détruit et les pousse à l'abominable. Margheriti a réalisé avec Pulsions cannibales un film de cannibales urbain qui parvient à trouver le juste équilibre entre le film d'action et le film d'horreur même si le premier l'emporte ici ce qui n'étonnera personne venant du réalisateur.
Cela ne signifie pas que Pulsions cannibales soit dépourvu d'effets sanglants, brutes et détonants. Hormis les quelques séquences de cannibalisme à proprement parler, on retiendra quelques moments particulièrement croustillants dont un chien piégé qui explose, une jambe tailladée jusqu'à l'os par une scie circulaire, une énucléation, une langue violemment arrachée lors d'un baiser passionné, une tête explosée contre une vitre de voiture et quelques belles morsures. Mais la séquence qui donna au film sa réputation est celle où un fusil à pompe fait littéralement exploser l'estomac de Giovanni Lombardo-Radice, créant un véritable cratère béant à travers lequel Margheriti filme un policier se tenant de l'autre coté.
Derrière cette horreur se cache cependant un autre message tout aussi horrible, la dénonciation de la barbarie que la guerre engendre, une métaphore sur l'homme qui dévore son prochain avant que la société ne le dévore lui même. Il n'a aucune échappatoire et le sexe est montré comme le meilleur moyen pour véhiculer des maladies mortellement contagieuses. Ainsi la scène où Hopper mord les parties intimes de sa jeune voisine nymphomane est une jolie démonstration du message que Margheriti tente de transmettre de manière subtile. En ce sens, Pulsions cannibales est un film intelligent et beaucoup plus profond que la plupart des oeuvres du même acabit qui sortaient ou allaient sortir à cette même époque.
Film maladif au final ouvert véritablement pessimiste à l'image même du film, Pulsions cannibales bénéficie en outre d'une solide interprétation de la part de John Saxon et Giovanni Lombardo-Radice, impressionnant, névrotique, en proie à ses abominables élans anthropophages. On soulignera la présence de Cinzia De Carolis qui avec ce film tentait de faire oublier sa réputation de lolitrash et donner ainsi un nouveau virage à sa carrière malgré un plan furtif sur sa petite culotte laissant entrevoir ses poils pubiens. La manoeuvre ne fonctionna pas et Cinzia abandonnera le grand écran pour se reconvertir.
Présenté jadis au Festival du film fantastique de Paris, Pulsions cannibales, mutilé par la censure, interdit en Europe, ne connut qu'une très brève et bien décevante sortie en salles qui ainsi amputé de tous ses effets gore en fit désenchanter plus d'un.
Plutôt lent dans sa mise en scène notamment lors de la première partie, plus porté sur l'action et le drame urbain que l'horreur graphique à proprement parler, Pulsions cannibales n'en est pas moins une belle réussite, une oeuvre singulière et surtout réussie, plus intéressant pour l'horreur du propos que par l'horreur elle même qu'on prendra toujours autant de plaisir à visionner aujourd'hui encore.