Ettore lo fusto
Autres titres: Les proxénètes / Il drittone / Hector the mighty / Hector the trunk / El rapto de Elena, la decente italiana
Real: Enzo G. Castellari
Année: 1972
Origine: Italie
Genre: Comédie
Durée: 101mn
Acteurs: Giancarlo Giannini, Vittorio Caprioli, Vittorio De Sica, Michael Forrest, Luciano Salce, Rosanna Schiaffino, Orchidea De Santis, Aldo Giuffrè, Philippe Leroy, Franca Valeri, Caterina Boratto, Giancarlo Prete, Haydée Politoff, Gianrico Tedeschi, Juan Luis Galiardo, Elio Bonadonna, José Calvo, Umberto Di Grazia, Alain Gerard, Edoardo Nevola, Gigi Rizzi, Rosita Torosh, Pietro Torrisi...
Résumé: Hector le puissant dirige un bordel de luxe sur un de ses terrains Le troika. Le cardinal Giove désire le lui acheter pour y construire un complexe immobilier. Hector refuse. Le conseiller du cardinal lui soumet alors un plan démoniaque. faire aux Deux Rois, deux frères qui tiennent aussi une maison close et sont les ennemis jurés de Hector. Le cardinal leur demande d'aller détruire le Troika. Le premier assaut est un échec. Accompagnés cette fois d'Achille et de ses hommes, ils assaillent une seconde fois la demeure...
Réalisé en 1972 Ettore lo fusto n'est jamais qu'une libre adaptation du roman de Henri Viard et Bernard Zacharias Le roi des Mirmidous qui lui même était une version comique revue et corrigée de l'Iliade transposée à notre époque. Si Enzo Castellari avoue s'être beaucoup amusé lors du tournage de ce film qu'il affectionne particulièrement à l'instar d'une bonne partie de la distribution transformée en de véritables trublions, en est il de même du spectateur embarqué dans cette vision endiablée de La guerre de Troie dont voici un bref résumé?
Ettore lo fusto connu en France sous le titre particulièrement absurde Les proxénètes conte les aventures du puissant Hector dont un des terrains est convoité par le fourbe cardinal Giove et son secrétaire Mercure qui veulent y bâtir un complexe résidentiel pour fortunés. Hector refuse de lui céder d'autant plus qu'il y a édifié un bordel de luxe, La Troika. Lorsque le cardinal découvre l'existence de cette maison close il est horrifié. Mercure lui suggère alors un plan machiavélique: contacter les Deux Rois, les frères Agamemnon et Ménélas, ennemis jurés de Hector et propriétaires eux aussi d'un bordel, avec qui ils sont en guerre. Sous les conseils d'Ulysse, un portier napolitain, les deux frères mettent au point leur vengeance et,
accompagnés d'une bande de voyous bardés de cuir noir, prennent d'assaut la propriété de Hector. Dans un premier temps, l'attaque est repoussée. Secondés cette fois par Achille, un voleur de voiture macho gay, furieux d'avoir perdu son meilleur ami lors d'un tournoi en moto, l'efféminé Patrocle dit Clo-Clo, Agamemnon et Ménélas parviennent à s'emparer de la demeure de Hector qui finira dans un bloc de ciment. Celui deviendra la première pierre du complexe du cardinal qui se fera un honneur de l'inaugurer tandis que Hélène, l'épouse libertine de Ménélas dont les terres ont été entre temps détruites par Achille, se consolera dans les bras d'un vieil avocat. Quant à Ulysse il repartira en Sicile.
Le moins qu'on puisse dire c'est qu'une telle pellicule est assez étonnante dans la filmographie du réalisateur qui réactualise la mythologie grecque dans cette comédie échevelée qui emprunte quelques éléments de base au film noir. Cette nouvelle guerre de Troie nommée ici Troika n'est en fait que la lutte que se livreraient deux bandes mafieuses rivales sur le sol italien, celle d'Hector le tout puissant qui règne en maitre sur un bordel de luxe qu'il a érigé sur ses terres et de ses ennemis jurés, le clan opposé, embauchés par un cardinal véreux qui n'aspire qu'à les lui voler afin d'y construire un complexe immobilier. La guerre est sans pitié, tous les coups sont permis et les protagonistes qui portent tous les
noms de héros grecs s'en donnent à coeur joie. En résulte une farce déjantée, échevelée, irrévérencieuse, une comédie satirique tournée à cent à l'heure par un Castellari visiblement déchainé dont la caméra virevolte, s'ébranle jusqu'à parfois en donner le tournis. Cette vivacité est certes un point positif tout comme l'idée de départ était très intéressante. Ajoutons la bravoure dont fait toujours autant preuve Castellari lors des nombreuses scènes d'action menées tambour battant, la présence de quelques très bonnes séquences, originales, et de quelques passages mettant en scène le gang de voyous à la solde d'Achille qui feront irrésistiblement penser aux futurs Guerriers du Bronx et aux Nouveaux barbares, tant dans
leur accoutrement sadomaso gay que dans les poursuites à moto et le duel motorisé tendance sodomite entre Hector et Patrocle (le couteau de Parocle pointé vers le derrière de Achille renvoie au final tout aussi sodomite des Nouveaux barbares entre George Eastman et Gianfranco Prete). Malheureusement Ettore lo fusto est au final en dessous de ce qu'on pouvait en espérer.
A trop miser sur l'aspect foldingue Castellari s'égare dans un scénario souvent confus où se démènent un trop grand nombre de personnages qui eux mêmes embrouillent l'esprit du
spectateur ne serait ce que par leurs noms empruntés à la mythologie tant et si bien que par instant on se demande qui est qui. Voilà qui ne serait guère gênant si le film était vraiment drôle. Faire rire est souvent un acte difficile auquel Castellari n'est semble t-il pas réellement parvenu. Les gags qui d'un bout à l'autre truffent le film ne sont pas très recherchés et sentent le réchauffé. L'ensemble ne s'élève guère plus haut qu'une quelconque comédie pour finalement ne faire esquisser à son public que de simples sourires voire de timides rires. C'est un sentiment presque d'ennui qu'il en ressortirait accentué par la durée excessive du film, quelques 100 minutes.
Fort heureusement ces points négatifs sont contre balancés par une affiche prestigieuse composée d'une alléchante brochette d'acteurs convaincus qui s'amusent visiblement comme des petits fous, cabotinent, et transmettent leur gaieté au spectateur en tête Philippe Leroy, déchainé, dans le rôle titre, l'austère Vittorio De Sica (Giove), Luciano Salce (Mercure), Vittorio Caprioli (Ménélas), Giancarlo Giannini (Ulysse), Aldo Giuffre (Agamemnon), le gigantesque Michael Forrest (Achille) et Giancarlo Prete surprenant en Patrocle gay maniéré tout en brushing fou. L'incontournable figure du western spaghetti reconverti bad boy Giovanni Cianfriglia, le solide Pietro Torrisi et Massimo Vanni forment le
gang de voyous bardés de cuir noir de Achille. Quant à la gente féminine elle est dignement représentée par Orchidea De Santis dans son rôle habituel de prostituée qui lors d'un plan furtif montre ses seins, Haydée Politoff, Franca Valeri en voyante cartomancienne et une Rosanna Schiaffino imposée par la production au grand dam de Castellari qui ne supportait pas ses caprices encore moins qu'elle se permette de réécrire ses scènes. On notera aussi la présence de Caterina Borrato, inoubliable quatrième narratrice de Salo, celle du cercle du sang.
Oeuvre transitoire entre la période western et la période polar du réalisateur Ettore lo fusto
est une comédie enlevée qui n'atteint pas forcément son objectif. Demi échec ou demi réussite, le film est à réserver en priorité aux inconditionnels du metteur en scène et aux collectionneurs invétérés. Les autres le verront comme une pure distraction, une curiosité divertissante un peu longuette qui accrochera ça et là un joli sur leur faciès plus ou moins réjoui face à des numéros d'acteurs hors pair. Voilà qui déjà n'est pas si mal!
Sorti en Italie en janvier 1972 sans grand succès, le film fut redistribué l'année suivante sous un nouveau titre Il Drittone avec cette fois l'accent mis sur la présence de Giancarlo Giannini qui entre temps était devenu une star. En France, le film sortit furtivement en 1975 mais uniquement en Province.