Le feu sous la peau
Autres titres: Il calore sotto la pelle / Flesh and fire / Fire under the skin / Gefährliche Leidenschaften
Real: Gérard Kikoine
Année: 1985
Origine: France
Genre: Drame / Erotique
Durée: 93mn
Acteurs: Kevin Bernhardt, Eva Czemerys, Lydie Denier, Michael Jacob, Philippe Mareuil, Marie Bossee, Cornélia Wilms, Veronique Beguin, Georges Saint-Yves, Marc Winandy, Frank N'dri, Jacques Insermini, Diane Suresne, Jocelyne Jeanssen...
Résumé: Un étudiant américain, Raphaël, est parvenu à se faire inviter au manoir des parents de son ami Alexis pour l'avoir aidé à réussir ses examens. Véritable play-boy, Raphaël ne laisse personne indifférent certainement pas ces dames qui rêvent toutes de le séduire. Dés son arrivée, Raphaël couche avec la petite amie d'Alexis qu'il traite en putain. Après le départ de son ami, ilcouche avec sa soeur ainée, Priscilla, clouée en chaise roulante puis débauche la soeur cadette. Il fait de leur mère, aveuglée par sa beauté, son esclave sexuelle afin de satisfaire ses désirs pervers. Il couche même avec le père. Un point commun à toutes ces coucheries: l'humiliation et l'avilissement, un jeu auquel le jeune garçon est passé maitre. Tous sont loin d'imaginer ses réelles intentions encore moins les véritables raisons de son séjour au domaine. Leur découverte fera l'effet d'une bombe qui détruira à jamais leur existence...
Réalisateur d'une multitude de petits pornos dans les années 70, Gérard Kikoine amorce son virage vers l'érotisme softcore en 1985 joliment intitulé Le feu sous la peau. Voilà un titre qui laisse songeur et laisse entrevoir bien des plaisirs interdits. Le film laissera un temps le spectateur dans le doute qui durant une bonne demi heure a la désagréable impression d'assister à un quelconque téléfilm érotique sans grand intérêt.
Un bel étudiant américain aux muscles saillants, Raphaël, est parvenu à se faire inviter pour les vacances de Toussaint au manoir des parents de son meilleur ami, Alexis, qu'il a sournoisement aidé à réussir ses examens. Son charme fait de suite mouche. Raphaël va séduire tour à tour tous les membres de la famille d'Alexis y compris sa petite amie mais refuse étrangement les avances de la bonne. Après le départ d'Alexis qu'il a humilié une nuit de beuverie, il couche avec Priscilla, la soeur clouée en fauteuil roulant, fait l'amour à la
cadette puis fait de la mère, une bourgeoise sexuellement frustrée totalement obsédée par sa beauté juvénile, l'esclave de ses jeux pervers. Il s'offre même au père loin d'être insensible à son corps d'albâtre. Arrogant, cruel, dépravé, Raphaël ne semble éprouver que du mépris pour chacun des membres de cette famille qu'il humilie chaque jour un peu plus, reculant sans cesse les limites de la cruauté. Après avoir surpris ses ébats avec son époux, la mère, incapable de lui pardonner cette trahison, le somme de quitter le domaine. Raphaël l'humiliera une dernière fois en l'offrant à trois éboueurs qui la violeront au milieu des
ordures habillée en robe de mariée. Lors d'une réception, un cadeau de Raphaël parvient à la famille. La mère l'ouvre devant les convives, heureuse d'avoir enfin de ses nouvelles après quelques jours de silence. Elle extrait du paquet un bocal renfermant un foetus tandis qu'une bande enregistrée révèle le terrible secret de leurs hôtes. Raphaël est le fils d'une ancienne domestique que le père de son ami a engrossé avant de la renvoyer comme une malpropre après avoir découvert sa grossesse évitant ainsi tout scandale. La pauvre femme s'est donnée la mort à la naissance de Raphaël qui fut placé en orphelinat tandis que son odieux
géniteur continuait de mener la belle vie. Raphaël s'est ainsi vengé de ceux qui ont brisé sa vie en brisant à son tour la leur de la plus effroyable manière.
En reprenant le thème éculé de l'étranger venu s'infiltrer au coeur d'une famille bourgeoise en apparence sans histoire pour de mystérieuses raisons, Kikoine signe un surprenant thriller érotique allant crescendo, intelligent, subtil et surtout d'une absolue cruauté dont la grande originalité est d'être monté en escalier. Ce choix judicieux pourra cependant rebuter durant les trente premières minutes qui ressemblent à un téléfilm polisson d'une fadeur affligeante destiné aux programmes nocturnes spécialisés de certaines chaines dans lequel
on retrouve les poncifs du genre: une famille bourgeoise, un superbe manoir campagnard, des décors somptueux, deux bellâtres droit sortis d'une revue de charmes et un éventail de jolies filles peu farouches qui se laissent vite séduire, une coupe de champagne en main, avant de coucher encore plus vite au son d'une horripilante partition musicale sirupeuse à base d'envolées de saxophone. On soupire, l'envie de faire avance rapide nous effleure l'esprit d'autant plus que l'érotisme est d'une sagesse exemplaire, particulièrement frustrant malgré quelques éclats sordides anodins sur le coup mais qui au fil de l'histoire vont
prendre toute leur signification... si on sait être un peu patient.
Le feu sous la peau, sorte de revisitation du Théorème de Pasolini, va dés lors intriguer, étonner, faire se poser au spectateur bien des questions quant à la personnalité de Raphaël qui le fait aller de surprises en surprises, véritable pilier de cette histoire d'une incroyable perversité. Cruel, froid, implacable, si haïssable qu'on se surprend à l'aimer, ce personnage est il tout simplement un dangereux play-boy pervers qui trouve son plaisir dans la souffrance et l'humiliation d'autrui, jouant avec chacun des membres de cette famille qui l'a accueilli
sans même ménager la jeune handicapée tout aussi maltraitée. tout n'est pas aussi simple qu'il n'y parait et les indices semés ça et là par Kikoine vont dés la seconde partie prendre tout leur sens jusqu'à l'inattendue explosion finale.
Le feu sous la peau se transforme alors en un véritable thriller dans lequel l'arme du tueur serait le sexe, l'avilissement, une arme beaucoup dangereuse et destructrice qu'un revolver ou même un couteau. Rien ni personne n'échappera à la vengeance du garçon, véritable loup dans la bergerie qui a méticuleusement construit son plan, tissé sa toile autour de cette famille qu'il va détruire un à un avant de lui asséner le coup fatal lors des ultimes minutes.
D'une extrême noirceur, Le feu sous la peau se révèle souvent fascinant dans sa précision et son habileté à jouer avec les vices de chacun notamment celui de la mère, prototype même de la bourgeoise frustrée qui l'a surprise entrain de se donner du plaisir tout en caressant un cheval, un soupçon de zoophilie, un thème alors très en vogue dans le cinéma hardcore transalpin, qui lui servira de base pour faire d'elle sa principale victime, l'esclave parfaite de ses jeux de plus en plus défendus.
En ce sens, le film de Kikoine est une superbe aubaine pour tout amateur d'obscénités déviantes et d'exploitation. Surprise par Raphaël entrain de se caresser contre son cheval, la mère est contrainte de lui faire l'amour dans un jeu de soumission dégradant puis sodomisée contre le noble animal qu'elle masturbe, une scène digne des meilleurs films de sexploitation italien des années 70 même si moins explicite. Les passionnés d'amours bestiales retrouveront le beau destrier au détour d'un autre jeu tout aussi farouche au cours duquel, habillée en putain, elle sera cette fois attachée au cheval qui, lancé au galop, traversera ainsi le domaine. Tout aussi mémorable, presque animale, est la scène où
Raphaël la pénètre sauvagement dans la cuisine tout en lui tartinant sans ménagement le postérieur de miel et de crème, un moment particulièrement trash filmé de façon tout spécialement vulgaire à l'image même des indécents ébats. On pourrait considérer cela comme une mise en bouche comparé au final sordide où, revêtue d'une robe de mariée, elle est jetée en pâture à trois éboueurs qui la violent au milieu des ordures, une scène qui parait interminable, aussi malsaine que morbide, d'une puissance évocatrice étonnante, filmée cette fois au ralenti. Elle résume à elle seule toute la ligne de conduite de Raphaël, ultime étape d'un plan diabolique avant l'envoi du foetus qui fera toute la lumière sur ses
agissements inhumains. Voilà une conclusion totalement inattendue qui non seulement laissera un goût bien amer au spectateur mais fera surtout jouir de bonheur tous les inconditionnels d'érotisme malsain, de sexe sordide, ceux qui prennent aussi un malin plaisir à voir la bourgeoisie fustigée.
Plus qu'un thriller érotique, Le feu sous la peau est avant tout une virulente offense, un crachat cinglant envers la société bien pensante qui derrière son vernis cache vices et perversions de toutes sortes, ne possède ni foi ni morale encore moins de respect. Elle n'est que pourriture et trouve donc sa juste place au milieu des poubelles. Kikoine n'est certes pas
Pasolini, la critique sociale reste à l'état embryonnaire mais elle est suffisamment forte pour ne pas laisser indifférent. Le réalisateur signe un film efficace, curieux, particulièrement morbide aux décors classieux qui malgré ses défauts et un départ un peu routinier demeure une petite réussite dans le domaine de l'érotisme sauvage, chose rare en cette nouvelle décennie. On regrettera simplement une partition musicale envahissante souvent insupportable, digne d'un soap, fortement estampillée années 80, des costumes et des coupes tout aussi marqués par leur époque et un érotisme trop sage sur le plan de la nudité tant féminine que masculine quasi absente du métrage, Kikoine ayant semble t-il préféré la
suggestion et l'aspect ordurier au voyeurisme gratuit. Dommage également que la séquence homosexuelle qu'on sent venir de loin entre le père et Raphaël n'ait pas été plus explicite dans l'acte lui même. Elle nous permet surtout d'admirer un tout jeune Kevin Bernhardt s'exhibant en slip sous le nez de Philippe Mareuil, troublé, et de l'apercevoir enfin nu par le biais d'un miroir le temps de quelques secondes.
Venu du soap (Dynasty, Hopital central) Kevin qu'on a pu aussi voir dans Hellraiser 3 est parfait dans le rôle de Raphaël, aussi beau que machiavélique, aux cotés de Lydie Denier rendue célèbre pour sa participation à la série Tarzan et de la nubile Marie Bossee. Plus triste est la présence de Eva Czemerys, ex-sexy star des années 70, muse de Nello Rossati, dont ce fut le peu glorieux chant du cygne après une apparition éclair dans Les guerriers du Bronx 2 où elle jouait la mère de Mark Gregory. Après quasiment huit années de silence, lasse des films qu'on lui proposait, Eva se retira des feux de la rampe avant ce come-back déshonorant, une façon de survivre comme beaucoup d'autres actrices, prêtes à accepter tout et n'importe quoi notamment dans ce domaine. Voir Eva, version coupe garçonne, s'adonner à la zoophilie, aussi sexuellement maltraitée, pour finir violée au milieu des poubelles est certes un plaisir coupable pour tout fan d'exploitation mais si avilissant pour l'actrice qu'elle fut. On peut imaginer son désarroi lorsqu'elle accepta ce rôle! Malade depuis de longues années, elle s'éteindra au milieu des années 90 après s'être dévouée aux causes humanitaires.