Bianco apache
Autres titres: L'apache blanc / Apache kid / White apache / Der weisse apache
Real: Bruno Mattei
Année: 1986
Origine: Italie / Espagne
Genre: Western
Durée: 90mn
Acteurs: Sebastian Harrison, Lola Ferner, Charly Bravo, Alberto Farnese, Cinzia De Ponti, José Canalejas, Charles Borromel, Luciano Pigozzi...
Résumé: Un groupe de desperados massacrent un paisible convoi. Une femme enceinte est sauvée par l'arrivée inopportune d'une tribu d'apaches qui la recueille. Elle meurt lors de son accouchement. Son fils sera élevé par les indiens qui le nomment Shining sky (Ciel étincelant en version française). Malheureusement, Shining sky tue par inadvertance son demi-frère. Il doit alors quitter la tribu et partir vivre chez le peuple à qui il appartient, les hommes blancs, en gardant secrète ses origines. Au cours de son voyage, il est attaqué par des desperados et laissé mourant. Deux jeunes femmes le soignent mais Shining sky révèle son identité. Torturé, il parvient à s'échapper. A son retour dans la tribu apache, il découvre qu'ils ont été massacré par les desperados. Fou de rage, nourrissant une haine féroce à l'égard des Blancs, il n'a plus qu'une idée en tête: se venger d'autant plus que celle qu'il aime a été capturée et torturée...
Mission peu évidente et surtout fort risquée à laquelle Bruno Mattei s'attèle en 1986, celle de faire revivre le temps de deux films un genre mort depuis déjà bien longtemps en Italie, le western-spaghetti, un style cinématographique auquel il ne s'était jusqu'alors jamais essayé. C'est ainsi qu'il va réaliser coup sur coup Bianco apache et Scalps. Malheureusement les deux films resteront inédits en salles en Italie et ne connaitront de succès que lors de leur sortie respective en vidéo et de leurs passages sur les chaines télévisées.
Si tout deux ont gagné en réputation au fil du temps, il faut reconnaitre que si Scalps est une très honnête surprise, Bianco apache dont on doit le scénario à Franco Prosperi, celui de La settima donna, en est une deuxième malgré un début qui pouvait laisser supposer un résultat final peu enthousiasmant. Après une ouverture incroyablement violente truffée d'effets gore surprenants totalement décomplexés pour l'époque le film sombre assez vite dans un comique involontaire faute avant tout à un manque de sérieux (la tribu d'indiens peu crédible qui rappelle celle de Arapaho) et quelques répliques peu convaincantes qui viennent briser la cruauté même du propos. On peut à juste titre craindre le pire lorsqu'on
assiste aux facéties de Ciel étincelant et de son demi-frère Loup noir, batifolant et jouant comme des enfants le long des rivières. Il en va de même pour les sentiments amoureux teintés de jalousie qu'ils éprouvent pour la mutine Rising sun. Ils peuvent en effet faire sourire tant ils sont puérils, candides et tellement teintés de manichéisme exacerbé. Les pensées d'une extraordinaire bêtise d'un vieux sage interprété par un Charles Borromel cabotin plus idiot que philosophe dissimulé sous une affreuse perruque ne sont pas non plus faites pour rassurer.
En fait Bianco apache décolle réellement à partir du moment où Ciel étincelant doit quitter
sa tribu pour rejoindre le peuple à qui il appartient, celui de l'Homme blanc. Bianco apache tente alors de mettre en exergue la souffrance de ce jeune apache d'adoption qui ne retrouve plus sa place dans le monde des Blancs et sa violence qu'il ne peut accepter. Le sujet carrément pro indien aurait gagné à être un peu plus, un peu mieux, développé sur le plan psychologique notamment sur les relations entre les différents protagonistes. Mattei semble en fait bien plus s'intéresser à la violence et aux effets sanglants. Le film se transforme donc rapidement en un véritable jeu de carnage qui risque de beaucoup surprendre d'autant plus que le film fut tourné à une époque où le cinéma italien ne pouvait
plus se permettre les débordements auxquels il nous avait habitué dans les années 70, l'âge d'or du cinéma Bis.
Si l'indien est très souvent montré comme un sauvage, l'Homme blanc est cette fois dépeint comme un animal sans scrupules capable des pires atrocités. Le racisme est ici poussé à son paroxysme. Oeuvre quasi apocalyptique calquée sur Un homme nommé cheval et Navajo Joe de Corbucci qu'on pourrait comparer sous certains aspects aux 4 de l'apocalypse de Fulci, Bianco apache ne recule devant aucune cruauté. Egorgements, assassinats d'enfants (il fallait oser), tueries, tortures sont ainsi au menu de ce western
atypique quant à sa brutalité. Mattei va même jusqu'à maltraiter une femme enceinte en la ruant de coups de pied dans le ventre jusqu'au final quasi surréaliste d'une étonnante cruauté où la bestialité de certains personnages dont celui qu'interprète magistralement le marocain Charly Bravo explose littéralement. Est-ce ici la griffe de Prosperi, connu pour ses oeuvres souvent décriées? Il est certain que bien peu reconnaitront le Mattei approximatif des Rats de Manhattan et autres Virus cannibale.
Tout aussi maîtrisé et soigné que Scalps, Bianco apache doit également beaucoup à ses interprètes notamment le jeune et séduisant Sebastian Harrison, le propre fils de Richard
Harrison responsable avec Prosperi du scénario, alors en tout début de carrière. Si Sebastian n'avait pas réussi à décrocher le rôle principal masculin de Scalps que son père avait imaginé pour lui, il parvint à avoir celui de Bianco apache. Il livre ici un jeu plutôt crédible malgré un coté par instant un peu raide. On le sent en tout cas totalement investi dans le rôle de ce jeune apache à l'éclatante blondeur écoeuré par la violence qui l'entoure. Sebastian ne fera pourtant pas une longue carrière à l'écran. On le reverra par la suite dans Les fantômes de Sodome de Lucio Fulci et quelques séries télévisées italiennes avant qu'il
ne disparaisse pour se réorienter, après une parenthèse musicale, vers une toute autre carrière, la téléphonie mobile à échelon mondial. A ses cotés outre la présence de la traitresse Cinzia de Ponti qui garde de ce film (et de Sebastian) un excellent souvenir on saluera la performance de l'espagnole Lola Ferner, jeune indienne victime de la sauvagerie des Blancs, émouvante au possible notamment lors du somptueux final.
Avec son final en forme de no happy end surréaliste d'une sidérante barbarie à une époque où tout bon film devait se conclure sur une note joyeuse Bianco apache tout comme Scalps tente avec très peu de moyens de renouer avec les grands westerns spaghettis d'antan,
voire certaines productions hollywoodiennes des années 50 et 60. Quelques soient leurs défauts ses deux films tournés quasi simultanément et produits par l'éternel comparse de Mattei Claudio Fragasso n'ont peut être pas la force ni la maitrise des grands classiques de leurs ainés mais ils s'en rapprochent fortement de par leur pessimisme et leur violence inouïe qui tranchent avec la beauté des décors naturels d'Almeria où cette bande fut tournée. L'essai n'est pas parfait mais il est fort louable et fera parfois songer au niveau de son discours humanitaire à un épisode de Winnetou mais pour adultes.
Voilà deux agréables et divertissantes surprises qui devraient beaucoup plaire aux amateurs mais également surprendre les détracteurs du réalisateur qui ne voyaient en lui qu'un petit tâcheron.