Karzan il favoloso uomo della jungla
Autres titres: Karzan maitre de la jungle / Karzan master of the jungle
Real: Demofilo Fidani
Année: 1972
Origine: Italie
Genre: Aventures
Durée: 82mn
Acteurs: Armando Bottin, Simonetta Vitelli, Ettore Manni, Jerry Ross, Melù Valente, Roger Browne, Attilio Dottesio, Attilio Severini, Edward Grant...
Résumé: Alors qu'il visionne un film sur une contrée africaine, le Professeur Fox repère un homme étrange à demi-nu au milieu de la jungle. Il fait très vite le rapprochement entre l'enfant qui avait disparu il y a des bien des années lors du crash d'un avion. Il organise donc une expédition afin de capturer cet homme. Bien des aventures les attendent, lui et son équipe, une fois dans la jungle...
Peu connu pour sa finesse et surtout son professionnalisme Demofilo Fidani fait partie de ces réalisateurs italiens dont la carrière se résume à une suite de films tous plus mauvais les uns que les autres. Artisan du pauvre du cinéma de genre transalpin Fidani a surtout oeuvré dans le western mais a également commis quelques polars, tous ayant pour points communs leur aspect fauché et surtout leur drôlerie. C'est au film d'aventures, plus spécialement le film de jungle, que Fidani s'attaque avec cette sidérante parodie de Tarzan joliment nommée Karzan.
Alors qu'il visionne un film sur une contrée reculée d'Afrique avec quelques amis, le Professeur Fox remarque un homme à demi-nu sauté de lianes en lianes. Il fait très vite la relation avec la disparition d'un enfant lors du crash d'un avion dans cette région. Grâce à Lord Carter, Fox trouve l'argent pour financer une expédition afin de capturer celui qu'il surnomme "Le Monstre". Accompagnés d'un reporter, d'une joie brune, d'un domestique noir et d'un joueur d'harmonica muet, Fox et Carter partent pour l'Afrique. Ils vont traverser la jungle, vivre moult aventures et connaitre mille dangers représentés par serpents, araignées, crocodiles et autres buffles. Faits prisonniers par une tribu sauvage, ils sont délivrés par "Le
Monstre" qui malheureusement leur échappe. La jolie brune est enlevée par, Shiran, la compagne de l'Homme. Les aventuriers parviennent à la délivrer et capturent enfin ce couple de la jungle. C'est sans compter sur leur guenon, Cika, qui les délivrent. Si Karzan, blessé, réussit à s'enfuir, Shiran reste prisonnière des aventuriers. Ils la ramènent au camp bien décidés à ce qu'elle rentre en Europe avec eux afin de faire part au monde de leur surprenante découverte. Ils sont alors pris de remords et décident de laisser Shiran rejoindre Karzan. De nouveau réunis, le couple de la jungle va pouvoir couler des jours heureux et d'aimer sur fond de couchers de soleil rougeoyants.
Très en vogue dans les années 30 et 40, le film de jungle fut brièvement remis à la mode à la fin des années 60 notamment en Italie. Ainsi virent le jour Samoa, Gungala et autre Tarzana tous ayant pour point commun leur charmante ringardise noyée dans un érotisme de bande dessinée. On eut également droit en 1972 à un mémorable Zambo avec Brad Harris tourné par l'ineffable Bitto Albertini. C'est cette même année que Fidani accoucha de ce Karzan maitre de la jungle, véritable farce pour grands enfants dont il est bien difficile de parler tant il est d'une effarante bêtise. Privé de tout budget et très certainement de scénaristes dignes de ce nom, Fidani nous livre une histoire sans queue ni tête truffée d'incohérences, dénuée de
tout bons sens mais parfaitement hilarante. De quoi sauver le navire. Inutile de perdre du temps, c'est en 5 minutes tapantes que Fox trouve son donateur, organise son périlleuse expédition et transporte des tonnes de matériel dans deux minuscules jeeps. Un véritable tour de force digne d'une production AB grande époque! En 10 minutes seulement nous voilà au coeur de la redoutable jungle africaine ou du moins à ce qui peut lui ressembler puisque le film fut tourné en Italie notamment près des cascades du Mont Gelato ainsi qu'aux abords de Rome comme le sera plus tard Emanuelle et les derniers cannibales. L'illusion est parfaite d'autant plus que Fidani truffe son film de stock-shots plus vrais que nature. Buffles,
éléphants, girafes, lions, flamants roses, envolées d'oiseaux sauvages... sont ainsi au rendez-vous. Cela se gâte par contre dés qu'il utilise son propre bestiaire: un inoffensif bébé crocodile filmé de très près pour le faire paraitre agressif, un serpent d'une mollesse suspecte avec lequel un des aventuriers se bat de façon homérique à grands renforts de grimaces surjouées qui ont bien du effrayé cet orvet, un chimpanzé anémié et un des clous du spectacle: une araignée en tissu ratée et un faux gorille autrement dit un pauvre figurant enfermé dans une peau de singe le temps d'échanger quelques coups de poing avec Karzan qui d'un uppercut le mettra royalement KO.
Pas de films de jungle sans tribu primitive et féroce. Entre deux nouveaux stock-shots empruntés à quelque mondo africain, Fidani fait appel à un groupe de figurants de couleur maquillés et emplumés jusqu'aux dents qui hurlent, gesticulent, dansent et sautent dans tous les sens en vociférant un dialecte qu'on nous dit être du swahili mais n'est qu'un yaourt puéril à base d'onomatopées qu'on avait plus entendu depuis les films de jungle des années 40. On remarquera avec amusement que nos africains arborent tous une sublime coupe afro made in 70s, notamment la grande prêtresse, et portent un slip noir très anachronique sous leur pagne, une petite culotte blanche très sexy pour la grande prêtresse.
Il va sans dire que Fidani arrose l'ensemble d'une bonne dose de racisme, élément indispensable à tout bon film d'exploitation. L'homme noir est donc forcément un être sauvage, dangereux, primitif et dénué de toute intelligence quant aux ethnies qui peuplent la jungle, le domestique de couleur de son coté est un être veule, peureux qui commence toutes ses phrases par un savoureux "Bwana" ou "Patwon" avec un accent qu'on ne pourrait plus se permettre aujourd'hui.
C'est donc avec impatience qu'on attend l'arrivée de Karzan, de sa belle et de sa guenon, certains diraient de ses deux guenons. Il faut pour cela patienter jusqu'à la seconde moitié
du film lorsque d'un arbre surgit notre triste héros, un bellâtre aux muscles saillants, au brushing parfait et très contrôlé à la David Hasselhoff époque Les feux de l'amour, le regard bovin, à l'air nigaud, sautant maladroitement de lianes en lianes. Afin de lui donner un semblant de nerf, Fidani le filme très souvent au ralenti ou en contre plongée mais l'effet ne fonctionne pas vraiment d'autant plus que le procédé permet encore plus au spectateur de remarquer son air niais et son physique ingrat. Si comme au bon vieux temps du péplum bas de gamme, Karzan écrase des rocs en polystyrène sur ses ennemis, il aime surtout dirait on les scènes de ménage puisqu'il ne cesse de se quereller avec Shiran, une blonde fadasse
en bikini peau de bête, qui comme lui émet des grognements, un langage que seuls nos deux intéressés comprennent. Gageons que leurs lignes de dialogue ne furent pas écrites mais inventées sur place!
Dénué de mise en scène, multipliant les faux raccords et les ellipses dont deux phénoménales (nos aventuriers se retrouvent soudainement attachés à un poteau de torture au beau milieu d'un village alors que dans la scène précédente ils traversaient allégrement la forêt et le final si on peut appeler cela un final puisqu'il n'y a pas à proprement parlé de fin, le changement d'avis des aventuriers survivants et les retrouvailles incompréhensibles de
Karzan et Shiran sous un flamboyant coucher de soleil) qui appuieraient certains dires de Fidani quant à un éventuel remontage et remaniement du film de dernière minute, d'une insondable bêtise Karzan n'épargne pas non plus ses comédiens. Si Ettore Manni fait ce qu'il peut en débitant des dialogues idiots, le pauvre Jerry Ross, roi incontesté du roman-photo à l'italienne, ne sert à rien et compte ses répliques sur les doigts d'une main. Attilio Severini est l'homme à l'harmonica pour ne pas oublier que Fidani vient du western. Simonetta Vitelli, actrice fétiche de Fidani et figure récurrente de ses westerns, est une Shiran quasi transparente. Quant au bienomméJohnny Kissmuller Jr qui enfile le pagne de
Karzan, il s'agit en fait d'un culturiste italien qui fit une brève carrière à Cinecitta. De son véritable nom Armando Bottin, il se spécialisa surtout dans la figuration. L'amateur, voire ses éventuels admirateurs, s'amusera donc à le repérer dans des oeuvres aussi diverses que l'excellent Quelli che contano, Deux génies un associé une cloche, Caresses à domiciles où il retrouvait Fidani, Spartacus et les 10 gladiateurs ou encore Les aventures d'une air-hôtesse. Fidani avoua lors d'une interview quelques temps avant sa mort qu'il ne supportait pas cet homme sans aucun talent qu'il trouvait physiquement laid, un laideron sur un corps parfait qui l'avait lui même surnommé Jonnhy Kissmuller, référence au mythique Johnny Weissmuller.
Aussi raté, nul et maladroit soit il, quelque soit l'hilarité qu'il pourra engendrer, Karzan maitre de la jungle n'est pas non plus la monstruosité qu'on peut trop souvent lire. Il faut le voir
comme une pure distraction Z, un exemple d'un cinéma de genre italien d'un autre temps qui s'amusait comme il le pouvait de tout et de rien en rendant hommage aux classiques (ici Tarzan). Il n'est ni pire ni meilleur qu'un Zambo ou tout autre film de ce type et fonctionnera si on se laisse prendre au jeu... ce qui peut être difficile pour certains... d'autant plus si on est en groupe. De beaux paysages pseudo exotiques, quelques animaux et un zeste de tueries comme au temps du mondo, une dose de racisme à bon escient, des coupes afro magnifiques, la présence de Jerry Ross, son regard azur, sa frange blonde rebelle et son bandana rouge, de l'action bon enfant non stop, un cat-fight interracial et un raz de marée de drôlerie involontaire, en cette période de morosité ambiante, laissons nous porter par un micro plaisir coupable.
Si le film est jadis sorti en salles en France, il n'existe à ce jour aucun DVD. Afin de le découvrir dans les meilleures conditions possibles, on privilégiera la version anglaise sous forme d'une belle version vidéo à l'image quasi parfaite. On évitera par contre la version française affublée d'un doublage d'une débilité absolue. Signalons enfin que l'exécrable Jess Franco signera à son tour une aventure de Karzan bêtement intitulée Maciste contre la reine des amazones avec une toujours aussi diarrhéique Lina Romay.