Paura nel buio
Autres titres: Le voyageur de la peur / Hitcher in the dark / Hitcher 2
Real: Umberto Lenzi
Année: 1989
Origine: Italie
Genre: Thriller
Durée: 95mn
Acteurs: Joe Balogh, Josie Bisset, Jason Saucier, Robin Fox, Thomas Mitchell, Fay W. Edwards, Tom Schultheis, Mel Davis, Sandra Parker...
Résumé: Un jeune psychopathe, Mark Glazer, sillonne les routes côtières de Virginia Beach en quête d'auto stoppeuses qu'il fait monter à bord de son camping-car pour les torturer puis les tuer. Un jour, il fait la connaissance de Daniela, une jeune fille qui lui rappelle sa mère. Il la prend en stop, la drogue et la retient prisonnière. Son petit ami se met à leur poursuite en espérant la sauver. Il se fait capturer lui aussi. Peu à peu Mark perd la raison...
Alors que le cinéma de genre transalpin n'en finissait plus d'agoniser en cette fin de décennie, certains réalisateurs tentaient péniblement de raviver la flamme, de faire perdurer un esprit depuis bien longtemps atrocement affaibli, pour le meilleur et trop souvent le pire. Umberto Lenzi fait partie de ces cinéastes qui continuèrent à réaliser de petits films le plus souvent d'horreur aussi anodins qu'inoffensifs pour la plupart tournés aux USA. S'il s'intéressa quelques temps aux films de guerre (Warzone, 5 salopards en Amazonie...) après ce qui reste son dernier véritable bon film, le très bon et fort divertissant Irommaster,
Lenzi entama une série de longs métrages horrifiques qui débuta en 1988 avec cette jolie surprise que fut Ghosthouse. Suivit l'année suivante Paura nel buio qui s'inspire ouvertement du Hitcher de Robert Harmon tant et si bien qu'il fut retitré Hitcher 2 pour sa sortie dans certains pays. Affublé d'une assez mauvaise réputation, Paura bel buio est contre attente une très agréable surprise, un joli chant du cygne qui prouve que le cinéma italien avait encore quelques cartouches à tirer et quelques victimes à occire.
Mark Glazer, le fils d'un directeur d'une chaine d'hôtels de luxe sillonne les plages de Virginia Beach à bord du camping car paternel. Les yeux dissimulés derrière une paire de ray-ban
aluminiumisée, il repère les jolies auto-stoppeuses qu'il fait monter pour ensuite les torturer, les tuer et prendre en photo leur cadavre. Dans un bar, il fait la connaissance de Daniela en froid avec son petit-ami Kevin. Lorsqu'il la retrouve entrain de faire de l'auto stop, il lui propose son aide. Il la drogue à son insu. Le jeune fille s'évanouit. A son réveil elle est menottée au lit, prisonnière de Mark qui va en faire le jouet de ses fantasmes sadiques. Obsédé par sa mère qui l'a abandonné enfant car incapable de supporter l'indifférence de son époux, Mark, misogyne pour qui toutes les femmes sont de repoussantes putains, voit en Daniela l'image de cette mère qui lui a tant manqué. Il la coiffe et l'habille comme elle, la
vénère et la déteste, incapable d'assumer une quelconque relation intime avec elle puisqu'il est de surcroit impuissant. Daniela malgré plusieurs tentatives ne parvient pas à lui échapper. Alors qu'elle se pense condamnée, son petit ami retrouve sa trace mais il est lui aussi fait prisonnier. Mark perd peu peu la raison, la situation lui échappe. Il finit par tuer Kevin après l'avoir torturé avant de se rendre compte que Daniela a succombé à une trop forte dose de narcotique. Il cache soigneusement les cadavres et rentre chez son père. Mark n'a plus rien à craindre, il peut repartir sur les routes en quête de nouvelles proies. C'était sans compter un fatal coup du sort, inattendu.
Le scénario ainsi résumé est tout à fait alléchant et en d'autres temps aurait pu donner un film particulièrement malsain, un rape and revenge sanglant truffé de scènes de sadisme gratuite arrosées d'une bonne dose d'érotisme déviant. Nous sommes malheureusement en 1989, le cinéma italien s'est incroyablement assagi et ne peut plus se permettre les outrances passées. Malgré cette relative sagesse, Hitcher in the dark s'avère vite une agréable si ce n'est étonnante surprise. Surprenant déjà est la cohérence dont fait preuve Lenzi, professionnel et méticuleux, quant au scénario lui même. Si quelques invraisemblances ou énormités s'y sont glissées, Hitcher in the dark bénéficie d'une histoire
tout à fait crédible, la plupart du temps logique, chaque morceau du puzzle trouvant au final sa place, fait suffisamment rare dans un cinéma de genre alors moribond qui puise dans le ridicule et l'absurdité son inspiration pour être ici signalé et applaudi.
Correctement mis en scène, ce petit thriller de fin de parcours parvient à maintenir un suspens parfois haletant jusqu'aux ultimes minutes au cours desquelles Lenzi aura recours à un rebondissement totalement inattendu même si peu crédible et guère original que chacun appréciera comme il l'entend, les plus sombres ayant très certainement préféré soit une fin ouverte soit voir le Mal triompher. Ce sont malheureusement les producteurs qui
imposèrent au cinéaste cette conclusion à laquelle il ne put se soustraire.
Outre sa cohérence, Hitcher in the dark connu en France sous le titre Le voyageur de la peur brille également par son sadisme, sa morbidité somme toute relative mais bel et bien présente. Lenzi se laisse en effet aller à quelques excès même si, époque oblige, il se modère. On pourra certes trouver un peu trop répétitifs les sévices que subit la malheureuse Daniela qui passe son temps à être giflée, menottée, droguée et photographiée nue durant son sommeil mais filmés avec une certaine énergie ils aident à entretenir une certaine atmosphère aidé par un accompagnement musical judicieux souvent angoissant et un jeu
d'acteur tout à fait convaincant. Les supplices subis par le petit ami de Daniela devraient satisfaire les amateurs d'effets sanglants, efficaces et tout à fait réussis (l'inscription au couteau du mot Pig sur son ventre, clin d'oeil au premier thriller du réalisateur Un posto ideale per uccidere mais aussi au massacre de la famille Manson) sans pour autant jamais sombrer dans le gore. Lenzi n'a apparemment rien perdu de son imagination et la transmet généreusement à son jeune psychopathe rarement à cours d'idée pour se débarrasser des cadavres, le facteur chance semblant de plus lui sourire. Les plus pervers retiendront quant à eux la scène où Mark après avoir arraché la petite culotte de Daniela lui passe la pointe de
son couteau entre les jambes sous l'oeil terrifié de son ami. On reste dans le suggéré mais l'idée est là et nous ramène au temps où le cinéma de genre se permettait toutes les audaces.
Entièrement tourné aux USA, le long des sublimes paysages côtiers de Virginia Beach sublimés par une magnifique photographie, Le voyageur de la peur bénéficie d'une interprétation des plus correcte, un facteur ici important puisque tout le film repose sur le jeu de ses deux principaux comédiens. Ils entretiennent une dynamique tout à fait acceptable qui va crescendo jusqu'à l'explosion de violence finale.
Habitué aux rôles de psychopathes et jeune homme au tempérament fragile (Visions, Monstrosity, Moon stalker), le fort séduisant Joe Balogh, le visage angélique mais fermé, fait une prestation tout à fait honorable et crédible dans la peau de ce jeune meurtrier tourmenté par un profond traumatisme infantile même si on l'aurait aimé un peu plus virulent. Satisfait de de sa performance, Lenzi fera de nouveau appel à lui deux ans plus tard pour l'intéressant Black demons. Quant à Josie Bissett, future héroïne de la série Melrose place dont c'était le tout premier rôle au cinéma, à la fois forte et fragile, outre son jeu, elle apporte une petite touche d'érotisme même si Lenzi joue à fond la carte de la pudeur, quelque peu
contraint puisque Josie, très pudique, eut beaucoup de mal à jouer dévêtue. L'ex-modèle et mannequin Jason Saucier, le bellâtre blond qui joue le petit ami de Josie Bissett, eut de son coté une courte carrière en Italie grâce notamment à Joe D'Amato (Top model, La iena dans lesquels on pourra admirer son corps dans le plus simple appareil et quelques acrobaties sexuelles, Contamination 7) et Bruno Mattei. Il poursuivra par la suite une jolie carrière à la télévision en apparaissant dans moult séries à succès.
Si Hitcher in the dark n'évite pas certaines séquences inutiles et surtout ridicules, stéréotypes d'une Amérique légère, (le concours de Miss T-shirt mouillé avec gros plans sur
les poitrines et fessiers en string de ses concurrentes, les bikers gay très années 90, Les séances de danse idiotes sur un air électro-disco atroce comme seule cette fin de décennie pouvait en imaginer...), si comme bon nombre de films de cette époque, il ressemble à ses téléfilms, ses thrillers toujours bon enfant qui firent les beaux jours des "Hollywood nights" et envahissent les chaines du câble, si les nostalgiques du cinéma morbide et malsain d'antan lui reprocheront sa gentillesse, si l'aspect psychologique du psychopathe reste trop superficiel et peu travaillé, le film de Lenzi n'en demeure pas moins un thriller horrifique plus que honnête, un film efficace, rondement mené, qui atteint son objectif, distraire tout en
distillant de doux frissons aux plus sensibles. Pour les moins indulgents, il faut tout simplement le remettre dans son contexte et surtout son époque et bien évidemment le visionner en version originale, le doublage français outre le fait d'être atroce a quelque peu modifié le sens des dialogues. Pourquoi donc bouder son plaisir?
Et dans le pire des cas restera le charme froid et poupin d'un Joe Balogh énigmatique, mi-ange mi-démon, qui devrait en séduire plus d'un... prêt à tous les sévices pour quelques étreintes passionnées contre son jeune torse parfaitement dessiné. Mais ça c'est une autre histoire comme le chantait à la même époque Gérard Blanc!
Pour information il est amusant de signaler que le film projeté sur l'écran du drive-in n'est autre que Grunt! de Andy Luotto. L'amateur l'aura sans aucun doute reconnu.