Adolescence pervertie
Autres titres: Adolescenza perversa
Real: José Bénazaraf
Année: 1974
Origine: France / Italie
Genre: Erotique
Durée: 88mn
Acteurs: Femi Benussi, Hervé Hallf, Véronique Col, Giacomo Furia, Malisa Longo, Nino Musco, Pietro Torrisi...
Résumé: Suites à ses convictions politiques, Mirella, jeune professeur de mathématiques, doit quitter Rome pour aller enseigner à l'université de Pérouse. Dés son arrivée, elle n'est pas insensible au charme d'un de ses élèves, Alain, un militant politique qui n'a que faire des cours. Littéralement obsédé par lui, elle organise des soirées chez elle afin de pouvoir l'approcher mais Alain n'a aucune envie de sexe encore moins d'elle qui personnifie ce qu'il déteste le plus, la bourgeoisie. Lorsqu'elle apprend qu'une de ses collègues a couché avec, elle perd tout contrôle...
En 1973 le réalisateur français José Bénazaraf s'envola pour l'Italie afin d'y réaliser deux films produits par la Zafes, Voir Malte et mourir / Une garce en chaleur et Adolescenza perversa, le plus connu des deux du moins en Italie puisque Femi Benussi et Malisa Longo en étaient les deux principales protagonistes. Plus qu'un simple film érotique, Adolescence pervertie appartient avant tout au riche filon des films contestataires juvéniles très en vogue au début de la décennie de l'autre coté des Alpes qui aimaient alterner sexploitation et contestation adolescente en mélangeant plus ou moins savamment de longues scènes érotiques souvent osées au discours socio-politique.
L'histoire est simple. Une jeune et nouvelle professeur de mathématiques, Mirella, arrive de Rome pour enseigner à l'université de Pérouse. Elle fait la connaissance de Alain, un de ses élèves, beaucoup plus intéressé par la politique que par les études. Considéré comme marginal par les filles, le sexe n'est pas une de ses priorités, trop occupé à défendre ses idées contestataires. Mirella est très vite attirée, obsédée par cet étudiant qu'elle suit, espionne lorsqu'elle n'en rêve pas. Elle incarne malheureusement aux yeux d'Alain cette
bourgeoisie qu'il hait plus que tout et contre laquelle il se bat férocement. Devenu l'objet de ses fantasmes, elle organise des soirées étudiantes chez elle afin d'attirer l'attention du garçon mais ses tentatives restent vaines, il la dédaigne. Lorsqu'elle apprend que Elisa, une de ses collègues professeur aux tendances lesbiennes, a couché avec elle enrage. Mirella est alors prête à subir toutes les humiliations pour pouvoir coucher avec lui. Il finira par s'offrir à elle avant de l'humilier en la jetant en pâture à trois de ses copains.
Aux différents thèmes politiques, ce sont cette fois les scènes de sexe qui prédominent, Adolescence pervertie étant souvent considéré comme le premier film à caractères pornographiques du célèbre metteur en scène habitué jusque là aux productions érotiques épicées. Bien déçus seront donc ceux qui auraient espéré du film une quelconque dimension politique, une aura sociale sujette à débat réduite ici à son plus strict minimum. Les étudiants évoquent la lutte prolétarienne, la chute de Salvatore Allende, le capitalisme,
assistent à un congrès de la CGT à Paris, on brandit quelques photos ça et là mais c'est malheureusement le ridicule qui l'emporte faute non pas à ces esquisses de discours et d'accusations mais à des dialogues incroyablement creux d'une sidérante puérilité qui suscitent l'hilarité tandis que la confrontation entre réactionnaires et marxistes ressemble à une bagarre d'enfants dans une cour de récréation. La politique à l'écran et les débats sociaux ne sont pas le fort de Bénazéraf bien plus à l'aise dans l'érotisme. C'est le premier aspect le plus intéressant du film puisqu'il constitue le parfait exemple d'un certain cinéma italien érotique à la fois précurseur et surtout dangereux pour ses comédiens.
Précurseur car Adolescence pervertie, même s'il est à la base français, fait partie des films qui furent le plus mutilés par la censure italienne de l'époque puisque quinze bonnes minutes lui furent amputées parmi les séquences de sexe les plus explicites ou osées. La version sortie en salles fut donc un véritable massacre quelques années avant l'avènement du cinéma pornographique au pays de Dante qui a cependant toujours su détourner les règles proposant un cinéma bâtard en incluant des inserts hardcore dans bon nombre de films érotiques et autres sexy comédies sans parler de la sexploitation. Des recours certes hypocrites mais qui avaient l'avantage de satisfaire un public avide de sexe.
Dangereux car une multitude de comédiens et surtout de comédiennes étaient contre ses procédés qui nuisaient à leur image, remplacées par des doublures pour mieux pimenter les films et les exporter à l'étranger, souvent sans leur accord. Si on ne compte plus les procès intentés aux producteurs, on ne compte plus également les actrices qui, déçues de ce milieu, salies, se retirèrent, amères, désillusionnées. Femi Benussi qui interprète Mirella, la jeune professeur, en est un bel exemple. Adolescence pervertie fait très certainement partie des films les plus osés qu'elle tourna durant toute sa carrière, plus ou moins à contre-coeur.
L'actrice yougoslave comme pour bien d'autres films dans lesquels elle est apparue, n'a jamais donné son accord pour être doublée dans des scènes pornographiques contrairement à Malisa Longo. C'est ainsi que Femi se retrouve par l'intermédiaire d'une prostituée que Bénazaraf avait rencontré en Italie et prise comme doublure de l'actrice au coeur de séquences X vertigineuses dont deux masturbations frontales étonnantes et la fellation qui clôt le film. Plus surprenantes encore sont les scènes auxquelles Femi elle même dut donner de sa personne, triste écho de ce que sera la fin de son parcours
cinématographique au milieu des années 80 lorsque pour continuer à travailler elle accepta d'apparaitre dans quelques productions pornographiques ou semi-pornographiques (Erotic passion et Petite culotte mouillée notamment) avant son ultime apparition à l'écran à titre gracieux cette fois dans Corpi nudi, une sorte de mea culpa touchant pour tout ceux qui la connurent durant lequel en une seule petite minute elle disait toute son amertume et sa profonde déception face au monde du septième art qui utilise les actrices comme des poupées de chair pour en faire ce qu'il veut tant que l'argent rentre dans les caisses de producteurs proxénètes.
Pour le reste, Adolescence pervertie n'est jamais qu'une énième histoire d'amour impossible, celle d'une professeur libérée politiquement engagée mais qui au fond d'elle n'est jamais qu'une bourgeoise et un étudiant gauchiste. Bénazaraf ne fait que reprendre le thème tabou de la relation interdite entre un élève et un professeur ici sur fond de contestation. Rien de bien nouveau donc et Adolescence pervertie serait bien anodin s'il ne regorgeait de qualités tant techniques que visuelles. On se laissera tout d'abord séduire par
le cadre de l' l'action, la superbe cité étrusque de Pérouse qui donne au film un cachet étrange presque envoutant, une ville et des décors naturels magnifiquement bien mis en valeur par une magnifique photographie qui alterne avec intelligence les tons froids et les tons chauds. Le film ressemble parfois à un long rêve si ce n'est un cauchemars durant lequel l'imaginaire flirte allégrement avec la réalité. S'ensuivent des séquences par instant fascinantes aux limbes du fantastique. Les scènes de sexe sont aussi léchées, classieuses, particulièrement esthétiques, appuyées par une très belle musique signée Franco Micalizzi,
la plupart se déroulant dans de très jolis décors aux couleurs vives fortement estampillées années 70... un régal pour tous les amoureux de design d'époque. Tout l'intérêt du film réside essentiellement dans son esthétique et le savoir-faire de son metteur en scène qui le sauve de la banalité dans lequel il était condamné à sombrer.
Adolescence pervertie restera aussi la rencontre entre deux sexy stars italiennes qui jusque là n'avaient jamais été réunies dans un même film, Femi Benussi et Malisa Longo. Malheureusement si Femi est toujours aussi attrayante elle trouve là un de ses plus mauvais
rôles et confirme ses piètres talents d'actrice, totalement insipide dans la peau de Mirella. Ni convaincue encore moins convaincante, elle traverse le film de façon monolithique, récitant des dialogues d'une aberrante stupidité d'une voix monocorde. Mélanger Sade et Pythagore, organiser des soirées étudiantes à domicile, ne suffisent pas à donner du corps à son personnage qui heureusement pour le spectateur offre son corps à la caméra. Sa beauté et ses scènes ravageuses feront oublier son jeu catastrophique. On gardera surtout en tête la fellation qu'elle fait à l'étudiant, stupéfiante car cette fois ci non doublée, sa tête posée contre
son sexe entrain de mimer (fort heureusement) l'acte buccal!
Quant à Malisa Longo, elle est égale à elle même. Son pitoyable jeu d'actrice n'est plus à prouver et se confirme une fois encore. C'est à elle que reviennent les scènes de sexe les plus chaudes, est ce étonnant, se déshabiller et s'exhiber nue étant ce qu'elle a toujours su le mieux faire. C'est le jeune Hervé Halff, parions sur le pseudonyme, qui interprète Alain, insolent, distant, cruel, bel éphèbe blond au corps svelte moulé dans un pantalon de cuir noir qu'il enlève sans pudeur, offrant son sexe à la caméra pour notre plus grand plaisir lors d'une
séquence de masturbation indolente au cours d'une soirée très spéciale. On put revoir Hervé par la suite dans le sulfureux Spermula dans lequel il se fait furtivement sucer par une des spermulites avant qu'il ne disparaisse de la circulation. On reconnaitra parmi les participants de l'orgie un Pietro Torrisi en pleine action, un des premiers acteurs à ne jamais s'être caché d'avoir fait de la pornographie parallèlement à sa carrière de comédien.
Présenté à Cannes en 1974 où il fit scandale, Adolescence pervertie existe en trois versions au montage différent, une de deux heures, celle là même qui fut diffusée au festival, une ramenée à 88 minutes environ, la plus courante aujourd'hui, programmée à la télévision avec un doublage assez surprenant puisque seuls les personnages principaux ont été doublés en français, et enfin la version italienne honteusement tailladée qu'on oubliera bien évidemment.