Fabrizio Moroni: La discrétion d'une idole
Grand, des yeux d'un bleu couleur océan, un visage poupin qui n'a jamais perdu son coté candide, un sourire angélique, version blond ou version brun, il incarna la nouvelle jeunesse des années 60. Est-ce étonnant s'il sut très vite se frayer une place au soleil tant au cinéma que dans l'univers du roman-photo dont il devint un des princes. Il côtoya quelques uns des grands nom du cinéma italien avant de se tourner vers le cinéma de genre, s'essayant tant au western, au thriller qu'à la comédie populaire. Discret, peu de choses ont été écrites sur ce bel Adonis, une erreur que le Maniaco va aujourd'hui réparer en vous présentant le parcours du séduisant Fabrizio Moroni.
Né le 16 mars 1943 à Florence Fabrizio débute sa carrière d'acteur très tôt. Il n'a en effet que 20 ans lorsque Lucchino Visconti le remarque et lui offre un tout petit rôle non crédité dans Le guépard. Cette participation lui ouvre alors les portes de Cinecittà. Nous sommes en 1963, le jeune Fabrizio enchaine très vite les films. Après une nouvelle courte participation dans le film de Luciano Salce aux cotés de Ugo Tognazzi et Emmanuelle Riva, Les heures de l'amour, Fabrizio obtient la même année son tout premier rôle en tant que principal protagoniste masculin dans la comédie musicale La chica del trebol de Sergio Grieco
auprès de la star du genre Rocio Durcal suivi d'un autre film espagnol Vivir un largo invierno, une dramatique signée du futur spécialiste du quinqui Jose Antonio De La Loma dont il partage la vedette avec Silvia Solar. Il est ensuite au générique de la comédie grinçante A l'italienne de Nanni Loy. En 1965 il interprète James Steerforth dans la série David Copperfield. Cela ne fait que deux ans que Fabrizio a fait ses premiers pas devant la caméra et sa notoriété est déjà très grande tant en Italie qu'en Espagne. Il faut dire qu'en si peu de temps il a déjà côtoyé quelques uns des grands noms du cinéma italien et espagnol, de Ugo Tognazzi à Nino Manfredi en passant par Lolo Bridgida et Silva Mangano.
Sa beauté, son charme, quant à eux ne passent pas inaperçus. Il devient rapidement la nouvelle coqueluche des jeunes filles qui collectionnent ses posters d'autant plus facilement que Fabrizio parallèlement à sa carrière d'acteur est dés le milieu des années 60 et ce, jusqu'à la fin des années 70, la vedette de nombreux romans-photos tant italiens qu'ibériques dont il est un des princes. Posters, couvertures de magazines, interviews, Fabrizio est partout. Il incarne tout simplement la jeunesse de son époque dont il est une sorte de porte-parole. C'est peut-être là une des raisons pour lesquelles il va un temps se spécialiser dans le musicarelli, ces comédies musicales typiquement italiennes. Après La chica del trebol il est ainsi à l'affiche de deux musicarelli de Ettore Maria Fizzarotti,
Perdono et Nessuno mi puo giudicare dans lesquels il a pour partenaire la chanteuse Caterina Caselli surnommée Casco d'oro. Il est ensuite un des principaux protagonistes du joyeux I ragazzi di Bandiera gialla.
Après cette période musicale Fabrizio s'essaie à un autre genre, le western-spaghetti. Il est tout d'abord aux crédits de Ringo contre Jerry de Tano Boccia puis surtout et avant tout en 1968 de Tire Django tire de Bruno Corbucci dans lequel il n'a aucun mal à effacer le fade Brian Kelly, son partenaire. Désormais blond, la mèche rebelle, les yeux plus bleus que jamais, Fabrizio ressemble de plus en plus à Robert Redford. De par sa beauté, soncharisme, son talent, il irradie tout simplement l'écran. Avec ces deux westerns le jeune acteur amorce un tournant dans sa carrière. Après avoir joué dans une petite dizaine de films "grand public" Fabrizio s'oriente alors vers le cinéma de genre et d'exploitation. En 1969 il est un des sept hommes du film de guerre 7 hommes pour Tobrouk de Mino Loy avant d'apparaitre dissimulé sous une perruque blonde à la Brian Jones dans le thriller psychédélique Las trompetas del apocalipsis / Mortelle symphonie de Julio Buch. On le voit ensuite trop rapidement dans Quatre mouches de velours gris de Dario Argento puis, moustachu, aux cotés de Gloria Guida qu'il séduit dans La minorenne / Polissonnes excitées, l'occasion également pour nous de le voir en caleçon. Il se partage l'affiche
avec Marisa Benson et Stefania Casini dans la comédie dramatique de Pier Ludovico Pavoni Un modo di essere donna puis se retrouve au générique de Mais... laissez nous succomber à la tentation de Giulio Petroni. Entre deux films de genre il prend le temps de renouer avec un cinéma bien plus sérieux en apparaissant dans Le professeur, le film controversé de Valerio Zurlini mené par un Alain Delon, le professeur à la dérive du titre, amoureux d'une de ses étudiantes.
Dés le milieu des années 70 Fabrizio voit sa carrière quelque peu ralentir. En 1975 il fait une apparition dans __Salvo d'acquisto__ puis c'est pour la télévision qu'il va travailler. Il est en
1976 au générique de trois épisodes de la série Rosso veneziano. Cette même année il renoue avec la comédie musicale en acceptant d'être le partenaire de Martine Brochard dans Frou Frou del Tabarin avant de disparaitre des écrans durant trois longues années. Il ne réapparaitra qu'en 1979 dans le temps d'endosser le costume du professeur de philosophie dont Gloria Guida est folle amoureuse dans La lycéenne séduit ses professeurs. Il entame les années 80 avec un téléfilm, Versa l'oro zero, puis fait une très courte apparition non créditée dans Follia omicida / Murder obsession de Riccardo Freda, un film d'horreur raté qui tente de renouer avec la grande époque du cinéma
d'épouvante gothique, en vain. Cette pellicule marquera la fin de sa carrière au grand écran, un chant du cygne qu'on aurait aimé bien meilleur qui ne marque cependant pas vraiment la fin de sa carrière artistique. C'est à la télévision qu'il terminera en effet son parcours en prêtant son visage pour différents spots publicitaires, une activité peut-être pas forcément reluisante mais qui étrangement lui apportera une certaine notoriété au Japon. Malade, il sera forcé de mettre un terme à sa carrière à la fin des années 90 après un retour inespéré au cinéma pour ses admirateurs, un tout petit rôle dans le film à sketches Il cielo è sempre piu blu de Antonello Grimaldi. La maladie finira malheureusement par avoir le dessus. Fabrizio s'éteint à Rome le 6 aout 2006 à seulement 63 ans. A sa demande il sera inhumé dans la plus stricte intimité, une décision qui ne surprend pas, la discrétion ayant toujours été un trait de caractère de Fabrizio qui a toujours évité d'exposer sa vie privée et su se détourner des mondanités.