Un brivido di piacere
Autres titres: A thrill of pleasure
Réal: Elo Pannaccio
Année: 1973
Origine: Italie
Genre: Drame
Durée: 79mn
Acteurs: Gianni Dei, Tony Fusaro, Orchidea de Santis, Rosita Torosh, Melù Valente, Sandra Cardinali, Federico Boido, Nicolò Galfano, Remo Capitani, Tommaso Sannini, Giovanni Petti, Aldo Pantanella, Giusy Caro, Giancarlo Mucci, Nino Musco...
Résumé: Renzo et Lucia viennent tout juste de se marier. Ils passent leur lune de miel dans une somptueuse villa que le propriétaire leur prête. Trois autres mariages voués à l'échec interfèrent avec le leur...
La filmographie d'Angelo Pannaccio aka Elo Pannaccio, un des pères de la pornographie italienne de la première heure, est aussi mystérieuse que l'homme est énigmatique puisque composée de films montés, remontés et de nouveau remontés dont les titres changent au gré des producteurs et distributeurs tant et si bien qu'il est parfois bien difficile de les identifier comme il n'est pas forcément évident de savoir qui les a réellement réalisé, produit ou financé. Avant de se spécialiser dans le hardcore Pannaccio à mis en scène quelques pellicules d'exploitation plus "grand public" très facilement oubliables car bien
médiocres (Il sesso della strega, La rançon du tueur) à l'exception peut-être de Bacchanales infernales, son sous Exorciste et l'intéressant et mélancolique drame féministe, Comincera tutto un mattino io donna tu donna. Parmi celles ci Un brivido di piacere, un drame social qu'il ne faut surtout pas confondre avec le X éponyme que Pannaccio tournera quelques années plus tard.
Avant toute chose il faut revenir sur la genèse du film. Il faut déjà savoir que Un brivido di piacere ne fut pas tourné en 1978 comme on le voit un peu partout y compris sur Imdb qui lui le confond carrément avec son X. Il fut réalisé en 1973 (les tenues et le look des acteurs
en témoignent) mais il ne trouva aucun distributeur. Il ne fut distribué que cinq ans plus tard, soit 1978, avant de disparaitre quasi immédiatement des circuits... et de la circulation. Difficile de retracer le parcours administratif/juridique du film dont le titre devait au départ être Amore puisqu'il n'en existe aucune trace comme il est difficile d'avoir des informations sur le tournage puisque les principaux acteurs notamment feu Gianni Dei et Orchidea De Santis ne se souviennent pas de l'avoir tourné ni même d'y avoir participé de près ou de loin. Les quelques détails qu'on connait aujourd'hui sur cette bande improbable proviennent du directeur de la photographie Maurizio Centini même si au final il n'est pas crédité au
générique, dû une fois encore aux magouilles de Pannaccio qui le contacta mais n'eut finalement pas besoin de ses services. Il fut cependant payé sans avoir jamais vraiment travaillé dessus. Financé par la Minerva italian film, la société de Salvatore Sicurezza, ami et frère de l'actrice Susan Levi(Assunta Sicurrezza), la première épouse de Pannaccio, Un brivido di piacere fut tourné au cours de l'été 73 dans la station balnéaire de Lido Di Piedi dans la propre villa de Pannaccio. Une affaire de famille!
Mais de quoi parle donc ce mystérieux film? En fait il n'y a pas vraiment d'histoire ni d'intrigue. C'est un assemblage de quatre épisodes qui tous tournent autour du thème du
mariage. mais n'ont aucun lien entre eux. Durant 80 minutes on va et vient entre ces sketches. Le premier, le plus important s'intéresse à Renzo et Lucia qui viennent tout juste de se marier. Ils s'aiment et passent leur lune de miel dans une somptueuse villa dont le propriétaire est aux petits soins pour eux. Lucia et Renzo perdent leur virginité le soir de leurs noces même si au départ Renzo jouait au mâle viril qui avait déjà eu des relations. Malgré leur amour Lucia se détache de son jeune époux et finit dans les bras du propriétaire. Il y a également Stephen et Elisabeth. Elisabeth est pour l'amour en groupe et offre son corps à des baigneurs sortis de l'onde tandis que Stephen venu accompagné de
sa mère est en pleine tourmente sexuelle. On fait également connaissance avec Severine, une jeune femme insatisfaite, déçue par sa vie conjugale, qui va trouver du plaisir dans une maison de passe tenue par une femme stricte qui ne la laisse pas indifférente. La quatrième histoire est celle d'une femme qui cherche un appartement. Elle en trouve finalement un qui appartient à un homme qui vient tout juste d'enterrer son épouse. A peine installée elle lui fait l'amour.
Avec Un brivido di piacere Pannaccio avait en tête de faire un virulent plaidoyer contre le mariage. Le résultat outre d'être raté est aussi inoffensif qu'un crocodile édenté. Ces quatre
récits de mariage sont trop simplets pour qu'il puisse en ressortir une quelconque réflexion ou discussion. Involontairement ridicules, peu aidés par des dialogues le plus souvent stupides, mollement mis en scène si de mise en scène on peut parler ils ne s'élèvent jamais plus haut qu'une banale petite bande érotique de troisième zone, et encore! L'érotisme y est tellement discret que le film est assez frustrant. Une petite culotte par ci, une poitrine furtivement dévoilée par là, quelques légers baisers, quelques caresses, et on a fait le tour de la question. La suggestion est ici de mise. On a connu des mariages et ébats extra-conjugaux bien plus chauds. Pannaccio se veut pourtant sérieux d'où la présence
d'une voix off solennelle qui par moment donne au film un coté très mondo et fustige le mariage dans une société où l'homme a oublié le sens des valeurs, des mots amour, fidélité, confiance, au profit d'un comportement égocentrique, où le partage a fait place à la solitude, l'errance, à l'éternelle insatisfaction, où sexualité ne signifie plus plaisir mutuel. Le discours se veut réfléchi, philosophique, pompeux mais très mal illustré il tombe complètement à l'eau. Reste donc pour passer le temps quelques scènes délirantes (le mariage au milieu des moutons en noeuds pap' bleus, les hommes en slip de bain émergeant de la mer comme sortis de nulle part puis disparaissant à nouveau, le mariage
lesbien qui précède le cauchemar de Lucia...), un très curieux clin d'oeil au Dernier tango à Paris à travers le quatrième récit et une séquence onirique étonnante, celle de l'homme à la pelle debout au milieu d'une lande déserte où se couchent les mariés en habits de noces pour y être enterrés vivants, que n'aurait pas renié Alberto Cavallone.
La présence de la toujours pulpeuse Orchidea De Santis (Elisabeth), celle de la toujours ravissante Rosita Torosh (Severine) tendance lesbienne frustrée, de Gianni Dei (Stephen) et de Federico Boido / Rick Boyd est bien entendu un atout. Citons aussi Tony Fusaro qui dans les années 80 fera carrière dans le doublage et obtiendra une certaine notoriété comme
commentateur sportif à la télévision.
Comme pour Comincera tutto un mattino, io donna tu donna cinq ans plus tard les intentions de Pannaccio étaient bonnes mais maladroit, incapable de mener à bien son idée faute de moyens et de professionnalisme il s'effondre et accouche d'un monument de vide certes par instant bizarre, curieux, déstabilisant mais désespérément creux. Reste un petit film discrètement érotique aux teintes par instant oniriques, une curiosité pour collectionneurs assidus de bandes oubliées ou perdues qui seront heureux de la posséder.