Libido
Autres titres:
Real: Ernesto Gastaldi
Année: 1965
Origine: Italie
Genre: Giallo
Durée: 86mn
Acteurs: Mara Meryl, Gianfranco Giannini, Dominique Boschero, Luciano Pigozzi...
Résumé: Christian a jadis surpris son père en train d'assassiner une jeune fille dans la maison familiale. Le petit garçon devenu un jeune homme retourne après une longue thérapie sur les lieux du drame accompagné de sa femme, son tuteur et quelques amis. L'atmosphère est très tendue car Christian doit bientôt hériter de l'immense fortune de son père. Très vite, des événements étranges vont se produire alors que d'inquiétantes ombres se faufilent dans les couloirs. Un mystérieux assassin ne va pas tarder à décimer les résidents. Peu à peu le passé de Christian resurgit, le jeune homme perd pied, la folie s'empare des lieux...
Scénariste pour de nombreux films de Mario Bava, Antonio Margheriti, Riccardo Freda mais également Sergio Martino et Umberto Lenzi, Ernesto Gastaldi réalisa également quelques films dont en 1965 Libido, un pur thriller dans la lignée des meilleurs films du genre qui allait inaugurer avec bonheur l'ère prospère du giallo dont il est un des plus intéressants précurseurs.
Malgré ses origines 100% italiennes, Libido se rapproche beaucoup des thrillers à l'anglaise que tournait alors la Hammer puisqu'on y retrouve ces ambiances si chères à un certain cinéma gothique repris par la suite par Mario Bava et Antonio Margheriti. Le film lui emprunte la plupart de ses éléments en les transposant de nos jours avec intelligence et beaucoup de maîtrise. Libido est en fait un huis-clos entre quatre personnages pris au piège dans une demeure inquiétante où semblent resurgir les terribles fantômes d'un tout aussi terrible passé. Reste à savoir si ces étranges événements sont effectivement réels ou le fruit d'une effroyable machination destinée à fragiliser l'état mental du personnage central afin de le dépouiller de son héritage.
Gastaldi aidé ici à la réalisation par le frère de Enrico Maria Salerno, Vittorio, utilise de manière subtile tous les artifices du cinéma gothique, les portes qui grincent, les nuits où l'orage gronde et souffle le vent qui fait violemment ouvrir les fenêtres tandis que la caméra parcourt les couloirs où apparaissent d'inquiétantes ombres encapuchonnées. C'est dans cette ambiance horrifique que le passé de Christian resurgit lentement, inexorablement au rythme du rocking-chair qui se balance seul alors que la poupée mécanique que possédait le jeune homme étant enfant semble prendre vie comme animée par une mystérieuse force au moment où une étrange silhouette gantée assassine un à un les différents protagonistes.
Si Gastaldi met tranquillement en place cette histoire qui trouvera son point culminant lors de sa dernière partie particulièrement excellente où s'abattent les cartes du ou des coupables jusqu'à l'implacable mais si ironique final cela ne signifie en rien que Libido souffre d'une certaine lenteur ou d'un manque d'un rythme, bien au contraire. Libido bénéficie d'un rythme soutenu, sans faille, ne laissant place à aucun temps mort. Gastaldi met également un point d'honneur non seulement à mélanger avec intelligence et savoir-faire plusieurs genres cinématographiques alors en vogue, l'épouvante, le thriller et même le fantastique, mais à donner surtout et avant tout à tous ses personnages une réelle dimension psychologique.
Plus que sur les effets sanglants dont il est quasiment dépourvu, Libido joue essentiellement sur cette ambiance inquiétante, oppressante et la psychologie de ces protagonistes multi facettes tous plus machiavéliques les uns que les autres avec lesquels Gastaldi aime jouer pour mieux perdre le malheureux Christian et par conséquent le spectateur en brouillant ainsi avec art les pistes qui déboucheront sur des portes aussi inattendues que surprenantes.
Tirant parfois vers Psychose et Sueurs froides, Libido peut être considéré comme une oeuvre freudienne tant le célèbre psychanalyste est ici présent. Le film repose d'ailleurs sur une de ses citations. En ce sens, le film de Gastaldi ouvre avec bonheur toute une lignée de gialli psychologiques dont Romolo Guerrieri et Umberto Lenzi entre autres réalisateurs se feront les spécialistes par la suite avec notamment Orgasmo et Paranoia.
Agrémenté d'un zeste d'érotisme qu'on doit principalement à la blonde et vaporeuse Mara Meryl, l'épouse du réalisateur, Libido rythmé par une très belle belle partition musicale signée Carlo Rustichelli, se conclura de manière bien cruelle puisque la folie n'épargnera personne ni le coupable voué à la plus horrible des agonies ni même le principal intéressé emporté par l'assaut des vagues sous l'ultime salut de cette hideuse poupée mécanique qui tirera sa révérence à la Mort.
Hormis Mara Meryl, on reconnaitra une jolie brochette de comédiens tous plus performants les uns que les autres dont Luciano Pigozzi, l'élégante Dominique Boschero et l'excellent Giancarlo Giannini dont c'était le premier rôle au cinéma.
Méconnu du grand public, resté totalement inédit puisque le film n'a malheureusement connu qu'une seule et unique sortie vidéo, Libido fait pourtant partie des bases fondamentales du giallo. Voilà une véritable petite perle de nacre réalisée avec tout le soin et la rigueur d'un grand réalisateur. Libido est une oeuvre fouillée, redoutablement efficace baignée de paranoïa, brillante, trouble, quasi parfaite et dangereusement intelligente puisque Gastaldi a réussi à faire d'une intrigue au demeurant assez simple une histoire complexe et totalement inattendue dans son déroulement et ses différents aboutissants.
A la vision de ce chef d'oeuvre du thriller psychologique, on ne peut que regretter que Gastaldi ne se soit pas plus consacré à la mise en scène tout au long de sa prolifique carrière de scénariste.