Pilar Velasquez: La beauté andalouse
Elle fut avec Nieves Navarro la plus célèbre espagnole du cinéma transalpin, celle qui dans de nombreuses oeuvres incarna à la perfection la gitane jusqu'à ce qu'elle veule prouver qu'elle pouvait être autre chose qu'une belle andalouse élevée au son du flamenco. Une bouche sensuelle, un visage quasi parfait, le regard noir qui rappelle celui des orientales, cette vénus ibérique fit les beaux jours du cinéma de genre durant quasiment avant de lentement disparaitre des écrans sans pour autant abandonner sa carrière artistique. Voici le parcours sans faute d'une rebelle incendiaire qui n'a jamais eu froid aux yeux, l'incandescente Pilar Velasquez également créditée Pilar Velazquez.
Née à Madrid le 13 février 1946, Maria Del Pilar Velàzquez Llorente, Pilar Velasquez pour son nom d'artiste, est d'origine tzigane. Enfant rebelle, elle fugue de la maison familiale dés l'âge de 12 ans, devient danseuse de flamenco à 16 ans et s'amourache d'un torero plus âgé qu'elle qui lors d'un combat sera mortellement blessé. Le nom de Pilar se retrouve alors tristement mêlé à cette tragédie. Passionnée par le monde des artistes depuis toute petite la jeune fille s'inscrit dans une école de théâtre à Madrid afin d'y prendre des cours. C'est durant ces années là qu'elle se fait remarquée ce qui lui permet à tout juste 20 ans de faire ses premiers pas dans le monde du spectacle. Elle incarnera alors cette Espagne cinématographique, l'andalouse de rêve avec tout son coté sauvage et enflammé. Pilar débute sa carrière à la télévision en apparaissant entre 1966 et 1968 dans bon nombre de séries télévisées ibériques avant de tourner son premier film pour le grand écran. Du spaghetti western au film d'espionnage en passant par le polar Pilar qui est encore créditée sous le nom de Pilar Vela va dés 1968 enchaîner les rôles. Elle apparait pour la toute première fois à l'écran dans le film d'Enzo castellari Aujourd'hui ma peau demain la tienne.
On pourra par la suite l'admirer dans toute une série de westerns comme Les pistoleros de l'Ave Maria de Baldi, Quando Satana impugno il colt, Arizona kid, Uomo avvisato mezzo ammazzato parola di spirito santo de Carnimeo et quelques films d'espionnage tels que Operacion Mata Hari de José Maria Font, I leopardi di Churchill de Maurice Pradeaux.
A la mort du genre Pilar se reconvertit dans d'autres types d'oeuvres cinématographiques dont le film familial. Elle est ainsi au générique de Luca bambino mio de Luca Fernandez en 1971, Senza dio de Roberto Bianchi Montero pour lequel elle obtint le premier prix du festival de Madrid ou encore Vivi ragazzi vivi de Lorenzo Artale et Una senora estupenda de Eugenio Martin.
Après sept années passées à interpréter la gitane dans des films qui mettent surtout en valeur son physique latin, Pilar, lasse, déclare être fatiguée de ce type de personnages d'autant plus ajouta t'elle sans ménagement qu'elle ne se sent pas l'âme d'une espagnole pure souche. " Je n'aime pas la corrida, je déteste le folklore andalou, je ne suis ni grosse ni timide encore moins sentimentale. Je suis une femme moderne qui prend la pilule, je suis pour l'avortement et l'émancipation de la femme". Les propos de Pilar font mouche dans son pays d'autant plus qu'elle part s'installer en Italie dans une belle maison remplie de chiens et de plantes tropicales. Elle avoue son amour pour l'Italie, pays de toutes les libertés et du travail. Mais elle sait que son physique est un problème.
Elle va alors tourner quelques gialli pour notamment Alfonso Brescia. C'est ainsi qu'on l'admirera dans Ragazza tutta nuda assassinata nel parco / Le manoir aux filles dans lequel elle est un des personnages centraux, parfaitement ambigu, l'excellent Exorcisme tragique_ de Scavolini dans lequel elle interprète une lesbienne qui ne manque pas de piment tout comme dans Il fiore dai petali d'acciaio de Gianfranco Piccoli dans lequel elle a une scène de saphisme avec Paola Senatore. Parallèlement à sa carrière de comédienne Pilar travaille également à cette époque pour la télévision espagnole en tant que présentatrice. Une coupe à la garçonne, elle anime notamment deux émissions musicales alors populaires en Espagne Senor y senoras et Palmares dans lesquelles il n'est pas rare qu'elle chante et danse.
Coté cinéma l'actrice reste ferme sur un point. Jamais elle ne se déshabillera gratuitement pour le spectateur ou pour les beaux yeux des producteurs dans une Italie où justement le cinéma aime faire se marier sexe et violence. En 1975 elle est au générique d'un nouveau thriller italien, Eroticofollia / Malocchio, un film horrifique certes anodin mais très étrange aux limites du fantastique. Pilar va ensuite se faire plus rare. Elle quitte l'Italie pour retourner en Espagne. La belle comédienne tournera désormais exclusivement dans son pays se contentant d'un ou deux films par an.
Entre 1975 et 1979 on peut ainsi la voir dans Sensualidad de German Lorente qu'elle
retrouvera pour Strip tease, Esposa de dia de Javier Aguirre, Tatuaje de Bigas Luna, Una familia decente de Luis Josep Comeron sans oublier Tropique du désir / La donna della terra calda de José Maria Forqué aux cotés de Laura Gemser. Tigre de Rodolfo De Anda sera son ultime film avant qu'elle ne se retire pour se consacrer à sa vie de famille. En 1979 elle convole en justes noces avec le séduisant chanteur-auteur-compositeurs Miguel Gallardo alors sexy star de toute la jeunesse espagnole. De cette union célébrée en grandes pompes à San Antonio de la Florida naitra en 1981 un fils Alejandro Gallardo Velasquez. Leur mariage comme la naissance de leur enfant vont alimenter les pages de la presse
espagnole. Même s'ils finiront par divorcer en 1990, leur mariage n'ayant pas résisté à la popularité de Miguel,on ne se lasse pas de regarder le couple le plus affriolant d'alors ni de suivre leur vie. Pilar se retire alors des feux des projecteurs pour élever son fils et se consacrer à sa vie de famille.
Elle reviendra sur le devant de la scène en 1986 essentiellement pour la télévision. Elle apparait dans quelques séries télévisées dont Regimen abierto de Pedro Gil Paradela. Pilar va beaucoup jouer au théâtre également en interprétant quelques classiques dont La petite hutte de André Roussin et La reine Victoria. Ce n'est qu'en 1996 qu'elle fera un bref retour au cinéma avec Pon un ombre en tu vida de Eva Lesmes. Entre 2000 et 2006, ses admirateurs auront pu l'apercevoir dans le téléfilm Un ombre solo et au grand écran dans La buena voz de Antonio Cuadri. La mort de Miguel en 2005 des suites d'un cancer sera une terrible épreuve que Pilar va devoir surmonter. Malgré leur divorce elle était restée très proche de son ex-mari dont la disparition l'affectera beaucoup. Elle remontera cependant sur les planches en 2009 pour jouer La nuit de l'iguane de Tennesse Williams jusqu'en décembre de cette même année. Par la suite Pilar aurait souhaité tourner avec son ami Antonio Cuanti un film qui lui tenait beaucoup à coeur mais il ne se fit pas. Si Pilar n'a pas coupé les ponts avec le monde artistique elle se fait aujourd'hui plus discrète, attendant de jolies propositions de films ou de pièces de théâtre. De sa carrière elle ne regrette rien. A 73 ans, toujours radieuse elle y jette un regard positif y compris sur les films quelque peu dénudés qu'elle interpréta dans les années 70. C'était une mode, une époque commente t-elle. Ils n'avaient rien de honteux et les gens venaient voir les nus.
Si le cinéma italien a vu bien d'autres actrices espagnoles débouler sur les écrans aucune n'est parvenue à égaler le charme et la séduction de Pilar encore moins à enflammer les écrans comme elle sut si bien et si naturellement le faire. En cela, Pilar fut unique!