Il lumacone
Autres titres:
Real: Paolo Cavara
Année: 1974
Origine: Italie
Genre: Comédie dramatique
Durée: 91mn
Acteurs: Turi Ferro, Agostina Belli, Ninetto Davoli, Isa Danieli, Francesco Mulè, Gabriella Giorgelli, Fioretta Mari, Franca Alma Moretti, Tuccio Musumeci, Stefano Amato, Giorgio Bixio, Stefano Amato, Daniele Dublino, Lorenzo Piani, Tuccio Musumeci, Franco Bracardi, Giorgio Bixio, Sandro Dori, Vittorio Fanfoni, Aldo Valletti...
Résumé: Ex-cuistot au chômage, alcoolique, Gianni depuis que sa femme l'a quitté vit seul dans le sous sol emménagé d'un immeuble à Rome. Il caresse le rêve d"ouvrir un jour un wagon-restaurant à la mode qui sillonnerait le pays. Il a pour amies une prostituée et l'épicière de son quartier qui partagent ses aventures, toujours prêtes à l'aider ou lui remonter le moral. Il fait un jour la connaissance d'un petit délinquant, Ginetto,. Ils se lient d'amitié. Gianni tente de lui apprendre le métier de serveur pour l'impliquer dans son projet mais le pauvre homme s'est une fois de plus trompé...
Après avoir fait ses débuts dans le mondo aux cotés notamment de Gualtiero Jacopetti Paolo Cavara signe son premier long métrage en 1967, un film amer, lucide, quasi auto biographique intelligemment intitulé La cible dans l'oeil avant de se faire remarquer avec deux gialli, La tarentule au ventre noir et E tanta paura. Avant de se faire de plus en plus rare dés le milieu des années 70 il signera encore deux comédies dramatiques, l'ambigu Un parfum d'amour / Virilité avec Marc Porel et le mélancolique Il lumacone toutes deux réalisées en 1974.
Originaire de Catane, petite ville de Sicile, Gianni Rodino fut autrefois un homme heureux. Quadragénaire, cuistot de métier, il est aujourd'hui au chômage. sa femme l'a quitté cinq ans plus tôt. Il vit seul dans un petit appartement, en fait le sous sol emménagé d'un immeuble dans un quartier prolétaire de Rome. Il est devenu alcoolique et a pour amies et confidentes Carmela l'épicière de son quartier et Giorgina une prostituée au grand coeur. Il a des vues également sur la jolie Elisa, une jeune fille de son immeuble qu'il aimerait séduire. Son grand rêve est de monter un wagon-restaurant à la mode qu'il installerait à Rome. S'il a trouvé le wagon idéal il n'a ni l'argent ni le personnel pour voir ce rêve se réaliser. Un jour il
fait la connaissance de Ginetto, un petit voyou tout juste sorti de prison. Ginetto est en fait le fiancé d'Elisa. Si Gianni voit ses espoirs de conquérir sa belle voisine s'évanouir il se lie d'amitié avec Ginetto avec qui il va rapidement partager son appartement. Il lui apprend les bases du métier de serveur car il aimerait que le garçon s'associe à lui pour que son rêve se concrétise enfin. Malheureusement Ginetto refuse. Le garçon n'a pas que de bonnes fréquentations et la police vient un jour frapper à la porte de Gianni. Déprimé le pauvre homme tente en vain de se suicider. Ginetto revient alors sur sa décision. Gianni parvient à acheter son wagon-restaurant qu'il installe sur une place de la capitale. Ginetto et Elisa
travailleront avec lui. Il découvre alors que le wagon appartient à son ex-femme. Un soir accompagné des deux amoureux Gianni s'invite à diner au wagon afin d'y faire un scandale. C'est peut être là un moyen de se réconcilier avec sa femme et d'extérioriser cinq années de déprime et de désespoir.
Il lumacone, le gros escargot / la grosse limace, du titre c'est Gianni, cet ex-cuistot rondouillard que la vie n'a pas épargné autour duquel toute l'histoire du film tourne. Avec Il lumacone Paolo Cavara signe une comédie douce-amère attachante en forme de scènes de vie. On y suit la vie au quotidien de ce petit homme dans un petit quartier populaire romain,
ses désillusions, ses errances nocturnes ivre mort. Loin des clichés touristiques Cavara nous entraine dans la Rome prolétaire et sous prolétaire des années 70, celle des quartiers habités par une véritable âme, celle de la générosité, de l'amitié, des rêves et de l'entraide. Les personnages vont et viennent, disparaissent comme dans la vie au fil des aventures de ce cuistot mélancolique au chômage qui se définit lui même lors d'une réunion des alcooliques anonymes comme un pauvre gars qui a sombré dans l'alcool à cause de deux femmes, sa mère qui a mis au monde un gros con et son épouse qui l'a trompé et quitté. L'arrivée de Ginetto va lui redonner espoir, relancer ses rêves mais lui aussi le décevra
lorsqu'il découvre que de temps à autre il se prostitue pour de l'argent.
L'intrigue est simple, très simple mais elle contient tous les éléments de la comédie aigre-douce propre à toucher le spectateur qui s'il rit de temps à autre c'est les dents serrées. Avec humanisme, pudeur Paolo Cavara jette un regard bienveillant sur cette Rome douloureuse, résignée mais pleine de vie qui chaque jour se bat, garde espoir sans pour autant transformer son film en une longue réflexion sur la condition sous prolétarienne. Il lumacone est plutôt une ode à l'optimisme, un petit film sans prétention qui pousse son public à croire en ses rêves et à se battre pour qu'ils deviennent réalité. Quand on veut on peut semble dire
Cavara avec ce final lumineux, plein d'espoir où pour la première fois durant 90 minutes il laisse entrevoir la splendeur de Rome, signe de la libération de Gianni et de sa liberté retrouvée.
Un des extraordinaires atouts du film est son son affiche et son interprétation tout en justesse et douceur, le sicilien Tuti Ferro en tête dont le rôle de Gianni semble avoir été écrit pour lui sur mesure. Ninetto Davoli donne un léger coté pasolinien au film, son personnage de tendre petit voyou romain semble droit sorti d'un film du Maestro, tandis que la douce Agostina Belli est radieuse. Plus étonnant encore les seconds rôles sont ici d'une grande
qualité, de la malheureuse Gabriella Giorgelli version perruque blonde à l'autoritaire Fioretta Mari et la plus maternelle Franca Alma Moretti sans oublier le pizzaiolo Francesco Mulé et Tuccio Musumeci. Impossible de ne pas remarquer l'apparition furtive du générique Aldo Valletti, l'inoubliable Président de Salo ou les 120 journées de sodome, lors de la réunion
des alcooliques anonymes.
Sorti quasiment inaperçu en Italie, totalement inédit chez nous, Il lumacone est une attachante comédie dramatique que n'auraient pas renié un Comencini ou un Scola, par instant touchante, pleine d'humanité, d'émotion, d'optimisme et de bons sentiments teintée d'un zeste de critique sociale sous prolétaire. Méconnue elle mérite toute l'attention de l'amateur qui prendra soyons en sûr un plaisir certain à la découvrir et la rangera sans hésiter aux cotés de Virilità, seconde comédie dramatique du cinéaste tout aussi mordante et réussie.