Africa dolce e selvaggia
Autres titres: Shocking Africa / The last savage 2
Real: Angelo et Alfredo Castiglioni
Année: 1982
Origine: Italie
Genre: Mondo
Durée: 92mn
Acteurs: Pour l'ultime fois, les frères Castiglioni nous invite à un voyage au coeur de l'Afrique noire pour nous faire découvrir les rites et coutûmes les plus incroyables des peuplades dites primitives. Et parfois incroyable rime avec insupportable d'autant plus que la trame conductrice du film est cette fois la souffrance humaine...
Résumé:
Africa dolce e selvaggia est le dernier des cinq mondo africains que tournèrent les frères Castiglioni . Comme pour les volets précédents, ils nous proposent de nous faire découvrir les rites et coûtumes les plus primitives de tribus africaines sous couvert ethnologique.
Il était difficile de faire plus fort que Addio ultimo uomo qui repoussait les limites du supportable dans le sadisme et le réalisme de certaines scènes dont celle de la castration de l'indigène ou les nombreuses séquences de barbarie physique. A comparer de cet avant dernier opus, Africa dolce e selvaggia semblera donc plutôt sage d'autant plus qu'il n'est pas le plus violent de la série.
Le fil conducteur de cet ultime chapitre de la longue saga africaine commencée en 1969 avec Africa segreta est cette fois la souffrance humaine aussi bien physique que morale. "La vie est souffrance donc souffrir et connaître la souffrance dés l'enfance c'est apprendre la vie." C'est sur cette phrase philosophique que s'appuie le film qui nous entraîne une fois de plus dans l'Afrique sauvage au coeur de ses croyances et incroyables rites et coutumes ancestrales.
Mondo oblige, Africa dolce e selvaggia comme les précédents films des deux frères accumule les séquences de massacres d'animaux: volailles décapitées ou écrasées vivantes à la main, porcelet donné vivant en pâture à un crocodile, chameau décapité, dépecé et éventré, émasculation à vif, chèvres sacrifiées, scorpion avalé vivant ... Ceci nous amène doucement à la première séquence fake du film, celle où un serpent pénètre avec force et détails l'intérieur du vagin d'une indigène afin de la fertiliser. Il est clair que si la scène est des plus réelles, l'indigène est une actrice.
La deuxième séquence fake est celle où un malheureux autochtone qui lors d'une chasse aux serpents parmi les plus mortels au monde se fait mordre au cou par l'un d'entre eux. La caméra filme alors son atroce agonie, l'image tremble, devient convulsive pour mieux simuler la folie ambiante, on court, on crie, on filme sous tous les angles tandis que des images d'archives bien réelles cette fois sont insérées afin de donner plus de véracité à la séquence.
On souffre également pour être beau, la souffrance est le prix à parfois payer pour plaire et séduire. Scarifications faciales et corporelles à la lame de rasoir pratiquées ici sur des bébés et des adolescents hurlant de douleur, taille des dents au mini burin ou au ciseau à pierre sont donc au programme.
La souffrance c'est aussi savoir accepter la mort pour pouvoir ensuite mieux renaître. Les peuplades que visitent les frères acceptent le fouet et autres punitions extrêmes jusqu'aux terribles scènes qui donnèrent au film sa triste réputation, les insupportables circoncisions et excisions pratiquées sur de trés jeunes enfants dont Africa ama nous avait déjà donné un avant-goût en 71 et qui couvrent une bonne partie du métrage.
Cette pratique est la toute dernière étape de la souffrance avant la renaissance, celle qui permet d'être enfin soi même. Le prépuce est l'ultime organe féminin chez l'homme et le clitoris l'ultime organe masculin chez la femme. Ces organes doivent être retirés pour que l'être assume pleinement son genre. Le prépuce cloué sur une planche la peau est tranchée d'un coup sec au ciseau à pierre tandis que le clitoris des petites filles ligotées sont tranchés à la lame de rasoir. Avec un acharnement morbide, la caméra des frères Castiglioni insiste sur les prépuces tranchés, les glands ensanglantés. Ils filment les mutilations en rafales, les répètent sous tous les angles possibles et imaginables comme un cauchemar sans fin. Gageons que beaucoup de spectateurs auront du mal à visionner ces images.
Gratuit? Complaisant? Ignoble? Chacun jugera et appréciera selon ses propres critères. Il faut cependant garder à l'esprit que les Castiglioni contrairement à d'autres de leurs confrères ont toujours su donner à leurs mondo un coté documentaire, ici encore plus que dans leurs essais passés.
Les massacres d'animaux tout horribles soient ils ne sont guère plus atroces que nos abattoirs. L'animal est ici tué pour la survie d'un peuple ou par la loi de la nature. En dévorant vivant des scorpions et en s'injectant leur venin, les hommes s'immunisent pour leur propre survie.
Le vrai but du film est de nous montrer ce qu'est réellement la souffrance pour ces peuples. C'est une étude ethnologique des rites d'initiation tribaux où cette souffrance est la transition entre l'enfance et l'âge adulte. C'est la souffrance physique, la souffrance de la mort. La mort est le passage d'un état à l'autre. On devient adulte en l'affrontant et en survivant à celle ci.
Les actes qui à nos yeux d'occidentaux nous paraissent les plus barbares comme les terribles scarifications ne sont pour ces peuples que la plus simple expression de la beauté corporelle et de la séduction.
Les Castiglioni tentent de nous montrer l'impact religieux et social de ces coutumes. Il faut y voir un aspect éducatif même pour les circoncisions qui sont encore pratiquées dans de nombreuses religions même occidentales mais qu'on préfère taire dans nos sociétés car elle est fortement tabou. Les Castiglioni nous montrent l'acte sans détour dans ce qu'il a de plus précaire: instruments utilisés, manque d'hygiène, cris et pleurs de terreur... Si la circoncision est permise, l'excision est quant à elle pratiquement interdite partout mais elle existe encore. Les Castiglioni dénoncent cela dans ce que cet acte a de plus cruel puisque ces fillettes resteront mutilées à vie dans leur chair.
Africa dolce e selvaggia reste pourtant comme tout mon do du pur cinéma d'exploitation avec tout ce que cela comporte en voyeurisme, complaisance et hypocrisie notamment ces séquences fake, et l'insistance à filmer au ralenti les parties intimes des hommes entrain de danser nus, marque de fabrique des films des deux frères. “Ces hommes sont heureux, ils n'ont besoin de rien pas même de vêtements nous dit la voix du narrateur le tout sur fond de musique sirupeuse.
Aprés que les frères aient annoncé qu'ils avaient parcouru plus de 20000 kilomètres pour nous faire découvrir cette Afrique sauvage de façon brute et impartiale sous l'oeil implacable de la caméra, le film se terminera par une phrase de Leopold Senghor souvent paraphrasé par les Castiglioni: "Si la civilisation était ignorante d'une seule des coutumes de ces peuples, l'humanité serait incomplète et ne pourrait vivre en paix".
Si on enlève les douloureuses scènes de circoncisions, cet ultime mondo n'est pas le plus passionnant qu'ait réalisé les Castiglioni encore moins le plus brutal. Mais s'il peut paraître ennuyeux par moment il reste dans la lignée des précédents et clot dignement cette saga africaine.