La monaca di Monza
Autres titres: La religieuse de Monza / La monaca di Monza (una storia lombarda) / Lady of Monza / Die nonne von Monza / The nun of Monza / Terror en la abadia
Real: Eriprando Visconti
Année: 1969
Origine: Italie
Genre: Drame / Nunsploitation
Durée: 98mn
Acteurs: Anne Heywood, Antonio Sabato, Hardy Krüger, Tino Carraro, Luigi Pistilli, Anna Maria Alegiani, Margarita Lozano, Maria Michi, Carla Gravina, Laura Belli, Caterina Boratto, Giovanna Galletti, Giulio Donnini, Pier Paolo Capponi, Renzo Giovampietro, Michel Bardinet, Rita Calderoni, Francesco Carnelutti, Attilio Dottesio, Remo Capitani, Orso Maria Guerrini...
Résumé: Marianna de Leyva, une jeune noble italienne, s'est retirée au couvent de Monza dont elle est désormais la mère supérieure. Elle tombe amoureuse de Gianpaolo D'Ossio, un gentilhomme fougueux qui hait les espagnols. Lorsque celui-ci fuit après avoir assassiné le receveur des impôts du couvent, un espagnol qu'il accuse de s'enrichir sur le dos des paysans, Marianna le recueille. Il va alors semer le trouble parmi les soeurs qui, jalouses de la Mère supérieure vont se venger. Deux d'entre elles vont organiser le viol de Marianna par Gianpaolo. Luttant contre ses désirs charnels, la Mère supérieure va tenter de résister à l'amour qu'elle sent gardien elle pour ce jeune noble. Mais elle en est incapable. Elle le fait alors arrêter mais ne pouvant vivre loin de lui, elle le fait s'évader. Ensemble ils vont élever l'enfant né de leurs ébats le jour de son viol. Leur amour fou va malheureusement être brisé lorsqu'on découvre le bébé. Le scandale éclate. L'Eglise ordonne alors un procès...
Adaptation du roman de Mario Mazzuccheli Una storia lombarda, La monaca di Monza est une nouvelle version de la tragique destinée de Marianna de Leyva devenue Soeur Virginia Maria après avoir été contrainte à la vie monacale pour couper court à sa romance avec son amant. L'histoire de la religieuse de Monza avait déjà inspiré quelques réalisateurs dont Rafaello Pacini en 1947 et Carmine Gallone en 1962 et sera également en 1980 à la base
du Novices libertines de Bruno Mattei, du pur cinéma d'exploitation cette fois avec Zora Kerowa. La version de Eriprando Visconti, le neveu de Luchino, est le second film du metteur en scène remarqué l'année précédente avec Una storia milanese. La genèse de La monaca di Monza est intéressante. C'est au départ Carlo Ponti qui devait produire le film dont son épouse Sophia Loren devait en être l'interprète principale. L'idée tomba à l'eau et fut reprise par le jeune producteur Sergio Clementelli qui chargea Visconti de monter le projet avec pour principaux comédiens Catherine Deneuve et Gian Maria Volonte. Peu enclin à travailler avec des stars, Eriprando Visconti leur préféra l'américaine Anne Heywood et le bellâtre Antonio Sabato. La monaca di Monza sorti chez nous sous le titre La religieuse de Monza put enfin voir le jour.
Si on peut classer le film de Visconti dans la section nunsploitation, La religieuse de Monza est cependant assez représentatif de la carrière du cinéaste, oscillant sans cesse entre un certain cinéma d'auteur et un cinéma beaucoup plus commercial qui tend bien souvent vers l'exploitation. Cela se traduit ici par un traitement de ce drame qui tire vers le mélodrame, le transformant en une sorte de roman-photo en costumes dont l'action se situerait dans un couvent sans pour autant oublier d'en faire une analyse sociale qui de son coté se voudrait sérieuse à savoir que le pouvoir et l'argent régissent notre monde y compris l'Eglise, corrompant la foi, lorsque ses enjeux politiques et financiers sont menacés. Le sujet n'est pas nouveau et fut illustré de façon bien plus captivante notamment le très beau et émouvant Les religieuses du saint-Archange. L'équilibre des deux est ici malheureusement trop précaire et c'est beaucoup plus l'aspect mélo qu'on retiendra.
C'est à une véritable relation amoureuse, passionnelle mais impossible à laquelle le spectateur assiste, empreinte d'un certain romantisme. celle de Gianpaolo Ossio, un jeune noble fougueux qui a les espagnols en aversion, et Marianna De Leyva devenue Soeur Virginia Maria, la mère supérieure du couvent de Monza, une femme jeune et belle dont les abbesses et novices sont jalouses. On suit donc les aventures du couple maudit, la tentative désespérée de Marianna de ne pas céder à ses désirs charnels bien en vain mais ce sont en fait les soeurs qui seront à l'origine du scandale qui frappera le couvent. Réfugié chez les soeurs après avoir tué le receveur des impôts, Gianpaolo D'Osio va violer Marianna avec la
complicité de deux d'entre elles, bien décidées à l'évincer de son poste. De ce viol naitra un enfant dont Marianna s'occupera en cachette étrangement secondée par les deux nonnes qui avaient participé à son viol. Cependant Marianna lutte avec acharnement contre ses désirs interdits mais elle ne peut s'empêcher d'aimer le jeune homme. Afin d'être libérée de son emprise, elle le dénonce et le fait arrêter. Incapable de vivre sans lui, elle l'aide à s'évader et fuit avec lui à Venise. Ensemble ils vont alors élever leur enfant. Mais le sort s'abat sur le couple. Après bien des trahisons de toutes sortes, ils sont découverts et jugés. Gianpaolo mourra en tentant de s'évader tandis que Marianna est condamnée à être emmurée vivante.
Amour et passion, trahisons, aventures, larmes, tragédies, La religieuse de Monza n'a rien à envier à Angélique marquise des anges qui lutterait contre la faiblesse de la chair. Le film de Visconti n'est en rien une grande fresque historique en costumes mais un bien beau roman-photo noir parsemé de quelques éclats morbides qui donnent dans le semi sensationnel et oriente de temps à autre l'ensemble vers l'exploitation sage. Ainsi les tortures physiques que s'infligent Marianna, ses mortifications, bien peu impressionnantes, (le cerceau d'épines dont elle s'entoure la poitrine) afin de résister à ses pulsions érotiques ne s'élèvent jamais plus haut que celles d'un banal roman feuilleton. On est loin des supplices, de la douleur, la souffrance tant physique que morale, d'autres films du même genre. Il en va de même pour le soupçon de lesbianisme dont le réalisateur tente de saupoudrer l'ensemble qui reste dans le suggéré.
La version de Visconti ne risquera guère de marquer les esprits encore moins de bouleverser le spectateur. Cette Religieuse manque d'âme et surtout d'énergie, peu aidé par une mise en scène un brin paresseuse. Pas assez bien dessinés, trop fades, on ne se sent que peu concerné par leurs déboires amoureux et leur tourmente et ce n'est pas l'interprétation trop sage de Anne Heywood et surtout Antonio Sabato qui changera la donne. C'est donc d'un oeil quelque peu distrait qu'on suit leurs mésaventures comme on assistera impassible à la terrible scène finale, l'enfermement de Virginia derrière son mur de briques. Là où il aurait fallu une véritable montée dramatique, une véritable force expressive, Visconti, apparemment limité, se contente de platement mettre en scène cette effroyable condamnation comme il semble être incapable de donner une certaine cohérence à l'ensemble. La narration est parfois confuse, truffée d'ellipses et c'est au spectateur que revient la tâche de trouver les liens qui relient certaines parties de l'histoire, un un tantinet déplaisante dans ce contexte précis puisqu'il le laisse dans un certain sentiment d'incertitude.
Tourné en Lombardie, terre privilégiée de Visconti, La religieuse de Monza n'est pas un mauvais film encore moins un film raté. Il faut simplement le voir comme un joli feuilleton sur fond d'interdits religieux, comme une histoire d'amour fou entre deux êtres qui ne pourront jamais vivre leur passion. Le film, visuellement très riche, bénéficie en outre de très beaux décors parfaitement mis en valeur par une jolie photographie et d'une partition musicale plutôt intéressante signée Ennio Morricone qui met en avant tout l'aspect romantique de l'intrigue.
Gros succès commercial en Italie lors de sa sortie mais raillé par la critique, La religieuse de Monza devrait plaire à tous les amateurs de romances en costumes, aux âmes fleur bleue tandis que les autres lui préféreront et de loin Novices libertines, la version de Mattei, plus apte à remplir leurs attentes. S'il n'est pas le meilleur film de son auteur, loin de là, La religieuse de Monza se doit surtout d'être vu comme une oeuvre qui donna à la carrière d'Eriprando Visconti sa future orientation qui atteindra son apogée quelques années plus tard avec Una spirale di nebbia et surtout La orca et sa suite directe La oedipus orca.