Maniaco Deprebis

Corpi Nudi fait partie de ces films italiens qui aujourd'hui demeurent des énigmes d'autant plus qu'ils sont devenus au fil du temps quasiment invisibles ou introuvables. Avant toute chose tentons d'éclaircir un tant soit peu le mystère de sa réalisation. Si on doit sa mise en scène à Amasi Damiani dissimulé sous le pseudonyme de Joseph Mallory, l'année de sa conception reste floue. Si le film n'est sorti en Italie qu'en 1986, il aurait été réalisé en 1982, soit quatre ans auparavant, comme en témoigne d'une part son visa de censure et d'autre part la présence de quelques stars du hardcore d'alors.

Plus difficile est de savoir qu'elle fut exactement la version que tourna Damiani qui avoue lui même n'avoir jamais vu une seule copie de son film. Si une version soft de 70 petites minutes seulement circula jadis en Italie, il est quasiment certain que le film original devait être plus long et contenait des séquences hardcore interprétées par notamment quatre des spécialistes du genre: Guia Lauri Filzi, Alfonso Gaita, Sandy Samuelet Gabriel Pontello. Beaucoup plus difficile est de découvrir qu'elle est la véritable version puisqu'en effet la seule copie existante du film est celle de la vidéo italienne dans laquelle on y retrouverait Marina Frajese et Ajita Wilson lors des scènes pornographiques. Par contre, Femi Benussi qui accepta d'y apparaitre sans être payée, uniquement par amitié pour Amasi, est absente de cette version. C'est alors que surgit une version vidéo espagnole d'où Marina Frajese et Ajita Wilson sont absentes mais Guia Lauri, Rosy Navarro, Alfonso Gaita, Sandy Samuel, Gabriel Pontello et une poignées d'acteurs non identifiés s'en donnent à coeur joie dans les séquences X. Femi Benussi y réapparait, le temps d'un caméo. Mais si Corpi nudi demeure donc une énigme aux yeux des spécialistes du cinéma d'exploitation qui y perdent leur latin, cela ne change en rien la médiocrité du film.

Si Gianni Dei, principal protagoniste de ce mélodrame érotique qui ressemble beaucoup à Peccati a Venezia le précédent film du réalisateur, aurait comme l'affirme aujourd'hui son entourage tourné tout et n'importe quoi afin de pouvoir jouer et satisfaire sa folle envie de tourner encore et toujours, Corpi nudi tout comme la fin de sa carrière peuvent facilement en témoigner. Si l'histoire n'est pas déplaisante en elle même, son traitement est d'une rare indigence. Luciano, ancien photographe de charme, est désormais condamné à vivre en fauteuil roulant suite à un accident. Devenu impuissant, il ne peut plus satisfaire sa jeune épouse et leur couple bat de l'aile. Il passe son temps à regarder des films porno sur un vieux projecteur jusqu'au jour où il donnera sa femme à son meilleur ami afin qu'elle devienne sa putain, satisfaisant par la même occasion son coté sadomasochiste.

Corpi nudi aurait pu être un film particulièrement morbide dans la grande tradition de l'exploitation italienne, une oeuvre sordide et malsaine qui avait tous les ingrédients pour ainsi assouvir la soif de perversion du spectateur. On est malheureusement face à un véritable gâchis.
D'une pauvreté extrême, rarement avait on vu une réalisation aussi terne et plate à l'image même des décors et de la photographie, simplement hideux. La quasi totalité de l'histoire se déroule dans l'appartement de Luciano, aussi vide que triste. Quelques plans extérieurs, fort maladroits, donnent un peu de vie à l'ensemble mais rien ne parvient à sauver Corpi nudi de sa misère, surtout pas l'interprétation, sans aucun relief. Tous autant qu'ils sont, les acteurs,

en tête Gianni Dei, cloué dans son fauteuil, et Rosy Navarro aperçue dans La prof d'éducation sexuelle, récitent, impassibles, absents, des dialogues creux sans aucune conviction. Totalement inexpressifs, les statues du musée Grévin semblent être plus animées que tous ces comédiens dont le vide du regard reflète toute la vacuité de la mise en scène. Une horrible musique jazzy accompagne le plus souvent les ébats des protagonistes tandis que Gianni Dei se passe inlassablement un vynil sur un vieux pick-up, soit trois notes de piano répétitives.

Surnagent ça et là quelques moments accrocheurs tel l'instant où le meilleur ami viole Ines sous l'oeil indifférent de son mari, consentant. Les séquences hardcore, guère imaginatives, permettront de retrouver Guia Lauri Filzi, Alfonso Gaita, Sandy Samuel et Gabriel Pontello sans oublier Rosy Navarro à l'action. Quant à Gianni Dei s'il se dénude et bien inopinément, du moins espérons le, nous gratifie d'une rapide vision de ses testicules coincés sous sa femme il reste prude et se limite à un érotisme de bon aloi.
Femi Benussi et Marisa Mell jouent leur propre rôle le temps d'une courte apparition qui fera tout de même plaisir à leurs admirateurs. Ce sera d'ailleurs l'ultime pour Femi Benussi qui se retira par la suite du monde du showbiz
Corpi nudi est une curiosité certes qui aurait pu s'inscrire dans la bonne lignée des films à l'érotisme morbide dont l'Italie fut naguère la grande spécialiste. Malheureusement, l'insipidité de l'ensemble la rend totalement inoffensive et surtout ennuyeuse.