Addio ultimo uomo

Autres titres: Les derniers sauvages de la savane / Cannibale brutalo / Cannibal brutalo / The last savage / The world of the last man
Réal: Alfredo et Angelo Castiglioni
Année: 1978
Origine: Italie
Genre: Mondo
Durée: 90mn
Acteurs: Riccardo Cucciola le narrateur dans la version originale
Résumé: Les auteurs nous proposent un nouveau voyage, certainement le plus pénible à supporter, au coeur de l'Afrique noire afin d'y découvrir les rites et coutumes de peuplades primitives en les comparant à notre société dite civilisée...
Addio ultimo uomo fut l'avant dernier mondo que tournèrent les frères Castiglioni après cinq films consacrés au continent africain: Africa segreta, Africa ama, Magia nuda / Mondo magic et Africa dolce e selvaggia.
Réalisé en 1978, les Castiglioni prouvent de nouveau avec
Addio Ultimo uomo leur mépris pour notre civilisation alors qu'ils semblent avoir une
estime sans limite pour l'Afrique. Ils mettent plus que jamais en
parallèle notre monde dit civilisé et les rites tribaux les plus
ancestraux de trois tribus: les Kapsiki, les Nuba et les Shiluk.
Tout le film est donc construit sur ces incessants parallèles. Voyeur, pervers, macabre, barbare et cruel, Addio ultimo uomo
est une suite d'abominations qui vont crescendo et trouveront leur
paroxysme lors des deux fameuses séquences supposées réelles mais bel et
bien fabriquées par les auteurs eux mêmes. La supercherie de ces scènes
non seulement donnèrent au film son titre mais lui valut sa sinistre
réputation. Survie, culte du phallus, danses et rites sexuelles ou
érotiques, massacres et cannibalisme sont ainsi au programme.
Le
film s'ouvre avec les traditionnels massacres d'animaux récurrents aux
mondo movies. On a ici droit à la longue et pénible mise à mort d'un
éléphant que les indigènes mettent en pièce pour ne garder que sa
carcasse, à des oies égorgées et un chien bastonné dont on dévore les
parties génitales. Les Castiglioni afin de justifier
ces scènes mettent en parallèle nos inutiles et intolérables séances de
vivisection, l'euthanasie de chiens errants particulièrement saisissante
qui forment d'immenses charniers canins pourrissants.
Les rites et
danses érotiques puis le culte du phallus permettent ensuite aux frères
de filmer avec ce voyeurisme coutumier la sexualité des indigènes avec
leurs désormais gros plans en ralenti de sexes masculins. Ils comparent
ce culte de la sexualité et ces rites érotiques à nos bars glauques et
autres bordels où de vieux pervers se masturbent devant une hôtesse qui
s'enfonce un godemiché. La sexualité occidentale est sale, elle nourrit
surtout les vices sous toutes leurs formes. Chez ces indigènes malgré sa
violence ou sa barbarie, elle n'est qu'une représentation de l'amour.
On apprend aux enfants à se masturber, les sorciers fertilisent les
vierges lors de pratiques magiques. Pour les auteurs voilà qui est plus
sain que ces adolescentes qui se prostituent et doivent se donner à des
vieux pervers. Les Castiglioni profitent de l'occasion pour insérer
quelques brèves séquences de sexe hardcore.
Sont aussi au menu, les
décorations charnelles et scarifications où des femmes se déchirent et
se mutilent les chairs à coups de lames. Des chirurgiens indigènes
découpent des tranches de seins et d'estomac et prélèvent de longs
morceaux de tissus avant de tout recoudre. Ils refont un nez à coups de
marteau alors que dans nos sociétés occidentales les femmes ont recours à
la chirurgie esthétique sans garantie de réussite. Les Castiglioni se font alors un plaisir à montrer cicatrices et opérations ratées.
On
saute ensuite au Vietnam sur des charniers d'enfants dont on tranche
les membres alors qu'en Afrique une femme allaite son bébé tant bien que
mal. Ses seins sont si secs qu'ils ne laissent s'écouler que quelques
gouttes de lait qui se perdent sur son abdomen qu'un indigène vient
lécher. Au consumérisme qui engendre le gâchis s'oppose ici la
précarité, rien ne peut être perdu. Ces deux séquences permettent aux Castiglioni
d' enchainer sur ce qui constitue les deux scènes clou du film. Si dans
nos sociétés, les atrocités commises durant les guerres ne sont pour
eux jamais justifiées, la barbarie de ces peuples primitifs l'est tout
le temps. C'est sur cette base que les auteurs ont fabriqué de toutes
pièces les deux célèbres séquences dites snuff. Un indigène poursuivi
par une tribu ennemie dont il a incendié le village est roué de coups,
cloué au sol par une lance et castré alors que l'urine s'écoule de son
pénis. On lui tranche ensuite les mains à la hache et il sera cuit à
petit feu. Afin de donner plus de véracité à l'ensemble, la caméra se
fait nerveuse, s'agite en tout sens, devient frénétique.
La deuxième
est la longue et nauséeuse préparation funéraire d'un corps putrescent
pour son voyage vers l'au delà. Le cadavre est minutieusement dépecé, la
putrescence retirée ainsi que les détritus amoncelés dans tous le
orifices naturels. On nettoie le nombril avec les doigts tandis que les
mouches et la vermine s'échappent du cadavre. Les frères montrent avec
une certaine complaisance macabre voire morbide les détails les plus
cliniques afin d'amplifier le dégoût du spectateur.
Le réalisme de
ces scènes est assez stupéfiant et risque de provoquer un profond
malaise chez le spectateur. On pense par instant au final paroxysmique
de Cannibal Holocaust. Ruggero Deodato se serait d'ailleurs inspiré de ces mondos pour écrire son film.
Comme dans tous leurs mondos, on sent les Castiglioni,
deux férus d'éthnologie rappelons le, passionnés par leur travail, leur
total engagement. Ils évitent le plus possible les commentaires
racistes et hypocrites récurrents chez les mondos de leurs confrères, Climati / Morra et Jacopetti même s'ils laissent place par moment eux aussi à une certaine hypocrisie.
Quelques soient leurs intentions, Addio ultimo uomo
demeure du pur cinéma d'exploitation. Chaque réalisateur voulait alors à
chaque nouveau film dépasser les limites de ses confrères. En cela, Addio ultimo uomo
est un monument du Mondo éthnologique italien des années 70 qui ne
reculait devant aucune limites si toutefois il existait des limites. Addio ultimo uomo
demeure tout de même derrière sa façade humaniste et moralisante un
spectacle hypocrite et éminemment malsain à visionner avec pas mal de
recul et surtout un certain regard critique