Le foto proibite di una signora per bene
Autres titres: Photos interdites d'une bourgeoise / Les plaisirs de la nuit / Plaisirs des sens / Forbidden photos of a lady above suspicion / Fotos prohibidas de una dama
Real: Luciano Ercoli
Année: 1970
Origine: Italie
Genre: Giallo
Durée: 96mn
Acteurs: Dagmar Lassander, Pier Paolo Capponi, Simon Andreu, Nieves Navarro, Salvador Huguet, Osvaldo Genazzani...
Résumé: Minou, une jeune femme fragile, est agressée par une nuit par un inconnu qui lui affirme que son mari, Peter, est un assassin, responsable de la mort de son associé, un certain Jean Dubois. Peu après, l’inconnu revient harceler Minou et lui fait écouter une bande magnétique qui confirmerait ses dires. Il lui propose alors d’acheter son silence si elle accepte de coucher avec lui. Minou accepte mais elle ignore que l'inconnu a pris des photos compromettantes de leurs ébat. Dés lors il exige d'elle qu'elle se soumette à ses moindres désirs. C'est alors qu'elle reconnait l'homme sur des photos pornos qu'a faite son amie Dominique. Celle ci lui avoue ignorer qui il est. Déconcertée, Minou avoue tout à son mari puis à la police. Malheureusement les photos semblent avoir disparu et l'appartement où elle est censée se rendre pour rencontrer son maitre-chanteur est à l'abandon. Minou sombre lentement dans la folie. La jeune femme est elle réellement folle ou simplement victime d'un sinistre complot?
Premier des trois gialli que signera Luciano Ercoli entre 1970 et 1972, Le foto proibite di una signora per bene / Photos interdites d'une bourgeoise bénéficie d'une solide réputation sans nul doute due à son titre fort évocateur qui renvoie à biens des thèmes alors en vogue dans ce type de cinéma à savoir le sadomasochisme et autres perversions sexuelles, clé de bien des énigmes. La présence de Dagmar Lassander n'est peut être pas non plus étrangère à sa renommée. Lancée en Italie l'année précédente grâce au phénoménal
Femina Ridens de Piero Schivazappa, Dagmar bénéficiait alors d'une aura suffisamment sulfureuse pour donner au film cette petite connotation perverse si appréciée. Les fameuses photos du titre sont en fait toute une série de clichés pornographiques qu'un photographe a fait de Dominique, la meilleure amie de l'héroïne, Minou. Sur une des photos de Dominique, Minou reconnait l'homme qui une nuit a tenté de la violer avant de lui avouer que son mari est un assassin. Dés cet instant, la vie de la fragile Minou qui a trop abusé d'alcool et de tranquillisants va se transformer en un véritable cauchemar. Si la fameuse photo va bien
entendu disparaitre et que ses ébats amoureux vont à son tour être immortalisés sur papier glacé, tout semble confirmer que la santé mentale de la malheureuse se détériore au fil des jours. Est elle en train de sombrer dans la folie ou est elle tout simplement victime d'un terrible complot?
Plus que des gialli de Dario Argento, ce sont des thrillers psychologiques de Umberto Lenzi que Le foto proibite di una signora per bene se rapproche le plus. On y retrouve en effet cette atmosphère de machinations diaboliques et de folie latente sur fond d'érotisme discret dans
laquelle se retrouve plongée une jeune femme fragile, victime d'un complot machiavélique dont l'argent est la motivation première. Malheureusement n'est pas Lenzi qui veut et malgré la présence du grand Ernesto Gastaldi à l'écriture du scénario, l'intrigue prend vite l'eau et s'avère rapidement ennuyeuse d'autant plus que la résolution finale est claire comme de l'eau de roche et ne surprendra personne. Ercoli balayant tout suspens et évitant soigneusement tout rebondissement et autres retournements de situation, on aura vite compris les tenants et les aboutissants de l'histoire d'une simplicité étonnante et très peu crédible.
Certes les questions habituelles s'amoncellent au fil du métrage quant à la santé psychologique de la pauvre Minou forcée à se donner corps et âme à ce maitre-chanteur violeur, sur son entourage et plus précisément la véritable personnalité de son mari si compréhensif et sa si dévouée amie Dominique, une bourgeoise débauchée. Mais tout est si limpide que les réponses sont aussi évidentes que le nez au milieu du visage. On espère s'être trompé, on prie pour que déboule au moment le plus inattendu un quelconque twist qui orienterait le film dans un tout autre sens. En vain. Quant à l'érotisme promis par un titre fort
bien inspiré, il reste malheureusement très discret, Ercoli hésitant même à déshabiller ses héroïnes dont il ne dévoile que subrepticement un demi sein, un soutien-gorge ou leur petite culotte, une initiative surprenante puisque quelque peu en contradiction avec le sujet du film.
Le novice se laissera donc berné mais les fervents inconditionnels du genre n'auront plus qu'à admirer les sublimes décors parfaitement bien mis en valeur par une tout aussi sublime photographie. C'est là que réside en fait tout l'intérêt de ce sexy thriller qui déploie tout une esthétique visuelle qui séduira les amoureux des années 70. Entre Glamour et
design Ercoli soigne ses élégants décors comme il soigne les splendides tenues de ses deux actrices principales, la douce Dagmar Lassander et l'altière Nieves Navarro, épouse du réalisateur, dont les robes et manteaux en cuir et vinyle noir sont à l'image de ses frasques sexuelles privées.
On appréciera également l'adresse du réalisateur à jouer avec les couleurs aux tonalités chaudes, à jongler avec les ombres et les lumières afin de donner au film une teinte parfois fantastique des plus plaisantes, utilise le mobilier et les ornements tels les miroirs, masques, rideaux de théâtre et autres puissants symboles, base de ses futures oeuvres
puisqu'on les retrouvera dans ses gialli suivants, La morte cammina con i tacchi alti / Nuits d'amour et d'épouvante et La morte accarezza a mezzanotte / La mort caresse à minuit.
Souligné par la lancinante partition musicale d'un Ennio Morricone inspiré et les envolées lyriques de Edda Dell'Orso, ces Photos interdites d'une bourgeoise feront donc illusion. Elles finissent par se laisser visionner sans trop d'ennui pour le peu qu'on ne soit guère exigeant d'autant plus que le duo Lassander-Navarro fonctionne parfaitement malgré une Dagmar bien peu futée qui était alors au sommet de sa beauté mais malheureusement pas
encore à l'apogée de son talent comme ce fut déjà le cas l'année précédente pour Femina Ridens. On appréciera également beaucoup les apparitions de Simon Andreu, tout à fait inquiétantes, la lame de son couteau luisant dans la nuit à chacune de ses agressions contre Minou. On n'en dira pas autant de Pier Paolo Capponi qu'on a connu un peu plus investi.
Malgré ses défauts, sa simplicité et la lenteur de sa mise en scène, Photos interdites d'une bourgeoise n'est pas un mauvais thriller, il est tout simplement divertissant, un sympathique passe-temps à l'esthétique certaine qui ne risque pas de donner la migraine faute à une intrigue tortueuse. A réserver à un public pas trop exigeant et autres collectionneurs afin de pouvoir l'apprécier à sa juste valeur.