Una sull'altra
Autres titres: La machination / Perversion story / One on top of the other / Una historia perversa
Real: Lucio Fulci
Année: 1969
Origine: Italie
Genre: Giallo
Durée: 97mn
Acteurs: Jean Sorel, Marisa Mell, Elsa Martinelli, John Ireland, Alberto De Mendoza, Faith Domergue, Jean Sobieski, Franco Balducci, Jesus Puente, Riccardo Cucciola, George Rigaud...
Résumé: Le Docteur George Dummurier est marié à Suzan, une jeune femme malade, en proie à de violentes crises d'asthme. Elle vit recluse chez elle et ne sort pratiquement jamais. Alors qu'il est en compagnie de sa maîtresse, une étrange photographe, il apprend la mort de Suzan qui bizarrement venait de souscrire une importante police d'assurance. Des faits étranges ne tardent pas à se produire. Un appel lui demande de se rendre dans un club de strip-tease où il découvre Monica, une danseuse, parfait sosie de sa défunte épouse. Une relation nait entre eux mais Monica ne semble pas être la femme qu'elle veut bien paraitre alors que la mort de Suzan devient de plus en plus suspecte...
Un an avant L'oiseau au plumage de cristal de Dario Argento, une des principales références du giallo italien, Lucio Fulci réalise son premier thriller érotique qui se veut une sorte d'hommage à Hitchcock puisque Una sull'altra connu chez nous sous différents titres dont La machination et Perversion story reprend à sa façon Sueurs froides en y incorporant les éléments qui caractériseront tout un pan du giallo transalpin.
Cette première tentative il faut le reconnaitre est un véritable coup de maître tant le film s'avère être captivant à plusieurs titres. Loin de ses futurs penchants macabres, Fulci se concentre plus ici à créer une atmosphère vénéneuse et malsaine dans un contexte érotique souvent torride et surtout assez osé pour l'époque.
La première partie du film nous présente les différents protagonistes tous plus troubles les uns que les autres. Sur le devant de la scène se trouvent le docteur Dummurier éperdument amoureux de Suzan, sa jeune épouse malade qui vit recluse chez eux, sa maîtresse, une
étrange et malheureuse photographe, et enfin la dévouée et froide servante. A la mort de Susan qui laisse derrière elle une importante police d'assurance, tous basculent dans un univers glauque tandis que Fulci va semer le doute dans l'esprit de chacun et par conséquent celui du spectateur. Qui aurait pu tuer Suzan et qui est donc Monica, cette étrange strip-teaseuse sosie de la défunte autour de laquelle semble graviter nombre de réponses?
Fulci accumule donc les fausses pistes, ballade son spectateur au gré des retournements de situations qu'il s'amuse à inventer de façon parfois maladroite. Il n'est donc pas très difficile de deviner qui est en réalité Monica et la révélation finale n'étonnera guère par conséquent.
Ces maladresses et imperfections scénaristiques sont fort heureusement gommées par les motivations profondes de chacun, odieuses et diaboliques, qu'on découvrira lors du frénétique final que Fulci transforme en une véritable course contre la montre afin d'éviter au héros la chaise électrique.
L'autre principal atout du film est son érotisme brûlant présent tout au long du métrage le plus souvent sous forme d'intenses scènes à connotations saphiques qui culmineront lors de la relation aussi envoûtante que équivoque entre l'étrange photographe et Monica qui parallèlement donne bien du plaisir au docteur lors de douceurs orales suggérées.
Réalisé trois ans avant Le venin de la peur, Una sull'altra pourrait en être l'ébauche, le brouillon. On y retrouve l'essence même de ce second giallo, l'érotisme incandescent, la perversion des personnages et l'atmosphère empoisonnée que distille l'histoire. Les deux films ont en communs certains points notamment au niveau des protagonistes. Ainsi, la relation entre Monica et la photographe trouve écho dans la relation ambigüe qui existe entre Florinda Bolkan et sa voisine, Anita Strindberg, dans Le venin de la peur.
Rythmé par une jolie partition jazzy signée Riz Ortolani, Una sull'altra malgré ses défauts et maladresses est une brillante réussite du Maître qui parvient sans mal à tenir en haleine son public par le biais de cette histoire à tiroirs dénuée de tout meurtre où chaque détail a son importance. Il faudra donc au spectateur une bonne dose de mémoire pour les retenir tous autant qu'ils sont afin de les remettre à leur place lors du final haletant. Si on appréciera la fluidité de la caméra, si on restera sous le charme de certains plans vertigineux et quelques split-screen étonnants, on saluera également la manière dont Fulci met en scène San Francisco qu'il sublime.
On savourera la présence de Marisa Mell qui dans un double rôle éclaire de toute son énigmatique beauté et sa plastique de rêve cette machination aux cotés de l'androgyne Elsa Martinelli, fascinante, entre lesquelles se trouve coincé Jean Sorel beaucoup trop mono expressif malheureusement.
Tout conventionnel soit il, Una sull'altra s'il n'a pas la puissance, la beauté onirique et la violence du Venin de la peur fait partie de ces films trop méconnus de la filmographie du Maestro qui méritent amplement d'être redécouverts et réestimés. Ce premier thriller érotique a sa place parmi les meilleurs gialli ou plutôt sexy gialli de l'époque. Cette même année, Alberto Di Martino mettra en scène Perversion qui se rapproche quelque peu du film de Fulci ne serait ce que pour son érotisme mais également sa location géographique, non pas San Francisco cette fois mais Los Angeles.