Liberi armati pericolosi
Autres titres: Jeunes désespérés violents / Racket boys / Les féroces / Young violent dangerous
Real: Romolo Guerrieri
Année: 1976
Origine: Italie
Genre: Polizesco
Durée: 93mn
Acteurs: Max Delys, Benjamin Lev, Stefano Patrizi, Tomas Milian, Eleonora Giorgi, Salvatore Billa, Venantino Venantini, Gloria Piedimonte, Diego Abantatuono...
Résumé: Trois garçons de bonne famille, Blondie, Luis et Joe, sans raison apparente, passent un beau matin de l'autre coté de la barrière. La fiancée de Luis les dénonce lorsqu'elle apprend qu'ils vont piller une station service avec de faux pistolets. Contre toute attente, les armes sont réelles et Joe tue le gérant. Commence alors pour les trois garçons une folle et sanglante cavalcade lors de laquelle ils tuent gratuitement tout ceux qui se trouvent sur leur chemin. Poursuivi par la police, ils entament une longue fuite désespérée et tragique en emmenant avec eux la fiancée de Luis...
Tiré d'une nouvelle du célèbre auteur italien Giorgio Scarbanenco, Nove calibre, dont les ouvrages servirent souvent de base à de nombreux polizeschi, Liberi armati pericolosi reste non seulement un des meilleurs polars de Romolo Guerrieri mais également un des plus réputés du genre ne serait ce que pour sa violence.
Sur un scénario du brillant Fernando Di Leo qui transforma la nouvelle en une histoire beaucoup plus personnelle, Romolo Guerrieri signe un film mouvementé qui raconte la folle cavalcade de trois jeunes délinquants qui sans raison apparente un beau matin pillent et massacrent tout ce qui se présente sur leur chemin. Liberi armati pericolosi s'inscrit donc dans la mouvance des polars métropolitains dont les protagonistes sont de jeunes voyous à la dérive, victimes d'une société en pleine décrépitude à qui il ne reste plus que la violence pour pouvoir s'exprimer.
Pourtant Liberi, armati pericolosi diffère des autres films du genre puisque ici les trois jeunes garçons ne sont ni des marginaux ni des anarchistes mais des fils de bonne famille, enfants de magistrats et de professeurs, qui un jour, ont basculé du mauvais coté de la barrière. Nous ne connaitrons rien de leurs raisons, motivations ni même de leurs idéaux ce qui rend leurs actes encore plus gratuits, barbares et ainsi donc condamnables. C'est à un déchainement de violence et de haine auquel on assiste ici, impuissants, qui mènera les trois garçons vers une fuite désespérée dont la mort sera la seule issue.
Cette totale absence de motivation, voulue par Di Leo, est certainement le point le plus frappant du film. Reste à savoir comment se positionnera le spectateur face aux exactions des trois loubards et la perception qu'il en aura. Risqué certes mais le risque en valait ici la peine. Cet anonymat confère au film une dimension par instant inquiétante que la tension grandissante entre les trois voyous vient accroitre.
Malheureusement certains des efforts de Guerrieri tombent à l'eau faute à une interprétation pas toujours à la hauteur et le manque de consistance des personnages. Les trois petites frappes sont ici beaucoup trop unidimensionnelles et mono expressives. Si chacun incarne un stéréotype parfait, Joe l'instable, véritable gosse hystérique au rire strident et à la blague facile, Luis le plus posé et influençable et Blondie, le meneur, un impulsif sans coeur qui s'avère vite le plus dangereux, aucun des trois comédiens ne tente de donner à son rôle un peu d'épaisseur. Ils se contentent d'être ce qu'on leur a demandé de jouer mais anonyme ne signifie pas non plus trop caricatural.
Cependant Guerrieri tente de temps à autre d'insuffler à leur personnage un soupçon de psychologie plutôt intéressant qui accroit leur coté malsain. Le plus curieux est le lien qui unit Blondie et Luis fort bien résumé par la petite amie de ce dernier lorsqu'elle déclare que quelque chose existe entre eux lorsqu'ils se regardent comme deux amoureux mais cependant cet étrange lien est autre chose que de l'amour. Cette ombre d'homosexualité latente voire refoulée est bel et bien présente tout au long du film au détour de quelques scènes accrue par l'apparente homophobie de Blondie qui se permet à plusieurs reprises quelques injures homophobes.
Plus surprenant est le manque de moralité dont fait preuve Di Leo accentuant encore plus l'aspect gratuit de l'ensemble. La seule tentative de moralisation sera donnée de façon assez brève mais tout à fait tangible lors d'un long monologue face aux parents des trois voyous qu'il culpabilise sévèrement. Pour lui et ce sera la seule tentative d'explication donnée tout au long du film pour donner un sens aux agissements des trois garçons, la faute en incombe aux parents qui n'ont pas su élever leurs enfants, trop occupés à ne voir que leur petite vie et préoccupations.
Une des autres originalités du film est le fait qu'il se déroule sur une seule journée qui confère à cette tragique et sanglante cavalcade un coté particulièrement réaliste contrairement à beaucoup d'autres oeuvres du genre. Cela donne alors l'impression au spectateur de vivre en direct cette folle équipée sauvage.
Liberi armati pericolosi est un efficace polar qui donne à l'action et à la violence une place prépondérante, se laissant aller par moment aux rouages du cinéma d'exploitation (la scène de viol et d'humiliation des deux copines de Lucio), qui laissera sans doute une impression mitigée chez le spectateur mais devrait satisfaire pleinement les amateurs du genre même s'il est inférieur à Milano Odia / La rançon de la peur dont il se rapproche.
On retrouvera Tomas Milian dans la peau du commissaire, plutôt effacé cette fois. Très peu étoffé, Tomas ne fait qu'apparaitre à l'écran à la grande déception de ses admirateurs. Guerrieri força quelque peu Milian à accepter ce rôle en reprenant son visage naturel. L'acteur avait alors pris l'habitude de jouer grimé puisqu'il était dans cette période où il incarnait Nico l'indic, Poubelle ou le bossu dans nombre de polizeschi. Peut être ceci explique t-il cela.
A ses cotés, outre le survolté Benjamin Lev dont les crises de rire hystérique en énerveront très vite plus d'un (il dut être remplacé pour quelques scènes par une doublure lorsque durant quelques jours il ne se présenta pas sur le tournage suite à son arrestation et sa mise en garde à vue pour une histoire de drogue), on appréciera d'une part la présence du blond Stefano Patrizi, d'autre part, l'ex-prince du roman-photo Max Delys dont ce fut l'ultime vrai rôle à l'écran avant sa triste déchéance. Eleonora Giorgi avec laquelle Max vivait alors une romance passionnée joue ici ironiquement sa fiancée, plus belle que réellement talentueuse. Leur relation dans le film s'en ressent ce qui apporte une petite touche naturelle fort appréciable.
L'amateur reconnaitra un tout jeune Diego Abatantuono, méconnaissable, à l'aube de sa carrière, qui interprète Lucio, le riche voyou dont on appréciera l'apparition en mini slip qui donne une orgie dans sa somptueuse demeure et la présence de Gloria Piedimonte, une des deux jeunes filles humiliées.