Le monache di Sant'arcangelo

Autres titres: Les religieuses du St archange / The nun and the devil / Sisters of Satan / The nuns of Saint Archangel / Innocents from hell
Réal: Domenico Paollela
Année: 1973
Origine: Italie
Genre: Nunsploitation
Durée: 92mn
Acteurs: Anne Heywood, Martine Brochard, Ornella Muti, Claudi Gravy, Muriel catala, Luc Merenda, Gianluigi Chirizzi, Giulio Del Prete, Maria Cumani Quasimodo, Pier Paolo Caponi, Claudio Gora...
Résumé: Naples- début du 16ème siècle. La mère abbesse du couvent de St Archange se meurt. La lutte pour sa succession est rude. L'ambitieuse mère Giulia convoite le titre, prête à toutes les manigances pour y parvenir. Elle doit rivaliser avec mère Lavinia, la plus ancienne et mère Chiara avec qui elle entretient une relation particulière du moins jusqu'à l'arrivée d'Agnès une jeune novice dont elle s'éprend. C'était sans compter l'arrivée de sa jeune nièce, Isabella, envoyée au couvent afin qu'elle oublie son amant. Isabella va être le témoin muet des manigances de sa tante et les utiliser à ses fins. Alertée, l'Eglise envoie un vicaire qui, preuves à l'appui, peut entamer un procès sous le joug de l'Inquisition...
Suite au succès de Jeanne mère des anges de Jerry Kawalerowicz, La monaca de Monza de Carmine Gallone et son remake La religieuse de Monza de Eriprando Visconti et surtout des Diables de Ken Russel, toute une vague de films s'inspirant de la vie conventuelle allait voir le jour en ce début d'années 70 dont Le monache di Sant'arcangelo de Domenico Paolella, vieux routard du péplum.
S'éloignant des simples films de nunsploitation et de sexploitation, Les religieuses du St archange s'en démarque par son subtil dosage d'érotisme cru, la mise en valeur des magnifiques décors de ce cloitre et des personnages cette fois complets et hautement intéressants. Son propos en est le noeud central de l'intrigue et des motivations humaines, jamais poussées à l'extrême cette fois comme dans la plupart des films d'exploitation.
Le film retrace sans fioriture aucune la vie de ces filles que leurs familles envoient dans ces couvents malgré leur innocence et contre leur gré afin d'attirer la fortune sur les ainées, les punir de refuser des mariages forcés ou d'accroitre leurs richesses et leur puissance en s'appuyant sur elles comme des leviers politiques. Tout n'est alors que manigances et complots dont le moteur est la richesse et le pouvoir. Ainsi l'Eglise n'a plus rien de religieux mais elle devient une entité politique écoeurante tout aussi corrompue que les pouvoirs en place.
Les soeurs ne sont ici que des êtres humains qui reproduisent dans leur couvent ce que l'Eglise copie, une institution en quête de pouvoir. Elles nous sont montrées faibles et humaines avec leurs tentations, leurs désirs, leurs envies mais également intraitables et cruelles comme l'Eglise les a fait devenir.
Le film se base essentiellement sur les expressions des visages, les regards en coins, les sourires entendus, subtils et toujours justes à l'image de l'interprétation, magnifique. Paolella souligne la noirceur des actes. Tout n'est ici que complots, hypocrisie, manigances, jalousie. Il met en exergue la vanité des soeurs, leurs ambitions, leur arrivisme mais ces travers ne sont en fait que la représentation de l'âme humaine, ce que L'Eglise ont fait de ces femmes. En ce sens, la conclusion résume tout le propos. Condamnée à mort donc libérée de son carcan Giulia criera sa révolte face à ses bourreaux et de façon concise elle exprime enfin haut et fort le sujet du film. C'est ici le cri de rébellion de ces femmes incarcérées contre leur gré dans ces couvents. Giulia devient une sorte de porte bannière.
A travers le personnage du vicaire incarné par Luc Merenda, Paollela trace le portrait de cette Eglise impitoyable. S'il est antipathique au début du film, peu à peu, il s'humanise. S'il veut d'abord condamner ces femmes pour leurs vices et leurs crimes contre Dieu, il comprend enfin ce qui les a poussé a être ainsi. Lors du procès, toute l'hypocrisie des institutions religieuses éclate. En condamnant Giulia à la prison à vie l'Eglise perdrait sa richesse et sa donation, en la condamnant à mort elle garde tout. Tout n'est encore que chantage, perversion et meurtres appuyés par les nobles qui enrichissent l'Eglise et soutiennent l'inquisition.
L'érotisme est ici léger et beau, discret, juste la vision d'un sein ou d'une jambe, deux corps enlacés luisant à la lumière lunaire. Les amours saphiques restent superficielles, toute empreintes d'une certaine naïveté, d'une timidité enfiévrée mais toujours belles et sincères.
Les séquences de tortures sans être très sanglantes sont tout aussi efficaces dans leur coté épuré. La souffrance jamais appuyée n'en est pas moins insupportable tandis que Paollela les met en scène de façon presque belle, tragique, dans cette lumière rasante tentant de percer une sorte de brouillard de poussière dans lequel se dressent ces corps nus et meurtris, à coté des juges tout de noir vêtus et de Monseigneur tout en rouge sang.
On appréciera également le coté historique que Paollela apporte à l'ensemble en montrant la vie conventuelle, sa dureté avec ses chambres de réclusion, ses cellules de punition, ses humiliations lors des tontes des novices.
Par instant on songe presque à Beatrice Cenci de Lucio Fulci auquel le film de Paollela ressemble par certains aspects.
Les religieuses du St Archange brosse avec sobriété toute une époque et une classe, dénonce les institutions et leur perversion. Peut être manque t-il au film ce souffle si particulier, ce vent d'hérétisme et de folie mais peut être n'était ce pas là le but du réalisateur. En l'état son film est fort attachant.
En tête d'affiche Anne Heywood déjà héroïne de La religieuse de Monza incarne une Giulia dévorée par l'ambition. A ses cotés Martine Brochard, la Catala, Claudia Gravy et une toute jeune Ornella Muti jeune novice forcée à prendre le voile afin qu'elle oublie son jeune amant joué par Gianluigi Chirizzi.
Fort du succès du film, Paollela lui donnera une pseudo suite l'année suivante Storia di una monaca di clausura toujours avec Anne Heywood et Martine Brochard mais c'est cette fois l'ex-lolita Catherine Spaak qui interprète le rôle principal.